Lettre à Claire.
Je me rappelle, la première fois que je t'ai vue. Rien ne s'est passé, et rien n'aurait pu prédire que, moins d'un an après cela, j'en viendrais à te désirer, à t'aimer, à désirer t'aimer, et que, plus de trois ans après, j'en viendrais à désirer te détester.
J'étais sans doute trop occupé à mes problèmes, trop centré sur ce que j'étais, ce que j'aurais voulu être, pour me rendre compte que je passais à côté de la plus grande leçon que la vie avait à m'offrir.
Puis, le temps passe, je t'ai revue, mais, encore une fois, je n'en avais cure. Encore une fois, je rêvais de ne pas être, de disparaître, sans laisser de trace, d'être l'inexistence existant. Ensuite, on m'a parlé de toi. Pas en des termes élogieux, et c'est justement ce qui m'a révolté. J'étais contre ces ouïs-dires, ces fausses déclarations proclamées dans ton dos. J'étais contre ceux qui étaient contre toi, cela voulait-il dire que j'étais avec toi? Je l'ai pensé, et là a été mon erreur.
Lentement, cette graine s'est planté, enraciné, a germé, et, pendant un long moment, j'ai cru que l'arbre de l'amour m'avait corrompu l'âme. J'étais trop sot pour me rendre compte que ce n'était qu'un arbuste annonciateur d'une désolation qui me ravagerait.
Car, si pendant de longues années, j'aurais voulu être tout à toi, mourir pour un seul de tes regards que jamais tu ne m'accordais, je réalise aujourd'hui que ça n'avait rien d'amoureux. Plutôt du possessif.
Bien sûr, on me dira que le malheur de l'amour est, qu'une fois qu'il nous a quitté, on ne le reconnait même plus de dos. Pourtant, ma plus grande espérance est que j'ai été dans l'erreur, que ce que je ressentais n'était qu'une vision tronquée de mon besoin d'affection, ou simplement de considération.
Tout ce que j'étais prêt à te pardonner, du plus moindre au plus grand défaut, m'ont fait comprendre, après des années de déconvenue et d'interrogation, quel était le genre de femme qui pourrait un jour sauver mon coeur des flammes qui le consument. Tu ne seras sans doute pas surprise d'apprendre qu'elles, ces femmes, sont tes exactes opposées.
Comprends-le: je ne te hais pas. J'ai essayer, de toutes mes forces, je le jure, mais, il faut croire que mon idée de "on ne peut pas en vouloir à Claire" était vraie, elle. Non pas parce que tu es douce, sympathique et qu'on peut tout te pardonner, non. Même pas que tu sois fragile (souvent, tu le joues, mais, simple rôle ou grande manipulation, je sais que ce n'est pas toi). Non, simplement parce que tu n'en vaux pas la peine.
Aujourd'hui, je suis avec des gens qui font ressortir le meilleur de moi. Je donnerais ma vie pour un seul de leur sourire, mais je ne l'attends jamais en retour. Ce brasier qui me dévorait l'âme, que je ravivais, que ta vue ravivait, s'éteint peu à peu, il finira froid avant moi. Si aujourd'hui, je pense encore à toi, ce n'est plus parce que je vous veux, toi et ton amour. Non, c'est juste pour que, notre prochaine rencontre, soit la dernière... Et qu'elle marque la délivrance. Ma délivrance.

Horrible. Les nuages s'assombrissent, perdant leur si belle clarté. Les orages menacent de tout détruire, de tout ravager. P'tain et ma mère qui me disait de rentrer quand il faisait tard. Mais à quoi je pense ? C'est pas le moment de penser à ça ! Oui, c'est la phrase qui convient, ça. Tout est noir, mais pas moi. Je reste éclatante, quelle que soit mon émotion. Bientôt, cependant, mon cerveau noircit, je tombe, tombe dans l'oubli...Embrouilles et ténèbres sont maitenant les deux seuls mots qui conviennent parfaitement en tant que synonymes de la Terre...Tout est sombre, les arbres déracinés par la cruauté de ces foutues tempêtes. Merde et moi qui avait perdu ma lampe torche, je vais bientôt m'endormir pour l'éternité. Normal. Plus aucune vie sur aucune de ces galaxie, plus rien, sauf moi. Pas vraiment encourageant, mais je n'ai que faire des gens qui m'encouragent et qui ne le pensent même pas. Bordel que c'est con.
Le bateau et le vent filaient, plus vite que l'éclair.

Plein ouest.