6 ans après le lancement de son offre initiale sous la marque Blade, l’entreprise française, désormais connue sous le nom de Shadow, vient de lancer une nouvelle formule baptisée “Option Power” pour tenter de rester dans la course technologique et concurrencer les meilleurs services de “cloud gaming”, sauf qu’ici, nous parlons de “cloud computing” et c’est bien là tout l’intérêt de Shadow par rapport à ses concurrents. Nous avons pu tester la nouvelle “machine” pendant quelques semaines, voici notre verdict.
Sommaire
- De Blade à Shadow, une histoire mouvementée
- Cloud Computing vs Cloud Gaming
- Shadow Classic vs Shadow Option Power
- Jouez où vous voulez, quand vous voulez
- Shadow Option Power, une offre prometteuse, mais encore confidentielle et sans doute trop chère
De Blade à Shadow, une histoire mouvementée
L’histoire de Shadow commence en 2015, quand Emmanuel Freund, Stéphane Héliot et Asher Kagan-Criou créent la start-up Blade, avec l’ambition de proposer un PC pour jouer (mais pas que) entièrement dématérialisé, donc dans le cloud, le fameux nuage blanc qui vit désormais 24/24, 7/7 avec nous.
Au terme de plusieurs levées de fonds (3 millions d’euros, puis 10, puis 51), l’offre Shadow est lancée en grande pompe dès 2016 avec une belle machine pour l’époque. L’offre se déclinait alors en deux versions, une sous forme d’application (comme aujourd’hui) ou alors par le biais d’un petit boitier type “Box TV” à connecter à votre télé pour jouer à vos jeux PC directement depuis votre canapé.
En 2019, forte de son succès, l’entreprise fut même retenue par le gouvernement français pour faire partie du club très fermé Next40, un programme visant à soutenir 40 jeunes entreprises considérées comme prometteuses et susceptibles de devenir des leaders du numérique et des nouvelles technologies. Cette distinction lui permit de faire une nouvelle levée de fonds à hauteur de 30 millions d’euros et en 2020, le service revendiquait déjà plus de 100 000 utilisateurs actifs.
Mais en mars 2021, un peu à la surprise générale, on apprend que la société Blade est placée en redressement judiciaire. Deux repreneurs potentiels se positionnent alors, Xavier Niel, le grand patron de Free, et Octave Klaba, fondateur de l’hébergeur OVH, par le biais de sa société Hubic. Et c’est ce dernier qui fut désigné par le tribunal de commerce de Paris pour reprendre la société qui changera de nom peu après pour devenir Shadow, du nom de son offre originale.
Abonnez-vous à Shadow à partir de 29,99€/mois
Cloud Computing vs Cloud Gaming
Mais au fait, c’est quoi le cloud computing que propose Shadow par rapport au cloud gaming ?
Le cloud gaming, que l’on retrouve dans le GeForce Now de chez Nvidia, le Xbox Ultimate Pass chez Microsoft, le nouveau PlayStation Plus Premium (anciennement PlayStation Now) pour Sony, le futur Amazon Luna, ou encore le défunt Google Stadia, est un service qui permet de jouer à tout un tas de jeux sur différents supports sans avoir besoin de posséder une machine particulièrement puissante.
En gros, le jeu est traité sur une machine distante (suffisamment puissante elle) et streamé chez vous, sur votre PC fixe ou portable, votre télé, votre tablette, votre smartphone ou même pourquoi pas en VR pour les jeux et les services compatibles.
L’avantage, c'est qu’il n’est pas nécessaire de posséder une très grosse machine, l’inconvénient, c'est que les catalogues de jeux sont limités aux différents fournisseurs et aux accords qu’ils passent avec les éditeurs. Sur PC, par exemple, impossible de jouer à un MMO comme World of Warcraft, n’étant ni au catalogue du GeForce Now, ni sur celui du Microsoft Game Pass…. Et son cas est loin d’être isolé.
C’est là qu’intervient Shadow et son offre de “Cloud Computing”. Ici, vous n’avez plus seulement accès à un catalogue de jeux prédéfinis, mais à un véritable PC, complet, et sur lequel vous pouvez faire tout ce que vous feriez avec le vôtre, y compris les mises à jour de Windows !
Shadow Classic vs Shadow Option Power
Depuis le 26 octobre, il existe donc désormais deux formules d’abonnement chez Shadow, la “Classic”, accessible immédiatement pour 29,99€ par mois et l’”Option Power”, pour 14,99€ de plus, accessible uniquement par réservation.
Dans l’offre de base, vous avez accès à un PC équipé d’un processeur de type Intel XEON à 3,5 GHz (ou équivalent), une carte graphique de type GeForce GTX 1080 (ou équivalent), 12 Go de RAM et un SSD de 256 Go. Une belle machine au lancement en 2016, mais qui commence sérieusement à accuser le poids des âges en 2022.
Avec l’Option Power, vous avez cette fois accès à un processeur de type AMD EPYC 7543P, une carte graphique Nvidia RTX A4500, 16 go de RAM, mais toujours 256 Go de stockage. En termes de performances, la carte professionnelle RTX A4500 se situe entre une 3070 Ti et une 3080. C’est donc une carte très solide, parfaite pour jouer en 1440p (voir en 4K grâce au DLSS). Shadow précise que les futures machines devraient également bénéficier de GPU AMD grâce à un partenariat signé avec ce dernier.
Shadow Classic | Shadow Option Power | |
Processeur | Intel XEON 3,5 GHz | AMD EPYC 7543P |
Carte graphique | Nvidia GeForce GTX 1080 | Nvidia GeForce RTX A4500 |
RAM | 12 Go | 16 Go |
Stockage | 256 Go (+2,99€ par tranche de 256 Go) | 256 Go (+2,99€ par tranche de 256 Go) |
Prix | 29,99€/mois | 44,98€/mois |
Jouez où vous voulez, quand vous voulez
La grande force et l’intérêt principal de Shadow, c’est de pouvoir y accèder sur pratiquement tous les supports grâce à une application disponible partout (Windows, Mac, Linux, Android, iOS, Smart TV et même sur les casques VR Oculus Quest 1 et 2).
Si sur PC, nous avons parfois été confrontés à des soucis concernant la reconnaissance de nos écrans ou des plantages (rares) de l’application (toujours en développement), l’expérience sur smartphones, tablettes ou même en VR était irréprochable. Jouer à Cyberpunk 2077 sur un Galaxy Z Fold 4 en 2176 x 1812p à plus de 80 fps est une expérience assez jouissive. Bon, à condition de connecter une manette en Bluetooth, car le pad virtuel est assez capricieux sur un tel jeu. Mais techniquement, le job est fait.
Sur des PC portables de dernière génération, mais dépourvus de carte graphique, l’expérience est là aussi saisissante, aucun problème dans la plupart de nos jeux testés (Cyberpunk 2077, Microsoft Flight Simulator, Horizon Zero Dawn) et nous avons même testé le service pendant plusieurs soirées sur World of Warcraft, rien à dire, aucun problème de lag à l’horizon.
Bizarrement, là où l’expérience fut la moins convaincante, c’est sur PC fixe, et plus particulièrement sur notre machine de test de référence équipée d’un processeur Intel Core i9-13900K, une carte graphique Nvidia GeForce RTX 4090 et deux écrans dont un Samsung Odyssey G7 28 pouces 4K et un ultrawide MSI Optix MEG381CQR Plus avec une résolution de 3840 x 1600p.
Dans ce cas bien précis, la machine virtuelle ne reconnaissait pas l’ultrawide, bloquant l’affichage en 2560 x 1440p à 60 Hz avec de grosses bandes noires sur les côtés. Idem pour l’écran 4K, cantonné lui aussi au 60 Hz. Mais avec d’autres moniteurs, aucun souci pour atteindre le 1440p 144 Hz. Un mystère que n’a pas réussi à résoudre l’assistance.
À plusieurs reprises, nous avons dû relancer l’application pour activer certains paramètres, par contre la reconnaissance des périphériques USB tels que les casques audios (avec ou sans fil) ou les manettes Xbox se sont faits sans accroc.
Au niveau des performances, sans grosse surprise, malgré le stream, la distance, la machine virtuelle, etc, etc. nous avons été agréablement surpris et les scores sont équivalents à une machine physique équipée d’un processeur Intel Core i5 12600KF et une RTX 3070. En 1440p on tourne ainsi à 80 fps sur Cyberpunk (sans Ray Tracing et avec DLSS), 150 fps sur F1 2022, 100 fps sur Horizon Zero Dawn, 105 fps sur World of Warcraft et environ 40 fps sur Microsoft Flight Simulator (en Ultra d’où le faible résultat).
Shadow Option Power, une offre prometteuse, mais encore confidentielle et sans doute trop chère
Nous avons testé l’Option Power de Shadow pendant plusieurs semaines et les résultats, pas toujours parfaits selon la configuration, sont toutefois au-delà de nos attentes.
On était resté sur une impression de technologie dépassée avec l’offre de base et cette “Option Power” est un véritable bond en avant pour l’entreprise et le service. Certains seront encore gênés par le petit effet de “flou” inhérent au streaming de la machine virtuelle, mais entre ça et jouer à 10 fps en qualité basse sur un vieux PC qui tire la langue, franchement on l’oublie vite. L’application PC devra néanmoins être stabilisée, même si son utilisation a été simplifiée au maximum.
Reste la question du prix, et c’est là que ça se complique. 30 euros par mois nous semblait être une bonne formule, avec des machines qui se renouvellent tous les 2-3 ans pour suivre le marché. C’était en tout cas ce à quoi s’attendaient les abonnés de la première heure et qui ont fini par déserter le service quand la GTX 1080 n’était plus capable de leur donner satisfaction. Ici, la machine proposée par l’Option Power est cohérente avec son temps, mais déjà, elle n’est accessible que sur invitation/réservation sans aucune idée des délais, et à 45€ par mois au total, soit 540€ par an, la question de l’achat d’une machine commence alors sérieusement à se poser…
Abonnez-vous à Shadow à partir de 29,99€/mois
Conclusion
Points forts
- Un vrai PC disponible partout, tout le temps
- On peut jouer à tous les jeux ou travailler, même sur smartphone, tablette ou en VR
- Facilité d’utilisation
- Compatible avec la plupart des périphériques USB
- Prise en charge du double écran
Points faibles
- Option Power disponible sur liste d’attente…
- Ne prend pas (encore ?) en charge les écrans Ultrawide
- Fonctionne parfois à merveille, parfois non, selon les machines (même des puissantes)
- Le stockage de base beaucoup trop limité (256 Go)
- Ça reste (trop ?) cher…
Note de la rédaction
En grande difficulté il y a de cela encore un an et demi, Shadow, sous la houlette de son nouveau patron Octave Klaba (fondateur du célèbre hébergeur OVH) tente, avec sa nouvelle offre “Option Power”, de donner un nouvel élan à sa formule du “Cloud Computing”, la version la plus élaborée pour jouir d’un PC à distance. Et si, clairement, l’offre initiale commence à tirer la langue (Intel XEON + GTX 1080), cette nouvelle formule avec un combo processeur + carte graphique pros n’a rien à envier à la plupart des configs gamer que l’on trouve dans les chambres des joueurs ou sur des PC vendus entre 1000 et 1500 euros. L’avantage, c'est que vous n’avez justement pas besoin de transporter une grosse bécane encombrante et qu’avec une simple connexion (VDSL2 au minimum, fibre conseillée tout de même) vous pouvez accéder à votre PC partout, tout le temps et sur tous les supports (vieux portable, tablette, smartphone, smart TV ou même en VR). Et si nous avons parfois été confrontés à quelques soucis de compatibilité avec nos écrans, sur les autres supports les résultats en jeu furent largement à la hauteur de nos espérances. Reste la question du prix, à environ 540 euros l’année, pour seulement 256 Go de stockage, cela reste un choix de luxe et les personnes en capacité de payer un tel prix n’ont-elles pas plutôt envie d’avoir leur ordinateur perso, rentabilisé en seulement 2-3 ans ? On souhaite en tout cas à Shadow tout le succès qu’il mérite tant la promesse est belle.