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Sujet : [SF][Roman] Vertige Stellaire

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Dès le 5 juin prochain, embarquez dans une enquête opposant un maître Jedi à un mystérieux assassin dans Star Wars : The Acolyte sur Disney+ !
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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:42:23

Une ombre dans le tableau, derrière un arbre. Comme si le soleil ne devait plus se coucher, simplement frôler l'horizon, en dévalant la courbure du ciel, embrasant tout, jusqu'à l'air. Ici, les couleurs sont purs, sans concessions aucune. Ici, le fond de la vallée est sec, limpide, on voit loin, très loin. Il n'y a pas d'ombre, sauf là, derrière cet arbre.
Viltis passe une main sur son tronc. C'est un pin parasol. Usé, chétif, que le vent a pris soin de courber en rapprochant sa cime du sol, comme s'il se prosternait devant un seigneur invincible. L'endroit est beau et doux, accueillant, reposant. Ici, il s'assoit. Là-bas, le colonel Mac Mordan et le maître Flinn s'en sortent très bien sans lui. D'ailleurs, il les regarde monter, son corps les suivant sans être là, détaché, perdu. Les manœuvres à bord de la navette sont plus lents, moins précis. Même l'arbre semble plus réel.
Ici, il peut respirer. Dans le Réel, l'air n'a plus d'utilité. Son corps a entamé sa dernière mue, celle qui le privera des plaisirs simples de la chair. La nourriture ne deviendra qu'un passe-temps, une obligation sociale. Tout comme respirer, boire, dormir ou parler. Dans le Réel, tout est devenu lent, visqueux, figé. Viltis, ici, peut espérer aller plus loin. Il retrouve l'accord, l'harmonie, et personne ne peut le briser. Pas même le vent, qui plie les souvenirs et distord les perceptions.
Il fouille dans son cœur, retrouve la promesse du Dieu-Machine sous la forme d'un message écrit, appliqué contre un morceau de papier froissé, aux lettres rondes et audacieuses.
« Il n'y a que nous. Les autres peuvent attendre ».
Drôle de preuve d'amitié. Qui pourrait croire que cela en est une ? Impossible de le dire, puisque les autres ont disparus.
Seul l'ombre persiste dans le couchant. Elle dresse les aiguilles du pin contre la paroi d’un rocher sanglant, perfore la pierre, brise le silence. Les aiguilles picorent le grain de la roche comme des oiseaux, agaçants et inconscients. Aller vers l'ombre ne changerait rien, et Viltis le sait. Tout ce qu'il pourrait y gagner serait largement perdu par d'autres problèmes, plus grands, plus insolvables.
Il sait que l'ombre le guette. Elle n'est pas normale. L'absence de lumière ne constitue qu'une partie de son essence, le reste demeure inaccessible, sauf à vouloir entrer dans des domaines dont il une idée précise, mais qui ne devraient pas être utilisés avant longtemps. L'époque ne le permet pas. Même ici. Surtout ici.
— Je sais que vous êtes là. C'est ridicule.
L'ombre frissonne, comme si le froid la mordait. Elle se redresse, oublie le rocher, se tourne vers Viltis, qui n'a pas peur.
— Vous savez que... Les tuer ne changera rien.
L'ombre s’aplatit, trouve le sol. Elle rampe jusqu'aux pieds de Viltis, les contourne.
— Vous pouvez encore éviter de le faire. Je ne serais pas obligé de faire ce que nous savons, ensuite.
Elle se redresse, prend forme. Un cylindre vertical, qui s'allonge, devient un ovoïde sans bras ni jambe. Une amande géante, qui s'ouvre.
— Les Voyageurs d’Étoiles... Pourquoi ce nom ? Tous les voyageurs vont et viennent des étoiles, n'est-ce pas ?
L'amande noire se rapproche de Viltis, veut le toucher. Quand enfin elle y arrive, elle finit par se consumer, sans flamme, sans chaleur. Des cendres blanchâtres dansent dans le couchant.
— Vous ne pouvez pas me prendre. Je suis au-delà de tout ça. Même ici. Entre nos deux paradigmes. Vous ne pourrez pas piller éternellement les étoiles sans qu'une résistance ne se crée. Vous ne pourrez pas non plus piller la connaissance des espèces sans rencontrer plus fort que vous.
Viltis soupire en regardant les cendres retomber, former un tas qui se condense, redevient une boule d'ombre.
— Vous ne pourrez pas nous retrouver dans l'espace. La navette n'aura pas d'existence physique. Elle prendra une autre voie. Une voie que je suis le seul à connaître. Pour vous, il reste la Terre. Vous savez que vous ne devriez pas, mais vous irez. Vous comprendrez, et vous fuirez. Vous ouvrirez la porte à quelque chose de plus grand, de plus rapide et de plus fort, quelque chose qui dépassera votre propre Histoire.
L'ombre flotte, se contorsionne, puis se fait bouche. Un soupir s'en échappe.
— La parole ? Oui, bientôt.
Les lèvres bougent, tremblent. Une langue blanche vient se coller contre elles, se frotte à leurs commissures.
— Vous ne pourrez pas nous attraper. Jamais. Vous êtes condamnés à disparaître.
La bouche crie, siffle. Elle cherche à mordre, ne trouve que l'air. Elle redescend au sol, qu'elle embrasse, et s'y fond. L’ombre a disparu. Ne reste plus que Viltis, mi amusé, mi effrayé.
— Nous rentrons, oui.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:43:15

Barnard brillait de ses derniers feux, glaciale. L'étoile morte pulsait ses derniers rayons, rubiconds et tremblotants, tandis que sa masse résiduelle se contractait. Le spectacle arracha une larme à Viltis. Au travers des projections holos de la navette, il pouvait sentir la souffrance, l'agonie douloureuse de l'astre. Il aurait pu éviter cela, mais à quel prix ? Et pour quoi ?

— La Terre. Comment comptez-vous y arriver, monseigneur ?

Flinn se tourna vers Livius, et retira son casque. Il passa une main sur sa nuque, esquissa une grimace.

— Je n'en ai aucune idée. Pour être exact, je ne pensais pas que nous aurions à affronter un tel problème.

Les deux officiers se tournèrent vers Viltis. Il les dévisagea, haussa les épaules.

— Je ne suis pas astrogateur...
— Tu viens pourtant de ressusciter le colonel Mac Mordan, répliqua Flinn.
— Oui... Non... C’est un peu plus compliqué que ça...
— Tu as réussi à tordre le continuum espace-temps. Tu te rends compte des possibilités ? Il suffirait que tu reproduises la même chose...
— La distance spatiale est trop conséquente.
— Utilise les principes de la transpatialité. Par bond ?
— Aléatoire.
— Nous sommes bloqués sur ce caillou alors.

Flinn se leva de son siège. Il se planta devant Viltis, les bras croisés.

— Rassures-moi... Nous allons rentrer ?
— Oui, maître. Mais j'ignore comment.
— Tu as réussi à nous sauver des Effaceurs pour finir ici... Quelle ironie.

L'adolescent soupira. Le Naneyë avait raison. Quelle ironie ! Échapper à une mort certaine pour rencontrer l'incertitude, l'attente douloureuse et insensée, pourquoi faire ? Il pourrait repartir dans le passé en les laissant, voler un vaisseau corps et bien, et obliger le capitaine de l'astronef à faire demi-tour. Ils arriveraient sur Terre après les Effaceurs, mais avec son talent, peut-être que...
Non. Quelque que soit la solution envisagée, il devait accepter de perdre. Cette manche était offerte aux Effaceurs. Viltis le savait. Et même s'il avait pu en changer le cours, il n'aurait pas accepté de prendre une telle charge sur ses épaules. Il ne devait pas modifier l'avenir. La Terre devait être prise par les Effaceurs. Lui, il devait aller ailleurs.

Une urgence le pressa à agir. Instinctivement, le garçon se pencha vers les commandes, effectua des manœuvres qu'il n'avait jamais vus, sans que Livius ou Flinn ne tentent de l'en empêcher.

— Tu...
— Oui, je sais piloter maître. Ne vous en faites pas.
— Mais je ne comprends pas.
— La noosphère.
— Alors tu peux nous ramener sur Terre ?
— Oui. Mais pas tout de suite. Nous devons aller quelque part avant.
— Viltis... La flotte des Effaceurs...
— Oui, la flotte des Effaceurs va arriver avant nous. Je le sais. Je sais aussi ce qui va se passer sur Terre. Nous n'y serons pas. Nous ne devons pas y être.

Flinn entama un mouvement vers l'adolescent, mais dut suspendre son geste. Il semblait raide, figé dans une attitude ridicule, en lutte contre une force invisible.

— Tu... trahis... ton... espèce, parvint à articuler le Naneyë.
— Non, je la sauve. Mais pas de la manière la plus glorieuse qui soit. Et vous allez m'y aider.

Livius, l'œil torve, observait la scène sans un mot. Viltis ne jugea pas utile de se tourner vers lui pour lui adresser une parole.

— Monseigneur, vous voulez savoir le fin mot de cette histoire ? Qui sont les Effaceurs, et comment les vaincre ?
— Oui, bien sûr, comme tout le monde.

Viltis sourit, et poussa une manette au-delà des recommandations de sécurité. Dans la navette, tout partit vers l'arrière. Tout, sauf Viltis, et les deux officiers.

— Alors regardez bien, monseigneur. Le voyage risque d'être instructif.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:45:05

Un flash, bleu. Le bond n'avait rien d’extraordinaire, sinon cette lueur incandescente et inhabituelle. L'espace tout autour apparaissait normal, et non pas soumis à de violentes distorsions. Pourtant, les capteurs de l'engin indiquaient une élévation des températures brutales et importantes. Avant que quiconque ne pose la question, Viltis leur répondit.

— L'espace n'aime pas ce que je viens de lui faire subir. Le plasma dans lequel nous baignons nous tuera tous, à long terme.
— Je constate pourtant que nous sommes vivant, railla Livius.
— Parce que je fais attention à ce détail, monseigneur.
— Une sage décision.
— Regardez bien.

Les températures s’effondrèrent. Tout avait retrouvé sa place. Comme si la fracture spatio-temporelle n'avait pas existé. Les lambeaux du réel étaient à nouveaux accrochés entre eux, dansant et tissant une réalité qui se déroulait devant la navette, fébrile et riche d'une activité électrostatique anormale.

— Regardez bien, monseigneur, répéta Viltis.
— Je ne vois rien.
— Encore une fois.

A nouveau, un flash, qui ne fut cette fois accompagné d'aucune modification de l'environnement. Seule la sphère verdâtre d'une planète s'offrant à eux les contemplait. Flinn, toujours figé, parvint à articuler.

— Je... ne comprends... toujours pas...
— Si vous me tuez maître, la stabilité de l'environnement direct de la navette ne sera plus assurée. Et vous mourrez, en une fraction de seconde.
— J'avais … bien compris... la leçon.

L'étreinte se relâcha. Flinn tomba au sol, porta une main à sa gorge, grogna.

— Ce n'était pas nécessaire.
— Bien au contraire, maître. Si je vous avais dit que je devais aller sur Alioth, m'y auriez-vous encouragé ?
— Je n'aurais pas pu t'en empêcher.
— Preuve en est.

Flinn grimaça, avant de sourire, tristement.

— Pourquoi ma planète ?
— Les Sages. Ils ne vous ont pas tout dit, ni tout donné. Ils ne vous font pas suffisamment confiance. Nous devons régler quelques points de détails, si nous voulons que les Effaceurs ne soient plus qu'un souvenir.
— Ils m'ont pourtant permis d'aller plus loin dans la compréhension de notre Histoire... Pourquoi n'auraient-ils pas voulu que je connaissance l'ensemble des informations relatives aux Effaceurs ?
— Cela me paraît évident.
— Ma nature de cyborg ?

Viltis hocha la tête.

— Entre autre.
— C'est ridicule... Je sais que les Naneyë ne sont pas favorables à cette usage de la technologie, mais les Sages savaient que je devais accomplir cette mission.
— Tous comme ils savaient qu'en ne vous donnant qu'une information partielle, vous vous heurteriez à un mur.
— Quel mur ?
— Celui de leur technologie.
— Les Cubes, c'est ça ? Nous avons tout tenté...
— Vos ancêtres ont pourtant trouvé la solution. Et les Sages prétendent qu'ils ont « perdu » la clef... Vous y croyez ? Pas moi.
— En parlant de ça...
— Laissez-moi deviner, maître. Ils pensent que je suis un danger, c'est ça ? Que je suis une espèce de monstre contre nature, car il ne faut pas bousculer l'ordre des choses.

Flinn laissa un silence éloquent s'installer. Viltis ricana.

— Intelligents mais idiots.
— Ils ont quand même conservés...
— Des traditions désuètes et entretenu le mythe d'une civilisation morte, qui a préféré fuir plutôt que d'affronter son ennemi. Et vous êtes fier de ça, maître ? Je suis surpris.
— Tu ne peux pas comprendre...
— Si, bien sûr que si. D'ailleurs, tout ceci ne va pas nous prendre plus de cinq minutes.
— Que comptes-tu faire ?
— Aller au plus simple.

Il y eut un nouveau flash, puis le vaisseau se matérialisa au-dessus d'une steppe jaunâtre, baignée d’averses. Une construction de Viltis avait déjà vu se dressait à leur droite. La navette s'immobilisa, son sas s'ouvrit. D'un pas décidé, Viltis sortit.

— Viltis, attend !
— Nous n'avons pas ce luxe-là, maître.

Flinn le rattrapa, posa une main sur son épaule. Le garçon soupira.

— Quoi encore ?
— Ils ne voudront pas te voir. Ils font garder l'entrée...
— Et alors ?
— Ta venue pourrait être considéré comme une ultime provocation. La guerre civile est proche, ici.
— Ne dites pas n'importe quoi. Votre père a très bien géré la situation jusqu'ici.
— Un rien pourrait déséquilibrer tout ce qu'il a construit depuis des décennies.
— Il n'y aura pas le temps pour ça.

Sans cérémonie, Viltis reprit sa marche.

— Et le colonel Mac Mordan ?
— Je pense qu'il a compris qu'il valait mieux qu'il reste au vaisseau. Pour le moment, tout ceci ne le concerne pas.
— Tu veux dire que... Qu'il a un rôle à jouer dans cette histoire ?
— Ce n'est pas comme s'il avait été le premier à identifier le danger potentiel des Cubes. Il n'a fait que risquer sa vie, après tout. Il est normal qu'il sache la vérité à propos des Cubes.
— Il doit déjà être au courant.
— Je peux vous assurer que non, maître. Pas plus que vous.

Des gardes sortirent des escaliers surplombés de l'édicule en ruine. Leurs visages menaçants n’effrayèrent pas Viltis, qui se contenta de sourire.

— Nous venons en paix.

Ils se figèrent. Hors du temps, ils persistaient dans leurs gestes, déconnectés du réel.

— Viltis, tu...
— Oui, on dirait bien. Bientôt, je pourrai appliquer cela à une échelle plus importante.
— C'est une découverte... prodigieuse...
— Non. C'est juste la continuité de ma rencontre avec la Noosphère. Tout ceci est à portée de main. Pourquoi s'en priver ?
— A propos de cela... Les Sages...
— Ne dites rien. Qu'ils me craignent, cela me suffit.
— Mais...
— Je sais tout ce qu'ils pensent de moi. Votre esprit n'a plus de secret. Hélas. Je sais tout, j'ai tout vu, dès votre retour. Vous avez eu beau vous en défendre, cela n'aura pas suffi. Je suis en avance sur mon temps ? C'est parfait, cela me donnera donc un avantage supplémentaire.

Les escaliers défilèrent, puis les couloirs, où ils croisèrent à nouveau deux gardes, qui subirent le même sort que leurs prédécesseurs. Arrivé devant la dernière porte, Viltis attendit quelques secondes.

— Quoi qu'il arrive, maître, laissez-moi faire.

Ils passèrent la porte, parcourent le dernier couloir, avant d'arriver sous le dôme humide et mal éclairé. Les Sages se tenaient les uns contre les autres, auprès d'un feu mourant.

— Que...
— Bonjour, ravi de vous rencontrer. Le colonel Flinn n'a pas tari d'éloges à votre égard, messieurs.

Le sourire de Viltis effraya Flinn, qui se tenait deux bons mètres en arrière, inquiet.

— Flinn... C'est la Clef ? Pourquoi est-elle ici ?
— Nous avons quelques questions à vous poser, répondit Viltis sans se défaire.
— Par les Anciens... Qu'as-tu fait ? questionna Hélio.
— Pourquoi le colonel Flinn n'a-t-il pas reçu toutes les informations nécessaires à lui assurer une victoire contre les Effaceurs ?
— Je ne parlerai pas à cette... erreur de la nature.
— Et le colonel Flinn ne vous adressera pas la parole. Aujourd'hui, c’est moi qui pose les questions.

Hélio se leva, tremblant.

— Comment oses-tu... Tu violes le passé d'une race dont tu n'as pas idée de la puissance...
— Laissez tomber, Hélio. Les Naneyë furent grands, mais leur prestige est éteint depuis des milliers d'années. Vous ne me menacez en rien.
— Tu ignores tout de notre Histoire...
— Bien au contraire. Je sais que vous avez préféré fuir. Quelle faiblesse...
— Ils ne pouvaient être vaincus...
— Vous n'avez même pas essayé ! Vous n'avez pas de leçon à donner à qui que ce soit. Maintenant qu'ils reviennent, vous souhaitez que l'espèce humaine — la seule soit dit en passant qui ait eu le courage de vous sortir de votre retraite — périsse ?
— C'est plus complexe que cela...
— Écoutez Hélio, n'y allons pas par quatre chemin. Vous ne m'appréciez pas. Vous me haïssez. Je défie, selon vous, toutes les lois de la nature. Très bien. Je ne suis pas naturel. Je ne suis que le fruit d'une expérimentation. Mais je peux tous nous sauver. Oui, j'ai des capacités que vous ne pouvez pas accepter, car elles infligent à notre dimension des effets secondaires très importants. Peut-être ces effets nous tueront-ils tous un jour. Mais pour le moment, la plus grande menace reste celle des Effaceurs. Ils seront bientôt sur Terre.
— Ceci... ne nous concerne pas, répliqua Hélio d'une voix sèche.
— Bien sûr que si ! Vous savez comment les Cubes ont été désactivés.
— Alors... Puisque tu sais beaucoup de choses, cela aussi, tu devrais le savoir...
— Vous voulez vraiment me mettre au défi ?

Hélio sourit, mauvais.

— Sois convaincant.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:45:25

Trouver la porte est plus difficile. Il fait noir, froid et humide. A tâtons, ses mains se perdent sur la pierre rêche qui couvre les murs. Au loin, il peut entendre les rires.
— Pitoyable.
La poignée se dérobe, dans l'éclat d'une lueur brillante, comme une étoile enfermée dans une cave. Viltis cligne des yeux, hébétés. Il ne doit pas lâcher.
— Et si j'y arrive ?
— Alors nous vous laisserons partir.
— Vous n'êtes pas en état de nous arrêter.
— Ah oui ?
La porte sort de ses gonds. Le jour pénètre dans le caveau. L'odeur de moisi exhale ses senteurs vers l'extérieur. Une fine brume roule aux pieds du garçon.
— Je suis à côté de vos secrets. Je pourrais les piller.
— Oui.
— Vous savez que je ne vais pas le faire.
— Tu as donc encore un minimum de respect. C'est... très intéressant.
— Pourquoi tout doit être si compliqué ? Nous aurions pu nous découvrir mutuellement, sans nous regarder comme des frères ennemis.
— La notion d'alliés ou de rivaux est propre à l'humain.
— Ne dites pas de bêtise, ce n'est pas si simple.
— Ceux que vous appelez Effaceurs n'ont aucune raison de revenir vers nous. Nous sommes un peuple mort.
— Pas si le colonel Flinn monte sur le trône.
— Il ne pourra pas.
— Ah oui ? Et qui l'en empêcherait ?
— Ses frères, le peuple.
— Soit, en prenant en compte l'estimation la plus pessimiste, quelques deux cent mille individus. Une quantité négligeable, comparé aux vingt-cinq milliards d'humains de la Confédération.
— Viltis... Tu ne le ferras pas.
— Je veux le Cube. Je veux la Clef qui les modifie. Tout de suite et ici. Sinon, oui, je pourrais aller voir du côté de votre savoir. Le H'hrodath est un concept particulièrement fascinant. Appliqué à une autre espèce.
Le montant de la porte se fissure. La cave semble vouloir se rétracter, sortir par l'orifice éclatant. Viltis se met en tension, lutte contre la force qui accroît son emprise.
— Devrais-je vraiment vous détruire pour arriver à obtenir ce que je cherche ?
— C'est un secret, et un secret bien gardé.
— Nous allons voir ça.
Viltis cède. Le caveau se contracte sur lui-même, expulsant Viltis vers l'extérieur. Il vole, flotte dans cette apesanteur parfaite, survolant une masse conséquente, si semblable et si différente de la Noosphère humaine.
— Imbécile !
— Vous m'avez forcé la main.
Il le trouve. Coincé dans une fissure étroite, loin en dessous de la couche du présent. Il luit, comme si on l'avait déposé la veille. Viltis n'a pas besoin de bouger pour que le Cube vienne à lui. La masse lourde s'arrache du bloc qui la contient, sans que rien ne puisse lui faire obstacle un seul instant.
— C'est une folie !
— Qui nous sauvera tous.
Viltis touche le Cube, expérimente son calme, sa singularité. Il lit, il perçoit, il comprend. Le mode opératoire devient une simplicité confondante. Il sourit, se laisse partir.
— J'ai gagné.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:46:05

Le Cube, dans ses deux mains, occupait un volume réel. Pragmatique. Viltis se retint de sourire, ici. Hélio le contemplait, bras croisé, interdit.

— Je suppose qu'il est inutile que j'intervienne.
— Vous supposez bien.

Sans un mot, sans une parole, Viltis fit demi-tour. Il exultait. Non seulement il damait le pion à une bande de vieux séniles arrogants, mais il se prouvait à lui-même une autre capacité étonnante. Aucun de ses plus profonds désirs ne pourrait plus être inassouvis. Chaque mémoire recelait le potentiel d'une existence matérielle, tiré des tréfonds de la Noosphère. La découverte capitale le rendait joyeux. Presque inattentif.

Lorsque le trait d'une flèche s'arrêta à quelques centimètres de son œil droit, il estima avoir suffisamment fait durer cette parodie. Le corps d'Hélio s'éleva au-dessus du sol, tandis que le vieux Naneyë commençait à suffoquer.

— Que les choses soient bien clair, vieux Sages. Vous n'êtes pas en vie à cause de vos pouvoirs ou de votre influence, mais uniquement parce que j'ai un minimum de respect et de considérations pour votre culture et votre Histoire. En bon gardien de la mémoire, vous ne devez pas mourir sans transmettre ce savoir. Le colonel Flinn en est le dépositaire, ce qui est une très sage décision. Mais ce savoir, il le tient de vous. Et même si vous avez consentis à de nombreux efforts, je vous conseille d'être prudents.

Hélio retomba au sol, et toussa en cherchant son air.

— Ne soyez pas stupides. Jouez intelligemment. La prochaine fois, il est possible que vous ne tombiez pas sur quelqu'un d'aussi aimable que moi.

Sans plus de considérations, Viltis tourna les talons, suivi de Flinn, qui gardait toujours ses distances. Ils traversèrent à nouveau les couloirs, débouchèrent sur l'escalier qui les ramena à la steppe. Ils dépassèrent les gardiens, toujours figés, pour lesquelles l'officier eut une pensée.

— Ils vivront, maître. C'est du temps perdu.
— Et les Sages ?
— Rien de bien méchant. J'espère seulement qu'ils comprendront la leçon.
— Laquelle ?
— Se reposer sur le passé ne sert souvent qu’à peu de choses. Sinon à préparer son propre tombeau.

Intrigué, Flinn garda tout commentaire superflu pour lui. Ce qu'il avait vu lui suffirait pour la journée.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:48:10

PARTIE VI.

5.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:48:49

En remontant à bord, Livius resta fixé sur le Cube, hésitant entre surprise et méfiance. Viltis le monta bien haut, afin que les arrêtes et les faces de l'objet se réfléchissent dans la lumière du projecteur holo qui bourdonnaient. D'étranges dessins se formèrent dans les airs. Des plans de vols, des inscriptions formées dans un langage inconnu, et décrivaient des mouvements complexes, vivants.

— Un Cube ?
— Par n'importe lequel. Celui que nous aurions dû trouver dès que les Naneyë ont pris contact avec nous.

Livius sourit, avant de répondre.

— Tu sais réécrire l'histoire ? Je ne doute pas de tes capacités, loin s'en faut. Mais il me semble que c'est bien mon père qui est venu poser le premier...
— Je sais ce qu'a fait le Commandus Magnus. Je ne parle pas de ça.
— Ah, et de quoi ?
— Oui, de quoi donc ? Ajouta Flinn.
— Asseyez-vous. La petite anecdote devrait suffire à meubler le voyage du retour.

Tous s'installèrent. Le vaisseau décolla, lentement d'abord, avant de prendre de plus en plus de vitesse, et d'effectuer son premier bond. Des alarmes stridulèrent, Viltis les réduisit au silence d'une simple pensée. Cette maîtrise l'amusait, le grisait. Il songea un court instant qu'il aurait pu effectuer le tour de la Confédération en moins de vingt-quatre heures. Il aurait pu l'essayer, à cet instant.

— Viltis ?

La voix de son mentor le tira de ses réflexions. La nuit de l'espace habillait le cockpit, effleurant les rares lueurs dispensés par les appareils optiques, le tableau de bord et les yeux robotiques de ses deux voyageurs.

— Vous voulez vraiment savoir ce qu'il s'est passé ? Maître, sachez que tout cela, je ne l'ai découvert qu'en rencontrant les Sages, tout à l'heure. Vous n'êtes pas... personnellement responsable de cet état de fait.

Flinn hocha la tête.

— Je ne pose plus de questions. Plus rien ne m'étonne. Et comme tu sembles prendre beaucoup de plaisir à jouer au professeur...
— Oui, c'est vrai. Je comprends que cela puisse être … très agréable d'avoir des élèves avec soi. Vous-même...
— C'était un honneur de t'avoir comme apprenti, mais pas un plaisir.

Viltis ricana.

— Voilà un beau compliment, maître.

L'ambiance se détendit. Le vaisseau commença en trembler, s'illumina d'un second flash.

— Eh bien, commençons.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:49:22

Il n'y a pas de soleil brillant sur la plaine. Seulement un brouillard dense, qui suinte de chaque plante, chaque pierre, et vient s'échouer aux pieds des quatre individus. Deux sont couverts d'une armure d'or, ancienne, lourde, désagréable. Les deux autres revêtent des atours précieux, complexes, aux motifs symétriques et esthétiques. Des étoiles géantes qui glissent en fils d'argent sur de la soie, de la pourpre. Des chapeaux fins et larges ceignent leurs têtes. Ils regardent au loin. Ils semblent voir bien au-delà du brouillard.
— Ils viendront.
— Ashdat, comment en être sûr ?
— Les légendes parlent de cet instant. Ils viendront.
Les deux individus richement vêtus se toisent, jusqu'à ce qu'un d'entre eux baisent le regard vers le sol.
— Ce n'est qu'un conte pour enfant. Voyez où tout ceci nous a mené.
— Vers les Sages. Là où nous allons.
— Eux savent, c'est cela ? Et ce sont sans doute eux qui vous l'ont dit, Ashdat, n'est-ce pas ?
Il hoche la tête, en signe d'accord, sans ajouter un mot. L'autre reprend.
— A quoi ressemblent-ils ?
— A ce que nous en avons su, lors, du Grand Échouage. Frêles, chétifs, ignorants. Coincés à un stade de l'évolution où nous ne sommes plus depuis si longtemps.
— Alors pourquoi doivent-ils arriver ?
— Pour nous. Pour revenir avec le savoir que nous aurons laissé sur leur monde. Ils l'ignorent encore, ils sont trop jeunes. Ni notre génération, ni la seconde, ni la troisième, ni même la dixième, ne doivent connaître cet événement. Mais d'autres que nous verrons ce jour s'accomplir. Alors, nous serons sauvés.
— La légende parle d'un sacrifice.
— Oui. La liberté.
— Quel sauvetage, ironisa l'un des interlocuteurs.
— Un prix lourd mais nécessaire. Presque... consensuel. Lorsqu'ils viendront, ils seront plus forts, plus rapides et plus intelligent que nous le serons alors. Ils auront l'aspect que nos ancêtres ont pris avant la Dispersion. Avant que nos peuplades ne deviennent de farouches maîtres de l'espace.
— L'Apogée...
— Ce sera leur heure. Ils nous aideront. Pour cela, nous ne les chasserons pas, comme nous devrions le faire. Car ils apporteront aussi leur lot d'inconvénients. Leurs faiblesses.
— Lesquelles ?
— La jeunesse, l'ignorance. Ils ne pratiqueront pas le H'hrodath. Ils ne parleront qu'avec les mots. Leur pensée ne sera pas belle, ou pure. Ils songeront à la guerre et à la gloire, prieront des dieux qui n'en auront que le nom, ignorerons tout de l'Histoire de notre galaxie. Ils arriveront à la maturité quand leur ennemi — le nôtre aussi — viendra les piller, vider leur monde natal, menacera leur mode de vie. Nous profiterons de cet état pour leur donner la Clef, car ils pourront l'utiliser. En échange de quoi, la menace sera éradiquée.
— Et nous serons en esclavage. Douce conclusion.
— La Clef sera le prix de notre liberté face à eux. Nous deviendrons égaux, et ils le comprendront. Le joug tombé sur nos épaules sera retiré par ceux-là même qui l'auront mis. Le temps dispersera la rancœur, et nous nous regarderons alors, comme de frères.
— De belles promesses.
Le plus vieux des deux notables détourna son regard du lointain.
— Ils viendront.
Les trois autres le regardèrent, comme s'il devenait sénile. Le Ashdat perdait parfois la notion de la raison. Ils en avaient l'habitude. Ils le poussèrent comme un enfant, avec tendresse, puis reprirent leur marche.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:50:20

Un nouveau saut s’achevait tandis qu'ils revenaient de ce souvenir doux et humide, encore chargé de brume. Flinn posa une main sur son menton, gratta la toison qui y poussait, et grogna.

— A la façon dont ils étaient habillés... Je dirais que cette discussion remonte à plus de mille ans.
— Tant que cela ? S'étonna Livius.
— Peut-être même plus...
— Mais la technologie ? Votre peuple avait encore accès à la technologie, non ?
— Non, coupa Viltis. Les Naneyë ont cessé d'utiliser la transpatialité il y a plus de dix mille ans. Les voyages motorisés sur Alioth ont cessé dans les deux millénaires qui ont suivis. Et toute technologie plus évoluée que celle que l'on trouvait sur Terre au Haut moyen-âge a disparu trois millénaires après. Donc, depuis environ cinq mille ans... Ils se déplacent à pied, en vivant les souvenirs de leurs ancêtres.
— Ils parlent du H'hrodath, nota Livius. Est-ce bien la technique que vous utilisez, monseigneur ?
— Non, répondit Flinn. Je le croyais, mais cela n'a pas grand-chose à voir. Le H'hrodath est bien plus puissant. Presque aussi puissant que ce dont use Viltis à l'heure actuelle. Il permettait aux Naneyë de voyager dans le temps — par le souvenir — et dans l'espace — par la transpatialité —.
— Pourtant, les documents retrouvés... Les entretiens des cybernautes avec les scientifiques...
— Une partie des réalités ont été occultés. Les travaux qui ont découlé du H'hrodath ont permis de s'en passer pour les voyages. C'est ce qui explique le fait que les théories de la transpatialité chez les Naneyë soient applicables chez l'Homme.
— Je ne saisis pas complètement la nuance, concéda Livius.
— Pour résumer simplement, disons que la technologie est applicable, mais qu'il manque le mode d'emploi pour conduire le vaisseau qui en est équipé.

Livius demeura songeur.

— Les vaisseaux que la Confédération a équipés fonctionnent.
— Pas complètement. Pas au niveau des potentialités de ce que cette technologie pourrait permettre.
— Elle a pourtant permis d'augmenter la fréquence et la vitesse des bonds, et de fait, de réduire le temps des voyages.
— Un bon point, nota Flinn.
— La technologie Naneyë permettait à ses bénéficiaires d'aller aussi vite que ce que je tente de faire actuellement, compléta Viltis cela vous donne une idée de la maîtrise et de la complexité des processus mis en jeu.
— Tout ceci est très intéressant, mais je ne vois toujours pas le rapport avec les Cubes...

Viltis et Flinn se regardèrent. Un courant commun portait leur pensée. Ils pouvaient sentit en l'autre, à cet instant précis, une connivence et une ouverture rare. D'un geste de la main, Flinn invita Viltis à répondre.

— Le Cube est la Clef que je devais trouver. Parce que je suis aussi la Clef.
— Comment... Je ne veux pas paraître offensant Viltis mais... Tu n'es qu'un humain.
— Cela ne me vexera pas. Même si techniquement...

Il brandit son poing cybernétique.

— Techniquement, je suis un cyborg.
— Ce n'est pas le sens de mes propos.
— Je l'ai très bien compris, monseigneur, ne vous en faites pas... Et je vois très bien où vous voulez en venir. Mes origines sont bien humaines, mais cela va plus loin. Le taux de nanites que j'ai dans le corps dépasse de très loin tous les standards habituels. Même chez un être récemment mécanisé.
— Cela devrait te tuer...
— Mais cela me donne des capacités au-delà de ce que devrait avoir à disposition l'humain standard.
— Un hasard ?
— Non, pas tout à fait.
— Alors...
— La nature des capacités, tout comme leur origine, est un sujet bien trop complexe et trop … inaccessible... pour que qui que ce soit y ait accès. Sachez seulement une chose, monseigneur : les capacités que j'ai développées me permettent de manipuler les Cubes, et d'être le seul en mesure de déchiffrer leur fonctionnement.
— Et donc, de les rendre inertes.
— Exactement.

Livius croisa les bras. Il leva les yeux vers le plafond.

— Tout le temps que nous avons investi dans la recherche, tous les cybernautes mobilisés... C'était inutile ?
— Pas tout à fait, modéra Viltis. Ils ont appris bon nombre de choses sur la nature physique de ces objets. Avec le temps, ils auraient fini par comprendre le fonctionnement.
— Et combien de temps cela aurait-il pris ?
— Soyons optimistes : quelques décennies, peut-être quelques siècles.

Cette fois, Livius éclata de rire.

— Je ne vois pas en quoi c'est si drôle...
— Tu trouves que cela n'est pas une perte de temps ?
— A l’échelle du temps depuis le début de l'Univers, non.
— Mais à celle d'une vie ?
— Tout est relatif.
— Et donc, tout est inutile ? Viltis... Lorsque nous arriverons sur Terre, ta mission sera de reprogrammer tous les Cubes que nous avons trouvés ?
— Cela ne sera pas une priorité.

Nouveau bond, qui éclaircit l'intérieur du cockpit sans que personne ne semble trouver cela dérangeant, ou anormal. Une secousse plus violente cependant incita Livius à chercher le harnais de maintien de son fauteuil.

— Pas une priorité ? Mais cela nous permettrait-il de vaincre les Effaceurs ?

Viltis se tut, reportant son attention vers les commandes. Il détecta plusieurs anomalies graves aux alentours du vaisseau, sa bouche se tordit en un rictus d'embarras.

— Viltis ?
— Si vous tenez tellement à le savoir, monseigneur, les Cubes ne sont qu’une partie du problème.
— Ils sont pourtant la source de...

Un ultime saut les emporta jusqu'à une orbite lointaine de la Terre. Un spectacle effrayant ôta toute envie de réponse à Livius. Flinn, lui, ne put tenir sa langue.

— Le véritable problème est ici, monseigneur.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:53:51

Où est-elle ? Il l'ignore. Tout ce qu'il peut en percevoir, c'est la forme de son visage, et le sang qui commence, avec une lenteur atroce, à couler de ses yeux. Les larmes s'y mêlent. Elle pleure. A genoux, elle le supplie.
Il devine alors le contexte. Un lit surgit, puis une chambre. Le reste d'une chambre, balayé par une force violente et vive, qui a rasé le toit, un des murs. Le sang a coulé sur le sol. Elle gît dedans, incapable de se lever. Une douleur abominable cisaille son bassin, fracturé, meurtri. Ses jambes ont été happé par une machine infernale. Des moignons de cuisses brûlés à vifs s'échappent d'un pantalon déchiré, en loque. Vision insoutenable de la guerre.

— Aide moi, Seigneur !

Il aura beau tendre la main, se persuader qu'il peut, par la volonté farouche qui l'anime à cet instant, la tirer de cet ignoble position, il vacille dans ses fondements. Elle est, et elle n'est plus. Elle est celle vers qui son esprit se tourne sans qu'il ne soit d'accord, sans qu'il ne le veuille franchement. Elle le hante plus qu'elle n'en habite son cœur. Elle est si forte et si fragile. Elle est le songe d'un avenir possible, déchiré, broyé par la guerre qui l'a mutilé. Il voudrait détourner son regard, il ne peut pas.

— S'il te plaît, aide moi !

Ses pleurs redoublent. Sa bouche aux lèvres blanchissantes se contracte, crache un sang noir, funeste. Il sait. Il comprend tout. Il ne peut même plus s'offrir le luxe de l'ignorance. Il voit la destination, définitive, où la femme rampe plus qu'elle ne s'y rend. Sa dignité est comme son corps : à terre.
— Je suis là.
Il tend une main, aussi invisible soit-elle, qui vient essuyer ses larmes et offrir un peu de lui en consolation. Alors il ressent. Il bouillonne. Et il veut pleurer, à son tour.
La douleur n'est qu’une facétie du destin, une condition ouverte aux vents de la vie, de ses événements aléatoires, de ses obligations. La douleur physique n'est que l'antichambre de la mort. Une mort solitaire, inhabitée, qui la prive de la certitude d'être humaine. Il rattrape son âme comme on retient le sable sur la plage, avec courage mais sans force, sans optimisme, persuadé de l'inéluctabilité des choses, de la course des grains blancs. Il soutient son souffle, retient la langue en elle, lui susurre des mots qu'ils auraient dû avoir, avant.
La douleur d'une qu'une facétie du destin. Elle précède le regret, immense, qui vient exploser en lui. Il souffre du vide, du possible jamais achevé, de la tentation folle d'accepter l'amour tant qu'il est là, aussi biaisé soit-il. Elle sent sa présence, il la sert, plus fort. Crie tant qu'il peut, tant qu'elle écoute. Tant qu'elle n'a pas disparu.
— Ana !
Elle roule au sol. Son regard se fige dans le plafond. Elle sourit. Elle ne veut pas se défaire de son étreinte. Elle a rêvé longtemps, si longtemps. Il la porte en lui comme on porte une croix. Nécessaire mon horrible. Il devra, il le sait, continuer à vivre avec cette insupportable culpabilité/. Retranché derrière s nature de cyborg, il ne peut que subir l'assaut furieux des émotions qui le ronge, qui démolissent le falaise d’albâtre qui serti son âme. Il doit abdiquer, poser un genou à terre face à la Vie. Il cède. Hurle à la mort.
— Je t'aime, Ana !

— Flinn...

Son œil pleure toujours. Les larmes vont remplacer le sang, un court instant. Elle va s’accrocher à cette idée, car il la tient. Il reste possible. Accessible. Il a renoncé à son armure, aux préjugés, au lourd poids des traditions. Leurs corps ne sont que des prisons contraignantes pour leurs âmes, leurs esprits. Il se laisse séduire à nouveau, totalement, mis à nu. Il accepte ce présent authentique de celle qui meurt en lui, tout en y renaissant. Elle prend sa main, fait battre un cœur qui n'existe plus, conforte ses idéaux et le rend idéal. Il quitte un monde en perdition pour se mélanger à sa douleur, la transcender, et dépasser la nature physique du Réel. Ils peuvent voyager ailleurs. Y rester. Toujours, sans se soucier du présent.
— Je t'aime, Ana...

— Je t'aime aussi, Flinn...

Une dernière quinte brise ses côtes. Un spasme fait ployer son cœur. Elle suffoque. Il bascule sa tête en arrière. Le miracle put avoir lieu. Quelqu'un, loin et proche, semble accepter d'abolir la distance, pour que la rencontre ait lieu. Il ressent cette présence bienfaisante et bienveillante au-dessus de lui. Des ailes le protège, comme on protège un enfant, un naïf, un cœur pur. Il n'est plus à cet instant, capable de décider où se trouve le haut du bas, la gauche de la droite, le Réel de la Noosphère. Il vit. Pour lui, rien de plus n'a d'importance.
Basculer est simple. Sa volonté tend vers la chambre, vers le corps mortel et blessée de celle qui s'est promise à lui, qu'il a si longtemps refusé, et qui devient une évidence. Tendre la main, non seulement en songe, mais aussi en vérité. Oublier la nature du réel pour obtenir la vérité impérissable, inaltérable, si rare et si évidente. Laisser son esprit accepter la déchirure, et...

— Je t'aime, Ana.

Il la tenait, à genoux, son corps fragile et abîme soutenu par ses bras nus, vierges de toute technologie. Il était redevenu celui qu'il n'avait jamais cessé d'être : un esprit libre, viscéralement ancré dans ses traditions, conscient de la puissance de cette chair dont on souhaitait si fort qu'il se débarrasse. Mais non. Il les avait vaincus. Nu, sans artifice, il pouvait la contempler comme elle le contemplait.
— Je... Je t'aime... Viltis.
Et tendre ses lèvres vers la bouche offerte, présent dérisoire et inestimable, source de vie à laquelle il voulait à jamais pendre ses lèvres, boire et mordre tout à la fois, en oubliant que non, cet état de fait ne pouvait pas durer.
Mais il l'aimait. Il n'avait jamais cessé de l'aimer. A sa façon : froide, indifférente, presque mécanique. Elle avait su lire au-delà de l'apparence, trouvant entre ses mains le cœur fragile et nu de ce destin tragique et exceptionnel. Elle avait accepté de n'être qu'une ombre parmi les ombres, pourvu que jamais il ne l'oublie. Et son rêve, au crépuscule de sa vie, se voyait réalisé.
Ivre de lui, de la vie toute entière, baignée par l'épiphanie de l'abandon de cet amant impossible, salutaire, elle cessa d'exister.

Et tandis qu'elle glisse, lentement, il reflue. Il accepte ce destin terrible qui pèse sur lui avec le poids d'un monde. Atlas de son propre corps. Il ne peut que bénir celui qui lui a accordé ce rêve fou, insensé, improbable. Il garde la trace, l'odeur et l'empreinte en lui, trésors perpétuels qui vont l'accompagner, pour toujours, dans la mission qui l'attend.
— Merci. Merci à vous deux.
Et il accepte de revenir. Brisé, mais complet. Détruit, mais réalisé.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:55:30

PARTIE VI.

6.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:55:56

Des nuages piquetés de flashs entouraient la Terre. Une armada innombrable volait tout autour, en tout point, comme une armée de charognards prêts à la dévorer jusqu'au noyau. La destruction, éloignée de son habituelle cortège de douleur, présentait à cet instant une beauté fulgurante, presque absolue, tant la surprise et l'incompréhension régnait dans le regard de ses spectateurs.

— Ils l'ont fait, déclara Livius d'une voix blanche.

La navette, suspendue dans le temps et l'espace, ne pouvait être touché. Viltis n'avait pas achevé pleinement la transition de la Noosphère. Flinn lui-même n'était encore qu'une sorte de fantôme diaphane, écrasé dans son fauteuil par une force obscure, lui interdisant tout mouvement. Son regard à lui ne fixait rien, n'accrochait rien. Viltis crut deviner une larme, qui traversa l'espace pour se figer dans le fauteuil.

— Maître ?
— Ça ira, mentit le Naneyë.

Effondré, il allait devoir se battre avec lui-même pour réintégrer ce corps quitté quelques instants, au mépris de toutes les lois de la logique. Encore assommé par la violence de l’événement, il ne reprenait conscience qu'avec lenteur, sortant d'un rêve extatique et éveillé.

— Est-ce que l'on peut capter des signaux radios ?
— Je ne sais pas, monseigneur... Nous sommes encore en partie détachés du Réel. Je préfère attendre.
— Bien. Sage décision, Viltis.
— Votre confiance m'honore, monseigneur.
— Ce n'est pas comme si on me laissait le choix.

Le mensonge de l'adolescent prenait. Dupait-il seulement quelqu'un, ici ? Les ondes radios traversaient l'espace comme autant de vagues échouées qui venait sur perdre sur les récifs de la navette, résonnant, se reflétant, ou bien disparaissant au gré des angles et des faces de l'engin. Toutes venaient de la Terre. Et toutes portaient le même message de peur, de mort, et d'abandon.

L'Histoire se jouait tel que Viltis l'avait vu. Différée, diffractée, mais la trame ne changeait pas.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:56:15

Tout commence par l'observation d'un corps céleste inconnu, étranger et solitaire, qui se laisse regarder par des milliers de senseurs, de télescopes, d'observateurs. Quelques minutes de calme. Quelques certitudes aussi, qui commence à émerger dans l'esprit des décideurs. À Civimundi, on décide d'évacuer le Très Saint Magister et les hauts dirigeants vers les bunkers les plus profonds, creusés si loin qu'ils ressemblent bien davantage à des tombeaux qu'à un quelconque salut. Avec aisance, les portes blindés se referment, les unes après les autres, sauvant une minorité plus forte, plus solide, tandis que les cieux apportent leur message de mort.
Car le corps est devenu flotte, armada, invasion. L'unique divisé masque la multitude, cent puis mille puis dix milles, puis des millions. Un tapis crocheté d'argent qui s’étale tel un écran de fumée, qui masque l'éclat des étoiles lointaines avec plus de force que n'importe quel Sphère de Dyson. Les Effaceurs sont là. Il leur suffit de quelques minutes pour enserrer la Terre, et commencer leur programme de destruction totalitaire. Les villes sont les cibles évidentes, prioritaires, les premières lacérées par des rayons de mort qui tranchent tout, n’épargnent rien. Déjà, à la première seconde, les morts se comptent par millions. Il ne faudra guère plus d'une journée pour anéantir ce monde.
La dixième minute arrive. Au loin, un point minuscule vient troubler l'espace. Il se voit. Il apprécie la mise en abyme. Un sentiment étrange qui le grise, le rappelle à sa mission.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:57:09

— Dix minutes. Pas plus.
— Je ne comprends pas, Viltis...
— Ils sont arrivés il y a un quart d'heure à peine. Et leur attaque ne dure que depuis dix minutes.
— C'est impossible...
— C'est pourtant la vérité, monseigneur. Ils n'auront pas besoin de beaucoup de temps pour venir à bout de la Terre. Dans quelques heures... Il ne restera rien.

Livius abattit un poing décidé contre le tableau de bord du cockpit.

— Non !
— Tout ira bien, Livius. Nous avons Viltis avec nous.

Flinn était sorti de sa torpeur, et affichait un sourire triste, qui semblait venir de l'outre monde. Son corps avait retrouvé sa dimension sa stature, et debout derrière le jeune officier, il imposait enfin une présence physique rassurante.

— Les Saintes armées... Elles peuvent encore...

Le Naneyë secoua la tête.

— Elles ont été anéantis. Barnard d'abord, et même ici, sur la Terre. Il y a toutes les raisons de croire qu'elles sont été la première cible des Effaceurs.

Livius serra les dents, puis essaya de se détendre.

— Alors, c'est notre seule chance ?
— Oui, Viltis est notre seule chance.
— N'est-ce pas... un peu maigre ? Sans vouloir te manquer de respect Viltis.

L'adolescent garda le silence, se concentra sur sa prochaine destination.

— Je l'ai entraîné pour ça. Pour ce moment.
— Mais... Monseigneur, avez-vous leur nombre ?
— Peu importe. Là n'est pas la question. Si Viltis doit les vaincre, il y arrivera, qu'ils soient dix ou dix milliards. Je te trouve bien loin de ton habituelle indifférence, Livius... Les implants n'effectueraient-ils plus leur officie ?

L'officier secoua la tête.

— Vous devriez le savoir.
— C'est la Noosphère, n'est-ce pas ? Depuis que Viltis t'a ramené d'entre les morts, tu te sens... différent ?
— Et un peu le même, malgré tout.
— Une drôle d'histoire.
— Y aura-t-il seulement une oreille pour l'entendre, lorsque nous rentrerons ?
— Ne t'en fais pas Livius. J'ai foi en lui.
— Comme dans notre Seigneur Mécanique ?

Flinn choisit de ne pas répondre. Livius le relança.

— Comme dans notre Seigneur Mécanique ?
— C'est... compliqué, Livius. Je pense qu'il vaudra mieux que tu découvres toute l'étendue de cette question par toi-même. Je suis sans doute le plus mal placé à présent pour y répondre.
— Vous ? L'ancien Inquisiteur ?
— Que veux-tu ? Les gens changent...

Livius ne comprenait pas. La réponse énigmatique de ce vieux sage ne laissait place à aucun doute. Quelques semaines en arrière, on l'aurait condamné pour blasphème et hérésie. Mais à présent ? Le Dieu-Machine pouvait-il seulement sauver l'espèce qui l'avait engendré ? Oui, Flinn avait raison. Le doute dépassait la foi, la certitude. Se convaincre du contraire ne changerait rien aux faits.
Il y eut un changement dans l'atmosphère. Comme une impression d’électricité. Le vaisseau se remit à trembler.

— Nous rentrons, déclara simplement Viltis.

Un dernier flash. Une dernière secousse. Et la navette disparut de l'espace.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:58:01

La cathédrale de métal laissait entrer en elle des odeurs étranges de buis, d'essence et de pierre humide. Une atmosphère crépusculaire y régnait, renforcée par l'éclairage orangé et délicat qui en soulignait les piliers immenses, qui se perdaient dans un plafond lointain, indéchiffrable. Le froid mordait le sol et les murs, trempant ses dents dans la chair blanchâtre de l'homme. Il s'étonna d'être encore vivant, avant même de se demander ce qu'il faisait ici. Et pourquoi il était ici.

La cathédrale recueillait sa voix grinçante sans le juger, sans l’atténuer ni l'amplifier. L'absence d'écho fit rire l'homme, qui s'étonnait de tout, de la plus petite fissure aux grandes étendues masquées par les ténèbres, loin devant lui. Il aurait beau marcher, courir, voler, rien ne pouvait venir remplir ce vide immense, où que porte son regard avide de réponses. Cela ne l'empêcha pas de rire, face à sa propre ignorance, à ce sentiment incongru de vide qu'il ressentait comme étranger.

— Je suis...

Oui, qui était-il ? Sa phrase ne trouvait ni conclusion, ni sens. Il était là. Au monde, comme on existe, avec simplicité, force et conviction. Impossible d'effacer ce sentiment, encore moins de l'atténuer. Cette force le protégeait depuis longtemps, si longtemps. Le temps lui-même n'était plus qu'une donnée insignifiante, dont il avait perdu le goût et la saveur suave.

— Je suis...

L'effort devenait terrible, insoutenable. Il posa un genou à terre, terrassé par la concentration. Il porta ses mains à son crâne, se rendant compte qu'une de ses mains n'était plus une main, mais... autre chose. La définition, le sens du terme lui échappait. Comme à peu près tout. Il fallait se contenter d'avancer. Oui, au bout, l'ensemble des réponses trouveraient leurs questions. Il cesserait d'en être le porteur universel.

— Je suis... Cyrill !

Oui. La certitude l'emplit de joie. Il était Cyrill. Il avait vécu ailleurs, d'autres expériences, et il était arrivé là... Comment ? Peu importait. La délicieuse sensation glissa en lui. D'étranges symboles dansaient devant ses yeux, parés de couleurs précieuses. Des couleurs dont il ignorait le nom. Était-ce important ? Un jour, cela avait dû l'être. ? Plus maintenant. Tout l'univers tenait, pour l'homme, en trois mots.

— Je suis Cyrill...

Il se redressa, contemplant ses pieds usés. Ils étaient à lui, tout en étant parfaitement étranger. Il pouvait les ressentir avec cette curieuse mise à distance qui les tenaient éloignés de lui-même, tandis qu'ils lui obéissaient, deux fidèles cerbères luisant sous la lueur orangée du pilier près duquel il s'était arrêté. Des…pieds ? Non, pas ce terme... Des... des quoi, alors ? Des orteils ? Des chevilles ? Incomplets, manquants, inachevés.

Il trébucha, à nouveau. Il se souvenait être tombé, bien longtemps avant cet instant. Le souvenir était flou, mais persistant, refusant de s'en aller pour céder la place au présent. A genoux, ainsi accroupi, une pensée fulgurante traversa son esprit, ranima une braise qui lentement se ternissait, et transperça sa bouche en mots vengeurs.

— Bénis sois-tu, ô Seigneur Mécanique, toi qui me contente et me nourrit. Toi à qui j'ai fait serment d'allégeance maintenant et pour toujours, toi qui veille sur moi, et sur tous ceux qui ont pris ton chemin.

Il se mit à transpirer. Les lettres se remirent à danser devant lui, il tomba face contre terre. Les mots frottaient en lui sur des cordes rêches, cassantes, qui un jour disparaîtraient. Comme tout, comme le reste. Il était Cyrill. Il n'était plus que cela. Cet espèce d'homme marchant dans la nuit, suivant ce rêve éveillé qui le maintenait sur la corde raide, loin du temps et de l'espace, reconduit à perpétuité dans un jour maudit, coupé de tout, coupé de lui-même.

Amnésique.

Un trait de lumière surgit du sol. Le plan parfait s'inclina, avec douceur, et Cyrill se mit à frapper de peur et d'horreur ce sol qui le portait, qui ancrait cette mémoire défaillante en lui. Il aurait voulu pleurer, mais quelque chose en lui l'en empêchait. Une force mystérieuse, qui parfois revenait le hanter, lui dire qu'il avait été au bout de sa mission, et qu'à présent, il faudrait tout accepter, tout prendre, pourvu que la vie, la sienne, se prolonge un peu plus. Une voix qui l'invitait à lutter, à ne rien perdre, jusqu'à ce que le moment venu, il puisse partir en paix. La mort étendait ses ailes sur lui, il les sentait, et cette idée le terrifiait plus sûrement que les moments, de plus en plus rare, où il se savait perdant la mémoire, coincé dans ce labyrinthe déserté, coupé de toute obligations morales.

La chaleur fit place à la lumière. Il resta à genoux, tenta de se cramponner là où il pouvait trouver une prise, mais ne parvint qu'à ralentir une chute inéluctable et tragique dans ses mouvements. La lenteur du sol n'eut d'égal que l'expression figé, presque morte, qui barrait alors son visage, lorsque ses pieds ne purent le retenir une seconde supplémentaire, et qu'il chuta lourdement dans le ciel, un instant planant, avant que son corps ne rencontre le sol dur et anguleux d'une dalle de béton.

Les couleurs dans ses yeux revinrent plus fortes et plus vives que jamais. Un liquide étrange coulait goutte après goutte devant lui. Il se souvenait... le sang. Son sang. La chute l'avait blessé. Quelle importance ? Il retrouva le sol, le vrai, et la lumière. Ses yeux organiques morts depuis des décennies n'aurait pas supporté la violence des stimuli. Son cerveau bouillonnait, ne pouvait plus traiter tant de données. Cyrill était faible, usé, meurtri. Même quand la gueule d'un fusil le frappa lourdement à la tempe, il ne put trouver la force de crier.

— Un humain !

La voix transperçait ses oreilles. Il aurait voulu qu'elles disparaissent. Qu'elles ne deviennent plus que deux morceaux de peau inertes. Mais l'une d'elle n'avait plus rien de naturel. Elle ne pouvait échapper au bruit sourds et erratiques qui l'environnait.

— Un cyborg, capitaine ! Et... Par le Seigneur... Un officier.
— Ramenez le ! Aboya une seconde voix.
— Je...

Cyrill ne pouvait protester. Il ne pouvait pas plus se servir de ses jambes. Réduit à une fonction de marionnette parlante, il regarda le sol défiler sous lui, tandis que ls soldat le portait jusqu'à un tas de gravats moins abîmé que le reste du paysage.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 22:59:09

Lorsque la navette arriva au niveau du sol, la tension atour devint si épaisse que l'espace d'un instant ; Viltis craignit de ne pas réussir à stabiliser le plasma qui en résultait. La soupe d'énergie se répandit au sol avant de geler aussitôt, et il put y poser sans dommage le vaisseau. Il soupira de soulagement.

— Enfin...

Un cri de terreur lui parvint de l'extérieur. Une femme, hurlant de douleur, se tenait à quelques mètres, au-dessus d'un tas de ruines fumantes, tandis qu'on pouvait deviner une main sortant des gravats, figée, grise.

— Où sommes-nous ?
— A deux cent mètres du Palais, monseigneur.
— je ne … Je ne reconnais rien.
— Civimundi a dû être leur première cible. Cela n'a pas grand-chose d'étonnant.
— Par le Seigneur Mécanique...

Un rayon de lumière frappa le sol à quelques centaines de mètres d'eux. Un ronflement venu des entrailles de la Terre remua l'atmosphère avec une telle force que l'engin menaça de se retourner. Sans se concerter, les trois occupants sortirent rapidement.

— Monseigneur...
— Oui, Viltis ?
— Vous allez rejoindre l'abri du Palais.
— Mais... Je dois participer aux combats.
— Ne vous inquiétez pas. Ils seront très vite terminés.
— Et comment vais-je...
— Comme ça.

Il cessa simplement d'être là. Il avait disparu, comme une image.

— Est-il... En lieu sûr ? questionna Flinn.
— Évidemment. Pourquoi cette question, maître ?
— Tu aurais pu... mentir à propos de son brillant avenir.
— Pourquoi l'aurais-je fait ? Il est plus compétent et plus qualifié que le Très Saint Magister Siegfried pour mener à bien la reconstruction de l'espèce humaine.
— Si tant est que l'on puisse rebâtir quoi que ce soit sur ces ruines.
— Je n'envisageais pas la Terre comme un lieu viable à long terme, répliqua sentencieusement l'adolescent.

Flinn le dévisagea durement.

— La Terre serait condamnée ?
— A moyen terme. Analysez la spectrométrie, les ondes utilisées par l'armement des Effaceurs... Et vous allez vite comprendre pourquoi je dis ça.

Flinn s’exécuta, se figea.

— Des rayonnements exotiques... Les mêmes que...
— Ceux qui équipent nos croiseurs. Tout sera stérilisé d'ici quelques dizaines d'heures. La radioactivité sera telle que même les plus résistantes bactéries n'y survivront pas.
— Quelle horreur...
— Vous imaginez donc les conséquences à court termes. Mêmes pour les survivants.
— Si tu arrives à arrêter les Effaceurs.
— Oui ? Ce qui serait un premier pré requis, et pas le moindre.
— Et comment comptes-tu...
— Asseyez-vous.
— Par terre ?
— Vous voulez vous installer ailleurs ?
— Je ne sais pas... Les bombes, la guerre...

La réponse fit ricaner Viltis.

— Vous êtes pourtant un militaire.
— Oui, mais je n'ai jamais connu la guerre sous un aspect aussi totalitaire.
— Remarque pertinente. Vous préférez le calme ? Soit.
— Non, attend...

Un flash les emporta ailleurs. Loin du tumulte de la guerre. Sous la voûte grise d'un temps de mi saison, perturbé par de gros orages qui tendaient l'atmosphère sous une toile grise et pesante. Viltis, à peine arrivé, s'assit. L'air devint plus dense autour de lui.

— Où sommes-nous ?
— Loin de la guerre. Le temps que je m'occupe de la mission pour laquelle on m'a formé. N'est-ce pas ce que vous vouliez ?
— Oui mais... Tout va vite. Trop vite peut-être ?
— Nous n'avons pas le temps de nous poser des questions. Maître, s'il vous plaît assurez-vous simplement qu'il ne m'arrive rien de fâcheux le temps que je règle ce problème.
— Un simple « problème », en effet...
— Vous voulez nous lancer dans une discussion sans fin ? Vous auriez préféré un combat conventionnel, avec deux belles flottes à armes égales qui se tirent dessus pendant des jours et des jours, jusqu'à ce que, mathématiquement, le plus gros survivent ?

Viltis soupira.

— La donne a changé. Notre ennemi n'a jamais été conventionnel. Laissez-moi l'éloigner comme je peux, et alors peut-être que je pourrais sauver définitivement votre monde ?
— Tu … tu pourrais faire ça ?
— Alioth n'est que la terre d'accueil promise aux Hommes. Vous auriez dû y songer depuis le temps.
— Une terre... définitive ?
— Ce n'est pas à moi de régler ce problème. Je me contente de faire ce que vous me demandez.
— Qui le fera alors ?
— Eh bien... Vous, je suppose ?

Flinn pointa un doigt contre son poitrail, étonné, avant de se mettre à rire.

— Moi ? Qui voudrait que je sois le leader des survivants ?
— Oh mais... Personne ne voudra cette autorisation. Vous la prendrez, si vous estimez en être légitime. Vous avez encore quelques heures pour y réfléchir. D'ici là, veillez sur moi. C'est tout ce qui compte.
— Mais...

Avant que le Naneyë ne puisse répliquer, une étrange lueur avait rempli le corps de son apprenti. Une chaleur étrange et douce à la fois irradiait dans toutes les directions. La poussière se mit à léviter, tandis que les mouvements de l'air lui-même cessait d'arriver jusqu'à eux. Émerveillé par le spectacle, Flinn ne put voir le moment fragile, juste avant le basculement, où l'espace lui-même tentait de résister à cet affront fait à son existence. Les scintillements de son tissu avaient un aspect magique, irréel. Comme sir la réalité avait décidé de fuir. Comme si Viltis, en pleine possession de ses moyens, s'extrayait définitivement du monde des vivants.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 23:10:36

PARTIE VI.

7.

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Niveau 10
14 septembre 2017 à 23:12:22

La caresse du vent est une griffure portée contre lui. Il gémit, touche son épaule, blessée, siffle, essaye d'oublier la douleur, en vain. Oublier. Un mot étrange, incongru, dans ce paysage violent et vibrant. La limité n'est pas celle de son regard qui, à cet instant, emporte toute barrière dans le lointain, levant le voile sur ce qui était caché. Le plus difficile à cet instant n'est pas de voir.
L'espace tout entier est envahi de leur présence. Le Réel et la Noosphère les confond en un mélange gazeux dense, où il voudrait porter ses mains, mais se retient de le faire. Eux l'ignore. C'est peut-être sa chance.
— Attends !
Elle court derrière lui, trébuche une fois, puis deux. Il la regarde sans bouger, il se retient de venir à sa rencontre. Elle est belle, presque trop. Tout sur elle devient un excès : le maquillage, les habits, la coiffure, ses expressions, ses formes. Il le sent : elle n'a jamais, à un seul moment de son existence, eu cette apparence précise. Doit-il pour autant la chasser ? La décision serait cruelle, il ne s'en sent pas la force. C'est elle, sans l'être tout à fait. Sa mère, morte, et une autre.
Il y reconnaît les traits d'Ana. Il se souvient. Il ne fait que cela, se souvenir. Il vient mobiliser les capacités de mémoire qu'il a acquis, que toute l'humanité a acquis, et qui vient ici le trouver, lui rappeler qu'il n'est, au final, pas si différent. Le souvenir... Elle se relève, tend une main, reprend sa course dérisoire, lointaine, qui serpente entre les Effaceurs. Pourquoi la laisser passer ? Pourquoi la laisser exister, ici ?
— Attends-moi !
Lorsqu'elle arrive à son niveau, il a envie de pleurer. Le vent menace de revenir, plus fort. Il n'est pas sûr de pouvoir se protéger. Il sait qu'elle, elle ne pourra pas tenir. Elle partira au gré du flot qui va et vient, qui retourne l'air déjà, au loin.
— Pourquoi es-tu venu ?
— J'avais besoin de te dire au revoir...
— Tu mens.
Elle s'approche encore. Il la gifle, avec violence. Des larmes se mettent à fleurir sur leurs deux visages.
— Pourquoi ? gémit-elle, apeurée.
— Je n'ai pas la réponse. J'attendais la tienne.
— Je te l'ai dit, Viltis...
— Menteuse... Menteuse !
Il la secoue. Si fort que sa tête ballotte, sur ses épaules frêles, et menace de tomber. Elle hoquette, garde ses yeux grands ouverts, semble ne pas comprendre.
— Tu n'existes pas... Tu n'existes pas !
— Je... Viltis...
— Je lui avais dit au revoir ! Alors pourquoi ? Hein ?
Elle ne peut pas répondre. Elle ne connaît pas les mots. Personne n'a daigné lui laisser suffisamment de vocabulaire pour tenir tête à l’adolescent, ici, dans son royaume. Il la maîtrise, la tord, la maltraite. Elle qui n'a rien demandé. Elle qui vient à peine de naître, et qui déjà, s'efface dans le vent mugissant, qui se rapproche.
— Viltis... Écoute moi...
— Non. Je n'écouterai personne ici. Vous n'êtes que des mensonges. Vous êtes ailleurs.
— Ce n'est pas vrai... Regarde-moi...
— Tu aurais pu être plus subtile. Ne pas prendre l'apparence de maman... Tu as cru qu'il suffisait de regarder dans quelques mémoires bien précises pour que cela fonctionne ? Naïve... Tu es si naïve...
— Mais je suis ta mère.
— Ma mère est morte ! Morte ! Hurla Viltis en pleurant.
La femme trembla. Il la lâcha, elle tomba au sol, se roula en boule, gémissante.
— Pourquoi tu me fais si mal...
— Tu n'es même pas humaine... Même pas … vivante, en dehors d'ici.
— Ce n'est pas le plus important. Tu le sais, Viltis.
— Tout comme toi, tu aurais dû savoir qu'un piège aussi grossier n'aurait pas marché.
— Ce n'est pas un piège. Je voudrais juste que tu restes avec moi. Je ne peux plus être seule...
— Tu n'as jamais été seule. Tu n'as même pas pris la peine d'être crédible. Tu es juste là pour me détourner, pour capter mon attention. C'est ridicule.
Il la ramasse, elle n'essaye pas de se débattre. Même pas de sourire. Elle se contente de pleurer. C'est tout ce qu'on a daigné lui apprendre. C'est son seul moyen de communiquer avec franchise. Avec sa cible.
— Il disait... Il disait que tu comprendrais.
— Qui ça ?
— Celui qui m'a trouvé.
— Celui qui t'as trouvé, n'est-ce pas ?
Il la regarde, bien en face, tandis qu'elle flotte au-dessus du sol, prise par le col de son pull. Elle commence à suffoquer. Sa peau, par endroit, bleuit. Elle laisse ses jambes, comme du coton, s'agiter sous elle. Il voudrait achever tout cela sans qu'elle ne souffre. Mais le message doit être clair. Pertinent. Les émotions n'ont pas leur place dans cette stratégie.
D'un geste précis, il lui arrache un œil. Elle hurle. Du sang s'écoule de l'orbite vide, vient se répandre sur le visage de la femme, puis dégouline sur le poignet de Viltis.
— Les morts ne doivent pas se mêler au monde des vivants. C'est la première règle des humains. C'est ce qui fait de nous des Hommes.
Elle semble ne pas l'écouter. Il réitère son geste, sans conviction, presque lassé. Elle redouble ses cris, commence à s'agiter. Son bras continue à la tenir, fermement.
— Tu ne peux pas me faire croire à la persistance de quelque chose que j'ai moi-même terminé. C'est dommage.
Des ongles lisses viennent se perdre sur le poignet de l'adolescent. Il ressent une douleur, la même que celle du vent qui glisse sur son corps. Le vent qui approche, roulant au loin comme un galop furieux au milieu de la plaine.
— Personne ne me bat. Personne ne peut espérer me battre.
Les bras tombent, désarticulés. Elle cesse de hurler, sa voix devient un bruit rauque et animal qui se noie dans sa gorge. Sa peau bleue se flétrie. Elle perd sans beauté, devient plus morte que vivante.
— Va lui dire ça. Il comprendra à qui il a à faire.
Il relâche son étreinte. Le corps affreusement mutilé chute, toujours en vie. Elle se tord comme un serpent, devient liquide, bue par le sol. Elle disparaît. Il souffle.

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Niveau 10
14 septembre 2017 à 23:13:26

Il faut à Viltis de longues minutes pour accepter ce qu'il a fait. La créature à ses pieds n'est ni humaine, ni vivante. Elle a existé, malgré tout. Et elle est morte. Coupée en morceaux, gisant dans une flaque de sang tiède, elle reste là, le regard figé, et parfois un mouvement réflexe s'échappe de son visage. Il voudrait la prendre, la secouer, lui demander pardon. Elle n'est pour rien dans cette histoire. Elle n'avait même pas conscience dans enjeux. Mais elle a payé le prix fort. Elle a été sacrifié pour tenter de le vaincre, lui.
— Les monstres...
Ils ne sont pas plus monstrueux que lui. Ils ont une guerre à gagner, une bataille à remporter, définitive. Le vainqueur aura les pleins pouvoirs. Les deux camps en sont conscients. Viltis a l'avantage d'être seul. Seul, face à la multitude. Mais il n'est pas invincible. Il n'est pas invulnérable. Ses failles sont nombreuses. Son humanité l'étreint et l'emporte, l'élève et le leste, et il ne sait plus vers où tourner son attention.
Ici, ce n'est que l'antichambre. Ici, on n'attend pas à ce qu'il passe à l'action. On le jauge. On a préparé depuis longtemps ce lieu à son attention. On l'a mesuré, on a calibré son supplice. Le jeu, ainsi, doit exister.
Il comprend qu'il doit reprendre la main. Partir de cette tentative faible et inachevée de prison. La souffrance endurée ne sera rien. Elle n'a jamais été qu'un inconvénient. Un inconvénient dont il apprend, avec lenteur à se détacher. La douleur lui vient des autres. De son humanité. Une humanité qui, à cet instant, le gêne. Il prend sa décision.
— Vous pouvez venir, je vous attends, comme vous m'avez attendu...
Le temps glisse sur lui. Il disparaît, happé par le ciel sans fond. Un vers, comme griffonnés sur une page blanche, tombe derrière lui, vient se poser sur le sol, dans la flaque de sa victime. Il s'imbibe de sang. Déjà, les lettres disparaissent. Les yeux de la femme se portent vers elles. Ils lisent.
« Et la mort n'aura pas d'empire ».
Elle tremble à cette idée.

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MP
Niveau 10
14 septembre 2017 à 23:13:39

La Terre est une sphère imparfaite, qui flotte au-dessus du vide. Elle constitue un morceau du Réel. Un morceau qui tombe en poussière à mesure que sa disparition devient sérieuse, inéluctable. Voler en ligne droite à ses côtés est un privilège dont jouit Viltis avec une acuité prophétique, l'égal du messager d'un dieu qui viendra à sa rencontre. Il sent que la ligne sentencieuse entre le souvenir, la mémoire, le réel et l'action va disparaître, quelques instants. Il devra frapper. Vite et fort. Son corps retrouve un poids certain, la vitesse à laquelle il se déplace le déforme, lui inflige un supplice qu'il tente d'ignorer, et qu'il doit seulement accepter. Il croit percevoir en cette souffrance une force, une opportunité que les Effaceurs ne peuvent comprendre. Déjà, leurs longs vaisseaux se profilent dans le vent solaire. Plusieurs brillent. Comme des étoiles assassines. Il faudra, comme avec son maître, tendre la main pour traverser le tissu de l'espace et du temps. Simplement tendre la main.

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