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News débat et opinion Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique
Profil de la_redaction,  Jeuxvideo.com
Rédaction Jeuxvideo.com

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Cet article est rédigé et proposé par Anthony, sociologue de formation.

Note :

Ce présent article étudie un objet sous l'angle des sciences sociales. Il adopte une posture analytique qui ne se veut en aucun cas exhaustive, elle montre seulement un point de vue singulier avec une méthode de recueil de données particulières.

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Si le froid ne vous a pas empêché de suivre l'actualité du jeu vidéo, vous ne serez donc pas surpris si je vous parle aujourd'hui des nouvelles offres de cloud gaming que nous proposent de plus en plus d'acteurs plus ou moins connus du milieu vidéoludique. Le dernier en date à se lancer sur ce marché émergeant n'est autre que Google avec son projet Yeti cherchant à grapiller toujours plus de parts du gros gâteau qu'est le divertissement numérique. Si parler de Netflix du jeu vidéo me semble parfois un peu trop abusif, cette image a le mérite d'expliquer très clairement le principe de ces services de jeux à la demande auprès de celles et ceux qui n'auraient pas du tout suivi les dernières actualités du monde numérique.

Cette nouvelle manière de consommer du jeu vidéo semble encore trop récente pour pouvoir l'observer de manière formelle. Néanmoins, il est clair que si le marché du dématérialisé se développe encore et toujours, il va être nécessaire pour les concepteurs de revoir leur jeu, et en particulier la partie explicative. Que vous l'avez remarqué ou non, les livrets ou modes d'emploi ont presque disparu : ceux-ci ont été dans certains cas remplacés par des livrets numériques ou dans la plupart du temps, par des turoriels en jeu. Cette numérisation du mode d'emploi pourra très clairement émouvoir les plus nostalgiques des bons vieux guides en papier glacé. Si l'anecdote peut prêter à sourire, elle montre néanmois un changement dans la conception, la consomation et l'utilisation d'un jeu. Loin de moi l'idée (et l'envie) de vous répéter que "c'était mieux avant", l'ambition de cet article est au contraire de chercher à comprendre comment le concepteur parvient, au travers de différents dispositifs informationnels, à guider l'expérience de jeu. Pour étudier cela, je me suis appuyé sur de l'analyse textuelle et de situation à partir de tutoriels, mais également à l'aide de modes d'emploi fournis par les concepteurs, objets que les moins de vingt ans vont de moins en moins connaître...

Aujourd'hui remplacé par des tutoriels se voulant plus "explicites" et s'inscrivant dans une dynamique particulière de jeu, le mode d'emploi a été longtemps le meilleur moyen pour les équipes de conception de "communiquer" directement avec les joueurs. L'objet en lui-même est donc le fruit de tout un travail de conception, de passage d'une main à l'autre, afin de rendre celui-ci le plus intelligible auprès du public qui n'a jamais joué au jeu, ou au genre auquel il se réfère. Installons donc directement une théorie qui me tient particulièrement à coeur et que vous risquez de subir très régulièrement tout au lond de mes articles : la théorie de l'acteur réseau, ou bien actor network theory (car "ça en jette" de balancer des termes anglo-saxons). Michel Callon, Bruno Latour et Madeleine Akrich (les hokage de l'approche) incarnent les trois figures pionnières de ce mouvement théorique en France, également appelée "sociologie de la traduction". La théorie explique le social non pas seulement par le biais d'interactions entre les acteurs humains, mais également pas le rôle des discours (les lois par exemple) et des acteurs "non-humains" (les objects). Le tout constitue un véritable réseau, dense et dynamique, dans lequel chaque élément intéragit avec d'autres. Un objet a donc un rôle social puisqu'il conserve tout un héritage qui va de sa conception (son design a été longuement pensé par exemple) jusqu'à son utilisation et sa possible seconde vie (occasion, recyclage, etc.). La théorie est bien évidemment réduite et pourrait à elle-seule, remplir les pages de cet article, mais afin de rendre la lecture la plus agréable qui soit, je m'arrêterai là pour l'instant.

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Intégrer le guide d'utilisation au coeur de la sociologie de la traduction vient de présenter un objet aussi banal qu'un petit livret glissé dans une boîte comme le fruit de tout un travail de réflexion. Nous pourrions par exemple citer les développeurs, les game/sound designers, les graphistes et toutes les équipes qui se sont occupées de concevoir et créer le jeu en lui-même et qui ont pu, ensuite, réaliser le guide. Nous retrouvons également les équipes qui ont régulièrement testé le jeu afin que l'expérience ludique soit la plus optimale. N'oublions pas également les équipes qui vont tâcher de s'occuper de la "mise en mot" des actions du jeu. Nous terminerons ce focus avec les équipes de traduction qui nous offrent la possibilité de suivre les indications dans un français "bien de chez nous". Le tout est envoyé à l'impression, puis à la distribution et finalement, arrive entre nos mains après un long voyage (schématisé pour l'occasion). Le manuel d’utilisation est donc loin d’être un élément de l’équation totalement neutre car ce dernier est communiquant : il traduit, lorsque l’on y prête une certaine attention, tout ce travail effectué en amont. Lorsque le joueur utilise ce mode d’emploi pour se sortir de tel ou tel problème, le livret lui offre la possibilité d’avoir un contact (indirect) avec les différentes équipes de conception qui se sont penchées sur ce manuel afin de lui proposer les indications les plus justes. Interrogeons-nous maintenant sur la construction de cette traduction.

Le syndrome de la "boite noire

Le tutoriel est un peu mal-aimé. On le crée à contrecoeur, beaucoup de game designers ont l’impression que le tutoriel ne fait pas appel à la créativité, mais qu’il s’agit juste d’élaborer des instructions de jeu jouables. D’un autre côté, un bon tutoriel, c’est capital. Il n’y a rien de plus frustrant qu’un jeu auquel on ne joue pas correctement, faute de le comprendre. En général, on crée le tutoriel assez tard. Notamment parce que ça demande pas mal de travail. (...)

J’entends souvent des jeunes designers dire qu’on pourrait se passer des tutos, que tout le monde se débrouille. Mais c’est tout le contraire. Dans les sessions de test, c’est un peu la honte : tu observes comment les joueurs gèrent les actions complexes et personne ne pige rien. En général, malheureusement, ce n’est pas aussi intuitif que dans la tête du designer, parce que rien n’est défini.” Joerg Friedrich, game designer.

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Dunnigan défend un postulat similaire à celui de Friedrich cité ci-dessus. Selon lui, le fait que les règles soient “cachées”, symbolise le syndrome de “la boîte noire” qui reste un défaut. Le fait d’avoir une différence entre le manuel/tutoriel (ce qui est donc prescrit) et ce qui est nécessaire de faire en réalité, révèle une faiblesse du jeu vidéo par rapport à des jeux classiques. Il est vrai que plus le jeu est complexe, plus les règles doivent être détaillées et personne n’a envie de lire une centaine de pages d’indications avant de jouer.

Ce terme de “règle”, ou plus largement “d’indication”, peut ainsi s’appliquer à plusieurs ensembles différents :

  • les règles perçues par les joueurs (du fait de leurs expériences sur le jeu),
  • les règles inscrites dans le manuel/tutoriel (qui ne sont pas toujours lues et/ou suivies),
  • les règles qui s’ajustent de manière dynamique tout au long de la partie (augmentation de la difficulté exigeant une nouvelle approche, multiplication des commandes ,etc., sont autant d’éléments que le joueur va devoir de lui-même prendre en compte).

Ces trois ensembles constituent un environnement de régulation avec lequel le joueur va devoir négocier. Ce système peut s’avérer quelquefois opaque puisque nous ne percevons que le rendu final, la partie “esthétique” de l’iceberg. Un jeu vidéo existerait difficilement sans code, ni programme informatique. Si le game designer conçoit un jeu (du moins, sa partie “visible”), il ne le programme pas. Il y aura donc des règles “écrites” par les designers, et d’autres qui vont être implantées/codées à l’intérieur du soft.

À partir de ce principe là, la typologie se voit mise à jour :

  • les règles inscrites dans le document de game design,
  • les règles inscrites dans les codes,
  • les règles inscrites dans les manuels/tutoriels,
  • les règles que le joueur perçoit.

Le jeu vidéo est le fruit d’une traduction permanente : prenez n’importe quel soft, celui-ci a d’abord été imaginé/dessiné, puis codé (JAVA, C#, C++ pour ne citer qu’eux) ce qui fait déjà deux langages différents (le “visuel” et le “programmé”). Ces suites de codes, bien que présentes dans le rendu final, ne sont pas directement visibles, elles sont habillées par des éléments visuels, des interfaces, etc., avec lesquels le joueur va interagir. Le jeu est enfin agrémenté d’une dernière traduction qui vient mettre des mots et termes compréhensibles par la majorité du public (le français, l’anglais, le japonais…). Si le guide d’utilisation n’est finalement que le fruit de multiples étapes de traductions (sorte de porte d’accès afin de rendre le tout complètement intelligible), il doit rester également parfaitement lisible et ne doit pas montrer tout le travail de réflexion réalisé a fortiori afin d’éviter de perdre le joueur. Il est d’ailleurs toujours déconcertant de trouver des modes d’emploi complètement incompréhensibles (voire risibles) lorsque ceux-ci sont mal traduits. Le concept de traduction ayant été explicité, intéressons-nous sur le but de telles indications et leur impact sur l’expérience de jeu.

Rendre intelligible

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Il suffit de voir l’extrait de guide ci-dessus pour comprendre que jouer aux jeux vidéo n’a rien d’inné (et encore moins à un jeu avec une 3D de Nintendo 64) : donnez la manette à une personne n’ayant jamais joué et vous remarquerez la difficulté que celle-ci aura à évoluer dans un environnement virtuel (en particulier sa peine à coordonner ses mouvements sur le contrôleur, tout en focalisant son attention sur l’écran). J.R. Parker identifie de nombreux éléments que l’on retrouve dans l’univers vidéoludique, en particulier au sein des interactions physiques et virtuelles en lien avec un jeu. Il est par exemple possible de retrouver les boutons (en tout genre), les interfaces dites “naturelles” (le clavier d’ordinateur, la souris par exemple), les interfaces de communication (la reconnaissance vocale), les détecteurs de pressions (appui plus ou moins long sur un bouton), mais également le motion gaming (mimer le tennis ou le combat au sabre avec sa manette). L’article est certes en anglais, mais celui-ci reste très accessible. Je vous le recommande assez chaudement puisqu’il montre particulièrement bien certains aspects techniques que nous avons fini par intégrer sans nous en rendre compte dans nos interactions avec un jeu vidéo.

Si le manuel d’utilisation a donc été, à un moment donné, si important c’est parce qu’il permettait aux concepteurs de proposer des jeux aux gameplays émergents tout en limitant la possibilité que ces derniers ne finissent par être abandonnés par les joueurs pour cause d’incompréhension. Le mode d’emploi est donc bien moins intuitif qu’un tutoriel, mais il permet au joueur de se référer bien plus facilement et rapidement à des commandes particulières et, cerise sur le gâteau, il n’est pas obligatoire. Beaucoup de joueurs se plaignent des tutoriels à rallonge qui viennent quelque peu amoindrir leurs premières expériences de jeu. Si ces informations peuvent sembler particulièrement utiles et précieuses pour un novice, elles sont au contraire inutiles pour un expert de la série ou du genre. Les prescriptions d’utilisation peuvent en partie nous renvoyer au fameux débat sur la difficulté dans les jeux vidéo. Si cette épineuse question reste encore d’actualité, la problématique des indications fournies par les concepteurs à l’égard des joueurs reprend une logique somme toute similaire. En effet, si l’on veut proposer un jeu qui soit accessible à tous, quelque soit son expérience de base, il faut donc adapter la difficulté, tout comme les indications devant être graduelles, utiles, sans trop être intrusives. Néanmoins, il faut que ces consignes soient assez précises et complètes afin d’éviter que le joueur ne se perde dans un gameplay pouvant devenir injuste faute d’incompréhension (on ne comprend pas les mécaniques pour battre un boss par exemple).

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Une difficulté précédemment évoquée reste donc cette nécessité de laisser de la place à la jouabilité, afin qu’elle puisse garder son aspect ludique, tout en cadrant cette activité. Soyons honnêtes, il est rare (et quelque peu harassant) de lire l’intégralité d’un manuel d’utilisation, ou bien d’un tutoriel (en particulier quand il est long) avant même de commencer à jouer. L’envie de jouer, mais surtout l’effort cognitif qu’implique cette phase d’apprentissage des fondamentaux peut s’avérer extrêmement désagréable si celle-ci se prolonge un peu trop. Prenez l’exemple d’un jeu de combat qui connaît un grand succès actuellement, Dragon Ball FighterZ. Un novice pourra commencer par apprendre les commandes de base, puis jouer avec les auto-combos qui lui permettront de s’essayer au gameplay sans pour autant lui exiger au préalable des heures entières d’apprentissage des combos (on peut le qualifier de “mode facile”). Un joueur ayant de l’expérience dans les jeux de combat risque au contraire de chercher à aller au delà de ces combos automatiques dès le départ. Si ces deux publics se rencontrent dans un jeu, il faut bien pouvoir permettre à chacun d’avoir un contenu qui puisse répondre à ce niveau d’exigence particulier. Les manuels, tout comme certains tutoriels, ne sont donc pas seulement des éléments à lire et à suivre uniquement en début de jeu, ils sont au contraire conçus par leurs concepteurs pour être consultables tout au long de l’expérience ludique.

“Ne vous laissez pas impressionner par le grand nombre d’actions possibles. Il est inutile de vouloir toutes les mémoriser. L’important est de bien maîtriser les techniques de base; le reste viendra en jouant.”

L'Art de jouer

Si les indications du manuel se doivent d’être bienveillantes (on n’a pas non plus trop envie de se voir critiquer par le système à chaque mauvais choix), elles doivent également être suffisamment directes et “rigides” afin d’apporter au joueur la meilleure expérience qui soit. Ces manuels et tutoriels ont pendant longtemps été les seuls moyens de faire “communiquer” le concepteur avec le joueur : le dispositif doit donc orienter l’utilisation tout en laissant une marge de manoeuvre, une place pour l’expérimentation. Natkin, game designer, nous explique que les règles du manuel ne font pas tout. Dans certains jeux tels que les RPG par exemple, le fait de connaître les forces et les faiblesses des types de personnages/attaques est obligatoire, et le joueur ne les maîtrisant pas devra obligatoirement passer par l’expérimentation afin de pouvoir avancer, car le manuel d’utilisation ne décrit pas toujours ce genre de cas bien particulier.

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Selon Jesper Juul (rien à voir avec le rappeur) “l’échec constitue l’élément central de l’art ludique”. Qu’il soit simple ou difficile, le jeu vidéo laisse une place importante à l’expérimentation afin que le joueur puisse de lui-même puisse valider, ou non, sa démarche. Bill Kunkel, appelé plus communément The Game Doctor, a écrit un article sur l’arrivée d’Alex Pajitnov (le monsieur à votre droite) aux Etats-Unis. Ce papier (malheureusement en anglais lui aussi), détaille un petit peu l’histoire de ce génie russe et de son succès vidéoludique avec Tetris. Si je vous parle de cet article, c’est parce que Kunkel présente le gameplay de Tetris et des jeux de l’époque de la meilleure manière qui soit : cet avis est bien évidemment subjectif, mais il explique que les “grands jeux vidéo” peuvent “s’apprendre en une minute, mais se maîtriser en une vie”. Bien évidemment, il faut replacer cette phrase dans son contexte : le jeu vidéo avait connu son succès sur bornes d’arcade, ce contexte était favorable à une pratique économique particulière valorisant une forme de die and retry, puisqu'il fallait que les joueurs dépensent une quantité significative d'argent pour qu'une borne soit rentable. Le gameplay du jeu se devait donc d’être assez simple à comprendre (pour attirer le joueur, nous n’allions tout de même pas mettre un tutoriel à rallonge), mais devait tout de même proposer un challenge aux plus aventureux, les poussant à aller toujours plus loin dans le jeu afin d’inscrire leur pseudo sur le Hall of Fame de chaque fin de partie. Je vous recommande d’ailleurs, si vous souhaitez aller plus loin sur cette thématique, les films documentaires Man vs Snake : The Long and Twisted Tale of Nibber et The King of Kong qui reviennent particulièrement bien sur cette époque qu’était l’âge d’or de l’arcade.

Revenons maintenant à nos bonnes vieilles indications textuelles. Selon Salen et Zimmerman, la différence entre un jeu vidéo et un “jeu classique” réside dans la manière de s’approprier la règle. Pour un “jeu classique”, il est nécessaire qu’au moins un joueur connaisse les règles et sache les appliquer, à la différence de son homologue vidéoludique qui n’en a pas foncièrement besoin. S’il est possible de jouer à un jeu vidéo sans en lire le manuel, à quoi donc sert ce dernier ? Prenons un exemple de recommandation :

Pour commencer la partie

  1. Insérez la cartouche de jeu dans le Game Boy Advance et mettez l’appareil sous tension.
  2. '''''Appuyez sur START à la page de titre pour afficher la page “Crossroads” (“Carrefour”) du menu principal.

Appuyez sur le clavier de commande pour sélectionner d’autres objets, puis sur le bouton A pour valider'''''.” Castlevania, Konami, 2001, Gameboy Advance.

L’extrait précédent pourrait, chez de nombreux joueurs, prêter à sourire du fait de l’action de jeu logique qui y est indiquée. Néanmoins, si pour certains, appuyer sur le bouton Start semble être un geste naturel, il ne va pas l’être pour d’autres qui découvrent pour la première fois le jeu vidéo. Cet univers vidéoludique n’a rien de naturel, appuyer sur le bouton A pour sélectionner quelque chose et le bouton B pour annuler n’a rien d’inné et il est d’ailleurs particulièrement déroutant par exemple de passer de commandes “Nintendo” à des commandes “PlayStation” sur lesquelles X sélectionne et O annule une action. Le concepteur doit donc constamment jouer sur une simplicité visible aux premiers abords, tout en offrant une profondeur suffisante afin de ne pas laisser les puristes de côté.

Les règles de jeu au coeur de la construction de l’expérience vidéoludique

Enfin, et je l’ai déjà mentionné, le jeu vidéo reste bien évidemment un jeu, en d’autres termes, celui-ci doit rester “amusant”. Implanter des règles en permanence, afficher à l’écran des commandes multiples rebuterait davantage le joueur (débutant comme expert) qu’il ne l’attirerait. En effet, le jeu vidéo reste un domaine dans lequel l’expérimentation est une donnée qu’il ne faut pas omettre ; réguler entièrement l’activité risquerait davantage de frustrer le joueur que de l’amuser. Si les différentes indications sur le manuel, l’écran de titre et les possibles tutoriels deviennent intrusifs, le joueur ne se sentira plus véritablement libre de jouer, mais pris au contraire dans une spirale procédurière. Jesper Juul précise que “l’échec constitue l’élément central de l’art ludique”. En d’autres termes, comme Kunkel a déjà pu l’expliquer plus haut, le jeu lui-même est conçu comme un parcours initiatique où le joueur pourra apprendre les rudiments de celui-ci à son rythme. S’il est donc possible de retenir l’intégralité des règles, cet acte n’est pas obligatoirement nécessaire et ne changera pas l’expérience de jeu. Un game designer conçoit, en “règle” générale (vous remarquerez l’effort pour le jeu de mots), un jeu comme un parcours où les difficultés vont se faire ressentir petit à petit. Les techniques et autres manipulations vont donc être découvertes tout au long de celui-ci, rendant le processus d’apprentissage dynamique et agréable à suivre. Il faut donc ben retenir que si en effet, le manuel d’utilisation reste un élément (voire une trace) particulièrement intéressant pour interroger la manière dont les concepteurs d’un jeu peuvent “communiquer” avec leurs joueurs, il reste un support et ne peut pas directement l’influencer dans le jeu lui-même. Pire encore, lorsque ce manuel est perdu, comment accéder aux fameuses commandes ?!

Pour conclure..

Le jeu vidéo a toujours été conçu comme un environnement dans lequel le joueur peut découvrir des éléments tels qu’une histoire, un gameplay, des personnages, etc.. Ces entités représentent tout un processus d’exploration dynamique que le manuel vient finalement “rompre”. “Si j’ai aimé jouer à un jeu, c’est parce que j’ai pu m’immerger dans son univers et si finalement je dois en permanence ressortir de cet univers pour lire un manuel, je casse véritablement cette immersion”. Je vous conseille d’ailleurs très fortement la série Art of Gaming réalisée par Arte en collaboration avec Jeuxvideo.com qui vient traiter de cette question du tutoriel dans un épisode dédié. La chronique vient questionner la nécessité de rendre les indications agréables à suivre sans pour autant être intrusives, ce qui reviendrait à provoquer un véritable décalage entre immersion et accompagnement.

Il est cependant important de se demander si le fait de retirer le manuel des boîtes de jeu n’a pas permis également de réduire les coûts de production (moins de frais d’impression, il n’est plus nécessaire de mettre en page les différentes indications, ni de les traduire). Néanmoins, je tiens à seulement placer cette idée comme une hypothèse tout simplement parce qu’il n’existe aucune réelle information qui viendrait, ou non, appuyer cette interrogation. De plus et comme Natkin a déjà pu nous l’expliquer, le manuel était très souvent non lu. De fait, la solution du tutoriel semble être la meilleure réponse à la fois pour expliquer un gameplay (rend le processus d’apprentissage plus dynamique), tout en permettant aux jeux dématérialisés comme physiques d’avoir le même contenu (et éviter les redondances livret/tutoriel). Le concepteur se doit d’évoluer dans sa manière de communiquer dans un jeu et de fait, doit proposer un contenu plus agréable à suivre. Cette nouvelle manière de fournir de l’information vient également poser de nouveaux problèmes en particulier auprès de joueurs soumis à certains handicaps (physiques ou moteurs) pour qui rendre le jeu vidéo plus dynamique, risque de rimer avec la nécessité de devoir s’adapter de nouveau à un contenu difficile d’accès ; voilà donc un problème qui reste encore en suspent.

Le récap

  • Le manuel d’utilisation et le tutoriel sont le fruit de multiples traductions de règles et d’indications : les game designers retranscrivent visuellement un univers, les programmeurs traduisent cet univers sous formes de codes, les interfaces (physiques comme virtuelles) permettent de traduire des commandes, les langages (au sens classique du terme) permettent de donner une lecture/compréhension au jeu (le fait de pouvoir jouer en français, en anglais, etc.).
  • Un jeu vidéo n’est jamais véritablement expliqué au joueur (syndrome de la boîte noire), c’est à lui d’expérimenter et découvrir par lui-même certaines règles. Le game designer laisse donc une marge de manoeuvre plus ou moins grande à ce dernier.
  • Le jeu vidéo est conçu comme un parcours avec une évolution graduelle de la difficulté. Si celui-ci peut être simple à comprendre, il est donc bien plus difficile à maîtriser dans son intégralité. Les manuels de jeu et tutoriels participent à cet accompagnement tout au long du “parcours initiatique”.

Références

Bibliographie :

  • Callon, M. “Eléments pour une sociologie de la traduction: La domestication des coquilles Saint-Jacques et des marins-pêcheurs dans la baie de Saint-Brieuc”. L’année Sociologique. 1986. Vol 36. pp 169-208.
  • Dunnigan, J. F. Wargames Handbook: How to play and Design Commercial and Professional Wargames. Bloomington: iUniverse. 2000.
  • Hock-Koon, S. “Expliciter les connaissances du game designer pour mieux comprendre le jeu vidéo”, in Rufat, S. & Ter Minassian H. (dir.) Les jeux vidéos comme objet de recherche. Questions théoriques, coll. « L>P ». 2011. pp 14-28.
  • Juul, J. Half-Real: Video Games Between Real Rules and Fictional Worlds, Cambridge, MIT Press. 2005.
  • Kunkel, B. “How Alex Pajitnov was Tetris-Ized! Why Tetris’ creator got the cultural bends upon his arrival in America”, http://www.gooddealgames.com/articles/Tetris_Alex_Pajitnov.html, consulté le 23/02/2016.
  • Natkin, S. “Les jeux de demain: télévision oui cinéma interactif?”. In Le Game design de jeu vidéo: Approches de l’expression vidéoludique. Paris: L’Harmattan. 2006.
  • Parker, J.R. Buttons, simplicity, and natural interfaces. Loading. 2008. Vol.2, N°2.
  • Salen, K. & Zimmerman, E. Rules of Play. MIT Press. 2003.

Numériques :

  • Tutoriels, Arte/Jeuxvideo.com, Art of Gaming, France/Allemagne, 2017, 12 min.
  • Man vs Snake : The Long and Twisted Tale of Nibber, Tim Kinzy, Andrew Seklir, USA, 2015, 1h33min (disponible sur Netflix).
  • The King of Kong, Seth Gordon, USA, 2007, 1h19min.

Crédits

  • Mémoire d’un joueur.overblog.com.
  • Okami, Capcom.
  • Suricate, Golden Moustache.
  • Spelunky, Derek Yu.
  • Super Mario 64, Nintendo.
  • Rankedboost.
  • Good Deal Games.
  • Otakia (extrait notice Wall-E, THQ).
Commentaires
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Akira_22 Akira_22
MP
Niveau 7
le 09 mars 2018 à 12:00

Malheureusement c’est clairement une raison économique.
Ça arrive dans tout les secteurs économique et pas seulement le’ jeux vidéo.
Mais c’est une grosse plaît.
Exemple récent seiken densetsu collection sur Switch.
Le livret qui est quand même indispensable, sauf si on connaît déjà les jeux bien sûr, est inclu en simili format pdf d’un scan du livret original dans un sub menu du jeu.
Enfin pour faire l’analogie avec Mario 64, le manuel de Mario odissey est inclu en tutoriel au cours du jeu et c’est très envahissant. De plus ça simplifie beaucoup le jeu en lui même car il s’active au moment où on a besoin d’effectuer une action précise enlevant toute possibilité d’essai de réussite/échec. Alors que dans le passé avec les manuels on avait les mouvements de base et c’était à nous de les maîtriser et de penser à les utiliser aux endroits opportuns.
Toute la découverte en est brisée.
Et l’expe de jeu détérioré. Si au moins les collections collectors avant un livret mais c’est même pas le cas.

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