Comme une guerre froide, le conflit entre Ubisoft et Vivendi dure depuis déjà plus d'un an. Les choses se font petit à petit, la compagnie de Bolloré grimpant au capital de la firme française et les Guillemot sécurisant des parts de leur propre affaire à coups de millions. Mais cette histoire pourrait bientôt prendre fin puisque à compter du mois de novembre, Vivendi fera l'acquisition du droit de vote double. En effet, selon la loi Florange, les actionnaires conservant leurs titres pendant au moins deux ans obtiennent en récompense les droits de vote doubles.
C'est un mois très certainement entouré en rouge sur le calendrier de l'homme d'affaire breton. Comme l'ont fait remarquer différentes analystes financiers, le mois de novembre serait idéal pour Vincent Bolloré. Idéal pour lancer une OPA sur Ubisoft. A près de soixante jours de la potentielle prise de contrôle, le président actuel du studio de jeux vidéo français s'est entretenu avec les Echos. Une interview des plus intéressantes dans lequel l'homme s'exprime sans filtre sur Vivendi, société qu'il considère comme rivale et avec laquelle il n'aurait aucun contact :
Nous ne nous parlons pas. Nous attendons toujours la réponse au courrier envoyé il y a plus d'un an, pour qu'ils nous précisent les synergies qu'ils disent imaginer. Vivendi est avant tout un concurrent pour Ubisoft, notamment dans la guerre des talents, le jeu sur mobile, le cinéma, etc.
Ubisoft est-il condamné à tomber entre les mains de Vivendi ? Difficile à dire tant que la stratégie de la multinationale possédant Canal+ n'est pas connue. De son côté, Yves Guillemot explique compter sur les performances de sa société qu'il estime bien plus intéressantes pour les actionnaires que n'importe quelle prime :
La meilleure stratégie est de performer. Nous avons transformé le modèle d'Ubisoft pour allonger la durée de vie de nos jeux et qu'ils apportent des revenus plus récurrents et plus rentables. C'est une stratégie lancée en 2010. La prédictibilité de nos résultats et de la croissance s'améliore. Depuis un an, le cours de bourse d'Ubisoft a progressé de plus de 60 %. Si quelqu'un arrive et propose une prime de 30 %, je ne pense pas que beaucoup d'actionnaires seraient intéressés car notre potentiel de création de valeur est largement supérieur.
Parce qu'elle est présente à chaque interview sur le sujet, nous ne pouvons passer à côté de l'inévitable question suivante : que deviendrait la société Ubisoft si elle était dirigée par Vivendi ? Yves Guillemot ne change pas de version et continue de penser que Vivendi aurait bien du mal à comprendre l'industrie vidéoludique. "Nous, depuis trente ans, nous essayons de trouver la bonne voie. Ce n'est pas facile, c'est exigeant, il faut prendre des risques et être mobilisés à 100 % sur ce segment" ajoute-t-il.
Et l'avenir avec Bolloré ? A les entendre, il semblerait que les frères Guillemot aient du mal à s'imaginer continuer chez Ubisoft avec Vivendi au-dessus de leurs têtes. Sans vraiment parler de son cas, Yves préfère revenir sur les performances moyennes de Vivendi dans le milieu du jeu vidéo jusqu'à aujourd'hui. L'homme d'affaire lance même une petite pique concernant le regain de puissance d'Activision depuis son émancipation du groupe de Bolloré :
Je n'ai pas du tout envie d'être dirigé par un conglomérat. J'observe d'ailleurs que les groupes de médias qui ont investi dans les jeux vidéo n'ont pas réussi. Regardez Disney. Quand Activision a intégré Vivendi, c'était pour venir prendre la pépite, Blizzard. Vivendi a ensuite laissé partir l'ensemble en revendant Activision, qui a ensuite bien plus prospéré. Les 60 % que Vivendi détenait dans Activision représentent aujourd'hui 20 % de plus que la valeur totale actuelle de Vivendi ! J'aurais préféré qu'Activision reste dans Vivendi, ils auraient été un concurrent bien moins dangereux.
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