Dans mon jeune temps, le test d'un jeu de pêche était inévitablement propice au lancement d'une ou deux bonnes petites blagues sur la lutte ancestrale de l'homme contre le poisson sauvage. Avec l'âge et l'expérience, j'ai pourtant fini par comprendre qu'un jeu de pêche, ça n'a rien, mais alors vraiment rien de drôle. En particulier ceux estampillés Rapala, prestigieux fabricant de matériel divers dont ce jeu éponyme fait office de catalogue en 3D. On trouvera donc ici moult leurres et autres indispensables accessoires de la marque qu'il faudra savoir marier convenablement afin de parvenir à ses fins : gauler la créature pisciforme et la ramener chez soi. Le point sur lequel Rapala a au moins su progresser, c'est son contenu un poil plus étoffé puisqu'il affiche son mode libre, arcade, time trial ou tournoi. Ce dernier étant le plus stimulant dans la mesure où il impose toutes sortes de règles strictes sur le type de poisson qu'il faudra pêcher, leur poids, les conditions etc.

Seulement on touche déjà là un problème de fond du titre, chacun des plans d'eau, lacs ou rivières, semble ne contenir qu'un seule type de poisson, celui qu'on est venu y chercher. Réduisant d'un seul coup une part de l'intérêt tactique lié au choix de son équipement. En somme, on n'a pas à se compliquer la vie en cherchant à n'appâter que les truites, du moment qu'on pêche dans une rivière prévue à cet effet. D'une manière générale en fait, on a du mal à distinguer les nuances dans ce Rapala Tournament Fishing. Les choix de matériel n'ayant finalement pour principale incidence que de faire varier le temps d'attente entre deux prises, des prises qui arrivent de toutes façons assez vite et sans réelle complexité une fois qu'on a déniché le bon "spot", étape qui nous sera facilitée par la présence d'un coach à bord du bateau se chargeant de donner son avis sur les emplacements où vous aurez choisi de faire halte. Ne reste alors qu'à ferrer et ramener la bête.

Là encore, le système paraît bien conçu de prime abord pour mieux s'effondrer par la suite. Une fois que le poisson a mordu, un petit coup aidera à ferrer avant de se mettre à mouliner tout en surveillant l'indicateur de tension de la ligne. Quelques conseils donnés en direct vous aideront à éviter de trop tirer ou à ne pas oublier d'obliquer la canne à droite ou à gauche si votre prise décide de jouer les filles de l'air... Enfin de l'eau, ou de la vase à la rigueur. Une fois près du bateau, les petites prises remonteront d'elles-mêmes, les plus grosses nécessiteront pour leur part d'avoir recours à l'épuisette. On s'étonnera à ce stade de l'intervention d'une sorte de mini-jeu dans lequel il faudra viser une cible mouvante en forme de poisson avant de répéter rapidement une suite de boutons brièvement indiquée à l'écran (du genre 2 + 2 + A + B). Soit, pourquoi pas, mais surtout, pourquoi ? Toujours est-il que le système semble convaincant sans l'être dans la pratique. Rompre la ligne est rare et on ne peut pas dire que la lutte contre les bestioles aquatiques soit spécialement sportive. Inutile d'avoir un brin de connaissance de la pêche pour assurer. Ce qui est heureux à la rigueur car les accessoires mis à votre disposition sont des ustensiles obscurs aux béotiens et plutôt mal décrits dans le jeu, qui n'est par ailleurs pas localisé en français. Vous n'avez plus qu'à réviser votre vocabulaire subaquatique anglophone. Attention, c'est plutôt pointu comme jargon.

Finalement, sous ses dehors subtils, Rapala ne parvient qu'à sembler hermétique aux néophytes, superficiel aux connaisseurs et trop facile pour tout le monde. Mais il reste à faire le point sur son usage de la Wiimote. Une fois de plus, le contrôleur de Nintendo semble idéal pour ce type de discipline. Semble seulement car l'objet ne suffit pas, encore faut-il s'en servir convenablement. Si on vous file un stylo et que vous écrivez avec le bouchon, ça marchera beaucoup moins bien. Tout suit pourtant une logique parfaitement attendue, pour lancer, il suffit bêtement de maintenir le bouton A, de faire un élégant et preste geste du bras de l'arrière vers l'avant et de relâcher A. La canne suivra ensuite tous les mouvements appliqués à la Wiimote. De fait, pour ramener sa prise, on la tirera vers l'arrière en moulinant et en appuyant sur A. L'ennui, c'est qu'on ne s'est pas vraiment donné la peine de calibrer tout ce bazar chez les développeurs. Si la canne suit en effet les élancements gracieux de votre bras, elle le fait avec un temps de latence parfois invraisemblable et hautement désagréable. La désynchronisation qui s'ensuit achève de briser l'aspect réaliste et crédible qui aurait pu se dégager de l'usage de la Wiimote. Regrettable constat tant la pratique d'un jeu de pêche avec la télécommande Wii aurait presque pu distraire un temps même les plus réfractaires au genre.