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Sujet : [Fantasy] Le jeune Stivassian ne prend pas de risques

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_dexter75_ _dexter75_
MP
Niveau 10
01 octobre 2015 à 12:58:06

Lu :ok:

J'ai bien aimé ! Ça se lit tout seul même si, par endroit, j'ai trouvé quelques petites lourdeurs. Rien de très grave, mais, par exemple, quand tu dis : "Il tenait à être au niveau optimal de ses capacités, pour traiter avec le noble" dans le chapitre deux, un simple : "Il tenait à rester sobre pour traiter avec le noble" ou " il tenait à garder l'esprit clair pour traiter avec le noble" rend la phrase plus légère,.

Après ça s'inscrit dans l'aspect chirurgical que tu sembles vouloir donner à tes descriptions mais, je pense, que tu gagnerais à ne pas trop en abuser.

Bref, c'est un peu du pinaillage, ça ne m'a pas non plus empêché d'apprécier ton histoires. Et comme il a été dit, on ressent clairement l'inspiration Witcherienne : Le héros au mèche blanche, le baron et la scène de l'auberge etc.

C'est simple, mais efficace.

je lirais là suite :)

AdAeternam AdAeternam
MP
Niveau 10
03 octobre 2015 à 22:09:23

Le 28 septembre 2015 à 13:38:09 FatuiteR a écrit :
Même si on a jamais vu Aragorn se mettre à couvert en hurlant: "Philippe!" :noel:

Je voulais faire un commentaire constructif mais ça m'a fait recraché mon eau et j'ai oublié :hap:

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
04 octobre 2015 à 09:40:58

Merci pour les lectures les gens :-)

Rapidement, la sweet.

C’était cette même monture, déjà couarde et fainéante à l’époque, que Stivassian montait, aujourd’hui, en compagnie du baron Stardis. Le noble, après la longue chevauchée, ordonna une halte. La troupe était arrivée sur le territoire de chasse de la créature, dans des prées en friche, délaissés par les paysans. La nuit tombait doucement, et Stardis interrogea Stivassian sur la marche à suivre.
— Je n’ai encore aucune idée de ce que ça peut être. Je pense que nous devrions attendre demain matin pour agir.
— D’accord, et comment agissons-nous ? On est encore loin des bois, et je doute qu’elle viendra d’elle-même.
— Si c’est un félin, nous ferons cuir de la viande. Mais avant ça, nous aplatirons les herbes.
— Quoi, tu as peur qu’elle nous saute dessus par surprise, fit l’un des soldats, qui trouvait l’idée qu’une énorme créature se cache dans de si petites herbes ridicule ?
— Non, j’ai peur qu’au lieu d’un félin, ce soit une mère qui chasse avec ses petits. Et eux pourraient nous passer sous le nez et nous encercler.
Le soldat comprit qu’il avait encore raté une bonne occasion de se taire. Ses compagnons le raillèrent, et ce fut les oreilles rouges que le garde étendit son paillasson sur le sol. Ils firent un feu, la lumière et la chaleur devant repousser les prédateurs nocturnes. Installés, ils mangèrent, dans un silence de mort. La nuit crissait d’une multitude de bruits, et deux des gardes se lançaient des regards inquiets. L’un de leur confrère les invectiva :
— Arrêtez de trembler, vous deux. Les bestioles qui font du bruit vous laisseront jamais qu’un bouton sur le cul, demain. C’est celles qui sont silencieuses qui devraient vous faire peur.
Loin de les rassurer, la bonne parole eut pour effet d’augmenter les tremblements des deux hommes. Stivassian les observa, comprit que c’était juste des fils de rien qui avaient trouvé une place. Les autres soldats étaient des militaires, ayant été dans l’armée, bien que le mercenaire voyait qu’il n’y avait que le baron et un autre qui étaient allés à la guerre.
— Oh, maître-lame, fit un des hommes. Jouez-vous aux dés ?
— Oui. Mais je n’ai rien à parier.
— Vraiment ? Pourquoi pas… votre poêle ?
— Bon dieu, s’emporta le baron, pourquoi veux-tu sa poêle ?
— Pour la vendre au village. « Voici la poêle de votre libérateur ! ». J’suis sûr d’en tirer un bon prix.
Stivassian sourit, lança un regard sur sa poêle, cabossée et difforme.
— Dis-moi, mon garçon, demanda le baron après quelques coups de dés, qu’est-ce qui t’a poussé sur la route ?
— Pourquoi demandez-vous ?
— La curiosité. Et l’envie.
— Ah, vraiment… L’appel de l’aventure, je suppose. Je n’avais jamais réellement eu envie de partir de chez moi, avant. Mais j’ai réalisé un jour que nous vivions dans un monde étrange, et qu’on ne peut y être bien en étant ignorant.
— Simplement ? Pas d’aspiration à la gloire, à la fortune ? A ton nom dans les chansons ?
— Les chansons, je m’en passe bien.
Quand Stivassian disait « je m’en passe bien », il fallait comprendre « je m’en passerais bien ». En effet, le chasseur de primes avait déjà une chanson le glorifiant. Fort heureusement, son texte étant en elfique, et long de trois-cents-dix couplets, on l’entendait peu. Cet honneur, il le gagna durant son premier combat contre des bandits. L’histoire commença par la rencontre de deux individus, nommés Hargon Dents-de-pierre et Lorio Pouce-en-fleurs.
Hargon et Lorio étaient pour le moment occupés à débattre à la manière naine, ce qui équivalait à une sérieuse dispute dans n’importe quelle autre culture :
— Tire, putain d’abruti !
— Je tire, idiot de bordel !
— Mais tire, j’t’dis !
— Mais je tire, que je t’ai dit !
Stivassian, ployé sous l’effort, les bras tendus en tirant sur la longue corde de chanvre, les coupa :
— Bon dieu, fermez-la tous les deux et tirez, ou je vous claque le haut du crâne jusqu’à ce que votre pif finisse au niveau de vos genoux !
— Dans le cas de Lorio, ce sera pas long !
— La ferme !
Stivassian jeta un œil à son cheval, broutant de l’herbe sans se soucier de la corde attachée à sa selle.
— Abruti de canasson ! Fais un effort, ou, je te le jure, tu finis en fricassée !
Le cheval renâcla, hennit et, mécontent, obéit, se joignant à l’effort collectif. Malgré la force extraordinaire que possédaient les nains, il fallut de longues secondes avant que, du bas de la doline, parvienne le son d’un mouvement. Ils redoublèrent d’efforts, et parvinrent à tirer le chariot jusqu’à la route. Exténué, le mercenaire s’assit, satisfait du résultat. Lorio s’approcha du wagon, examina les roues une à une. Il grogna et se baissa vers l’une d’elles, commençant les réparations. Hargon, quant à lui, sauta sur la charrette et commença à extraire les flèches plantées dans le bois. Tout en faisant, il remercia Stivassian :
— Merci, maître-lame. Sans vous, on aurait été bloqué.
— De rien, répondit le mercenaire en flattant l’encolure de sa monture. Maintenant, vous pourriez m’expliquer comment vous vous êtes retrouvés dans une telle situation ?
Hargon Dents-de-pierre remit ses manches, qu’il avait retroussées pour l’effort, en place. Il fit passer ses doigts boudinés dans sa longue barbe noire, chassant la sueur qui y avait coulé. Le nain cracha et, enfin, s’expliqua :
— On était parti pour livrer des affaires à Tinla, maître-lame. Sauf que quand on est arrivé ici, on a pas eu le temps de se dire « Défiance, reine des villes » qu’on s’est pris des flèches de toutes parts. Je me suis caché sous le chariot en sortant ma hache, et ces maudits elfes m’ont encerclé.
— Je vois. Au moins, personne n’est blessé.
— Ils m’ont donné une claque pour me garder de toute bravoure, et celui-là, vu comment il a détalé dans les bois, y risquait pas grand-chose.
— Ils étaient trois fois plus nombreux, et deux fois plus haut que nous, qu’est-ce que tu voulais que je fasse, répliqua Lorio Pouce-en-fleurs, agitant les bras en l’air ?
— Que tu te battes comme un vrai nain, par l’œil du Roi ! Ah, maître-lame, ne faites pas attention à lui. C’est juste un autre de ces enculeurs d’arbres qui veulent la paix et l’amour par-dessus tout !
Stivassian ne savait pas quoi penser des « enculeurs d’arbres », il n’en pensa donc rien. Il se contenta d’examiner le chariot, en bon état, mais vide.
— Ils se sont faits la malle avec nos produits, lui dit Hargon. Et nos poneys ! Je sais que ce serait peut-être trop demandé, maître-lame, mais, pensez-vous que, peut-être…
Il jeta un œil au cheval de Stivassian. Le chasseur de prime, qui, depuis deux semaines qu’il voyageait avec le destrier, le connaissait bien désormais, prit la parole :
— Ce serait mieux si je tire moi-même le chariot.
Hargon s’inclina si bien que la pointe de sa barbe balaya le sol. Stivassian récupéra ses bagages, qu’il avait jetés au sol pour enlever du poids à son cheval, et les remit sur la selle. Au milieu de ses provisions, il trouva une grande boîte qui ne lui appartenait pas. Il s’en approcha, puis recula, une puissante odeur d’encens s’en dégageant.
— Ne touchez pas à ça, s’écria Lorio, sa courte barbe rousse frémissante de colère.
Hargon lui claqua l’oreille.
— Un peu de respect pour un passant qui nous vient en aide, bougre d’ingrat !
Lorio s’excusa, semblant rétrécir sous le poids de la honte, ce qui était difficilement imaginable puisque le nain faisait une tête de moins que son compère. Lorio releva son long nez aquilin et expliqua à Stivassian :
— Pardonnez, maître-lame. Mais ce sont mes outils de travail et mes herbes de relaxation. Cette boîte m’est très précieuse.
Le mercenaire fit un geste de la main, indiquant qu’il n’en prenait pas ombrage. Il donna les rênes à Hargon, pour qu’il conduise le cheval, et saisit les deux bras du chariot. Lorio s’empara de sa boîte à outils, la chargea sur son dos avec une extrême délicatesse, et suivit le convoi. Stivassian tirait et avançait doucement. Cela permettait aux nains, aux jambes arquées, et aux pas lents, de suivre. Après un moment à aller ainsi sur la route, Hargon, qui observait avec attention les bandages aux avant-bras du mercenaire, l’interrogea :
— Dites-moi, maître-lame. Vous trouviez-vous dans la région de Piriotule, dernièrement ?
— Oui, répondit Stivassian, en sueur. J’y ai chassé une manticore.
— Ah, c’est donc ça. Nous y sommes passés juste après vous, alors. On nous y a conté vos exploits. Où étiez-vous, après ?
— Dans les petits bourgs alentours. J’y ai chassé une horde de chiens sauvages et une laie.
Ruisselant de sueur, Stivassian tirait le chariot. La route se modifia vite, passant d’un chemin terreux bordés de nid-de-poules à une longue allée pavée. Bientôt, à l’horizon, apparut la forme bleutée de Tinla, la cité en ruine, leur destination.
— Oui, fit le chasseur, remarquant que le regard de Hargon se posait sur lui, et se détournait, de manière honteuse ?
— Hé bien… Je ne voudrais pas abuser de votre générosité, maître-lame, mais… Comment dire, ces bandits nous ont pris nos livraisons et…
— Vous voulez que j’aille après eux ?
— Si ce n’est pas trop demander.
— Pour le bon prix, je peux m’en charger.
Hargon sembla réfléchir pendant de longues minutes. Pendant ce temps, Tinla apparaissait de plus en plus net à l’horizon. La cité était entourée d’échafaudages précaires, des contremaîtres nains et une flopée d’ouvriers de tous les horizons s’affairant à la reconstruction. On disait que Tinla était l’une des plus belles villes au monde, autrefois. Bâtie avec les pierres bleues travaillées par des tailleurs experts, la cité jouissait d’une architecture atypique, faisant la part belle aux colonnes et aux voûtes. De nombreux bâtiments disposaient de jardins suspendus, la ville se transformant en une fresque colorée de toutes les fleurs y vivant, une fois le printemps venu.
Mais ça, c’était avant le Seigneur de guerre. Dans sa sanglante campagne, il choisit comme première cible Tinla. Si avant il était considéré comme un vulgaire malfrat, une fois le sac de la ville terminée, le Seigneur de guerre devint l’un des plus terribles ennemis des royaumes. La suite de la guerre termina de le glorifier, et il devint le héraut des Temps des sombres, l’incarnation de la folie meurtrière et du sang versé. Il devint l’être déicide, assassin des Rois de droit divin. Et bien que Tinla fut détruite il y a cinquante ans, les royaumes n’avaient jamais pu jusqu’à aujourd’hui entamer la reconstruction. Un demi-siècle, c’était ce qu’il avait fallu, pour que le traumatisme se retire.
Les trois voyageurs approchaient de l’arc de triomphe, seule structure que le Seigneur de guerre n’avait pas réduite en cendres lors de son passage. Il avait préféré y faire clouer les corps de ceux qui n’avaient pas pu lui échapper. Hargon, qui n’avait pas la tête à l’Histoire, prit la parole :
— On ne peut pas vraiment se permettre de vous offrir un contrat. Toutefois, vous avez été bon avec nous, et notre maître nous répète sans cesse que c’est une qualité trop rare pour ne pas la récompenser. Si je peux vous prendre un peu de votre temps, je pense que nous serions capable de trouver un terrain d’entente.
Ils s’arrêtèrent aux portes de la ville. En lieu d’une porte de garde , ils trouvèrent un trou béant dans la muraille, où des caisses et des cailloux avaient été jetés pour limiter le passage. Un garde, assis sur une boîte, se leva en cliquetant dans son armure rutilante. Il vérifia le chariot vide, et les laissa passer. Plus loin, ils trouvèrent un campement. L’amas de tentes et de toiles tendues faisaient plus penser à l’arrêt dans la campagne d’une compagnie qu’à un lieu de repos urbain, mais Hargon informa Stivassian que c’était l’auberge. Le nain ordonna à son camarade d’acheter un endroit où mettre la charrette, ainsi que deux tentes pour eux. Enfin, le chasseur, un brin épuisé par sa tirée, suivit Hargon, tout en laissant son cheval aux mains de Lorio.
— N’est-ce pas honteux, maître, fit le nain, alors qu’ils progressaient tout deux dans la « ville » ? Des gravats, des ruines, des bâtiments qui menacent de s’effondrer au moindre coup de vent… C’est vraiment une honte. C’était un véritable joyaux, dans le temps. Je l’ai visité dans ma jeunesse, Tinla la magnifique. J’ai même poussé le vice à aller admirer leur cathédrale. J’ai pas l’âme pieuse comme certains, mais je vous le dis, quand je suis entré et que j’ai vu le machin, je me suis dit : « Par la Grande montagne, il doit y avoir un dieu, quelque part, pour que des choses aussi belles existent ».
Stivassian ne répondit pas. Les avenues étaient entourées de piles de pierres brisées et noircies par les flammes. Des tailleurs, souvent accompagnés d’architectes nains, allaient de débris en débris, séparant ce qui pouvait encore être utilisé de ce qu’il faudrait jeter.
— Espérons que votre nation pourra lui faire justice en la reconstruisant, commenta Stivassian.
— N’ayez crainte, maître-lame ! S’il y a bien une chose que nous avons appris à faire, c’est tailler les cailloux et les empiler de la bonne façon. Savez-vous que ces abrutis voulaient faire ça tout seul ? Sans notre expertise ? Ah, il y a fort à parier qu’ils auraient mis du mauvais bois partout, pour consolider et s’en serait laver les mains. Il aurait alors pas fallu deux ans pour qu’une boniche fasse tomber une lampe et qu’on ajoute plus de cendres aux restes.
Hargon prit un tournant dans une allée étroite, entre deux bâtiments ployés qui se touchaient. Quand le vent soufflait, des nuées de plâtres tombaient d’entre les briques, ainsi qu’un nuage de spores venant de plantes pâles. Le nain poursuivit son discours :
— De la pierre, de la bonne pierre bleue venue des carrières de Défiance, voila ce qu’il faut. C’est pas donné, et avec le salaire des maîtres qui savent la travailler, ça fait un joli pactole. Mais ça durera, de bien bonne façon. Regardez Défiance, par exemple…
Hargon s’interrompit, réalisant l’erreur qu’il venait de faire. En effet, la comparaison entre les deux villes étaient plutôt mal venue, étant donné que le même homme avait ordonné la construction de l’une et la destruction de l’autre.
— Bon, disons juste que ça durera, conclut Hargon. Nous y voila, maître-lame.

C'est si court que je n'ai quasiment rien à dire. Oh, si, on fait du développement de background. Un peu d'histoire des lieux et tout ça. Aussi, on parle des nains. Sur un truc qui n'a rien à voir avec l'intrigue, je déteste le format épisodique dû à la publication sur le forum. La transition presque subtile entre la première histoire et le retour à la chasse avec le baron est totalement niquée à cause du découpage. Mais bon, j'ai pas trouvé de meilleur endroit où couper juste avant.

Psyclo Psyclo
MP
Niveau 10
05 octobre 2015 à 12:56:47

Mh... je commence un peu à décrocher, je trouve ce dernier chapitre un peu creux. Trop axé divertissement et action, trop de dialogue, pas assez de psychologie. Après, c'est toujours bien écrit, les dialogues sont bien menés... j'attends le prochain chapitre pour trancher.

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
06 octobre 2015 à 09:40:04

Merci pour la lecture :-)

Ouais, pas grand chose dans ce chapitre là. C'est mou de chez mou. Bon, en même temps, il en faut aussi. Passons vite à la suite, je dis :

Stivassian s’arrêta. Ils étaient arrivés à la fin de la ville. Une troupe armée, installée, attendait là. Ils ne se mirent pas en travers du chemin des deux compagnons. Leur rôle n’était pas d’assurer l’entrée ou la sortie d’un tel, mais de surveiller, au cas où des bagarres se déclencheraient. En effet, une fois passé le muret qui avait été autrefois les remparts, on trouvait un camp de réfugiés. Et l’origine des dits réfugiés faisait qu’on se méfiait. Un souffle s’éleva, vint heurter les narines de Stivassian. Il mit une main sur son nez, décryptant l’odeur. L’urine, les excréments, les ordures, la putréfaction… Le sang, aussi. Hargon le guida, d’un pas assuré mais prudent. Il décrivait de larges arcs de cercle pour éviter les places les plus bondées. De nombreux réfugiés s’étaient attroupés autour des leurs, apathiques, défaits, et l’air résigné. « Voila ce qu’il reste des elfes » se dit Stivassian, la contemplation des visages mélancoliques lui pinçant le cœur. Certains avaient réussis à établir des cabanes précaires, avec des restes sauvés de planches. Mais la plupart des abris n’était que des tentes, ou des bouts de tissus cousus à la va-vite pour faire un sac posé à même le sol. Entre les gens assis, discutant peu, Stivassian voyait les malades, allongés sur le sol, parfois juste empêchés par de violentes quintes de toux, parfois le visage couvert du sang qu’ils vomissaient. Les gémissements et les hurlements s’élevaient en parts égales, les premiers arrachés par une poussée de fièvre, les deuxièmes par les puissantes migraines. Hargon ne pipa pas mot durant leur traversée, le spectacle lui faisant toujours de l’effet. Enfin, ils s’arrêtèrent devant l’entrée d’une grande toile rapiécée. L’odeur s’en échappant était pire que celle du camp, mais s’y mêlaient des fragrances particulières, de l’encens, de l’ammoniac, et d’autres produits médicaux. Sur le côté, deux elfes discutaient rapidement, devant une charrette. Un drap blanc était tiré sur celle-ci, mais la forme de trois corps se dessinaient dans les plis du tissu. L’un des elfes, tout en guenilles, saisit les bras du chariot et s’éloigna, conduisant les patients vers leur dernière demeure. Le deuxième resta un moment sans bouger, la tête basse, puis il aperçut Hargon et Stivassian. Il approcha, sa longue toge autrefois immaculée, désormais tâchée de sang bruni et de vieilles traces de vomi, ondulant sous ses longues enjambées. Rachitique, le visage tiré, l’elfe portait les traces de longues nuits de soins, ainsi que des rides, signes d’un âge immense chez cette race censée ne jamais vieillir.
— Maître Hargon, dit-il en s’inclinant légèrement devant le nain.
— Docteur Assir, répondit l’interpellé.
Le nain se tordait les mains l’une dans l’autre, embarrassé. Voyant cela, le médecin poussa un long soupir et prit la parole :
— À vous voir sans ma commande, j’imagine qu’il y a eu un imprévu.
— Oui, docteur. Regrettable. Honteux, même. Mais nous avons été attaqué par des bandits, qui nous ont chapardé les produits… Mes excuses, docteur, mes plus plates excuses,…
— Ne vous tracassez pas pour cela. Ce n’est pour moi qu’une petite vague dans une mer d’ennuis.
— Ah, mais ne dites pas cela. Voyez-vous, le maître-lame Stivassian, ici présent, est un puissant chasseur, qui pourra récupérer sans difficulté votre bien ! Enfin, pour peu qu’il soit rémunéré…
Le médecin tourna sa tête vers le mercenaire. Jamais Stivassian n’avait vu de cernes aussi prononcés. Il déglutit et se présenta :
— Je me nomme Stivassian de la Thêverie.
— Et je suis le docteur Assir El Hamar. Cela vous gêne-t-il que nous nous serrions la main ?
— Absolument pas, répondit Stivassian, échangeant une poignée de mains avec le médecin.
— Merci. Il y a des hommes qui éprouvent encore des craintes envers nous, à cause de la Maladie. Si vous me permettez une remarque, vous semblez pâle.
— Sans doute. Je n’avais jamais vu la Maladie, et c’est… troublant.
Le médecin inclina légèrement la tête, et invita Stivassian et Hargon sous la tente. Ils pénétrèrent les lieux, s’arrêtèrent au centre, dans une allée aménagée entre des lits de camps. Des souffrants gémissaient ici et là, notamment une femme elfe, apathique, un râle douloureux s’échappant de ses lèvres immobiles. Un homme elfe était assis à ses côté, lui serrant la main. Le docteur Assir, pour qui cette vision était désormais chose courante, porta son regard sur Stivassian.
— Concernant notre affaire, maître-lame, j’ai bien peur de ne pas pouvoir vous offrir grand-chose. Nous sommes pauvres, vous vous en doutez bien.
— Ça ne fait rien, docteur. Je récupérerai vos produits.
— Je vous remercie, mais vous ne devriez pas risquer votre vie pour si peu.
— Vous avez besoin de ces médicaments. Je ne peux pas vous tourner le dos.
Un léger rictus s’échappa de la gorge d’Assir El Hamar.
— Nous n’avons aucun besoin, jeune Stivassian. Nous sommes condamnés, et n’attendons plus que l’acte finale de la Maladie. Je pourrai utiliser ces produits pour alléger nos souffrances, mais nous n’avons pas d’avenir.
Stivassian serra les dents. Il regarda autour de lui, les elfes alités, se tordant de douleur, la vie leur échappant petit à petit.
— Vous avez perdu espoir, dit-il.
— Bien sûr. Il était un temps où nous nous acharnions, moi et mes collègues, pour trouver un remède. Une tâche ardue, quand les chercheurs succombent l’un après l’autre du fléau qu’ils combattent. Désormais, j’ai enterré trop de mes confrères pour me permettre l’espoir.
— Ça a dû être dur pour vous, tenta le mercenaire, cherchant à communiquer sa compassion.
— Oui. Ça n’a pas été le plus dur, toutefois. Le plus dur, ce fut quand les enfants commencèrent à tousser.
Stivassian entendit un crissement s’élever de sa mâchoire. Il desserra les dents, par crainte de les briser s’il continuait ainsi. Il s’apprêtait à répondre, quand un cri s’éleva. La femme elfe, prise par un sursaut d’énergie, leva une main tremblante dans leur direction, et se mit à hurler :
— Assargwend !
Le docteur Assir alla vers elle, sortant des plis de sa robe un flacon. Il déboucha la fiole, la passa sous les narines de la femme, soudainement prise de violentes convulsions. Elle se calma, son corps se cabrant avant de se reposer, sans énergie, contre le matelas. Elle marmonna des paroles en elfique, des balbutiements incompréhensibles. L’homme à côté d’elle se pencha pour l’écouter, susurrant des paroles réconfortantes entre deux sanglots.
— Je m’excuse pour cela, fit le docteur. Irila était une druidesse, dans le Royaume d’émeraude. Elle est fiévreuse, et elle est particulièrement sensible à certaines odeurs, notamment celle provenant de votre épaule, maître.
Stivassian, surpris, recula.
— Alors, c’est à moi de m’excuser. Peut-être devrions-nous nous éloigner ?
Le docteur opina, fit passer ses deux invités vers l’arrière de la tente. Là, le médecin avait aménagé un petit laboratoire et un bureau. Il proposa du thé à Stivassian et Hargon, trifouillant ses casseroles, poêles et bouilloires en vue de la préparation. Une fois la boisson servie, le médecin interrogea Stivassian sur l’origine de sa blessure et de la rune inscrite sur celle-ci.
— Une lance enduite de venin de manticore, répondit le mercenaire. Le poison était dilué, pour ne pas ronger l’acier, et c’est ce qui m’a permis de survivre.
— Ça a joué, fit le médecin. Mais même dilué, le venin est puissant. Je n’ai jamais entendu parler de quelqu’un y survivant.
— J’ai été soigné par un mage.
La face de Stivassian s’affaissa, alors qu’il se rappelait de la terrible nuit. Il se souvenait du mage, sa voix puissante qui hurlait les incantations, et la magie qui pénétrait son corps en ruine. Il naviguait alors entre des périodes de lucidité qui le torturaient, la souffrance brûlant chaque parcelle de son corps, et d’inconscience glacée. Le mage lui avait dit que c’était sa magie qui l’avait plongé dans le sommeil, pour limiter la géhenne. Mais Stivassian restait persuadé qu’à un ou plusieurs moments du rituel, son cœur s’était arrêté.
— Il doit être puissant, pour accomplir une si grande prouesse, commenta le médecin.
Voyant que le jeune homme ne désirait pas poursuivre, Assir reprit sur leur affaire en cours :
— Si vous désirez tant aller à la poursuite des brigands, je ne peux pas vous en empêcher. Promettez-moi simplement de ne pas vous faire tuer pour si peu, maître-lame. La vie est une belle chose, mais si fragile.
Stivassian inclina la tête, signe qu’il promettait. Peu après, Stivassian et Hargon, silencieux de honte durant tout l’entretien, prirent congé du médecin. Sur la route vers « l’auberge », le nain prit la parole :
— Maître-lame, je suis à jamais votre débiteur. Vous nous avez aidés sur la route, et maintenant, vous allez laver mon honneur en réparant mon erreur.
— Merci. Mais ce n’est pas vraiment ce que je cherche à faire.
— Et pourtant, c’est ce que vous allez faire. Encore une fois, je suis votre débiteur.
Ils arrivèrent à l’auberge, et cherchèrent le coin d’herbes folles où Lorio avait installé les tentes. Ils trouvèrent l’endroit, grâce au cheval de Stivassian, qui hennissait à foison, alors que Lorio le brossait. Le nain avait soigné et pansé l’animal, et celui-ci semblait irradier de bonheur. Stivassian prit les rênes en remerciant le petit être.
— Maître-lame, fit Hargon, soyez prudent. Des bandits, c’est pas une mince affaire.
— Ne vous en faites pas. Vous m’avez dit que c’était des elfes, peut-être que j’arriverai à les raisonner.
— Rah, grogna le nain. J’en doute. Ce sont des jeunes, pas encore atteints par la maladie, et ils ont le cœur empli de colère. Ils haïssent les humains, pour ce qu’ils ont fait au Royaume d’émeraude. Ils sont nés après la catastrophe, et n’ont vécu que de leur rancœur, pour ceux qui leur ont pris la grandeur de leurs ancêtres.
Stivassian se garda de répondre. Il enfourcha son cheval, et se lança vers la sortie de la ville. Une fois sur la route, il éperonna sa monture, commença à galoper. En quelques minutes, il fut de retour là où il avait trouvé les nains. Le chemin gardait les traces du passage de la compagnie, les pas des nains et les marques du chariot encore frais. Stivassian regarda attentivement la terre, cherchant là où les bottes des elfes s’étaient posées. Il trouva, examina la piste, puis se tourna dans une direction. Là-bas, il vit un petit bosquet, sombre et touffus. L’endroit idéal en somme.
Il galopa jusqu’à l’orée des lieux. Là, il descendit de selle, ordonna à son cheval de rester. Il n’osait pas l’attacher, par crainte d’un danger, mais espérait que, cette fois, sa monture n’irait pas cavaler dans quelque coin où l’herbe était plus verte. Évidemment, elle le ferait, et il faudrait une heure à Stivassian pour retrouver son canasson, en lui promettant la fricassée, s’il ne se montrait pas.
Le chasseur entra dans les bois. Il se savait sur la bonne piste. Les arbres alentours n’étaient pas élagués, leurs branches basses battant son torse et son visage. S’il y avait eu un sentier, il était désormais bien caché sous les ronces et les fougères. Le lieu criait à l’abandon, comme si personne n’osait s’y aventurer. En progressant, Stivassian redoublait d’efforts pour faire le moins de bruits possibles. Le terrain rendait la tâche difficile, mais il tenait à approcher furtivement. Après quelques minutes à avancer de son pas prudent, il trouva du sang, collé contre le tronc d’un arbre. Il examina la tache, vit que de la salive et des glaires se mêlaient au liquide carmin. Il continua sa route, et, très vite, des voix s’élevèrent à l’horizon. Il s’approcha, commença à percevoir les mots. Une violente quinte de toux résonna dans l’atmosphère, puis une voix éraillée et colérique :
— Je ne suis pas malade, je vous dis !
— Écoute, il y a un médecin en ville…
— Je ne suis pas malade, répéta l’individu. C’est le froid. J’ai attrapé froid.
Un long silence suivit, avant que la voix ne s’élève à nouveau, faible, presque en sanglot, en une supplique qui brisait le cœur :
— Je ne suis pas malade…
Stivassian étouffa un soupir au fond de sa gorge, et se décida. Il aurait pu continuer comme il le faisait, mais il se doutait bien que l’acuité auditive des elfes l’arrêterait. Il ne pouvait pas espérer débouler ainsi, sans bruit, au milieu des bandits. Il prit donc l’approche la plus directe et s’exclama :
— Holà, par là !

Là, c'est du lourd, j'ai envie de dire. On entre dans un gros point de l'univers, le fait que les elfes sont atteints d'un cancer du sida de l’Ebola. En sous-texte, on comprend aussi que leur nation a été complètement annihilée de la carte. Bref, c'est pas la joie pour les oreilles pointues. Je suis assez mitigé sur les effets concernant la transmission d'informations au lecteur. D'un côté, je ne voulais pas mettre d'un bloc toute l'explication des événements, un peu comme je l'ai fait pour expliquer Tinla, la destruction, le Seigneur de guerre et blablabla... Du coup, j'ai été vers des indices épars à ramasser pour le lecteur. Je pense qu'au terme, on comprend globalement, c'est-à-dire pas dans le détail, les événements. Je sais que ça peut être gênant pour certains lecteurs d'être dans le flou par rapport à ça, qu'il faut absolument tout connaitre et la clique, mais un brin de mystère a un certain charme. En soi, il n'y a aucune justification pour retenir des informations, étant donné que les personnages, eux, sont parfaitement au courant. Après, le fait qu'on ne parle pas des détails de l'événement, fait que l'on comprend les positionnements des personnages : la fatigue, la pudeur, la résignation.

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
16 octobre 2015 à 09:36:22

Une série de craquements, de chuintements et de bruissements s’éleva. Les bandits tiraient leurs armes, et se mettaient en position. Stivassian s’approcha d’un pas tranquille, le moins menaçant possible. Le campement des brigands était petit, juste quelques affaires semées ici et là en attendant de reprendre la route. Ils étaient six, pauvrement vêtus, des bleus sur les bras et les jambes, les yeux grands et cernés. Deux tenaient un arc, tandis que les autres portaient des coutelas et des gourdins. Stivassian arriva devant eux, les mains levées. Les bandits formèrent vite une garde, deux se déplaçant pour le prendre en tenaille, un troisième formant le front.
— Je viens discuter, rangez vos armes, fit la voix apaisée du mercenaire.
Les elfes eurent un doute, très léger, très court. La stature svelte du jeune homme et ses traits anguleux les rendaient confus. Mais quand ils virent que les oreilles de Stivassian n’étaient pas longues et pointues, ils se décidèrent bien vite.
— Mort aux humains !
— Pour le Royaume d’émeraude !
Une flèche partit, Stivassian bondit dans les fourrés. Les trois de l’avant-garde partirent à l’assaut. Le mercenaire n’avait pas le choix, il devait se battre. Il sortit son acier et tournoya au milieu de ses ennemis, son épée dirigée d’une main de maître. Il trancha un gourdin, fit sauter des doigts de son propriétaire un coutelas. La troisième arme perça l’air, à la recherche du cœur de l’homme. Stivassian l’évita d’un pas de côté, frappa la nuque de son adversaire avec la garde de son arme. Il donna un coup de genou dans le ventre d’un des désarmés, et lança son coude dans le visage de l’autre. Le mercenaire roula jusque derrière un arbre, évitant la dague lancée à son encontre.
— Bon Dieu, je viens en paix, hurla-t-il aux trois belligérants encore debout.
— Ta paix ne nous intéresse pas, humain !
Une flèche arracha un morceau d’écorce à l’arbre. Stivassian comprit qu’il ne pouvait rester là, voyant une des formes abattues précédemment se relever. Il se lança, courant vers un des archers. Bondissant d’un pied sur l’autre, il slalomait, les traits manquant son visage de peu à chaque fois. Il déboula sur son ennemi, se lança. Son genou vint heurter le nez de l’elfe, une gerbe de sang jaillissant de la rencontre. Le blessé tomba à terre, les mains sur la face, Stivassian se retourna, son épée virevoltante. Une flèche vint heurter l’acier, elle partit loin derrière lui. Il se tint en garde, regarda l’elfette qui le mettait en joue.
— Ce que vous avez volé, ce sont des médicaments pour les elfes en ville. Je viens les récupérer.
— La ferme ! Tu ne nous berneras pas !
L’arc bandé ne tremblait pas, la main étonnamment puissante de l’archère tenant le coup. Elle cherchait une ouverture dans la garde du mercenaire, un instant d’hésitation qui suffirait pour lui percer le cœur.
— Ta race est vile et immonde, fit l’autre elfe, qui avait ramassé sa dague. Vous avez usé de la magie pour détruire notre peuple !
L’insulte n’attint pas Stivassian. Il se tenait paré, ses pieds décrivaient un arc de cercle autour de sa cible. L’archère commença à tourner également, mais un léger tremblement saisit ses bras. Elle ne tiendrait pas longtemps, devant guetter la garde et les pas du mercenaire, tout en maintenant la tension dans ses muscles. L’elfe qui s’était relevé s’approcha à son tour, fit signe à son allié à la dague de prendre l’homme en tenaille. Mais ce dernier, avant d’avoir fait un pas, fut soudain pris d’une quinte de toux. Puissant, venu des poumons, l’assaut le plia en deux. Ses doigts fébriles lâchèrent leur arme, et le malade tomba à genoux, une main sur le torse, une autre sur le sol, pour ne pas s’effondrer. Au bord de ses lèvres, des perles de sang commencèrent à apparaître, un vomissement retenu in extremis. L’elfette baissa son arme, horrifiée, voyant des larmes de souffrance couler le long des joues de son ami. Elle arracha son carquois attaché à sa ceinture, le lança au relevé, avec son arc. Vite, il encocha une flèche, lâcha la corde. Stivassian mit son épée dans la trajectoire du trait, repoussa l’assaut. Une deuxième salve partit, l’ennemi prenant de longues secondes pour bander l’arme. Encore une fois, le mercenaire para l’assaut.
— On peut faire ça toute la journée et toute la nuit, fit Stivassian, repoussant une troisième flèche.
L’archer poursuivit. Son amie mit le malade sur le côté, lui tournant la tête pour éviter qu’il ne s’étouffe dans son vomi. Une gerbe de sang sortit de la bouche de l’elfe, et une série de convulsions le saisit. L’elfette, paniquée, le visage trempée de sueurs d’effroi et de pleurs, arracha une lanière de cuir à sa tunique. Elle la calla dans la bouche du souffrant, l’empêchant de se mordre la langue.
— Ton ami a besoin d’un médecin, bougre d’imbécile, hurla Stivassian, qui répétait encore et encore le manège.
La prouesse semblait impressionner l’archer. Ses deux amis, que le mercenaire avait étalés au début, s’étaient relevés, dressaient un mur entre le malade et le chasseur. Mais aucun ne semblait être paré à se lancer à l’assaut, la lame tourbillonnante les effrayant.
— Dernière avertissement, cria Stivassian d’une voix mécontente. Baisse ton arc maintenant, ou je te claque le haut du crâne !
L’archer tirait, encore et encore, jusqu’au moment où il ne resta qu’une seule et unique flèche dans le carquois coincé à la va-vite dans sa ceinture. Quand il prit le dernier trait entre ses doigts, il tourna un visage atterré vers ses compagnons.
— Écoute, fit, plus calme, Stivassian. Mon cheval est à l’orée de la forêt, mets ton ami dessus et partez trouver le docteur Assir.
— S…Silence, humain, hurla l’elfette, sa voix décomposée tentant de prendre le ton de la colère.
Tremblants, apeurés et confus, les elfes se lançaient des regards fuyants, pour savoir qui tenteraient le premier la lame de Stivassian. Celui au nez cassé, qui était resté jusque-là à geindre dans son coin, commença à ramper. Il passa à côté du mercenaire, celui-ci le regarda passer. « Je pourrais lui percer le cœur, simplement. Mais je ne le désire pas ». L’instant d’inattention fut saisi par l’archer. Il lâcha sa flèche, celle-ci se dirigeant vers le cœur de l’humain.
Stivassian dressa son épée, et il parvint, in extremis, à intercepter le trait. Toutefois, l’angle n’était pas le bon, la flèche s’éleva, son acier érafla le front du chasseur. Entaillé jusqu’à l’os, Stivassian recula, portant une main sur la plaie dégoulinante. Pris par la colère, il s’apprêtait à se jeter sur l’archer, à le déchiqueter, mais un hennissement tout proche l’interrompit. Un cavalier, lancé sur une monture éreintée, franchissait les ronces et les fougères. Le visage en sang, déchiré par les multiples branches sur son passage, l’elfe monté s’arrêta devant le spectacle. Stivassian le reconnut : c’était celui qui était au chevet de la druidesse. L’elfe leva les bras en l’air, gesticulant, parlant vite, hurlant presque. Les bandits se lancèrent un regard d’incompréhension. Le nouvel arrivant parlait en elfique, et ils n’avaient jamais appris la langue de leurs ancêtres, inutile pour des réfugiés qui devaient se faire comprendre par des humains avant tout. Comprenant cela, le cavalier articula, d’une voix essoufflée emplie d’un fort accent :
— Irila ! Irila ! Dans la ville ! Maintenant ! Irila ! Le Royaume d’émeraude renaîtra !
Il bondit de sa selle, et écarta ses compatriotes. Il se saisit de l’elfe malade, le soulevant comme s’il ne pesait rien. Il l’installa sur le cheval, grimpant avec lui sur la monture essoufflée.
— La ville ! Irila ! Assargwend !
Il s’élança dans les bois, retournant sur ses pas. Les bandits se jetèrent des regards, incapables de comprendre. L’elfette fut la première à se décider : elle bondit d’un pas rapide, filant comme le vent, à la poursuite de l’individu. Ses camarades l’imitèrent, laissant Stivassian là, avec leur camp en ruine. Le mercenaire resta un long moment à attendre, l’épée à la main, incertain de la marche à suivre. Il rangea enfin sa lame, se fabriqua un bandeau pour couvrir sa blessure, et se mit en quête de sa cible. Il trouva vite une boîte dont l’emblème lui était inconnu, mais dont l’odeur lui indiquait le contenu. Il la chargea sur son dos, partit.

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
16 octobre 2015 à 09:36:40

Comme précisé auparavant, il lui fallut une heure pour retrouver son cheval. Ce fut donc en début de soirée qu’il retourna au camp de réfugiés des elfes. Les gardes à l’entrée étaient agités, se concertant en des murmures inquiets.
— Que se passe-t-il, demanda Stivassian, qui, le long de la route, se demandait ce qu’il trouverait en arrivant à destination ?
— Nous ne savons pas, maître-lame, répondit l’un des hommes en armure. Les elfes s’agitent bizarrement, on en a vu plusieurs sortir en courant comme des dératés. On a essayé d’en interroger un, mais il bredouillait dans leur langue, et nous a juste dit qu’il devait porter la nouvelle à un maximum de monde.
Ça n’avançait pas beaucoup Stivassian. La caisse de médicaments sur le dos, il pénétra dans le camp. Les endroits où se massaient les réfugiés étaient désormais vides. Ne comprenant pas, Stivassian chercha un elfe, et vit le fossoyeur. Il tirait d’un pas rapide, pressé d’aller à destination, sa charrette. Le mercenaire l’interpella, voulant lui demander des détails sur les événements. Mais quand l’elfe vit l’humain, il lâcha son fardeau, les yeux écarquillés. Il leva les bras en l’air et courut, fuyant le mercenaire en hurlant :
— Assargwend ! Assargwend !
Stivassian pressa le pas, suivant à grand peine le fossoyeur. Il arriva en vue de la tente où le docteur Assir exerçait. Une foule s’était amassée à l’entrée, n’osant pénétrer dans le lieu, restant silencieuse devant la toile. Le respect humble, quasi-religieux, qui animait le rassemblement se brisa, de légers murmures s’élevèrent, quand Stivassian apparut. Les elfes s’écartèrent de sa route, des « Assargwend » s’élevant ici et là. Le mercenaire, surpris et suspicieux des agissements de la multitude, pénétra sous la tente. Là, il trouva d’autres elfes, agenouillés autour du lit de la druidesse Irila, buvant ses paroles. La femme avait les yeux révulsés, son corps pâle agités de spasmes, et couvert d’une sueur coulant à flot. Dans ceux qui s’étaient agenouillés, Stivassian reconnut les bandits qu’il avait affronté. Ils ne comprenaient pas les paroles prononcés d’une voix profonde par la druidesse, mais le ton empli de mysticisme les tétanisait. Stivassian regarda autour de lui, et vit jaillir, du bout de la tente, le docteur Assir. Il alla le trouver, toujours confus des événements alentours.
— J’ai vos produits, dit-il d’une voix feignant l’indifférence.
— Mes quoi ? Oh, oui, c’est vrai. Vous aviez dit… Peu importe. Je vous remercie.
Le médecin dansait sur ses pieds, l’air profondément ennuyé. Il posa la boîte sur le côté, et alla trouver les elfes agenouillés. Il leur distribua du papier et des crayons, et ils s’empressèrent de retranscrire les paroles de la druidesse, jetant rapidement ce qu’ils se remémoraient, et ce qu’ils entendaient.
— Que se passe-t-il, demanda Stivassian, une fois que le docteur fut revenu à ses côtés ?
— Je… comment dire ? Irila est une druidesse, je vous l’ai dit. Elle est également une devineresse. Elle était chargée de lire l’avenir, en usant de narcotique pour se mettre en état de transe. Des substances qui sont très proches de ce que je lui donne pour calmer les douleurs. Et voyez-vous…
Le médecin s’interrompit, le regard posé sur la druidesse, lui-même incapable de réellement comprendre ce qu’il se passait.
— Vous voulez dire qu’elle lit l’avenir, là ?
— Non, maître-lame. Elle… je crois qu’elle prophétise. Je ne peux pas vraiment le dire, je ne connais pas les différences entre les déliriums instillés par la Maladie et les divinations. Je ne suis même pas certain qu’il y ait des différences, pour tout vous dire.
— Et… à quel sujet prophétise-t-elle ?
— Elle prophétise qu’un Grand héros fera renaître le Royaume d’émeraude, et que notre peuple sera sauvé de la Maladie.
Stivassian regarda l’attroupement autour du chevet. Il se mit à espérer que la prophétesse n’était pas simplement sous l’influence de la fièvre. Mais cette pensée s’effaça bien vite. Il s’aperçut que les malades se dressaient sur leurs coudes, tournaient leur regard vers lui. Parmi les fervents, certains se levèrent, et vinrent s’agenouiller devant lui. « Oh, non » pensa Stivassian, comprenant déjà ce qu’il se passait.
— Docteur Assir, fit-il d’une voix froide, y a-t-il quelque chose que vous voudriez me dire, à propos de ce Grand héros ?
— Allons, Assargwend, j’imagine que vous avez déjà deviné.
Stivassian retint un juron, et changea immédiatement de sujet :
— Je vais me retirer. Avant cela, j’aimerais être payé. Pour la récupération des médicaments, j’aimerais que vous m’offriez une de vos poêles.
Surpris par une demande aussi modeste, le docteur prit un moment pour se reprendre. Il disparut à l’arrière de la tente, revint avec l’objet en question. Stivassian se saisit de la poêle, contempla la surface noire, et s’avança vers l’un des fidèles. Il abattit son arme improvisé sur le haut du crâne de l’elfe, celui-ci s’effondrant en se tenant la tête.
— Pourquoi donc, demanda le médecin, étonnamment calme suite à l’incident ?
— Parce qu’il n’a pas baissé son arc, fit Stivassian.
Irila, la devineresse, prophétisa pendant trois jours. La rumeur voulait qu’elle aurait continué pendant trois jours de plus, si elle avait pu. Mais l’effort requis, associé à sa condition physique, firent que la Maladie l’emporta. Sa prophétie fut écrite, et distribuée partout où des elfes se trouvaient. Certains la chantaient, les soirs tristes, levant les yeux vers les étoiles, et espérant. Beaucoup de jeunes elfes arrêtèrent de se tourner vers le banditisme. Certains racontaient même qu’ils furent désormais plus amicaux envers les humains. À la place de la vie précaire d’hors-la-loi, ils choisirent d’être des itinérants, gagnant leur pain quotidien sur les routes. Partout où ils passaient, ils ne demandaient qu’à savoir où si on avait vu un chasseur de primes aux cheveux blonds. Souvent, les jeunes elfes remontaient la piste et trouvaient l’homme qu’ils cherchaient. Quand cela arrivait, il fut souvent rapporté que Stivassian de la Thêverie, Grand héros prophétisé, Assargwend, qui devait faire renaître le Royaume d’émeraude, jaillissait, rouge de colère, de l’auberge où il séjournait, réveillé aux premières lueurs par les prières des fidèles, une poêle à la main.

Comme je l'ai indiqué dans l'introduction, mon appréhension de la fantasy, dans mes créations, se centre sur les codes. Donc, le code attaqué ici est le code de la prophétie, si cher à nos auteurs. Ma variation sur le thème est facilement compréhensible si je commence par vous présenter le prototype de la prophétie sur lequel je me suis basé. Une prophétie est, proto-typiquement, ancienne, dicte le voyage d'un protagoniste, le héros, ce qui permet souvent d'entrer dans un récit d'aventure classique, avec la formation et l'évolution du héros. Notons que le contenu de la prophétie contient toujours le but, et parfois, le développement du voyage. Les modalités de la réalisation ne sont pas à prendre en compte dans le cas qui nous intéresse ici.

Donc, là, ça devient plus simple au niveau de mon traitement:
La prophétie est nouvelle, et très ancrée dans la réalité des individus concernés (les elfes). Le contenu est traité légèrement, car le focus n'est pas centré sur le voyage rendu possible par la prophétie, mais sur les conséquences sociales. Au niveau des points communs avec le prototype, on peut signaler que la prophétie est traitée comme un objet agissant sur les individus, mais pas centré sur l'individu concerné (le héros), mais sur une population. Le héros en question est même réfractaire à son statut nouvellement acquis.

Ce sera tout sur ce chapitre. Quoi? Ah oui, y'a aussi l'autre truc... Stivassian dévie des flèches en pleines courses. Comme y disent ailleurs: roll with it. C'est de l'heroic fantasy, le héros est balaise, s'too.

Psyclo Psyclo
MP
Niveau 10
19 octobre 2015 à 11:25:40

J'ai lu les trois derniers posts, sans difficulté majeur. Je dois même dire que ce fut assez agréable. Effectivement, l'arc des elfes est plus prenant que le début. Perso, ils m'ont fait penser aux Roms :hap:

Sinon, j'ai une remarque au niveau de la narration, je la trouve assez systématique pour le moment, dans le sens ou on a affaire à un schéma récurrent ; voyage - halte - rencontre - mission - retour... ça fait très jeux vidéos et ça manque un peu de spontanéité.

J'attends la suite :)

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
03 novembre 2015 à 09:12:33

Allez, on est reparti !

Neira le logea à l’arrière de la boutique. Le lieu était un endroit peu accueillant, certains produits stockés là. Toutefois, le matelas de paille était un luxe pour Stivassian, habitué aux nuits à la belle étoile. Lorsque la soirée débuta, après un repas fortement arrosé en vin, le mercenaire eut envie de se balader dans la cité.
Comme les étoiles s’imposaient de plus en plus dans un ciel teinté de pourpre, d’ocre puis d’indigo, le jeune homme se surprit à contempler la ville. La multitude de lumières venant des nombreuses maisons l’impressionnait. Ça n’avait rien à voir avec Tinla, cité en ruines qui se reconstruisait petit bout par petit bout. Ni avec les bourgs, où l’on craignait les esprits, une fois la nuit tombée. Ici, le soir désignait une nouvelle partie de la journée, vivante comme les autres. Stivassian sentait le lieu débordant d’énergie, et cela lui donnait envie de reprendre goût aux simples choses, loin de soucis qui s’accumulaient trop.
Cette envie fut d’ailleurs la raison pour laquelle il décida d’aider Lorio. Le soin des âmes en peine n’était pas dans son répertoire de compétences, certes. Mais le peu de temps qu’il avait passé avec le nain, à Tinla, avait appris à Stivassian que Lorio était un brave homme. Le genre qui méritait qu’on se force pour lui venir en aide. Il se dirigea donc vers sa maison, voisine de l’atelier. En arrivant dans la rue, il vit la porte de Lorio s’ouvrir, le nain apparaissant pour l’une de ses escapades nocturnes. À la vue du mercenaire, Lorio se figea sur place, surpris.
— Bonsoir, fit Stivassian, d’un ton joyeux.
— Ah, vous êtes là. Bonsoir à vous, fit Lorio.
Le nain se tortillait la barbe, le regard fuyant. Visiblement, il n’appréciait pas cette rencontre fortuite.
— Où allez-vous donc, à une heure aussi tardive ?
— Je… je vais…
Une fine pellicule de sueur couvrit le front de l’artisan. Cette fois, il était paniqué, devant justifier une action dont, visiblement, il avait honte.
— Quelque chose ne va pas, demanda Stivassian, surpris de tant de secrets de la part de Lorio ?
— Ah… il est inutile de le cacher, j’imagine. Maître-lame, par pitié, venez à mon aide.
L’urgence dans la voix du nain faisait sentir à Stivassian que c’était une affaire grave. Il tenta de prendre un air sérieux, tâche ardue à cause des traces de vins subsistant dans son organisme, et écouta :
— C’est… ah, terrible. Maître-lame, par pitié, j’ai besoin de vous.
— Du calme. Expliquez-vous, Lorio.
— C’est ma chatte, ma Roselia. La pauvre est perdue, je dois la retrouver avant qu’il n’arrive malheur.
Un nain pleurnichant était une vue exceptionnelle. Pourtant, Stivassian ne pouvait pas se sentir chanceux, à la vue des larmes qui s’écoulaient des grands yeux de Lorio.
— Qu’est-il arrivé ?
— Je… voyez-vous, Roselia… je l’ai trouvée dans la nature, tout enfant. Vous souvenez-vous de la caisse, à Tinla ? Je l’y avais mise. Hargon n’aime pas les animaux, il m’aurait forcé à l’abandonner. Mais la pauvre, elle était affamée, sur le point d’y passer. Alors, je l’ai ramenée avec moi. J’utilisais des herbes pour la faire dormir quand nous voyagions, et, le soir, je partais dans les bois, pour lui permettre de se dégourdir les pattes. Quand nous sommes revenus à Défiance, je l’ai gardée chez moi, et je la mettais dans un panier, quand je partais la promener.
— Donc… c’est pour ça que vous ne quittiez pas votre maison ?
Le nain opina. Il essuya la morve lui dégoulinant du pif avec sa manche, renifla un grand coup.
— Et que s’est-il passé ? Elle s’est enfuie ?
— Oh, non. C’est pire, maître-lame. J’étais dans les bois, et je la laissais aller. Les animaux doivent batifoler un peu. Mais alors, une bête nous a attaqués.
Dessoulant presque sous la mention d’une créature, Stivassian sentit ses muscles se raidir.
— Quel genre de bête ?
— Je ne sais pas. Je n’ai vu qu’une ombre fondre du ciel. Elle s’est cachée entre les arbres et a commencé à cracher des flammes, en rugissant comme un démon. J’ai pris mes jambes à mon cou, en me disant que Roselia me suivrait… mais elle est restée dans la forêt. Je l’ai attendue, je le jure, mais je devais rentrer. Si on ne m’avait pas vu au matin, on se serait inquiété. Mais j’ai peur pour ma Roselia, maître-lame… si cette bête venait à s’en prendre à elle…
Stivassian se décida sur le champ.
— Lorio, allez seller mon cheval. Je vais chercher mon épée.
Stivassian allait donc se jeter à l’assaut d’une bête inconnue, pour sauver un chaton perdu. L’appel à l’aide du nain l’avait ému, et le mercenaire allait donc y répondre, bon seigneur sur son destrier, le cœur grand et sur la main.
Du moins, c’était ce que Stivassian voulait bien penser, jusqu’à ce qu’il arrive à l’orée de la forêt, après un puissant galop. Il réalisa soudain qu’accepter une mission sous l’effet de l’alcool n’était pas la marque des chevaliers purs, mais plutôt des idiots qui connaissaient souvent une fin d’idiot. Qu’à cela ne tienne, il était là, devant ces bois sombres. Il dut s’y reprendre à deux fois, avant d’apercevoir un chemin sur lequel il ordonna à son cheval d’avancer. La bête alla d’un pas lent, renâclant, l’air le terrifiant. Un brouillard noir enveloppait le cavalier, dissimulait le chemin. Stivassian sentit sa tête commencer à tourner, et il se rendit compte que ce n’était pas le contrecoup du vin. Il savait que c’était autre chose, mais il n’arrivait pas à mettre le doigt dessus.
Ce ne fut que quand des bourdonnements commencèrent à retentir entre ses deux oreilles, qu’il comprit à quoi il avait à faire. À ce moment-là, une grande ombre plana dans le ciel, éclipsant les étoiles et la lune un instant. Elle s’engouffra entre les arbres, passant entre les troncs. Le rugissement d’une puissante créature s’éleva, une gerbe de flammes surplomba les feuilles, semblant incendier la nuit. La monture de Stivassian hennit, se cabra, jeta son cavalier. Le canasson partit au pas de course dans la direction opposée, la frayeur le transformant en un trait sombre qui s’évanouit. Stivassian, le cul dans la poussière, se releva en maugréant, et hurla d’une voix rageuse :
— Si tu remontres tes sabots par ici, tu finiras en saucisson !
Mécontent, les bourdonnements devenant presque douloureux, le mercenaire se tourna vers les flammes. Elles avançaient vers lui, consumaient tout sur leur passage, les arbres se transformant en cendres en une fraction de seconde. Pourtant, le jeune homme n’eut pas peur. Au contraire, il avança, franchit le mur de flammes sans difficulté.
— Tes illusions ne me font pas peur, mage !
Le feu disparut immédiatement, rendant à la forêt son calme habituel, intouché. Le mercenaire s’avança encore, vers un fourré, où il avait aperçu la forme sombre avant le brasier. Il y a trouva un long châle noire, du bon tissu filé avec soin.
— Montre-toi, hurla Stivassian.
Comme pour lui répondre, deux arbres s’arrachèrent de terre, les longues racines frappant le sol pour les éloigner l’un de l’autre. Dans l’espace dégagé, une vieille femme apparut. Elle tournait et retournait sans cesse un long bâton dans un énorme chaudron. À la surface de celui-ci, une eau brunâtre bouillonnait, des ossements humains surnageant du bouillon.
— Viens, viens, jeune homme, fit la voix aigüe de la vieille. Je te couperai en morceaux, et te jetterai dans mon ragoût.
Stivassian ne répondit pas, se contentant de hurler aux feuillages noirs au-dessus de lui :
— Je t’ai dis que je n’avais pas peur !
La vieille disparut, son ragoût en fit autant, et il ne resta là que les deux arbres, qui n’avaient pas bougé d’une feuille.
— Qui es-tu, pour oser pénétrer mon domaine ?
Stivassian sentait les bourdonnements dans son crâne, signe qu’on usait de la magie près de lui, diminuer. La voix, au lieu de venir de toutes les directions, semblait désormais faible, murmurante, toute proche. Stivassian scruta les alentours, à la recherche du mage.
— Que viens-tu faire ici, fit la voix, dont Stivassian pouvait maintenant dire qu’elle appartenait à une femme ?
— Je viens aider un ami dans le besoin. Je n’ai aucune intention de me battre.
— Alors, jette ton épée.
Stivassian ne se demanda même pas si c’était une bonne idée. Il obéit. Au moment où l’épée toucha le sol, le tapis de feuilles à ses pieds se mit à se mouvoir. Il se souleva, goba la lame, et partit au loin. En suivant la course des yeux, le mercenaire vit la flamme d’une torche briller, au plus profond du brouillard. Sans se poser de question, il avança vers elle… et tomba.
Il heurta le sol, la chute de trois mètres dans la fosse ne lui laissant même pas le temps de pousser un juron. Le nez dans la poussière, il releva le visage, cherchant la lueur. Il la vit, un petit brasero installé aux pieds de la magicienne. Celle-ci était assise, sur un trône de branchages et de feuilles, le regard posé sur Stivassian, le jugeant. Le mercenaire se releva, examina sa situation. La fosse dans laquelle il se trouvait était un large trou, creusé grossièrement dans le sol. Dans le métier, on appelait ce genre de trou un piège à con, ce que Stivassian, en ce moment, était.

Arduilanar Arduilanar
MP
Niveau 10
15 avril 2016 à 19:29:23

Je commente comme promis. :-)

Commençons par l'essentiel : j'ai beaucoup, beaucoup aimé. J'ai retrouvé beaucoup de ce qui m'avait séduit dans l'univers du Sorceleur, dans un ton assez léger qui rappellerait plutôt les premières aventures de Geralt (dont on retrouve la structure d'ailleurs), et l'exercice est une franche réussite. :oui:

Je me suis quand même dit à un moment que tu avais fait un drôle de choix, en développant un monde à ce point inspiré de celui de Sapkowski ; je me disais qu'au point où tu en étais tu pouvais largement placer ton texte dans le même univers que le Sorceleur. Cependant c'était s'ouvrir au risque de tomber dans le fan-service ; et même si le héros de cette nouvelle est plus ou moins un Geralt bis, plus courtois et plus humain, cela te laisse la latitude de développer d'autres récits moins sorcelliens par la suite.
J'ai un peu coincé sur le fait d'introduire des éléments de l'univers réel, comme j'avais dû te le signaler à ma première lecture. Ça me chiffonne un peu, sur la question de la cohérence, de te voir introduire dans ton monde une Eglise chrétienne telle quelle ; après, ce n'est pas un aspect très présent dans ton texte, donc ça ne m'a pas tant dérangé au final, mais sur le principe je n'aime pas trop le mélange des genres.

Il y aurait aussi quelques perfectionnements à faire concernant la structure, surtout en ce qui concerne les transitions entre le présent et les souvenirs. Elles sont parfois un peu confusionnantes. :o))
Quelques fautes d'inattention qui traînent, mais comme je ne les ai pas notées je ne vais pas m'étendre dessus.

Dernier point, j'ai trouvé dommage que tu laisses complètement dans le flou la nature de la créature affrontée dans la dernière partie. Soit c'est une bestiole connue, auquel cas j'imagine que Stivassian l'aurait nommée, soit comme il me semble plutôt c'est un animal qui n'avait jamais été rencontré auparavant - et personne ne s'interroge sur son origine ? Cela aurait sans doute mérité un petit développement.

En dépit de ce que je fais remarquer, donc, j'ai vraiment beaucoup apprécié ma lecture, et je lirai avec plaisir d'éventuels autres textes dans le même monde. Bravo l'artiste. :-)

FatuiteR FatuiteR
MP
Niveau 10
16 avril 2016 à 08:57:57

Merci de la lecture :-)

Je prépare effectivement un texte dans le même univers, en suivant toujours Stivassian + un side-kick aux pieds poilus. Pour la dernière créature (le lion si j'ai bien compris), l'inspiration vient du lion de Némée, or si je l'avais nommé tel quel, incohérence au niveau de l'univers (puisque Némée n'existe pas dans ce monde).

Merci encore :-d

Arduilanar Arduilanar
MP
Niveau 10
16 avril 2016 à 14:36:09

Oui je parle bien du lion. Je trouve qu'il manque une remarque pour dire soit que Stivassian a reconnu ce que c'était, soit qu'il s'interroge sur ce que c'est. :oui:

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