Il suffit de jeter un œil à Disc Jam pour constater que le studio indépendant High Horse Entertainment, créé sous l’impulsion de deux ex-employés d’Activision, tire son inspiration de deux jeux : Windjammers et Rocket League. Le premier est un jeu de duel sportif au frisbee sorti dans les années 90. Nombre de joueurs ont claqué bien des piécettes pour y jouer sur borne d'arcade Neo Geo, avant qu'il ne débarque sur la console de salon du même nom, animant alors les longues soirées d’hiver entre amis grâce à son gameplay nerveux en versus. Le second est bien parti pour laisser une empreinte similaire. Grâce à son concept simple, sa prise en main immédiate et son format "parties courtes", la pépite de Psyonix est un exemple de réussite. À première vue, Disc Jam pourrait marcher sur ses plates-bandes. Mais en est-il réellement capable ?
Come on and Jam
Pour les joueurs les plus anciens, le gameplay de Disc Jam, sorte de mix entre tennis et air-hockey, leur sera extrêmement familier. En 1v1 ou 2v2, votre objectif est de lancer un disque dans le décor derrière votre adversaire, exactement comme dans Windjammers. Vu que les jeux d’arcade de ce genre se font rares désormais, autant vous dire qu’on ne va pas blâmer High Horse Entertainment d’avoir repris ce concept de base, d’autant plus lorsqu’ils le modernisent. Disc Jam offre un gameplay certes simple et rapide à prendre en main (du moins à la manette, on vous déconseille de tenter le combo clavier / souris), mais efficace et surtout technique.
Avant de vous mesurer à d’autres joueurs, il faudra passer par une phase de tutoriel plutôt bien menée afin d’affûter vos réflexes et votre précision, dans l’optique de peaufiner vos lancers et réceptions. Il est important de renvoyer le disque le plus rapidement possible, le bon timing permettant de déployer des tirs "parfaits", plus rapides, ou encore une attaque spéciale difficilement arrêtable. Vous pouvez activer un bouclier afin de bloquer un tir, et selon votre placement, le renvoyer à la volée ou en l’air pour riposter avec un tir puissant.
La palette de lancers qui s’offre à vous ("lob", "lift", "curve"… on est en terrain connu) rend le tout imprévisible et agréable à jouer, voire même à regarder, lorsque les échanges s’éternisent et que le rythme s’accélère. Faire rebondir le disque de façon intelligente sur les murs peut rendre la réception presque impossible à vos adversaires, et c’est autant une question de réaction rapide que d’anticipation des mouvements de vos adversaires.
La guerre des disques
Chaque personnage (quatre à la sortie du jeu) est différent par rapport aux autres en matière de vitesse et de puissance. Même si certains d’entre eux sortent clairement du lot, ils sont chacun agréables à contrôler. Maîtriser l'art du dash sera primordial afin de vous déplacer efficacement sur le terrain et attraper le disque dans certaines situations périlleuses. Les matches se déroulent en deux sets gagnants, 50 étant le chiffre magique à atteindre pour remporter une manche. Plus une joute est longue, à chaque fois que le disque passe de l'autre côté du terrain en réalité, plus le nombre de points que l'on marque au terme d'un échange est important (sur une base de cinq, dix pour un "ace"), et c'est bien là où Disc Jam devient passionnant. Un joueur (ou une équipe) n’est jamais loin d’un comeback venu de nul part. Surtout, il n’y a rien de plus gratifiant que de marquer 30 points d’un coup après un échange intense qui vous a scotché sur votre fauteuil.
Alors oui, vos premières parties ressembleront sans doute à une parodie de tennis, mais une fois le gameplay assimilé, Disc Jam devient bien plus qu’un simple jeu fun de sport. On se prend rapidement à la compétition, surtout entre amis. C’est typiquement le genre de jeu qui vous pousse à hurler des obscénités de temps en temps lorsque vous ratez une simple réception de disque, ou quand votre coéquipier n’a pas bien couvert son côté du terrain et que vous encaissez des points bêtement (uniquement à cause de lui, bien entendu). Un mode offline permet de jouer en écran scindé jusqu’à quatre joueurs, et il y a même la possibilité de créer des parties en LAN.
Le disque qui tourne en boucle
C’est lorsque l’on essaye de creuser plus profondément et de découvrir l’étendue du contenu proposé par Disc Jam que l’on constate qu’effectivement, on tient ici la création de deux personnes seulement. En d’autres mots, on en fait si vite le tour qu’il faut être motivé pour enchaîner les parties, notamment en solo. Pour son lancement, le jeu se montre peu généreux et ne dispose que d’un seul stade, d’ailleurs dépourvu de public, un simple détail qui pourrait compenser la direction artistique quelconque. Il n’y a pas d’angles de caméra alternatifs, aucun mode spectateur ou même de mode solo / arcade contre une IA, et les textes sont uniquement en anglais. Quant aux graphismes, disons qu’ils sont suffisants mais pas particulièrement réjouissants non plus, malgré l’usage de l’Unreal Engine 4.
Ce ne sont pas les éléments cosmétiques rachitiques (tags, emblèmes, skins de personnages et de disques…), déblocables en dépensant des points (accumulables rapidement en terminant quelques parties) dans une machine type « gashapon » qui suffiront à motiver les joueurs à éprouver le matchmaking. Par ailleurs, sachant qu’aucun mode classé n’existe, ce dernier vous trouve un adversaire sans prendre en compte le niveau des joueurs, donnant régulièrement lieu à des parties déséquilibrées.
Un mal pour un bien finalement : étant donné qu’il n’y a pas de crossplay entre les versions PC / PS4 et que High Horse Entertainment a sorti son titre dans une relative discrétion, la recherche de partie peut s’avérer longue. Plus gênant encore : le jeu n’a pas de serveur dédié, petit budget oblige, et fonctionne donc en peer to peer, ce qui rend évidemment certaines parties injouables lorsqu’une personne habitant au fin fond d’un trou paumé et jouant sur un toaster a la bonne idée d’héberger une partie.
Potentiel à développer
Après avoir lu cette dernière partie, vous devez certainement penser que le jeu qui risque de vous faire abandonner Rocket League, ne serait-ce que quelques jours, n’est pas encore né. Compte tenu de son modèle économique (payant à l’acquisition pour une quinzaine d’euros), cette accumulation de défauts peut en rebuter plus d’un lorsqu’il faut passer à la caisse. Pourtant, en comblant ses lacunes, Disc Jam a tout pour durer et fidéliser une communauté tant son concept de base est intéressant, notamment d’un point de vue eSport.
Espérons simplement que les modes compétitif et spectateur arrivent rapidement afin de relancer l’intérêt. Une chose aussi basique qu’un replay instantané après les plus beaux échanges rendrait le tout déjà moins cheap. Les développeurs ont annoncé que la plupart des ajouts précédemment cités devraient arriver au compte-gouttes, à grands coups de mises à jour gratuites, alors laissons-lui au moins le temps de grandir.
Points forts
- Fun immédiat
- Gameplay technique mais rapide à prendre en main
- Le plaisir de jouer au "successeur spirituel" de Windjammers
- Une base solide qui ne demande qu'à se consolider
Points faibles
- Il faut être patient pour trouver une partie
- Online en P2P
- Manque d'identité / direction artistique peu inspirée
- Expérience solo limitée
- Contenu trop pauvre au lancement
Disc Jam est loin d’être un mauvais jeu. Son concept de base suffit à justifier l’achat si vous cherchez un titre pour animer vos soirées entre potes sans pour autant vous ruiner, mais son manque flagrant de contenu l’empêche d’être (pour le moment en tout cas) un incontournable. Il possède tous les ingrédients de base pour devenir un classique, mais il semble tout simplement être sorti de cuisine trop tôt. Finalement, ce jeu pourrait bien être l’équivalent de Supersonic Acrobatic Rocket-Powered Battle-Cars (le prédécesseur de Rocket League, sorti en 2008) pour High Horse Entertainment. Il n'y a plus qu'à l'espérer, car si c’est le cas, on a hâte de voir ce qu’ils vont nous proposer dans le futur.