L'impensable vient d'arriver ! Nintendo, la compagnie familiale par excellence, sort de son image toute propre toute belle pour accueillir à bras ouverts Conker's Bad Fur Day, la nouvelle production des studios Rare. Véritable provocation à la morale et au bon goût, le jeu ne plaira pas à tout le monde et s'adresse avant tout à un public mature. Je vous aurais prévenu.
Avant de poursuivre, je me dois de rappeler ce que je disais en introduction, Conker's Bad Fur Day ne s'adresse pas à tout le monde. Il a beau être présenté dans un univers enfantin très mignon, le jeu n'en est pas moins grossier, violent, voire carrément gore. Je ne le répéterai plus donc tenez-vous le pour dit.
Ce n'est pas vraiment la première fois qu'un jeu craignos débarque sur une machine Nintendo. Je ne citerai qu'un exemple : Boogerman. Sorti uniquement aux Etats-Unis sur Super Nes (encore disponible sur le net), il mettait en scène un super héros qui se battait à coup de pets et de jets de morve. Ce jeu représentait pour moi la référence ultime en matière de mauvais goût jusqu'à ce que débarque enfin en France Conker's Bad Fur Day. Ce titre parvient à balayer d'un seul coup toute les bonnes valeurs qu'à tenté de nous inculquer la firme japonaise depuis tant d'années. Pour histoire, sachez que ce jeu a d'ailleurs failli ne jamais sortir en Europe et c'est grâce à une pétition sur le net que nous pouvons aujourd'hui en profiter - le jeu est quand même édité par THQ et non par Nintendo ! Comme quoi, les pétitions peuvent parfois fonctionner.
Conker, c'est le nom d'un écureuil déjà apparu sur Game Boy il y a quelques années, dans une production plutôt enfantine. Pour son apparition sur N64, Rare, le développeur du jeu, a décidé de changer la donne et de modifier la cible du jeu. Ce qui s'annonçait comme un clone de la série Banjo-Kazooie est alors devenu un soft totalement barré à l'humeur gras et ravageur beaucoup plus proche de Michel Muller que des Monty Pythons par exemple. J'imagine très bien les scénaristes du jeu autour d'une table, des cadavres de bières à leurs pieds, balançant chacune de leurs idées sans la moindre notion de censure. Et leur délire est allé vraiment très loin. Une montagne de caca mélomane à qui il faut faire avaler des rouleaux de papiers toilettes, des monstres enflammés qu'il faut éteindre en urinant sur eux ou encore un robot géant qu'il faut castrer à grand coups de briques. Les situations sont aussi diverses et variées que d'un goût plus que discutable. En tout cas, on ne s'ennuie pas une seconde et c'est bien là le principal, non ?
L'aventure commence dans un pub où Conker se plaît à retrouver ses amis. Ce soir, il a comme d'habitude trop poussé sur la boisson et l'écureuil peine à retrouver le chemin de sa maison. Votre premier objectif sera de lui trouver de quoi le remettre en forme. Cela ne devrait pas vous prendre trop longtemps car ceci ne sera que le début d'une longue liste de péripéties pour ce brave Conker. Il devra entre autres échapper aux fouines qui le cherchent pour remplacer un pied de table (!), retrouver sa copine Berri ou libérer une grange de l'emprise d'une botte de foin bionique. Un scénario bien débile dans lequel les événements s'enchaînent à une vitesse folle.
La motivation première de Conker dans la vie se résume à trouver un maximum d'argent (un peu comme moi, tiens). L'écureuil est tellement assoiffé de fric qu'il est prêt à tout pour quelques billets verts. C'est d'ailleurs ce qui le pousse à accepter d'aider les personnages qu'il rencontre. A l'instar d'un Banjo, la progression n'est pas linéaire. Les niveaux sont tous reliés entre eux et libre à vous de naviguer de l'un à l'autre sans trop de soucis. On a vraiment l'impression d'évoluer dans un univers cohérent. Loufoque mais cohérent. Si on se retrouve bloqué à un endroit, il est souvent possible de rebrousser chemin pour aller s'occuper ailleurs. Une fois l'aventure principale terminée, vous pourrez bien sûr profiter des nombreux modes multi-joueurs tous plus tordants les uns que les autres. Combat de tank, cambriolage de banque, débarquement à la Soldat Ryan... on reconnaît aisément la patte de l'éditeur, le roi du multi-joueurs sur Nintendo. De bonnes parties entre copains sont à prévoir !
Tous les niveaux sont truffés de socles appelés « context sensitive » ou en français les zones de contexte. Chaque context sensitive a une fonction différente qui dépend directement de l'endroit et de la situation dans laquelle vous vous trouvez. Par exemple, la première du jeu vous donnera une bonne aspirine pour aider Conker à se débarrasser de sa gueule de bois alors qu'une autre lui offrira un joli bâton de dynamite pour dégager le chemin. On ne sait jamais de quoi on hérite en les activant. On navigue de surprises en surprises et c'est ce qui fait certainement le charme du jeu. De plus, Conker's Bad Fur Day regorge d'allusions cinématographiques. La fabuleuse intro s'inspire de celle du très célèbre Orange Mécanique, la spectaculaire prise d'assaut d'un immeuble rappelle le non moins spectaculaire Matrix... j'en passe et des meilleures. Les citer toutes serait bien trop long et je préfère vous laisser la joie de les découvrir par vous-mêmes.
Conker's sera sans doute le dernier gros Blockbuster de la N64 et pour rendre un ultime hommage à la console, les équipes de Rare se sont déchirées afin de réaliser le plus beau jeu de la machine. Les graphismes explosent de mille couleurs et il n'y a plus aucune trace de brouillard ni d'effet de flou qui sévissaient dans les anciens jeux N64. La bande son est tout aussi magnifique. Les dialogues sont entièrement parlés (en anglais, sous-titrés en anglais) est débordent de grossièretés. Les gros-mots « les plus grossiers » sont quand même censurés et sont remplacés par des bips sonores et des @?*$ à l'écran. Cela dit, on comprend tout à fait ce qu'ils veulent dire et souvent les insultes vont tellement loin qu'on a du mal à croire que l'on joue sur N64. Et pourtant, c'est bel et bien sur cette console que tourne ce jeu vraiment pas comme les autres. Vivement une suite sur Gamecube
- Graphismes19/20
Un véritable tour de force de la part des graphistes. Les couleurs déchirent l'écran et les nombreuses animations de Conker ne souffrent d'aucun ralentissement. La console n'en a plus pour très longtemps à vivre, dans un dernier souffle, elle nous offre le plus beau jeu de sa ludothèque.
- Jouabilité18/20
Rare n'a plus rien a prouver question maniabilité. Tous ses jeux nous ont démontrer l'incroyable efficacité de leur jouabilité. Conker suit le mouvement : la jouabilité est exemplaire.
- Durée de vie19/20
L'aventure principale est assez grande pour vous faire baver de longues heures devant l'écran. En plus les nombreux modes multi-joueurs prolongent admirablement la longévité du jeu.
- Bande son19/20
Je ne pensais pas que la N64 était capable d'une telle bande son. Toutes les rencontres donnent lieu à des dialogues entièrement parlés. C'est vrai qu'on aurait apprécié les entendre en français (ou au moins avoir les sous-titres en français), mais force est de reconnaître qu'ils sont d'excellente qualité. Les musiques et bruitages tirent aussi profit du savoir faire des programmeurs.
- Scénario17/20
Le scénario principal n'est pas des plus complexes, mais il a le mérite d'être très original. De plus, de nombreuses quêtes secondaires parsèment le parcours de l'écureuil ce qui fait que l'on ne s'ennuie pas une seconde.
Conker's Bad Fur Day est sûrement le meilleur jeu de la N64. En tous cas il est ce qui pouvait arriver de mieux à Nintendo pour l'aider à se sortir du moule familial dans lequel il s'était enfermé. Merci Rare de nous offrir une fois de plus un jeu magnifique tant au niveau de l'intérêt que de la réalisation et merci THQ d'avoir pris le risque de l'éditer en Europe, il fallait oser.