Salut à tous, voilà une très courte nouvelle qui parle du mythe des Haschichins du moyen-orient et qui peut trouver dans l'actualité un écho intéréssant. C'est très différent de ce que je fais d'habitude, j'espère que ça vous plaira.
Pour une meilleure expérience de lecture, je vous conseille d'écouter ça en même temps : https://www.youtube.com/watch?v=QzMsoz4XIkM
N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez. Bonne lecture.

Les Haschichins

Durant le grand chiisme, il y avait cet homme que l'on appelait « Le Vieux de la Montagne ». Il s'agissait en fait d'Hassan-i Sabbâh, le chef charismatique des ismaéliens. Il régnait en maître sur une petite communauté chiite, perdue en Perse et isolée au beau milieu d'une région sous la tutelle de vizirs sunnites.

Vaillament, néanmoins, cette mystérieuse communauté résistait à l'oppression dont elle était constamment victime. Les combats qu'elle engageait, à coup sûr, elle les gagnait. On disait qu' un Haschichin avait éliminé le grand vizir Nizâm Al-Mulk ! Ainsi, ce groupuscule étrange, animé par une foi que nul homme digne n'avait jamais su éprouver à ce point, séduisait de plus en plus de jeunes gens.

Une rumeur circulait.

On disait du Vieux qu'il disposait de pouvoirs magiques, dispensés par le Très-Haut en personne.

Un jour, un jeune garçon insatisfait du régime qui le soumettait, lui et sa famille d'agriculteurs, à une extrême rigueur économique, tenta sa chance. Il gravit la montagne et gagna la gigantesque forteresse d'Hassan-i Sabbâh.

Une somptueuse demoiselle, presque nue, portant à ses seins et à son aine une parure dorée, vint lui ouvrir. Dérouté, ne sachant comment s'y prendre, le jeune homme exigea de voir le chef. Non pas qu'il manquait de politesse ou de déférence. Simplement, sa détermination et sa timidité ne faisaient pas très bon ménage, il avait dû mal à communiquer d'une manière raisonnable.

Fort heureusement, la magnifique demoiselle ne s'en formalisa pas. Elle somma le jeune garçon d'attendre ici, dans ce hall gigantesque, comme taillé dans la pierre. Un lieu si grand et si haut qu'il en devenait froid.

Ainsi, tournant en rond, détaillant avec envie la précision chirurgicale des motifs hypnotiques creusés dans les murs, il attendit. Une heure, deux heures... il commençait à perdre patience. Cependant, il continua d'attendre.

Il ignorait que le Vieux de La Montagne l'observait. Cette épreuve consistait en la première phase d'un processus secret. Le jeune garçon, porté par sa volonté et par le sentiment qu'était venu l'heure d'accomplir sa destinée, dormit ici. Dans le hall glacial, sans personne à qui parler, seul face à lui-même, il eut maintes fois l'idée de rebrousser chemin. Il s'était endormi cependant, tout tremblotant, sans une couverture pour lui tenir chaud.

Le lendemain, la ravissante créature qui l'avait accueillit, vint le cueillir. La faim le tiraillait. Il n'avait rien avalé depuis deux jours, sinon quelques dates sèches. Elle le convia à le suivre ; le Vieux de la Montagne était disposé à le rencontrer.

Bien qu'affaibli, le garçon recouvra subitement tout sa vigueur. Il emboîta le pas de la jeune femme, se focalisant sur le gigantisme des voûtes plutôt que sur les sinueuses courbes de cette diablesse en pagne clinquant.

Le Vieux était un homme simple. Sans turban, sans faux-semblants... à mille lieux des vizirs rutilants, empoisonnés par la cupidité. Le garçon fut ravit. On ne lui avait pas mentit. Hassan sourit dans sa barbe et l'invita à sa table.

Une table immense, pouvant accueillir une cinquantaine de personnes, au moins. De là ou il était assis, le garçon jouissait d'un panorama improbable, offrant à sa vue des étendues rocailleuses et toute cette verticalité qui lui donnait presque le tournis. Des nuages voilaient les villages d'en-bas. Là d'où il venait. Il n'y croyait pas. Il était dans cette forteresse sur laquelle tant de langues -bonnes ou mauvaises- s'exercaient à longueur de journée.

À deux, ils parlèrent longuement. Derrière eux, des hommes minces et suant se relayaient pour nourrir une cheminée qui suffisait à peine à réchauffer l'improbable demeure. Le garçon évoqua sa volonté d'en découdre, sa soif d'aventure, sa foi inébranlable et ses questionnements sur le vrais sens de la vie. Les martyrs avaient fait beaucoup pour lui. Il voulait en être aussi, pour sauver sa famille.

Le Vieux hochait la tête sans jamais s'en défaire de cet énigmatique sourire dans sa barbe. Après quelques heures, quand l'estomac de sa nouvelle recrue se mit à résonner dans l'enceinte, il fit venir un repas.

Un véritable festin. Des viandes succulentes, finement mijotées, des pains, des soupes, des figues, du thé... cela correspondait, pour le garçon, à une dizaine de repas, peut-être même à une semaine entière de nourriture, pour lui et toute sa famille !

Le vieux le regardait. Tous les mets avaient été truffé de haschich.

Une fois repu, le garçon s'affala dans son siège. La nourriture avait apaisé son esprit. Sa hargne s'envola peu à peu, sans qu'il sache pourquoi. Son bonheur tenait-il à quelques victuailles raffinés ? Il était si brave et si droit que sa réaction le décevait un peu.

Mais le Vieux lui dit de ne pas s'en faire. Il lui dit que c'était normal. Puis il lui demanda de se lever, de fermer les yeux et de mettre ses mains devant, pour être sûr. Alors qu'il s'éxecutait, il sentit l'odeur sucrée de la divine demoiselle. Elle lui passa un doux foulard autour du crâne, lui prit la main et l'emmena quelque part.

Lorsqu'elle enleva le foulard. Le garçon fut frappé de plein fouet par toute cette beauté qui le submergeait.

C'était un jardin baigné dans les rayons du soleil, avec partout des plantes luxuriantes et vertes, irriguées par de délicieux ruisseaux qui ronronnaient autour, sous, devant et derrière lui. Il n'en revenait pas et le bien-être qui engourdissait ses membres lui donnait la sensation de voler.

Là, des jeunes femmes émergèrent de tous côtés. Elles étaient d'une douceur et d'une splendeur à faire blêmir de jalousie cette servante qui l'avait invité à le suivre précédemment. Elles portaient de grandes amphores pleine de vin.

Il but à grandes goulées tout ce qu'on lui proposait, honora chaque jeune femme, caressa chaque plante, mangea chaque fruit et embrassa chaque parcelle de ce jardin luxuriant.

Quand il eut tout consommé, des renforts arrivèrent et il recommenca, encore et encore, jusqu'à l'épuisement de son corps. Acculé par tant de volupté, il s'effondra dans l'herbe humide.

À son réveil, il eut froid de nouveau. Il se trouvait assis là, dans le salon du festin. Face à lui, le Vieux, souriant, bienveillant, les mains croisées sur la table de banquet.

Terrifié, le garçon éructa. La folie le guettait. Était-ce un simple rêve ? Non, infirma le Vieux de la montagne. C'était un avant-goût de ce qui t'attend dans l'autre monde. C'est dans ce jardin que résident les martyrs, poursuivit-il, et si tu sais faire preuve de suffisament de courage et d'abnégation, tu y parviendras, toi aussi. Pour toujours et à jamais.

Quelques mois plus tard, le garçon emporta avec une centaine d'innocents avec lui, un jour de marché. Plus jamais il ne connaîtrait l'horreur et la pluie.

Si c'est censé être historique, comment il fait pour tuer cent innocents d'un coup ? Ils avaient pas encore de ceintures d'explosifs, si ?

Le 26 novembre 2015 à 22:10:12 Arduilanar a écrit :
Si c'est censé être historique, comment il fait pour tuer cent innocents d'un coup ? Ils avaient pas encore de ceintures d'explosifs, si ?

Je n'ai pas parlé de ceinture d'explosifs, Gandalf

MER C 1 ALLER GO RIZ .
Okay, j'arrête, je vais lire...

Blague à part, j'aime bien le ton. C'est léger, et la fin tombe à pic comme une brique lancée du dixième étage dans une poussette ... Pas grand chose à en dire, sinon que ça change de ce que j'avais l'habitude de lire de toi, un autre registre avec toujours cette pointe acerbe dans le propos, en arrière-fond... T'es vraiment en colère dans le fond, quand même ...

Bah du coup, justement, comment est-ce qu'il fait ses victimes ?
À l'arme blanche, à l'arc ou à la fronde, c'est long de tuer cent personnes. Je parlais de la ceinture d'explosifs pour rire, mais même si la poudre noire est connue depuis longtemps, je crois quand même qu'on ne lui a pas développé d'applications de ce genre avant un long moment.
Sinon il faut mettre le feu à un bâtiment où sont enfermés des gens, mais ce n'est pas ce que tu suggères par "un jour de marché".

Donc je réitère ma question : comment ton assassin s'y prend-il ? Qu'est-ce qu'on est censé déduire de la lecture sur les moyens employés ?

Le 27 novembre 2015 à 12:56:51 Arduilanar a écrit :
Bah du coup, justement, comment est-ce qu'il fait ses victimes ?
À l'arme blanche, à l'arc ou à la fronde, c'est long de tuer cent personnes. Je parlais de la ceinture d'explosifs pour rire, mais même si la poudre noire est connue depuis longtemps, je crois quand même qu'on ne lui a pas développé d'applications de ce genre avant un long moment.
Sinon il faut mettre le feu à un bâtiment où sont enfermés des gens, mais ce n'est pas ce que tu suggères par "un jour de marché".

Donc je réitère ma question : comment ton assassin s'y prend-il ? Qu'est-ce qu'on est censé déduire de la lecture sur les moyens employés ?

Lol, plus sérieusement, comme dit Marty, c'est plus allégorique qu'autre chose. En t'attardant sur ce genre de détail, tu esquives le problème (encore ce lien avec ta vie sexuelle) et tu outrepasses le divertissement de la fiction.

Tu es censé en déduire ce que tu veux. Le mec est drogué, possédé, il est prêt à tout. Un jour de marché, cent personnes, c'est assez compact. Je sais pas, un stand, des fruits empoisonnés en dégustation.... tu ne peux pas me blâmer pour ton manque d'imagination, quand même

Le 27 novembre 2015 à 12:13:53 --crazymarty-- a écrit :
Blague à part, j'aime bien le ton. C'est léger, et la fin tombe à pic comme une brique lancée du dixième étage dans une poussette ... Pas grand chose à en dire, sinon que ça change de ce que j'avais l'habitude de lire de toi, un autre registre avec toujours cette pointe acerbe dans le propos, en arrière-fond... T'es vraiment en colère dans le fond, quand même ...

Ben oui, j'ai la haine, j'ai honte d'être humain franchement.
Après, pour le coup, ici c'est plutôt ma fascination pour l'occulte et pour la manipulation mentale qui entre en jeu.

Ma vie sexuelle, quoique n'existant que sur un plan théorique et abstrait, te dit merde.

Je suis simplement déçu par la conclusion de ton texte. J'ai plutôt apprécié la lecture, notamment l'effort pour replacer l'action dans un contexte historique, même si c'est un thème déjà usé à maintes reprises. Mais le final est trop peu vraisemblable dans sa forme, et il n'apparaît en fin de compte que tout ça n'est qu'un sous-entendu grossier aux formes plus récentes du terrorisme, et c'est dommage.

Je suis sûr que tu pouvais trouver autre chose, pour parvenir à tes fins, que de faire mourir cent innocents un jour de marché, mode d'action qui rappelle bien trop les événements récents et parait au contraire tout à fait déplacé dans un contexte médiéval. On aurait quand même su faire le rapprochement, hein, de toute façon en ce moment cela occupe tous les esprits.
Mais je vois que tu n'apprécies pas que l'on se permettre de discuter tes choix scripturaux, donc je n'insiste pas d'avantage.

Le 27 novembre 2015 à 16:48:04 Arduilanar a écrit :
Ma vie sexuelle, quoique n'existant que sur un plan théorique et abstrait, te dit merde.

Je suis simplement déçu par la conclusion de ton texte. J'ai plutôt apprécié la lecture, notamment l'effort pour replacer l'action dans un contexte historique, même si c'est un thème déjà usé à maintes reprises. Mais le final est trop peu vraisemblable dans sa forme, et il n'apparaît en fin de compte que tout ça n'est qu'un sous-entendu grossier aux formes plus récentes du terrorisme, et c'est dommage.

Je suis sûr que tu pouvais trouver autre chose, pour parvenir à tes fins, que de faire mourir cent innocents un jour de marché, mode d'action qui rappelle bien trop les événements récents et parait au contraire tout à fait déplacé dans un contexte médiéval. On aurait quand même su faire le rapprochement, hein, de toute façon en ce moment cela occupe tous les esprits.
Mais je vois que tu n'apprécies pas que l'on se permettre de discuter tes choix scripturaux, donc je n'insiste pas d'avantage.

Non, pas du tout, au contraire, sinon je ne posterai pas ici... c'est juste que, comme tu as articulés ta première réponse en mode un troll gentillet, j'ai voulu renchérir, c'est tout

Oui la fin est facile, c'est vrai. Elle aura l'effet escomptée sur certains (Marty) et chez les plus érudits, elle décevra, parce que ne proposant aucune ouverture, ne donnant aucune piste. C'est véridique. Je l'assume. C'est une nouvelle tout ce qu'il y a de plus factuel.

Malgré le fait que j'ai dû me concentrer pas mal, parce que je n'ai du tout l'habitude d'écrire ce genre de truc, entre la "fable" (conte ?) et le récit historique, ce n'est pas une nouvelle très fine ou très ambitieuse. Le rapport avec les jihadistes est plus qu'évident, ce n'est même pas un rapport, c'est plus que ça, les deux concepts sont liés.

Mon vrai postulat, comme je l'ai dis plus haut, c'est plutôt la fascination qu'exerce sur moi cette puissance de manipulation psychique qu'utilisait le Vieux pour transformer ses soldats (victimes) en machine de guerre. On est ici à la base même du terroriste moderne.

Alors, en soit, la chute coulait de source. J'aurai pu affiner cette simple phrase de fin qui sonne un peu trop cinglante. j'aurai pu narrer l'exécution d'un templier (leurs cibles) mais là il aurait fallu que je fasse des recherches, etc... et ce n'est pas trop ce que j'aime faire en littérature.

Mon ambition était juste de présenter une légende historique que j'ai trouvé assez excitante, sur le coup.

Le "certain" te conchie, mon amour ...

J'ai lu. Pas mal
Le Digeredoo était une bonne idée pour accompagner ton texte ~ ~

♫♫ OUIN, OUAIW, UINUINUIN ♫♫ ~ ~

Comme certains l'ont souligner, le rapport avec les terroristes actuels viennent... agacer, déranger. Cependant, si on fait abstraction du contexte, ta nouvelle est très bonne. Je suis certain que, si ce ne serait pas des histoires des Djihadiste qui fou des gens dans la Daesh (jeu de mot ), ta nouvelle aurait été apprécier par beaucoup plus

Après. c'est mon avis fait sur quelques impressions

Bonne continuation

C'est bien écrit, ton style est là. Mais je te préfère dans ton "registre" habituel.

Le 02 décembre 2015 à 16:18:55 [B]etween a écrit :
C'est bien écrit, ton style est là. Mais je te préfère dans ton "registre" habituel.

Ouep, tweenouille, moi aussi... ce n'est pas un exercice que je reproduirai souvent don't worry. Mais bon j'ai quand même besoin de me diversifier, un peu, de temps en temps, c'est essentiel pour ne pas tomber dans la parodie de soi-même. Et pis bon, Choco se charge de ça

Je ne peux qu'apprécier cette délicieuse nouvelle orientale qui vient s'inscrire dans un contexte on ne peut plus d'actualité. J'aime particulièrement ton emploi du terme "haschichins" qui n'est pas anodin, au contraire de celui d' "assassins" qui à l'instar de termes comme "kamikaze" ou "jihadiste" ont fini par tomber dans l'usage courant jusqu'à dénaturer leur sens initial dans l'imaginaire collectif.

Dès lors, les termes "meurtrier", "attaque suicide" et "moujahid" ont ma préférence. Jolie piqure de rappel, et avec la forme, de surcroît. Nice !

mais je te remercie petit être

et toi, que me proposes-tu ?

Mais c'est très bon

C'est marrant, y a beaucoup de types dont les pseudos de sont pas connus qui commentent mes textes, je me demande comment vous tombez dessus, en faisant une recherche sur les haschichins sur google par exemple ou en fouillant les entrailles du fofo ?

merci à vous en tout cas, ainsi qu'aux habitués

Mais de rien !