Pour les joueurs Xbox, et plus particulièrement les fans de Halo, l'année 2012 fut marquée par une phrase en particulier : « Wake up John ». Cortana, l'intelligence artificielle alliée au Master Chief, le sortait subitement d'un long sommeil cryogénique. Un réveil synonyme de nouvelles aventures, après un Halo 3 qui se terminait sur un insupportable cliffhanger. Nous sommes en février 2016, et le joueur Xbox que je suis crie désormais : « Wake up Xbox ! ».
Si vous êtes des lecteurs récurrents de Jeuxvideo.com, il n'est pas impossible que vous soyez, à l'occasion, tombés sur un article signé de mon pseudonyme ; potentiellement, un article dédié à l'actualité Xbox ou à la franchise Halo. Vous savez donc peut-être que je suis plutôt attaché aux consoles de la marque, et à certaines de ses licences. Peut-être même pensez-vous que dans la guerre entre Sony et Microsoft, j'ai choisi mon camp. De fait, je me permets aujourd'hui de m'inscrire en faux, et d'y aller de ma petite gueulante, destinée (bien inutilement, j'en conviens) aux pontes de Microsoft, et plus particulièrement à ceux de sa division Xbox.
Si vous possédez une Xbox One, et que vous êtes un tant soit peu lucides, vous le reconnaîtrez : la situation actuelle de la 3ème console de Microsoft n'est pas bonne. Elle n'est pas mauvaise non plus et ces derniers mois, le constructeur/éditeur/développeur s'est remonté les manches pour proposer des jeux de qualité. Forza Motorsport 6, Halo 5 : Guardians, Rise of the Tomb Raider... bref vous les connaissez, d'autant que la firme de Redmond n'a pas manqué une occasion de mettre en avant son « best line-up ever ». Dans la foulée d'un E3 2015 très convaincant, le géant américain avait continué de rassurer en déroulant à Cologne, lors de la gamescom, un planning de sortie solide et relativement précis, à l'inverse de son concurrent direct.
Certains auront du mal à le reconnaître (oui oui, les fanboys au fond là, présents sur chaque news Xbox/PlayStation, pour répéter toujours les mêmes bêtises, vomir votre haine de l'autre, je vous vois et je vous juge), mais malgré tous les efforts déployés par Xbox, la mayonnaise n'a pas pris. Les ventes de Xbox ont certes pris un petit coup de pied au cul, et les Halo et autre Tomb Raider se sont plutôt bien vendus, mais honnêtement, ce n'est pas la panacée. Malgré une politique tarifaire extrêmement agressive, des offres incroyables (comme les jours Gamerscore, qui permettaient de trouver facilement des Xbox One à 200€) et des bundles assez fous proposés notamment lors du Black Friday, la Xbox One n'a jamais vraiment dépassé la PlayStation 4. Oh la sortie de Halo 5 lui a été très positive, notamment aux Etats-Unis. Mais l'impact fut des plus limités. Les raisons sont nombreuses, mais il y en a une qui revient assez souvent, pour peu que l'on s'attarde sur les commentaires dignes d'intérêt que l'on peut voir ici et là sur le web, ou même dans son entourage direct. Vous l'entendrez, ou le lirez régulièrement : pourquoi acheter une Xbox One, dans la mesure où la plupart des titres sortiront à termes sur PC ?
L'exemple le plus probant, récemment, fut celui de Rise of the Tomb Raider. Certes, Microsoft a cafouillé sa communication, lors de la gamescom 2014, et il a très vite été clair que les nouvelles aventures de Lara Croft sortiraient également sur PC... et probablement sur PlayStation 4 ensuite. Il a fallu peu de temps pour en être sûr. Et franchement ? C'est tant mieux, puisque les joueurs PC et PS4 peuvent et pourront découvrir et apprécier un grand jeu. Mais tout cela a-t-il profité à la Xbox ? Non. Pourtant, ce devait être le but, lorsque Microsoft a fait fonctionner la planche à billets pour s'offrir cette exclusivité temporaire. On imagine que la somme fut coquette. Mais comment booster les ventes de la Xbox One, en annonçant rapidement une sortie PC pour fin janvier 2016, soit moins de 3 mois après la sortie console ?
Preuve que les éditeurs tiers ne sont pas les seuls responsables, loin de là. On parle dans de nombreux cas de jeux édités par Microsoft, normalement « exclusifs » à la Xbox One, et donc la responsabilité leur en revient entièrement. Un « problème » qui a tôt fait de surgir dans l'histoire de la Xbox One, puisque dès ses premiers balbutiements, il a été question de version PC pour Fable Legends. Ou plus tard, celle de Gears of War Ultimate Edition, Dead Rising 3, ou encore Ryse : Son of Rome. Pendant un temps, il fut même question de porter sur PC Forza Horizon 2 (de loin le jeu de course le plus intéressant de 2014), ou encore Halo : The Master Chief Collection. Des rumeurs vite éteintes par Microsoft et Phil Spencer, même si la question semblait laissée en suspens. En février 2016, on pense pouvoir dire sans trop se tromper que cela n'arrivera jamais... En tout cas pour ces deux jeux.
Avec les deux salons majeurs de 2015, Microsoft a étalé pléthore de titres (plus ou moins) exclusifs, ce qui devrait enthousiasmer les joueurs, et générer des achats de Xbox One. Enfin, en principe. Oui car en principe, ces titres resteraient des exclusivités Xbox One, et non pas des « exclusivités Microsoft ». Avec Windows 10, Microsoft voit le jeu vidéo plus globalement et ne le pense plus qu'à travers le spectre de sa console de salon. Windows 10, c'est le meilleur système d'exploitation possible pour les gamers, un OS pensé pour les joueurs. Microsoft l'a répété à de nombreuses reprises, et il semblerait, dans l'état actuel des choses, qu'une bonne partie du public ciblé y trouve son compte. Le géant américain entend ainsi développer son écosystème, avec ordinateurs, smartphones/tablettes, et console, tous liés par le même système d'exploitation. Dans le domaine qui nous intéresse, à savoir le jeu vidéo, cela peut avoir une incidence : le streaming d'une plate-forme à l'autre (surtout Xbox vers PC), et bien entendu le jeu cross plates-formes, que Big M entend bien développer. Mais pour cela, il faut des jeux. Et les jeux qui autrefois étaient réservés à la Xbox se retrouvent désormais à être pensés pour les deux plates-formes de jeu. Personne n'a été vraiment surpris d'apprendre que Recore, le titre développé par Keiji Inafune et les créateurs de Metroid Prime, sortirait également sur PC.
ReCore fait partie de cette salve de titres présentés récemment par Xbox, des titres qui devaient garnir le rayon « Jeux exclusifs » de la console. On compte parmi eux Scalebound, Quantum Break ou encore Crackdown. Et si à ce jour aucune sortie pour ces jeux n'a été confirmé sur PC, en août dernier Phil Spencer ne fermait pas la porte pour autant, comme il l'expliquait à PC Gamer, dans une interview relayée par IGN :
Dans le cas de Scalebound, Crackdown ou Quantum Break, vous savez, et pour être parfaitement honnête avec vous, nous avons commencé à développer ces jeux avant même que l'on commence à penser à étendre Windows de la manière dont je le souhaitais, quand j'ai pris la tête de la division Xbox. {…} Ce qui ne veut pas dire que ces jeux ne pourraient pas sortir sur Windows, mais pour le moment, nous devons terminer les grands jeux que nous avons commencé.
On ne le répétera pas assez, rien aujourd'hui ne permet de dire que les trois titres susmentionnés sortiront un jour sur PC, mais quand on se penche sur le cas de Scalebound, il est permis de douter, ne serait-ce que pour ce titre précis. Annoncé à l'origine pour 2016, le nouveau bébé de PlatinumGames a été reporté à 2017, sans plus de précision. Le titre embarquant avec lui une composante multijoueur dont l'importance n'est pas encore connue, on serait tenté de penser que le titre a été repoussé pour permettre aux équipes de proposer une version PC et une version Xbox, avec une date de sortie commune... Ce afin de mettre en avant les fonctionnalités cross plates-formes permises par Windows 10. Mais il ne s'agit là que d'hypothèses (PlatinumGames croule actuellement sous les projets, sans doute ont-ils redéfini quelques priorités). Le produit des réflexions d'un joueur (et accessoirement, d'un professionnel) un peu étonné de voir le manque de jugement de Microsoft qui continue de se tirer des balles dans les pieds. Ou en tout cas, dans ceux de sa « petite » console de salon, qui mériterait plus d'égards, et moins d'écarts.