Pilier incontournable de l’économie mondiale, le canal de Panama n’est malheureusement pas épargné par les changements climatiques. En proie à un manque d’eau, il oblige les navires qui doivent l’emprunter à trouver de coûteuses alternatives.
Le canal de Panama mesure 80 kilomètres de long : il traverse l’isthme de Panama en Amérique centrale, et il relie l’océan Pacifique à l’océan Atlantique. Depuis son inauguration en 1914, il a totalement révolutionné le transport maritime : il évite aux bateaux de passer par le cap Horn et le passage de Drake pour se rendre à leur destination, leur faisant parfois économiser plus d’une dizaine de milliers de kilomètres.
Aujourd’hui, environ 6% du commerce mondial et 40% des tankers américains dépendent du canal de Panama. Cela représente plus de 12 000 navires qui y passent chaque année. Mais la conséquence de cela, c’est que quand quelque chose va mal avec ce canal, la situation peut très rapidement se dégrader.
Le canal de Panama victime des changements climatiques
En ce moment, le canal de Panama connaît une crise sans précédent : il manque d’eau à cause de la sécheresse. Il y a cinq ans, la région a enregistré une réduction de 20% des précipitations par rapport à la moyenne, devenant ainsi la cinquième année la plus sèche depuis les années 1950. Depuis, les autorités ont réduit le quota de navires qui traversent le canal de 16 à 14 navires par jour, afin d’économiser l’eau, tout en réduisant les limites de tirant d’eau et de poids des navires. Mais malgré ces tentatives d’optimisation, la situation continue de se dégrader.
Emprunter le canal de Panama est donc devenu extrêmement difficile. Résultat : une file de navires s’est formée à l’entrée du canal, et sa traversée est lente et complexe, ce qui entraîne des retards dans les livraisons à travers le monde. Si l’on ajoute à cela que les bateaux qui l’empruntent doivent transporter moins de marchandise, les problèmes s’accumulent d’autant plus.
Une opportunité très coûteuse pour passer plus vite
Avec près d’une centaine de bateaux qui attendent constamment pour entrer dans le canal de Panama, on comprend très vite qu’il est actuellement nécessaire de patienter parfois une semaine avant d’emprunter cette voie. Cela signifie des pertes colossales, de plusieurs millions de dollars pour certaines entreprises. Alors, certains navires n’hésitent pas à débourser énormément d’argent pour s’offrir un passe-droit et éviter une trop longue attente.
Les autorités locales organisent fréquemment des enchères qui permettent aux transporteurs d’acheter un droit de passage accélérer pour des montants conséquents. Début septembre, une entreprise a ainsi payé 2,4 millions de dollars pour pouvoir passer avant d’autres bateaux. La somme est rondelette, mais il y a fort à parier que la firme concernée aurait perdu bien plus d’argent si elle avait gardé sa place dans la file.
Des enjeux de taille dans de multiples secteurs
Généralement, les offres les plus élevées viennent de transporteurs de gaz de pétrole liquéfié ou de gaz naturel liquéfié. « Vous pouvez éviter la file d’attente, mais cela coûte extrêmement cher. Cela a augmenté très rapidement. Et si vous ajoutez le tarif régulier, cela représente environ 3 millions pour que vos navires passent », a expliqué Oystein Kalleklev, PDG d’Avance Gas, à Bloomberg.
Les enchères concernant le passage accéléré au cœur du canal de Panama risquent de s’accélérer à l’approche des fêtes de fin d’année, et des enjeux liés à la livraison de millions de produits à travers le monde. Le problème, c’est que la situation pourrait perdurer durablement, les changements climatiques étant de plus en plus intenses. Les transporteurs cherchent donc des alternatives. Le canal de Suez est une bonne piste, notamment parce qu’il est moins cher d’accès. D’autres s’intéressent de près à la fonte de l’Arctique, qui pourrait ouvrir une autre route compétitive vers le Nord. Le projet de canal au Nicaragua semble également être une bonne alternative viable pour l’avenir. Des trajets qui, rappelons-le, sont polluants et contribuent donc au réchauffement climatique…