On a vu le film Gran Turismo, enfin disponible au cinéma. L'adaptation de la franchise culte est-elle un bon hommage ?
S’il y a bien un fait qu’on ne peut pas amputer à la licence Gran Turismo, c’est qu’elle ne brille pas particulièrement par son scénario, une évidence qu’il serait toutefois bien difficile à reprocher à une simulation de course qui mise plutôt sur un réalisme et une technique des plus consciencieux. Pour autant, Sony n’a pas eu à chercher bien loin pour dénicher le pitch parfait qui donnerait enfin vie à l’adaptation cinématographique des jeux tant aimés de de Kazunori Yamauchi, le papa de la licence GT sur les consoles PlayStation, et qui pourrait aussi bien parler aux néophytes qu'aux habitués de la saga : Jann Mardenborough, un joueur émérite (et surtout bien réel) de la franchise, était si bon au volant virtuel qu'il est devenu pilote professionnel. Une histoire vraie, faite de grandes péripéties, et donc toute trouvée pour le grand écran. Le passionné a été couronné vainqueur de la GT Academy, compétition internationale organisée par Nissan avec Sony.
Yamauchi est l'un des producteurs exécutifs du film aux côtés de Hermen Hulst (le numéro 1 de PlayStation Studios). A la réalisation, on retrouve Neill Blomkamp. Si Gran Turismo s’éloigne des films de genre que le réalisateur d’Afrique du Sud a l’habitude de piloter, lui qui est à l’origine du film extra-terrestre à succès District, il est visiblement adepte des univers vidéoludiques : l’homme a planché sur un projet d’adaptation de la franchise Halo finalement annulé et travaille actuellement sur la conception d'un Battle Royale Cyberpunk. Le jeu vidéo, ça le connaît donc un peu.
Le récit parfait à adapter
Sony aurait difficilement pu trouver mieux comme récit à adapter, l’épopée de Jann Mardenborough s’accompagnant de jolis moments de gloire comme d’une poignée de déconvenues spectaculaires. Légèrement romancée pour les biens évidents de la narration, elle demeure néanmoins assez authentique et constitue une documentation idéale pour le public néophyte. Le jeu vidéo ne sert donc pas seulement de prétexte et sert de véritable moteur de l’aventure, la saga Gran Turismo s'en voyant honorée. On apprécie d’ailleurs l’idée de transposer plusieurs éléments de l’interface utilisateur des jeux vidéo de la franchise sur les pistes de course réelles. Une sorte d’hommage bien pensé qui fera cette fois plaisir aux joueurs et qui s’incruste plutôt pas mal dans le film, notamment grâce à des effets spéciaux assez crédibles et agréables à l'œil.
Blomkamp conjugue cette belle matière scénaristique avec une structure assez convenue, laquelle n’est pas nécessairement sublimée par la mise en scène, relativement classique, qui empêche le long-métrage d’être vraiment mémorable. Le rythme du récit est parallèlement assez intéressant pour être souligné : La première partie du film ne s'embarrasse pas de moments de répits et enchaîne les scènes comme si elle respectait une véritable course à la montre. C’est bien la seconde partie, plus posée, qui capte le plus l’intérêt et s’attarde davantage sur les émotions de ses personnages. Gran Turismo porte d’ailleurs bien moins sur la technique automobile et le show que sur la progression de son protagoniste.
Un casting bien garni pour honorer la saga
Pour le casting, Sony se paye un roster cinq étoiles avec Archie Madekwe (Midsommar, Teen Spirit, Beau Is Afraid) dans le rôle du prodige, très bon dans son personnage de gamin rêveur et craintif dont le développement se fera de manière plutôt touchante. C’est davantage la performance sans faute de David Harbour (Stranger Things), l’entraîneur circonspect, qui brille tout au long du métrage et fait preuve d’une belle évolution. L’acteur est sans appel l’atout majeur de ce long-métrage Gran Turismo. Orlando Bloom (Pirates des Caraïbes) qui fait son retour au cinéma, est également excellent dans son rôle de marketeux aux procédés questionnables. Et l’émotion témoignée par Djimon Hounsou (Blood Diamond, Gladiator) n’est pas en reste. Voilà un excellent quatuor qui mène la danse, tandis qu’une bonne partie des personnages secondaires reste à regret en surface et ne sera traitée que de façon superficielle.
Sans être forcément marquant pour le grand public, le film Gran Turismo se révèle plutôt pas mal. Il touche sans le moindre doute les amateurs des jeux vidéo, en se décentrant tout de même des voitures pour se concentrer davantage sur ses héros, et pourra séduire les pilotes spectateurs qui apprécient uniquement le pilotage dans le réel. La vraie question est donc de savoir si Gran Turismo parvient à parler à tout le monde, ceux qui connaissent ou non la série sur PlayStation, et globalement, nous trouvons que c’est finalement plutôt le cas. Et ceci sans en faire trop, mais sans pour autant tutoyer les sommets. Pas de dérapage ici et une ligne d’arrivée passée sans heurt qui fait plaisir à voir pour ceux qui ne pensaient jamais voir une série de jeux vidéo de pilotage de voitures aussi sérieuse traitée de la sorte au cinéma.