Pourquoi les rongeurs (hamsters, souris, rats, etc.) courent dans des roues quand ils sont enfermés dans des cages ? Par stress ? Ennui ? Habitude ? Le feraient-ils aussi s’ils étaient en totale liberté dans un endroit calme et paisible ? Ce sont toutes ces questions auxquelles des chercheurs hollandais ont tenté de répondre avec cette expérience.
Sommaire
- Mais pourquoi les hamsters et les souris courent-ils dans des roues à longueur de journée ?
- Des roues tournantes de 24 centimètres de diamètre en pleine nature
- Souris, musaraignes, serpents, escargots, limaces ou encore grenouilles, un véritable parc d’attractions pour animaux
- La conclusion des chercheurs est formelle, dans ces cas précis, l’utilisation de la roue était intentionnelle.
- C’est bien joli tout ça, mais quelle est la conclusion de cette belle histoire ?
Mais pourquoi les hamsters et les souris courent-ils dans des roues à longueur de journée ?
L’expérience à laquelle nous nous intéressons aujourd’hui n’est pas nouvelle (elle a été réalisée entre 2009 et 2013 et les résultats de cette étude sont disponibles depuis 2014, une éternité à l’échelle d’internet et des réseaux sociaux), mais elle connait un petit buzz actuellement sur Twitter et nous trouvions sympa de la relayer ici.
Just learned that Dutch scientists left a hamster wheel outside in 2014 and saw that tons of wild mice used it just for fun as well as frogs and slugs? All the creatures of the forest wanted a turn?? Absolutely phenomenal pic.twitter.com/sL7g9xEdnU
— darren incorvaia (@MegaDarren) January 3, 2023
C’est en 2008-2009 donc, que Johnanna H. Miller et Yuri Robbers, un couple de chercheurs hollandais de l’hôpital universitaire LUMC (Leids Universitair Medisch Centrum), soit l’équivalent d’un CHU chez nous en France, s’est posé cette question singulière : “Mais pourquoi les rongeurs enfermés dans des cages de laboratoires courent-ils ?”. Est-ce qu’ils le font par plaisir ? Parce qu’ils sont stressés ? Parce qu’il y a une récompense de nourriture à la clé ? Et est-ce qu’ils le feraient aussi,s’ils étaient totalement libres de leurs mouvements, en pleine nature et sans aucune pression ni récompense à la clé ? C’est là tout l’intérêt de cette étude.
Des roues tournantes de 24 centimètres de diamètre en pleine nature
Pour mener à bien leur expérience, les deux chercheurs ont ainsi décidé de placer deux cages dans la nature, avec les portes ouvertes, une roue de 24 centimètres de diamètre et une assiette de nourriture, histoire d’attirer le badaud qui passerait par là. Bien évidemment, les cages n’ont pas été placées au hasard, la première fut installée en haut d’une dune, écartée de toute présence humaine, alors que la seconde se trouvait dans une clairière remplie de buissons et infestée de petits rongeurs.
Histoire de ne rien rater de leur expérience, les chercheurs ont également braqué sur les cages des petites caméras avec vision nocturne ainsi qu’un capteur de mouvement à infrarouge. C’est ainsi qu’ils ont pu récupérer pas moins de 200 000 enregistrements en 4 ans desquels ils ont pu extraire la bagatelle de 12 000 clips vidéo. Il leur aura ensuite fallu environ un an pour livrer l’analyse de leur expérience.
Souris, musaraignes, serpents, escargots, limaces ou encore grenouilles, un véritable parc d’attractions pour animaux
Que nous ont appris les clips vidéos enregistrés pendant cette expérience ? Eh bien, à la grande surprise des chercheurs, c’est que les rongeurs (hamsters, rats, souris, musaraignes, etc.) aiment vraiment courir dans des roues et qu’ils en redemandent !
Parmi tous les participants volontaires (et bénévoles) à cette expérience, on trouve notamment des traces d’escargots, de limaces, mais aussi de grenouilles ou même de serpents, sans doute plus intéressés par les proies en libre-service que par les 24h du tour de la cage de la Dune… Mais dans près de 70% des cas, les participant(e)s étaient des… souris. Ce sont elles les plus assidues à la salle de sport !
Les observations ont montré que les souris sauvages couraient sur les roues tout au long de l'année, augmentant constamment à la fin du printemps et atteignant son apogée en été dans la zone urbaine verte.
Certains animaux semblaient utiliser la roue par inadvertance, mais on a vu des souris et des musaraignes, des rats et des grenouilles quitter la roue, puis y revenir après quelques minutes pour la faire fonctionner.
La conclusion des chercheurs est formelle, dans ces cas précis, l’utilisation de la roue était intentionnelle.
Si dans la grande majorité des cas les participants n’effectuaient que quelques tours de roues, pour une durée finalement assez courte, dans 20% des cas, les souris ont couru plus de 60 secondes consécutives. Comme ça, sans raison, simplement par plaisir et envie. Un marathonien des rongeurs a même été observé courir dans la roue pendant… 18 minutes sans s’arrêter !
Petit à petit les chercheurs ont arrêté de placer de la nourriture, et si les raids nocturnes ont alors naturellement diminué, une grande partie de ceux qui sont venus une première fois ont continué à venir régulièrement faire un petit tour de roue au Disneyland de la forêt. Et la popularité du petit parc pour rongeur n’a cessé de grimper, même auprès des plus jeunes rongeurs qui n’ont jamais connu les assiettes de nourriture du début.
C’est bien joli tout ça, mais quelle est la conclusion de cette belle histoire ?
L’étude, publiée il y a de nombreuses années sur le site The Royal Society, nous montre que courir dans une roue est une sorte de “comportement gratifiant” pour les animaux et “probablement pas motivé” par le stress ou l’anxiété.
Si dans les laboratoires ces types de roues sont généralement utilisés pour étudier comment les niveaux d’activité influencent le corps, on est en droit de se demander si leur utilisation n’est pas le résultat de stéréotypes ou de névroses résultants de leur captivité. Ici, l’étude suggère plutôt le contraire, à savoir qu’elle peut être volontaire.
Mais alors, pourquoi les rongeurs, et plus particulièrement les hamsters et les souris, courent-ils dans des roues ?! Pour le savoir vraiment, il faudrait pouvoir leur demander, mais en l’état, l’étude suggère que :
Les explications existantes sont que courir sur une roue est un comportement consommatoire qui satisfait une motivation comme jouer ou s'évader ou qu'il est lié au système métabolique [...] comme une réponse motrice à la faim ou à la recherche de nourriture.
L'utilisation de la roue peut être vécue comme une récompense, même lorsqu'aucune nourriture n'est en jeu : Courir sur des roues peut être un comportement volontaire pour les animaux sauvages dans la nature.
L’étude complète est disponible sur le site de The Royal Society.