C'est connu, Hollywood a de la suite dans les idées et si quelque chose fonctionne, autant exploiter le filon jusqu'au bout. Ainsi, après remis au goût du jour les séries animées des Transformers et de G.I. Joe via des longs-métrages calibrés pour les amateurs de destruction massive et d'action, c'est au tour de Power Rangers, série culte des années 90, d'avoir droit à un lifting via un passage sur grand écran. Second degré assuré donc mais passé la barrière de la nostalgie, que reste-t-il du long-métrage ?
Il était une fois cinq adolescents...
Fort logiquement, l'histoire suit une trame convenue, le premier film d'une saga en devenir (dépendant bien entendu du succès de l'original) ayant la lourde tâche de présenter les personnages tout en racontant leur première aventure. Dommage donc que Power Rangers ait absolument tout faux sur ce point, autant dans sa narration que sa durée (2h04), trop longue d'une bonne vingtaine de minutes. En effet, pour on ne sait quelle raison, le film s'évertue à nous présenter des personnages incroyablement stéréotypés via des tranches de vie collégiennes mille fois vues et revues. Le garçon chétif brimé par ses camarades qui se retourne contre eux : check. La star de football au grand cœur comprenant qu'il y a autre chose que le sport : check. La belle fille faussement rebelle découvrant quelle peste elle a été : check. Tout, absolument tout dans Power Rangers sonne comme une parodie de teenage movie sauf que ce n'est pas nécessairement censé être le cas, du moins si l'on en croit l'ouverture se déroulant durant l’ère préhistorique et débutant sur une ambiance plutôt sombre.
Ainsi, alors que les derniers Power Rangers en date se font littéralement décimés par l'ex Force Noire Repulsa, Force Rouge (Bryan Cranston) somme les cinq Power coins de trouver des personnes capables de maîtriser leurs pouvoirs tout en s'en montrant dignes. Bien que cette séquence nous ramène à un certain Green Lantern, l'intro laisse à penser que cette adaptation s'éloigne quelque peu du ton jovial de la série de Haim Saban. Malheureusement, la suite nous fait au contraire comprendre qu'il n'en est rien. Ainsi, durant les 2/3 du film, le réalisateur Dean Israelite n'aura de cesse de mettre en avant les cinq recrues, aidées par le robot cabotin Alpha 5 et la conscience de Zordon, le Force Rouge vu au tout départ, devenu entre temps le mentor de l'escouade.
Si tout ceci sera synonyme de séquences d’entraînements, de découvertes de capacités hors normes et de blagues incessantes et très vite usantes de Billy (autiste et petit génie du groupe), entrecoupées de passages nous montrant une Rita Repulsa revenue d'entre les morts afin de ressusciter sa créature Goldar pour mettre la main sur le Zeo Crystal, Israelite y va parfois de ses petites séquences plus sérieuses censées émouvoir les spectateurs. Peine perdue, l'ambiance second degré ne permettant jamais auxdites scènes d'être crédibles. Pire, on aura tôt fait de pouffer devant des passages prétendument graves d'autant qu'on sait que cinq minutes plus tard, tout rentrera dans l'ordre.
Sans maîtrise la puissance n'est rien
Si l'idée était donc de dépoussiérer une série résolument kitsch, Dean Israelite s'emmêle complètement les pinceaux en brossant le portrait de cinq héros caricaturaux au possible, parfois énervants et jamais convaincants dans leurs prises de conscience. Si on retrouvait déjà ce problème dans le regardable et plutôt rigolo Projet Almanac (du même réalisateur), le fait est que nous n'avons même pas l'occasion de s'amuser dans Power Rangers, le film, à l'image d'un certain 4 Fantastiques, manquant cruellement de rythme et nous demandant d'attendre la dernière ligne droite pour avoir droit à une grande scène d'action. Malheureusement, la conclusion ne convainc pas à cause d'effets spéciaux médiocres et d'un design d'ensemble abominable, les monstres de pierre de Repulsa se partageant la vedette avec le géant Goldar, sorte de créature dégoulinante du plus mauvais goût et se prenant au final quelques bourre-pifs par un Megazord déjà plus convaincant.
Dommage donc qu'au final, outre un film n'osant jamais aller au bout du kitsch ou ne souhaitant pas assumer une approche plus sombre, le réalisateur semble constamment être en roue libre en plaçant sa caméra n'importe-comment, en effectuant des zooms avant dignes d'un Paul Greengrass sous acide et en bardant son film d'une bande-son laissant davantage de place à quelques morceaux pop-rock d’actualité qu'à un score symphonique. Représentatif du projet mais rendant le tout encore un peu plus ardu à visionner.
Difficile dans ce cas de trouver un véritable point positif à ce Power Rangers s'évertuant durant deux heures à nous balancer punch-lines comiques, références geek récitées par des acteurs trop âgés et scènes d'action sabotées par une real aux fraises. La nostalgie a du bon, oui, mais encore faut-il la comprendre pour tenter d'en insuffler à l'intérieur d'un projet ici voué à faire sortir les fans hardcore de la série qui jubileront à l'écoute du main theme de la série balancée à l'arrache ou lors du clin d'oeil final.