Bien occupé par le développement puis la sortie de Street Fighter II, Capcom va mettre près de 2 ans avant de proposer de nouveaux beat’em up dans les salles. Pendant ce temps, la concurrence stagne. Les titres s’enchaînent avec des mécaniques de gameplay vues et revues et les arguments de vente se résument alors à l’univers exploré (une bonne licence restant encore le meilleur des appâts), la qualité de la bande-son et à la qualité des graphismes.
En Septembre 91, Capcom sort un titre qui, ô surprise, ne capitalise pas du tout sur Final Fight. Ca valait le coup de poser un modèle ! Au contraire, ils semblent revenir vers leur point d’entrée, le run’n’gun adapté sauce Beat’em up. Mais ils ont choisi, pour une fois, de le faire bien. Ce titre c’est . Jouable jusqu’à 3 joueurs simultanément, on a le choix entre incarner un guerrier, un nain (guerrier aussi), un clerc (hum… guerrier aussi), un elfe (archer) et un mage (un genre d’archer).
On a donc, pour le prix d’un jeu (enfin d’un jeton), la possibilité de jouer à distance ou en combat rapproché, mais surtout de mixer les deux approches à 2 ou 3 joueurs, et d’avancer en formation tactique. Les combattants corps à corps peuvent parer et, dans ce genre de jeux où les ennemis peuvent souvent le faire, mais les joueurs ont rarement cette possibilité, ça méritait d'être souligné. Un système d’xp permet aux joueurs de monter en niveau et donc d’avoir de meilleures stats. On peut aussi ramasser de l’équipement. Ce qui donne au tout des mécaniques très légères de RPG (un genre qui se popularise, notamment au Japon). Tout cumulé, cela donne un titre original, qui plus est soigné et rempli de niveaux.
Mais c’est en novembre que Capcom va véritablement assoir son règne sur le genre, avec 2 titres majeurs : Knights of the Round et Captain Commando. Knights of the Round est un mix de leur précédent titre, King of Dragons, et de Final Fight, sur le thème des chevaliers de la table ronde. Le gameplay commence déjà à être plus abouti. En plus des traditionnels combos prédéterminés et attaques sautées, les 3 personnages jouables ont une esquive, trois attaques spéciales, un death blow, une parade... Parade qui, réussie, donne lieu à la possibilité de contre-attaquer, un mouvement au centre du gameplay, et pas forcément intuitif à l’époque où ce genre était encore axé sur le matraquage de boutons. De King of Dragons, il reprend et parfait ce système de parade et ressort aussi son système d'expérience, représenté visuellement à l’écran par des armures et armes de plus en plus travaillées.
En revanche, cette fois-ci, les 3 combattants sont des guerriers et ont peu ou prou les mêmes capacités. Exit les formations tactiques de King of Dragons. Capcom replanchera sur ce sujet, mais on y reviendra plus tard. Knights of the Round se pose sans mal comme une nouvelle référence. Avec son univers fantasy et ses combats montés, il rappelle aux joueurs le vieux Golden Axe. Ce qui ne va pas jouer en faveur de Golden Axe II, sorti la même année, mais reprenant le même gameplay désormais obsolète du 1er Golden Axe (je cours, je saute et retombe sur mon ennemi épée pointée vers le bas répété jusqu’à nausée).
Pourtant la vraie star de cette fin d’année, ce fut Captain Commando. Peut-être pour son univers sci-fi délicieusement kitsch permettant d’incarner une momie, un ninja, un bébé pilotant un mécha ou Captain Commando lui-même (un super soldat augmenté). Peut-être parce que c’est celui qui reprend le plus l’héritage de Final Fight. Ou peut être parce qu’il permet à 4 joueurs de profiter ensemble de l’aventure. La move list des personnages commence à être importante : 5 à 6 attaques sautées, un combo principal avec plusieurs variations, une dash attack, un death blow, plusieurs choppes, le jeu est déjà largement aussi complet qu’un Streets of Rage 3 sur console (ou Bare Knuckle 3, pour ceux qui ne se sont toujours pas remis des horribles coupures que ce jeu a subi en s’exportant), sorti non pas en 1991, mais en 1994 ! Il connaîtra lui-même quelques adaptations console et le personnage de Captain Commando refera plusieurs apparitions (avant de mourir, oublié de tous, près d’une poubelle).
Entre Street Fighter II et ces trois titres-là, dans les salles d'arcade, on se fritte donc sur du Capcom. C’est à ce moment-là qu’on a véritablement commencé à parler de Capcom comme du roi de la baston.