Une année intense faite de moments forts et de concessions
Le manque de temps. Ces quelques mots rythment le quotidien de bon nombre d’entre nous et par conséquent notre vie de joueur. Bien souvent à la recherche d’un créneau me permettant d'expérimenter un titre, combien de fois j'ai cru être tombée dans une faille temporelle en réalisant que le jeu que je venais enfin de lancer était sorti l'année précedente, voir plus tôt sur la ligne du temps. Le paradoxe pour celui qui travaille dans le secteur vidéoludique se situe dans sa potentielle incapacité à se réserver des sessions de jeu en parallèle de celles dédiées aux titres testés. Aussi, cette année a été plus que jamais marquée par la priorisation, les choix et renoncements. L’arrivée sur mes machines de jeux qui ont suscité depuis un moment déjà l’engouement, la déception ou un panel de réactions variées, n'a ainsi pas été rare. De ce fait, Gris , le titre de Nomada Studio sorti fin 2018, fait partie des expériences les plus marquantes vécues en 2019. Sa Direction Artistique, l’intelligence de sa narration basée sur l'image et la musique (remarquables ost !), les divers ressentis que le titre permet d’expérimenter, ses mécaniques amenées d’une manière fine et inédite, tous ces éléments font de lui le plus bel étonnement de ces derniers mois.
Cette année encore, ce sont aussi des jeux qui ont pris la poussière sur mes étagères, parfois même toujours munis de leur blister et qui auraient peut-être pu faire partie de mon top 5. Je pense notamment à Days Gone qui trône fièrement à côté de sa Steelbox, sans jamais avoir mis ne serait-ce qu'un pixel dans ma Playstation 4, à Kingdom Hearts III , ou encore le dernier né du studio PlatinumGames, Astral Chain .
Mais 2019, c'est aussi l'année qui nous aura permis d'avoir quelques belles surprises, à commencer par The Legend of Heroes : Trails of Cold Steel III, un RPG sorti au Japon en 2017 et qui est arrivé dans l'Hexagone avec des textes intégralement traduits en français. Je n'en attendais rien de particulier et pourtant, je me suis délectée de cet univers, malgré quelques clichés, des textures un tantinet has been et une rigidité dans les animations qui, me concernant, ont plus soufflé un vent de nostalgie pour des titres emblématiques du genre, qu'une tempête de doléances.
Mon top 5 de 2019 :
- A Plague Tale : Innocence
- Death Stranding
- Fire Emblem Three Houses
- The Legend of Heroes : Trails of Cold Steel III
- Devil May Cry 5
Mon coup de coeur : A Plague Tale : Innocence
A Plague Tale : Innocence, ce sont 4 ans et demi de développement et de toute évidence, c'est aussi une quantité non négligeable d’heures à créer, penser, coder, imaginer et mettre en œuvre, avec des moyens financiers limités. A Plague Tale, ce sont des mois à douter, à s’investir sans compter, pétri d'incertitudes, car aussi bon un jeu soit-il, personne ne peut être sûr de la manière dont il va être accueilli par ceux pour lequel il a été créé. Certes, le résultat est imparfait - combien de fois j'ai pu pester contre cette IA affligeante, ou encore être tentée de lâchement abandonner ma manette lors d'une petite poignée de passages recommencés moult fois - mais cette œuvre, c’est aussi et surtout une expérience unique, une réalisation cohérente, un ressenti, une atmosphère, qui ont su me toucher. L'histoire, la narration, la direction artistique de cet opus, ainsi que le travail titanesque accompli par le studio bordelais Asobo, restent les éléments marquants que je retiens, au delà des défauts du titre.
Mon coup de gueule : Travers de l'industrie vidéoludique et responsabilités individuelles
Cette année encore, l'actualité du jeu vidéo n'a pas été un long fleuve tranquille. Au programme, procès, joueurs professionnels sanctionnés pour leurs prises de position politiques, modèles économiques pointés du doigt, en particulier les tristement célèbres loot boxes. A plusieurs reprises, j'ai eu l'opportunité de traiter la question de ces dernières dans la rubrique news, notamment lorsque la gouvernement anglais a pris en main le sujet. Les Royaumes-Unis ont en effet chargé une commission parlementaire de jauger la situation qui a conclu que, à l'instar de la Belgique, les loot boxes pouvaient être assimilées à des jeux de hasard et devaient donc être réglementées.
Si la légitimité d'un gouvernement à défendre les intérêts de ses citoyens n'est pas à remettre en question, je m'interroge cependant sur la pertinence de leur intervention sur ce point précis, ainsi que sur l'absence de prise de responsabilité d'un pan de la communauté des joueurs. Une très grande majorité d'entre eux blâment les éditeurs pour ce qu'ils assimilent à une tentative éhontée de leur soutirer de l'argent, alors comment ces boîtes - et autres systèmes similaires - peuvent encore représenter une manne financière pour les studios ? Une prise de conscience et une mesure radicale pour faire cesser ces pratiques s'impose, passant par le fait de ne plus consommer ce genre de contenu. Au regard de la quantité d'énergies individuelles déployées pour entretenir la polémique et perpétrer des attaques frontales envers certains titres, avant même leur sortie et la possibilité de se forger une opinion solide et fondée, il est acceptable d'envisager que chacun fasse converger cette verve en direction de sujets plus profonds et aille efficacement à l'encontre des pratiques de l'industrie du jeu vidéo qui lui déplaisent. Alors seulement un véritable changement sera amorcé.