De Commando à Ikari Warriors en passant par MERCS et Rambo : First Blood Part II, le run & gun, variante de shoot'em up dans laquelle on contrôle un soldat plutôt qu'un vaisseau, fut un genre très en vogue dans les années 80. On pourrait penser que ce style de jeu a fait son temps, mais c'est sans compter sur quelques soubresauts occasionnels comme ce Elite Forces : Unit 77 sur DS. Si l'on s'en réfère au dos de la boîte de jeu, qui insiste sur les capacités à la fois spécifiques et complémentaires des mercenaires que l'on va être amené à contrôler, on imagine un gameplay s'inspirant de Commandos : Derrière les Ennemis, faisant la part belle à l'infiltration et à la tactique, d'autant que les développeurs de Elite Forces sont espagnols comme l'étaient ceux de Pyro Studios. Pourtant, on se rend vite compte que le jeu est centré sur une action basique et peu réfléchie, aux accents très old-school.

Passons rapidement sur le scénario, véritable ode à la bêtise : d'ignobles terroristes, barbus et enturbannés comme il se doit, ont enlevé 30 personnalités parmi les plus importantes de la planète (politiciens, scientifiques, artistes...), que votre unité spéciale 77 est chargée de libérer. Une unité composée de quatre soldats d'élite : un sniper, un artificier, un expert en explosifs et un génie de l'électronique. Nous reviendrons plus loin sur leurs capacités respectives, sachant qu'ils n'interviennent pas tous ensemble et que ce sont des escouades de 2 à 4 hommes que vous allez contrôler. La progression se découpe en 12 missions aux objectifs variés mais peu originaux : détruire des cibles militaires, délivrer des otages, abattre un chef terroriste... Ces missions vous conduiront dans trois environnements différents : la jungle inhospitalière, le désert brûlant et les plaines glacées de l'Arctique. La première chose qui frappe, c'est le soin apporté à la réalisation. La 3D est fine, propre, bien texturée et peu pixellisée en raison d'une caméra placée suffisamment loin de l'action. Une action ininterrompue, soutenue par des bruitages et des thèmes musicaux dans la plus pure tradition militaire, qui conserve sa fluidité en toutes circonstances. En ce qui concerne la jouabilité, on peut difficilement faire plus simple. Seul le stylet est mis à contribution : touchez le sol pour vous déplacer, un ennemi pour lui tirer dessus, une arme secondaire pour la sélectionner, un mécanisme pour l'activer. Un run & gun jouable d'une seule main, vous en rêviez ? Gammick l'a fait.

Pourtant, tout n'est pas si rose puisque cette jouabilité intégrale au stylet empêche de tirer tout en se déplaçant, et rend donc vos hommes particulièrement vulnérables au feu adverse : si vous tirez, c'est que vous êtes immobile, et si vous êtes immobile, c'est que vous êtes une cible de choix pour les nombreux soldats ennemis qui se précipitent sur vous sans réfléchir (ou restent involontairement bloqués derrière un élément du décor). D'où l'aspect très bourrin des combats, qui manquent paradoxalement un peu de dynamisme. On aurait apprécié pouvoir s'accroupir, ramper ou se mettre à couvert, mais ce n'est pas trop le genre de la maison : Elite Forces : Unit 77 déroule un gameplay résolument old school dans lequel vous devrez vous résoudre à encaisser autant de pruneaux que vous en farcirez vos opposants. Les développeurs ont tout de même tenté d'intégrer un peu de finesse dans ce jeu de brutes en dotant vos soldats de capacités spécifiques. Chase peut sniper à distance les tireurs postés dans les miradors, Hammer jouer du bazooka pour détruire tourelles ou portes blindées, Bill pirater des boîtiers de commandes et lancer des grenades et Richter poser ou désamorcer des explosifs, ainsi que conduire des véhicules divers et variés (camions, chars d'assaut...). Le problème, c'est que l'utilisation de ces capacités, trop souvent induite par le level-design, ne modifie pas les fondements d'un gameplay qui ne laisse pas la place à l'approche discrète et ne permet pas d'élaborer une quelconque stratégie. La prudence ne vaut que pour la gestion des médikits, la difficulté des missions augmentant de façon exponentielle.

Malgré tout, le fun peut prendre, surtout chez les adeptes de jeux à l'ancienne. Avec sa jouabilité simple, son challenge corsé et ses environnements sympathiques bien que peu interactifs (seuls les tonneaux explosifs peuvent être détruits), Elite Forces : Unit 77 évoque d'ailleurs un certain Cannon Fodder, sorti en 1993 sur Amiga. Dommage que l'on n'y retrouve pas tous les ingrédients de ce dernier, dont la violence, l'humour noir et le second degré avaient assuré la réussite.