Rares sont les enfants à connaître le vrai sens du conte de Charles Perrault. Le Petit Chaperon Rouge, lorsqu'il se jette dans le gueule du loup, témoigne de ses pulsions malsaines en transgressant un interdit des plus glauques. Le studio Tale of Tales nous le fait bien comprendre en nous offrant une relecture de ce conte avec The Path, une des perles du jeu indépendant.
Tale of Tales, c'est le combo de deux programmeurs belges talentueux, une femme et un homme : Auriea Harvey et Michael Samyn. Fondé en 2002, ce studio indépendant débute en confectionnant des économiseurs d'écran pour ensuite se lancer dans le développement vidéoludique avec « 8 », un prototype qui tend déjà vers l'adaptation d'un conte puisqu'il reprend à sa sauce La Belle au Bois Dormant. Ce n'est qu'en 2009 que Tale of Tales commercialise son premier vrai jeu sur PC : The Path. Lors de l'IGF 2008, ce dernier est nommé dans la catégorie innovation en art visuel.
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Pour apprécier comme il se doit The Path, il faut davantage le considérer comme un concept que comme un jeu. Le principe est que si l'on veut qu'il se passe quelque chose, il ne faut pas faire ce qu'on nous dit de faire, à savoir rester sur le chemin salutaire qui mène à la maison de mère-grand. Aux commandes de six petits chaperons rouges au style gothique, il nous faut les mener un à un jusqu'à leur loup (qui variera de forme selon la fille incarnée), donc vers leur mort. Afin d'y parvenir, il faut se perdre dans la forêt, naïvement. On se sent presque coupable de dévier du chemin, mais c'est aussi ça qui fait le sel de la transgression. D'ailleurs, si l'on se met à courir, on ne voit plus rien devant soi, le rythme du cœur de la jeune fille s'accélère et la présence du loup se fait d'autant plus ressentir. Les musiques s'intensifient également et tout en restant dans le même ton hypnotique, se voient brodées de variations du thème principal à coups de violentes notes de violoncelle.
Mais quoi qu'il arrive, la vraie rencontre avec le loup se fait en réalité à l'intérieur même de la maison de mère-grand. Dans la demeure, la vue passe à la première personne et on doit alors marcher pas à pas pour arriver jusqu'à la chambre où le dénouement a lieu. Cette phase finalement passive est malgré tout la plus étouffante puisque s'apparentant presque à un cauchemar éveillé, parsemé de symboles hallucinatoires. Elle donne aussi l'occasion d'admirer les trouvailles visuelles aussi psychédéliques qu'ahurissantes et les choix de couleurs détonants qu'auront su creuser les génies de Tale of Tales.
Lors des moments clés, The Path se rapproche on ne peut plus du jeu d'épouvante