Même si le jeu vidéo est né avec le désir de plaire au plus grand nombre, la démocratisation du Pong de Nolan Bushnell étant là pour le prouver, il a rapidement pris une direction le destinant en priorité aux joueurs confirmés. Si certains titres comme Pac-Man conservaient une approche grand public (la petite pastille est notamment née de la volonté d'intéresser les femmes), nombre d’entre eux demandaient d’importants réflexes et une attention de tous les instants. Pour terminer Donkey Kong, pour ne citer que lui, il faut avoir l'oeil vif et les nerfs bien accrochés. Et comme de nombreux hits se voyaient porter sur console, la difficulté originelle se retrouvait généralement dans nos salons.
Ainsi, malgré l’instauration de points de vie et autres aides pour le joueur, le média s’est spécialisé de plus en plus et s’est finalement « enfermé ». Et ce fut ainsi pendant très longtemps… jusqu’à l’apparition de la PlayStation. C’est véritablement à cette époque, soit au milieu des années 1990, que le jeu vidéo, porté par la communication décalée de Sony, a changé de statut. Les développeurs – selon la nature des jeux – devaient parler au plus grand nombre et adapter la difficulté de leurs productions. Les années passant, le profil des joueurs a évolué considérablement, obligeant les studios à s’adapter.
Les joueurs d’hier ont grandi et n’ont plus du tout la même attente, comme le résume X-Fab :
Je n’aime plus tellement les jeux (très) difficiles. Un minimum de challenge ? Pourquoi pas évidemment mais des trucs qui rendent fou tels que Mega Man, Dark Souls et tout le tralala, ce n’est plus pour moi. Déjà d’une, ça m’énerve et donne envie de jeter la manette (surtout à cause du syndrome « M. Bison - l’IA a décidé de gagner et ne te laisse pas voir le jour – comme on le voit dans les jeux de baston), et d’autre part par manque de temps (famille, boulot…). Sauf à la limite en coop’, j’adore la coop’ avec Dark Souls et d’autres jeux d’horreur qui te permet de flipper / rager entre potes et d’affronter la difficulté en groupe pour mettre en place des stratégies.
Il faut bien imprimer que de très nombreux jeux à l’époque des 8, 16, voire même 32-bits, n’étaient quasiment jamais finis par les joueurs. Pour Laurent Lebailly, cela se traduit par une réalité implacable : « C’est bien simple, je n’ai jamais fini autant de jeux que depuis l’ère PS3 – 360. » Les joueurs d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’il y a vingt ou trente ans, les attentes sont totalement différentes. « Trop de difficulté, trop de skill me rebute. », insiste Rachalan Ludd. « Le Die and Retry imposé par les contraintes techniques, ça ne m’intéresse plus trop aujourd’hui. » Les habitudes d’hier, en revanche, sont ancrées chez de nombreux joueurs et beaucoup estiment qu’il faut trouver un juste équilibre entre l’accessibilité et le challenge. Comme le rapporte Olivier Brunel, « peu importe la difficulté du moment, à condition qu’elle soit cohérente avec son gameplay et son univers. Par contre, ce qui est insupportable, c’est le tas d’assistances inutiles que l’on intègre dans certains jeux modernes et qui sont une insulte à l’intelligence du joueur. » Comme on peut le voir, pour satisfaire le plus grand nombre, les développeurs ont encore du travail… et on sait à quel point cette notion de difficulté est compliquée à équilibrer durant la création d’un jeu. Et ça ne date pas d'aujourd'hui...