Bien qu'étant un grand fan de Gabe Logan et a fortiori des Syphon Filter, je dois avouer que la série a toujours eu un retard technique conséquent par rapport à ses adversaires principaux. Mais une fois encore, Sony (ou plutôt les développeurs de 989 Studios) démontrait que la technique ne faisait pas tout dans un jeu. Ainsi le scénario du titre, tournant autour du virus Syphon Filter (capable de sélectionner des types d'individus) se voulait passionnant de bout en bout, mêlant conspiration gouvernementale, trahisons multiples et rebondissements en pagaille disséminés sur les trois opus (rappelez-vous du cliffhanger du premier Syphon, mama mia !). C'est donc en toute logique que le quatrième épisode suit le même chemin et nous narre une histoire gigantesque (tournant autour d'un nouveau virus et d'un groupuscule terroriste, l'ALA) très bien documentée (fourni qu'est le titre en d'innombrables documents fictifs tels des coupures de journaux, des rapports d'interrogatoires, des lettres de Gabe Logan, des missives du président des Etats-Unis…) et réaliste, ce qui au final se révèle être un des points les plus effrayants et convaincants du soft.

Seulement, si le fan retrouvera ses marques en quelques secondes, il est dommageable de voir que les personnages des précédents titres (Gabe et Lian en tête) ne sont plus jouables et feront office de supérieurs, dirigeant par là-même vos missions et vous donnant vos objectifs. Certes, nous aurons le loisir de les voir dans les cinématiques émaillant le jeu mais il va sans dire qu'un grand vide se fait ressentir sachant que nous ne pourrons diriger qu'un illustre inconnu que nous aurons au préalable créé de la tête aux pieds. Comme je le précisais dans ma preview, ceci est compréhensible par le fait que le jeu mise plus sur son mode Online que Solo, les deux étant liés (les 9 missions Online faisant partie des 19 missions jouables en Off-line) et ne pouvant se permettre de proposer deux aventures différentes. Bref, on se contentera donc de cet état de fait et après avoir mis la dernière touche à la création de son héros (dont on peut modifier le sexe, la corpulence, la couleur de peau, les cheveux, les yeux, la pilosité, etc.) on pourra enfin commencer à jouer en enchaînant les missions.

A noter que vous pourrez à tout moment aller consulter vos dossiers personnels qui recèlent de tonnes d'informations sur vos performances, vos statistiques de jeu, vos médailles et bien plus encore. C'est d'ailleurs en terminant vos missions en un temps donné (nous y reviendrons), en jouant d'une certaine façon (lié au style de combat, à l'arme utilisée) ou en remplissant vos objectifs de missions que vous débloquerez d'innombrables bonus comme des armes (qui seront ensuite disponibles dès le début d'une mission) ou des documents qui étaient jusqu'alors Classé Défense. Il suffira dans ce cas d'aller sur une des missions déjà terminées et de jeter un œil aux nouveaux fichiers accessibles vous renseignant sur des points obscurs de l'histoire ou tout simplement sur de petits compléments d'informations anecdotiques.

Mais revenons à présent au jeu. La première mission n'en est pas une puisqu'en tant qu'Entraînement elle vous enseignera tous les mouvements à votre disposition, le maniement des armes principales ou encore quelques techniques de combat et de défense. Indispensable si vous n'avez jamais joué à un Syphon Filter, il est plutôt surprenant de constater que le titre n'a pas vraiment évolué depuis le troisième épisode puisque peu de nouvelles actions sont au rendez-vous. Vous pourrez utiliser de nouvelles armes, ramper mais sorti de là pas grand-chose de neuf à l'horizon. Ce qui fait qu'on esquisse un sourire puisque le tout est exactement comme dans nos souvenirs bien que cela fasse un peu pitié à voir au jour d'aujourd'hui mais nous verrons tout ceci un peu plus loin. Terminé ce premier passage, nous voici devant la première mission et c'est après une cinématique (de très mauvaise qualité, en dessous de celle des opus 2 et 3 c'est dire !) que nous arrivons devant l'écran d'avant-mission qui va nous permettre de choisir notre équipement. Armé jusqu'aux dents, la véritable aventure commence enfin.

Premier point, le titre est loin d'être impressionnant techniquement. Les décors sont immenses, labyrinthiques, ça tire de partout (les affrontements faisant parfois penser à de véritables guerres de gangs) mais le graphisme du soft est une fois de plus en retard par rapport à ses concurrents directs, mais une fois encore, on se fiche un peu de ceci puisque ce n'est pas ce qui importe le plus. Notez tout de même à ce sujet que les missions nous mèneront dans des endroits disparates (entrepôts, aciérie, centre commercial, plate-forme maritime, forêt enneigée, Yémen ou encore une mission fortement inspirée du chef-d'oeuvre de John Mc Tiernan, Piège de Cristal, se déroulant à Tokyo) et si quelques effets sont du plus bel effet (flammes, bitume qui explose sous l'effet des balles, volutes de fumée qui sortent de la culasse de vos armes et qui suivent votre mouvement quand vous vous déplacez) on pleure un peu devant la médiocrité de l'ensemble. C'est d'autant plus vrai que comme je le disais, les cinématiques sont affreuses et bien moins montées que dans les deuxième et troisième épisodes. Heureusement que la bande-son rattrape tout ceci, les musiques symphoniques étant d'un excellent niveau (et s'adaptant en fonction des événements) et les bruitages criants de réalisme. Je signale à ce titre que la version que nous avons reçue possédait pas mal de bugs sonores, les dialogues étant hachés et les musiques s'interrompant parfois sans crier gare. En espérant que ceci soit réglé lors de la version commercialisée.

Deuxième chose (qui fâche), la construction du soft est en tout point affreuse et là je mâche mes mots puisque c'est bien cette progression qui plombe complètement un jeu qui aurait pu, qui aurait dû ravir le fan de base. Tout d'abord si le titre reprend le principe d'objectifs des précédents opus, ceci est bien moins convaincant puisque la plupart du temps, les ordres de vos supérieurs arriveront au fur et à mesure vous laissant pris au dépourvu sachant que certains objectifs (non obligatoires) sont à réaliser en un temps limité. Mais pour vous donner un aperçu de ce que je veux vous faire comprendre voici un petit exemple. La quatrième mission commence par exemple par un objectif qui vous demande de sauver plusieurs ouvriers. Vous jetez alors un coup d'œil à votre carte où est précisé l'emplacement des bons hommes (bien entendu aux quatre coins de la carte) et partez donc les sauver d'un pas léger. Des tonnes de gardes arrivent, vous essayez tant bien que mal de les éviter ou de les flinguer et parvenez enfin au premier ouvrier après d'âpres combats. Là, l'Agence vous contacte et vous ordonne d'aller sauver un personnage. Bon ok, on y va donc dare-dare car si on attend trop longtemps l'homme se fait tuer, mais il faudra ici faire preuve de sang froid car si vous n'avez plus beaucoup de vie, la tâche sera difficile voire infaisable, les gardes étant nombreux. Bref on rage et on se dit qu'on va se laisser mourir pour reprendre au dernier check point et ressayer l'objectif, erreur ! ! Et oui ceci m'amène au second coup de gueule, la gestion calamiteuse des points de contrôle.

C'est simple, c'est à se défenestrer tant le système est confondant de stupidité, à croire que les développeurs se sont emmêlés les pinceaux en voulant reprendre ce qui avait été fait sur les précédents opus qui nous offraient tout simplement des check-points à des endroits clés nous offrant le luxe de ne pas reprendre une mission dès le départ. D'une difficulté parfaitement gérée, elle en devient ici désastreuse, bourrée d'incohérences amenant avec elle des missions qu'on boucle en deux temps trois mouvements ou des passages sur lesquels on reste une trentaine de minutes. Bref, vous retrouverez ainsi des check-points quand vous aurez rempli un objectif ou une part d'un de ces derniers ou à des endroits stratégiques qui se réactiveront quand vous y passerez à nouveau. En gros, chaque mission dispose de centaines et de centaines de points de contrôle enlevant tout intérêt à la progression. Pire, si vous reprenez à un ancien check-point, tout ce que vous aurez fait avant sera pris en compte. Ainsi il devient aisé par exemple d'arriver dans un endroit grouillant d'ennemis, d'en abattre quelques-uns, de se faire tuer pour reprendre au dernier check-point en date, de repartir au combat avec sa vie au maximum (et un gilet pare-balles intact) et de tuer le reste de vos assaillants. A ceci près que plusieurs endroits regorgent d'ennemis qui reviennent indéfiniment, idéal pour reprendre une bonne demi-douzaine de fois certains passages afin de ne pas se faire tirer comme un lapin en dix secondes chrono. Ce qui énerve également est que si vous voulez absolument finir tous les objectifs (ceci amenant des récompenses dont des nouvelles armes, la possibilité de tenir deux flingues en même temps...), il vous faudra souvent reprendre plusieurs fois le niveau. Quoi de plus rageant que de réussir les 5 premiers objectifs d'une mission, de louper le sixième et ne pouvoir le réessayer directement en prenant au dernier check-point ?! Non vraiment, je baisse les bras, c'est trop. Mais ce n'est pas tout car dans leur grande bonté, les développeurs ont eu la bonne idée d'inclure 4 missions Bonus dans le jeu que vous devrez débloquer en terminant des missions dans un temps imparti et autant vous dire que c'est inhumain, faisable mais réservé à une élite pour qui finir un jeu à 100% n'est pas une option mais un but. Tout ceci pour dire qu'inclure des missions Bonus si difficilement accessibles est une façon artificielle (et très frustrante) de rallonger la durée de vie du jeu.

Pourtant cette dernière aurait pu être à la hauteur de celle de ses prédécesseurs en misant sur le même système de sauvegarde, j'insiste là-dessus car l'ambiance de la série est de nouveau là. Les déhanchements chaloupés du personnage principal sont présents, les mouvements peu nombreux du héros mais suffisant finalement au bon déroulement du titre ne genent pas trop et les innombrables armes à notre disposition ou la visée automatique (permettant d'emblée un Head Shot, pour peu qu'on calibre un minimum, en passant en vue subjective) sont aussi de retour. A ce sujet, le gameplay ne posera aucun problèmes aux fans des Syphon Filter et surprendra sûrement les novices, l'ensemble manquant cruellement de possibilités. On signalera d'ailleurs que la partie Infiltration est ici réduite à sa plus simple expression (hormis dans quelques missions comme celle se passant au Yémen), le rentre-dedans étant bien plus efficace, le joueur étant en quelque sorte invulnérable (merci les points de contrôle). D'ailleurs, je signale ici qu'à l'image de la mission se passant au Yémen évoquée plus haut, deux autres se passant à Minsk et sur une plate-forme maritime vous inciteront à rester furtif mais se veulent en tout point atroces, la difficulté étant à s'arracher les cheveux !! Je ne sais pas si ça vient de moi (sûrement diront les Hard core gamers pré-pubères qui se la jouent "Moi, champion, toi pauvre idiot !") mais une fois encore, on misera très rapidement sur le bourrinage à outrance pour en terminer rapidement. D'ailleurs, concernant ce point, ajoutons que l'IA des ennemis est vraiment basse. Il est très fréquent que vos adversaires ne viennent pas à votre rencontre ou face à un poteau, vous tirent dessus alors que vous êtes juste de l'autre côté. Il m'est même arrivé de rencontrer dans une grosse partie d'un niveau des gardes qui ne bougeaient pas d'un pouce alors que je me trouvais à 30 centimètres d'eux (bug quand tu nous tiens). Ce qui m'amène à me demander si le jeu que nous avons reçu est vraiment la version Review ?!!! A ce sujet, je puis également être surpris par le fait que les textes des briefings ne furent plus traduits à partir de la dixième mission, un peu embêtant tout de même pour une version prétendue définitive ! Une fois de plus, ce ne sera plus le cas pour la version commercialisée mais comment juger correctement un titre dans ces conditions ??

Le mode Multijoueur (donnant lieu à un mode coopératif à 4 joueurs) apporte aussi un gros plus car si nous ne pouvons que reprendre plusieurs missions déjà disponibles en solo, le fait de les aborder avec des compagnons d'infortune diffère. Ainsi certains objectifs ne sont réalisables qu'à plusieurs. Dans la première mission par exemple, on vous demandera de récupérer un portable dans une banque envahie par les flammes. Vous devrez alors ouvrir une canalisation pour enclencher le système anti-incendie et très rapidement aller chercher le portable. Impossible en solo, vous devrez en multi faire en sorte qu'un joueur ouvre la canalisation et qu'un autre se positionne devant la banque et aille immédiatement chercher l'ordinateur, une fois le passage dégagé par l'eau. Une autre mission vous demandera de sauver plusieurs gardes, l'objectif solo se limitant à un seul sauvetage, l'objectif multi en demandant 4, les gardes étant éparpillés à des endroits éloignés. Une excellente idée et une bonne gestion du mode Online qui permet de prendre un peu plus de plaisir dans un jeu qui en manque et qui n'arrive à mon sens pas au niveau de ses illustres ancêtres.

Quelle déception de ce Syphon Filter : The Omega Strain que je suivais depuis pas mal de temps, gorgé que j'étais de souvenirs inoubliables en provenance directe des trois premiers titres de la série. Le soft de Sony est la preuve vivante que si on ne pense pas en amont à la construction de l'entreprise, le tout peut s'effondrer comme un château de cartes. Une difficulté mal gérée, des missions mal agencées, des points de contrôle mal amenés, l'obligation de reprendre les missions plusieurs fois en un temps Carl Lewisesque, on peine vraiment à prendre son pied en parcourant le tout. Dommage car l'ambiance est bien restituée, dans le prolongement de ses aînés, le scénario est fourni et travaillé et le mode Online est intéressant (par le fait de devoir compter impérativement les uns sur les autres). Mais si le titre dispose de quelques attraits, on avance dans tous les cas un peu tels des robots pour découvrir le pourquoi du comment sur toute cette machination, on refait inlassablement les mêmes trajets, on tue encore et encore et au final on en vient à verser de grosses larmes en se disant cette fois que Gabriel tient plus du diable que de l'archange…et justement un ange s'en est allé…