On nous sert parfois la soupe, toujours avec délicatesse. Avec Putrefaction, l'heure est plutôt au ragoût de tripailles, bien sanguinolent et baignant dans son jus. C'est dans les vieux pots... vous connaissez l'adage. Avec Putrefaction Oleg Kazakov a préféré la marmite, pour la cuisson de son met oldschool. Le FPS paru sur Steam a en effet tout de la plongée dans le passé, du genre back to the future. Sauf que la DeLorean d'Emmett Brown a été changée pour l'Interceptor de Mad Max.
S'il y a bien une chose que l'on ne pourra pas reprocher à Putrefaction c'est bien de ne pas s'étendre dans le bavardage inutile. Si le jeu était un pilier de bar, il serait du genre muet, les yeux sadiques et livides, plongés dans un verre de malt accroché au zinc. Accroche directe, scénario minimaliste, le ton est donné dès l'intro du jeu qui rappelle brièvement ce que vous faîtes dans cette base perdue au pied d'une montagne extraterrestre.
Comme à leur habitude les scientifiques locaux se sont amusés à jouer avec leurs éprouvettes. D'où la naissance de créatures hybrides dans les méandres labyrinthiques de cet endroit devenu maudit. La population qui habitait le bâtiment s'est muée en monstres assoiffés de sang. Et la maladie continue de se répandre. Dans ce cas de figure, qui appelle-t-on, bien sûr ? Le Space Marine qui va venir faire le ménage dans ce fatras bien organisé. Si Putrefaction ne brille pas particulièrement au niveau de ses graphismes, il reste tout de même appréciable d'en arpenter les niveaux l'arme au poing.
Dans l'espace personne ne vous entendra crier
Développé sous Unity, le jeu de Kazakov mise sur son ambiance glauque et ses loops venus d'un autre temps. En ligne de mire ce sont bien Doom et Quake qui sont visés à travers le soft indépendant. Dans les dédales de cette base à l'atmosphère claustrophobe, il arrivera souvent aux joueurs de faire des va et vient dans les couloirs noirs du décor. Le sentiment d'insécurité est plutôt bien mis en avant à chaque zigzag au détour d'une pièce, même si vous l'aviez déjà explorée. Muni d'une lampe torche et d'armes toutes plus puissantes les unes que les autres, Putrefaction joue aussi la carte bouchère. Et avec volupté.
Les démembrements et la localisation des dégâts sur chaque mob rencontré apporte une surcouche organique au petit FPS indé. Si bien qu'il arrivera souvent de les voir exploser dans de ravissantes gerbes de membres ensanglantés, ou de les voir se traîner au sol si vous leur avez coupé les pattes. C'était une des caractéristiques les plus intéressantes de Dead Space ou même de Rage (de Carmack, encore lui), et on aimerait que plus de développeurs s'en inspirent dans leurs FPS dits modernes.
De l'aire irrespirable aux cascades de scripts
Souvent Putrefaction, vous donnera l'occasion de découvrir des aires de jeux un peu plus larges qu'à l'accoutumée. Ces espaces serviront d'arènes lors de vos combats les plus virulents. A certains moments, vous vous retrouverez coincés dans un périmètre cloisonné par des murs plasmatiques où les créatures les plus enragées du jeu afflueront en masse afin de vous déchiqueter en mille morceaux. Vos armes sont munies d'une utilisation alternative donnant des perspectives combinatoires des plus efficaces. Surtout quand les troupeaux féroces à vos trousses, sont tellement nombreux que vous avez presque l'impression de voir la marée se lever un jour de tempête en Bretagne.
Dans ses déambulations chaotiques, Putrefaction n'oublie pas de réciter les lignes essentielles du shoot d’antan. Exploration, système de santé oldschool et un mode survival qui donnera des sueurs froides aux amateurs de survie extrême. L'un dans l'autre Putrefaction n'a rien d'un grand jeu, il n'apporte rien au genre, n'a pas l'ambition de le faire, ce qui peut paralyser le ressenti de l'utilisateur sur son expérience globale. Par contre il synthétise parfaitement l'esprit et la substance de ces jeux qui auront cloué à leurs souris et leurs claviers toute une génération dans les années 90. Ambiance sonore concordante, la nostalgie pointe au bout des filets de sang s'animant l'écran.
Points forts
- Ambiance viscérale
- De la tripaille
- Le côté oldschool bien assumé
Points faibles
- Son des armes en toc
- Austère en 2015
- Ambition en berne
Putrefaction est gore au possible. FPS d'un autre âge, il n'a pour lui que cette force intentionnelle qu'il développe aux forceps. Ambiance blafarde au possible, dans cette base extraterrestre, sa passion pour la brutalité de l'action qu'il anime horizontalement en fait un soft tout ce qu'il y a d’honnête. Avec son système de localisation des dégâts, il ajoute un petit côté viscéral à son gameplay. Malheureusement son manque d'ambition, tant sur le plan scénaristique (malgré une fin plutôt sympathique), que sur le plan esthétique ou ludique, lui confère aussi ce côté suranné. Les amateurs de shoots oldschool y trouveront leur bonheur, les autres verront d'un mauvais œil l'archaïsme que le jeu dialectalise de manière volubile.