
La compilation des deux premiers Suikoden entièrement remis à neuf a su se faire ardemment désirer. Elle offre aux nostalgiques l’opportunité de faire découvrir un pan entier du JRPG aux nouvelles générations dans des conditions optimales. Voilà un joli cadeau d’anniversaire pour cette série mythique qui n’a jamais pu bénéficier d’une aura similaire à celle de ses rivaux.
Sommaire
- Suikoden, 30 ans déjà
- Les fondamentaux de la série
- Quid du remaster ?
- Des soucis d’ergonomie qui perdurent
- Bonus et options de confort modernes
Suikoden, 30 ans déjà
Si les joueurs européens associent généralement les débuts de la saga Suikoden à l’année 1997, n’oublions pas que la version originale est sortie deux ans plus tôt au Japon. En 2025, le monde célèbre donc le trentième anniversaire du premier volet. 1995 fut une année magique pour le jeu de rôle japonais, Suikoden ayant face à lui un cortège de concurrents on ne peut plus sérieux, à l’image de Dragon Quest VI, Tales of Phantasia, Romancing SaGa 3, Seiken Densetsu 3 (Trials of Mana) ou Chrono Trigger.



Ces rivaux sévissaient certes sur Super Famicom (la Super Nintendo nippone), s’engouffrant dans le sillage de Final Fantasy VI, mais ils affichaient tous déjà une réalisation 2D très aboutie. Alors, quand la PlayStation entre dans la danse, la tendance est plutôt à exploiter les capacités 3D de la machine, ce que ne fera pas Suikoden qui mise sur des personnages pixelisés en 2D. Sa réalisation semble alors presque déjà datée et bien des joueurs passeront à côté de cet excellent jeu. 30 ans plus tard, Konami dépoussière enfin ce chef-d’œuvre et sa suite dans un remaster que réclamaient depuis longtemps les connaisseurs.
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Les fondamentaux de la série
Réunir les deux premiers volets dans une compilation remastérisée paraît d’autant plus pertinent aujourd’hui qu’ils incarnent vraiment la vision de Yoshitaka Murayama. Le créateur de la franchise avait trouvé très tôt les moyens de démarquer Suikoden des autres JRPG en y glissant des composantes uniques. Le premier opus embarque donc déjà les clés qui deviendront quasiment immuables tout au long de la série. À commencer par son scénario guerrier, à la fois complexe, tragique et profondément anti-manichéen. Cet univers fantaisiste subit autant les influences de notre monde (à travers sa diversité de cultures) que celles de la fiction, les humains côtoyant aussi bien des elfes, que des nains, des kobolds et bien d’autres créatures imaginaires.


L’histoire, très approfondie, se veut librement inspirée du roman classique chinois Au bord de l’eau. Elle a pour principale particularité d’introduire 108 personnages à recruter tout au long de l’aventure. Ils sont « les étoiles de la destinée » et une grande partie d’entre eux est jouable en combat, les autres intervenant au quartier général pour en étoffer les services. Ce QG évolutif est lui-même une constante de la franchise, trouvaille géniale qui pousse les joueurs à redoubler d’efforts pour découvrir comment recruter un maximum de nouveaux alliés.


En combat, la formation du groupe se déploie sur deux rangs avec six membres actifs aux capacités complémentaires. Les règles du tour par tour sont enrichies par la possibilité de déclencher le pouvoir des Runes ou de lancer des attaques à l’unisson qui bénéficient d’animations spécifiques. Les armes ne s’achètent pas mais se forgent, tandis que l’association des Runes est la clé pour décupler les talents magiques des personnages.

Dès le premier volet apparaissent aussi des batailles d’armées fonctionnant sur un système plus stratégique (bien qu’encore très rudimentaire) et une poignée de duels où il faut anticiper ce que fera l’adversaire en écoutant bien chacune de ses répliques.


Tout cela sera amené à s’étoffer considérablement au fil des épisodes suivants, mais les fondations sont déjà en place pour rendre l’expérience inoubliable. N’hésitez pas à suivre ce lien si vous souhaitez davantage d’explications concernant l’histoire et le système de jeu du premier Suikoden.


Quid du remaster ?
Tout cela, vous le savez certainement déjà si vous êtes un inconditionnel de la franchise. Il est donc temps d’aborder les spécificités de ce remaster. Les deux volets sont accessibles directement depuis le menu principal de la compilation et proposent des fonctionnalités « modernes » identiques. Afin de s’adapter à tous les publics, l’aventure est jouable suivant 3 modes de difficulté différents. De plus, l’intégralité des textes bénéficie d’une traduction en français, ce qui n’était pas le cas du premier volet lors de sa sortie initiale.

Sur le plan visuel, le résultat est certes moins éblouissant que certains remakes actuels (comme Dragon Quest III HD-2D Remake) mais il suffit de comparer chaque jeu avec sa version d’origine pour constater l’évolution réalisée. De nombreux effets d’ombre et de lumière ont été ajoutés pour donner davantage de relief aux images et rendre les décors plus vivants en faisant décoller parfois quelques oiseaux.


Les déplacements sur la carte du monde y gagnent aussi, tout comme les illustrations des personnages, entièrement refaites en HD. Il faut souligner que Junko Kawano était à l’origine de l’ensemble du character design du premier Suikoden (remplacée par Fumi Ishikawa sur le second volet) et que l’artiste a été sollicitée pour redessiner l’ensemble des portraits inclus dans ce remaster. Toute la partie sonore a également subi une refonte complète via l’ajout de nombreux effets d’ambiance en HD pour simuler le bruit de la nature environnante et rendre le tout plus immersif. Quant aux compositions de Miki Higashino, elles fonctionnent toujours aussi bien grâce à leur diversité et leur grande richesse musicale.




Des soucis d’ergonomie qui perdurent
Au niveau de l’interface aussi, les améliorations sont appréciables, même s’il aurait fallu reprendre entièrement celle-ci pour l’adapter aux exigences d’aujourd’hui. Car les associations de Runes et la limitation drastique de l’inventaire dans le premier volet rendent la gestion des items inutilement laborieuse. Suikoden II avait le mérite d’ajouter un sac et un menu d’équipement plus intuitif, mais on est encore loin des standards d’aujourd’hui. Résultat, on perd un temps fou à optimiser la place dans l’inventaire de chaque personnage, surtout lorsqu’il n’est pas possible d’accéder au coffre de stockage du QG pour y placer le surplus d’objets.



Il n’est heureusement plus obligatoire d’équiper une Rune bien spécifique dans le premier volet pour pouvoir courir, un bouton permettant de trottiner librement dès le début du jeu. On apprécie aussi la présence d’une sauvegarde auto, en plus des emplacements manuels, et d’un journal de conversation sur lequel on peut s’appuyer pour ne pas perdre le fil de l’aventure. Seul regret : un marqueur d’objectif (optionnel) aurait pu largement se justifier afin de faciliter la recherche des 108 étoiles, sachant qu’il faut nécessairement recruter tous les personnages pour espérer voir la vraie fin de chacun des deux jeux…



Bonus et options de confort modernes
Grâce à l’ajout d’une option permettant d’accélérer considérablement la vitesse des combats, ces derniers s’en sortent honorablement. D’autant que la série a toujours fait preuve de clairvoyance en remettant rapidement à niveau les unités laissées à la traîne, compte tenu du nombre ahurissant de personnages jouables. Suikoden II avait aussi permis aux affrontements de gagner en nervosité, tout en offrant des arrière-plans un peu plus détaillés. Ses batailles d’armées s’inspiraient également davantage des RPG tactiques, malgré un déroulement d’événements trop scripté n’offrant que peu de marge de manoeuvre.


Il est logiquement conseillé de parcourir les deux jeux dans l’ordre chronologique pour comprendre les liens narratifs profonds qui les unissent. Mais il faut obligatoirement terminer l’aventure pour débloquer le contenu de la section bonus qui inclut la totalité des cinématiques, des événements clés et des dénouements. Seules les musiques sont accessibles directement pour qui souhaite réécouter l’ensemble des pistes composant les OST de Suikoden I & II HD Remaster.

Avouons, pour finir, que l’on aurait bien aimé trouver aussi dans cette compilation les deux « visual novels » Gensô Suikogaiden, inédits en dehors du Japon, de la même façon qu’on avait pu découvrir le spin off Radical Dreamers dans la version remastérisée de Chrono Cross…
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Conclusion
Points forts
- Réalisation remise à niveau et agrémentée de nouveaux effets d'ambiance (visuels et sonores)
- 3 modes de difficulté pour ajuster le challenge
- Sauvegarde auto, journal des conversations et combats accélérés
- Une interface améliorée (mais encore perfectible)
- Les portraits HD redessinés par l’illustratrice originale de Suikoden 1
- Toutes les musiques directement accessibles dans la section Bonus (artworks et cinématiques à débloquer)
- Traduction intégrale des textes en français
- Scénario marquant et liens étroits entre les 2 jeux
- La durée de vie cumulée des 2 épisodes
Points faibles
- Une gestion de l’inventaire encore trop fastidieuse
- Idem pour les changements d’association de Runes
- Les batailles et duels restent très basiques sur le plan stratégique
- Un marqueur d’objectif (optionnel) aurait pu faciliter la recherche des 108 étoiles
- Le contenu bonus un peu léger
Note de la rédaction
Les joueurs attendaient depuis longtemps une refonte des premiers Suikoden pour s’y replonger dans des conditions confortables. C’est désormais possible grâce à cette compilation entièrement traduite en français et dotée de plusieurs fonctionnalités bienvenues. L’optimisation graphique et sonore en HD n’empêche cependant pas le titre d’afficher encore certaines lacunes sur le plan de l’ergonomie, comme la gestion poussive de l’inventaire ou l’absence de marqueurs qui auraient pu nous aiguiller dans la quête des 108 (ou plutôt des 216) étoiles.