
Voici une licence qui existe depuis les années 90, et sa tâche est délicate : se moderniser sans perdre ses spécificités. King’s Bounty vit toujours dans l’ombre du cousin Heroes of Might and Magic, mais cet opus est l’occasion de rebattre les cartes. Sont-elles plaisantes à parcourir, ces cartes ?

L’histoire commence dans un royaume magique, où vous incarnez le héros que vous avez choisi. Pas de personnalisation, vos possibilités se limitent à trois archétypes que vous pourrez faire évoluer à votre guise. Chacun des personnages a sa propre histoire mais ça ne change pas grand chose au scénario. Vous progressez dans le Royaume de Nostria et, après une première carte qui sert de grand tutoriel, c’est une grande zone qui vous est offerte. Vous la traversez dans une vue à la troisième personne, le jeu lorgnant du côté de The Witcher pour sa partie en monde ouvert. Les lieux sont émaillés de discussions et de quêtes, les dialogues intégralement doublés (en anglais) et les histoires s'entremêlent. Ne vous attendez pas à des scénarios très recherchés, les quelques rebondissements ne suffisent pas à rendre les dialogues intéressants. L’expérience est plus proche d’un MMORPG, avec des quêtes qui vous demandent d’aller d’un point A à un point B. Voire de revenir au point A.


Ça ne serait pas un problème si les déplacements étaient agréables, hélas le personnage s’avère assez lent. Nous avons bien accès à un cheval, mais lui-même n’est pas très rapide. Et les points de téléportation sont très éparpillés. Au moins, vous aurez l’occasion d’admirer la direction artistique, plutôt réussie, du titre. Les zones sont mignonnes et construites avec attention, du village de bûcheron à la grande ville en passant par les marécages. Le tout est agencé de manière organique, d’une ville riche à une autre plus pauvre, d’un petit village de bûcherons en bordure de forêt. Et comme vous êtes obligé de prendre votre temps, l’immersion est réussie. Quelques zones instanciées vous enverront dans des mondes parallèles, à l’ambiance plus fantaisiste, pour changer un peu. Techniquement, le jeu est très en retard, avec des éléments qui apparaissent trop tard et des textures assez moches, ça peut suffire à gâcher l’ambiance aux plus exigeants.




Et pendant que vous vous promenez, vous aurez l’occasion de réfléchir à la façon dont vous voulez terminer vos quêtes. Vous pouvez choisir votre alignement, avec des approches tantôt loyales tantôt chaotiques, et vous pouvez également préférer régler les situations par la force ou par la finesse. Ces choix débloquent des possibilités dans un arbre de compétence, avec l’effet pervers habituel : vos choix de gameplay vous forcent à prendre des choix de scénario correspondant, et inversement. Si vous voulez jouer avec les compétences débloquées par les arbres “loyal” et “force”, votre scénario sera obligatoirement celui de “je suis gentil et bourrin”. Et si vous choisissez d’être quelqu’un de pas sympa, il faudra accepter d’utiliser les compétences liées dans l’arbre correspondant. Les choix ont des conséquences limitées sur l’histoire, et toute la mécanique reste surtout un artifice de personnalisation des combats.

Bounty Hunter

Ce sont justement les affrontements qui donnent envie de continuer votre progression. Vous ne vous battrez jamais vous-même, vous allez plutôt parcourir les villes et campagnes en recrutant de pauvres hères qui se chargeront de mourir pour vous. La diversité des unités est bienvenue, car au-delà des classiques archers et épéistes humains, vous pourrez ajouter tout un panel de créatures allant de l’aigle aux jeteurs de sorts maléfiques, en passant par l’élémental de feu. Chercher la combinaison d’unités et de sorts la plus efficace est aussi grisant que le serait la création d’un deck dans un jeu de cartes. On ressent la hâte d’essayer si l’association des arbalétriers lourds, qui peuvent paralyser des unités ennemies, et des gros trolls de pierre bien costauds, va fonctionner. C’est par là que le jeu fournit sa dose d’adrénaline, car il faut réussir à équilibrer des données comme le moral, les résistances, la vitesse des unités ou les compétences. Et le tout est remis en question à chaque nouvel affrontement, en fonction des armées que vous aurez face à vous. Sachant que l’on peut piocher dans les unités de réserve pour les titulariser. Avec cinq unités présentes par bataille, il faut faire des choix.

Les combats se déroulent au tour par tour, dans un mélange de XCom et de Heroes of Might and Magic. La transition entre l’open world et la carte de bataille donne l’opportunité de se battre là où l’on marchait juste avant : si un combat se déclenche dans une ruelle, vos armées devront évoluer dans cette même ruelle reproduite sur un carte en hexagones, avec très peu de possibilités de déplacement. Le terrain aura une importance cruciale dans certaines batailles, vous obligeant à adapter votre stratégie. Certains combats sont plus difficiles que d’autres, si vous aimez vous creuser la tête pour trouver comment vous en sortir, King’s Bounty 2 est pour vous ! Dommage que les interfaces ne soient pas toujours très claires, et qu’elles s’avèrent assez pénibles à parcourir, notamment pour aller regarder les stats des unités alliées ou ennemies.



Conclusion
Points forts
- La diversité des unités que l’on peut recruter
- La création d’armée et toutes les données à prendre en compte
- L’univers plein de lieux sympa et agencés de manière organique
- Le challenge proposé par certains combats
Points faibles
- La technique à la peine
- L’histoire et les quêtes, pas passionnantes
- Les déplacements pénibles
- L’interface peu claire
- Si seulement le système de choix était bien exploité !
Note de la rédaction
Oui, les quêtes et l’histoire ne sont pas dingues. Oui, la technique du jeu est dépassée. Oui, les déplacements sont rébarbatifs et l’interface pénible. Mais on s’amuse en créant son armée, en choisissant parmi toutes les possibilités la meilleure combinaison possible. On prend du plaisir à parcourir cet univers savamment construit. Et on s’excite au moment de se confronter aux défis des combats corsés qui nous font face. Malgré ses défauts, le jeu parvient à scotcher le joueur et à lui donner l’envie de charger sa partie. Il ne faut pas bouder son plaisir !