Les jeux adaptés de mangas et d’animation japonaise passent-il un peu à côté de leur sujet ? C’est la question que l’on peut se poser lorsque l’on voit les retours critiques des joueurs sur la plupart des titres sortis ces dernières années. Ces titres divisent les fans et d’une personne à l’autre, les expériences sont toujours très différentes. Pour une raison assez simple : certains studios ont parfois du mal à saisir l’essence de ce qui fait le succès de ces œuvres, et ne peuvent pas entièrement le restituer dans leurs créations.
Il y a quelques jours, je tâchais tant bien que mal de vous expliquer un concept de game-design, appelé fantasy. Navré pour l’anglicisme, je ne suis pas game-designer, je n’ai pas créé ni conceptualisé ce terme ! Il est pourtant crucial, notamment au moment de créer les jeux qui nous concernent aujourd’hui, puisque c’est en comprenant pourquoi les fans de ces mangas et animes les aiment (ce qui les fait « fantasmer ») que les game-designers pourront créer la fantasy adéquate, puis la peaufiner. Dans le petit monde des adaptations, à travers l’histoire du jeu vidéo, plusieurs studios ont su cerner à merveille leur sujet et proposer des adaptations plutôt séduisantes. Difficile ici de ne pas mentionner Dragon Ball Z : Budokai Tenkaichi et ses deux suites, qui ont hypnotisé de nombreux fans grâce à leurs grandes arènes et surtout la possibilité de s’y déplacer en volant. Le jeu répondait alors à un vieux fantasme : pouvoir enfin voler librement dans un jeu Dragon Ball, et donc jouer avec l’espace pour combattre au mieux son adversaire.
Si je choisis l’exemple de Dragon Ball et Dragon Ball Z Budokai Tenkaichi, ce n’est pas innocent : la plupart du temps, les mangas et animes adaptés terminent en jeux de combat. Et on peut comprendre pourquoi : il s’agit la plupart du temps de shonen mangas. Les joutes qu’ils mettent en scène sont au cœur de la narration et c’est souvent ce que les fans retiennent le plus de leurs œuvres favorites. Mais ce serait oublier que beaucoup d’entre eux proposent plus qu’un simple enchaînement de pugilats. Y compris les plus populaires, les plus « grand public », comme par exemple Naruto. Le mangaka, Masashi Kishimoto, a conçu un monde, un univers que les premiers tomes exploitent à merveille. Les ninjas sont des mercenaires, confrontés aux dangers de leur condition dès leur plus jeune âge. Ils évoluent dans un monde captivant, coincé entre monde moderne et Japon féodal. Mais mis à part Naruto : Rise of a Ninja et Naruto : The Broken Bond, aucun n’a cherché à exploiter cette composante de l’œuvre de Kishimoto. Pas de voyages, pas de vie de mercenaire. Alors qu’il y aura largement de quoi proposer, par exemple, un jeu action/aventure. Ce constat, on peut le faire pour Naruto comme pour de nombreux autres grands noms de la japanimation. À mon grand regret.
Pourtant, les possibilités ne manquent pas. Alors, si vous le voulez bien, procédons maintenant à un petit exercice : je vais prendre quelques noms de mangas/animes et vous proposer une façon de les adapter qui me paraît intéressante. Pour cela, je suis allé chercher dans d'autres jeux déjà existants des idées de game-design qui fonctionneraient bien avec les univers de ces oeuvres.
- Puisque je parlais de Naruto : j’aimerais voir Bandai Namco s’inspirer du travail de Konami et d’Hideo Kojima sur Metal Gear Solid V : The Phantom Pain. Quoi de mieux qu’un jeu d’infiltration pour un manga mettant en scène des ninjas ? Remplissez ce vaste désert par une reproduction du monde imaginé par Kishimoto, et les bases que doit pénétrer Snake par des villages cachés. Ou de petits camps à infiltrer ou à attaquer. Remplacez les gadgets hi-tech par des outils ninja et les gunfights par des combats de jutsu, et hop, vous obtenez un jeu Naruto sacrément sexy.
- Si je vous parle de de One Piece et de son monde de pirates, sans doute penserez vous à Assassin's Creed IV : Black Flag ou même Sea of Thieves. Pour ma part, je préférerais que l’on s’inspire de The Legend of Zelda : The Wind Waker. De vastes océans à explorer et à cartographier, une quête épique obligeant le joueur à aller d’île en île, et des rencontres avec de nombreux peuples différents ? Voilà qui ferait honneur à l’œuvre colossale d'Eiichiro Oda.
- Les différentes séries Gundam ont eu droit à leur lot de jeux de combat et de muso. Et si certains étaient plutôt bien fichus, ils oublient l’essentiel. Il faut donc que le joueur incarne le pilote, le ramener à sa condition d’être humain. Un jeu qui ne l’obligerait pas à monter ou à descendre du cockpit passe à côté de ce plaisir, celui de mettre la main, même temporairement, sur une machine gigantesque, à la puissance de frappe destructrice. Titanfall 2 a plutôt bien traité cette fantasy, mais c’est un autre jeu qui retiendra ici mon attention : paru en 1998, il a été développé par Monolith Productions, qui sortira quelques années plus tard le très populaire F.E.A.R.. Ce jeu-là l’est un peu moins : il s’appelle Shogo : Mobile Armor Division, et c’est un FPS très inspiré de Mobile Suit Gundam. Dedans, le joueur incarne un pilote et alterne les phases de combat à pieds et les phases en mecha au fur et à mesure que l'intrigue se déplie. Tout est là, ne manque que l’univers Gundam.
- Je vous en soumets un petit dernier, pour le plaisir : l’arc Greed Island de Hunter X Hunter était tout simplement brillant. À ce jour, je rêve toujours d’un genre de MMORPG qui l’exploiterait, et dans lesquels les joueurs se battraient entre eux et contre la montre pour mettre la main sur les cents cartes du classeur.
Et vous alors ? N’hésitez pas à partager et à détailler vos idées en commentaires de cet article.