La semaine dernière, Facebook annonçait l’Oculus Quest, nouveau casque de réalité virtuelle de la firme. Ce produit autonome et mobile, apportera dès le printemps 2019 ce que le public attend depuis toujours, à savoir, une solution simple, non-câblée, permettant de profiter de la VR n'importe où et, accessoirement, de se déplacer chez soi sans risque tout en gardant le casque sur la tête. Etonamment, sa stratégie, ses enjeux, et le contexte dans lequel il sera déployé, ressemblent beaucoup au périple qu'a connu la Wii U à son époque. La marque Oculus devra donc redoubler d'efforts pour faire du Quest une réussite commerciale...
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Rappelons, en préambule, que la précédente console de Nintendo basait son succès sur l’adhésion du public et des développeurs à une nouvelle philosophie de jeu, orbitant autour de l’asymétrie de gameplay introduite par l’arrivée du Gamepad, la tablette tactile de la console. Car si la Wii proposait en 2006 de “jouer différemment”, la Wii U promettait quant à elle des “jeux pensés différemment” et c’est exactement sur ce créneau que vient de s’engager Facebook avec l’Oculus Quest.
Basé sur les mêmes technologies que l’Hololens en matière d’analyse de l’environnement, le casque permettra notamment de jouer dans plusieurs pièces de votre logement et de travailler en réalitée mixte. Le Quest a, de ce fait, plusieurs casquettes. Il est à la fois un outil familial, professionnel, ludique et social. Dans son écosystème, il se place entre l’Oculus GO (autonome, abordable et multimédia) et l’Oculus Rift (premium et gamer avant tout), desquels il devra suffisamment se différencier pour justifier un prix d'achat dépassant probablement les 400 € sur le marché français.
Le cocktail Quest : un zeste d'Hololens et les gestes du Rift
L’Oculus Quest offre donc une innovations de rupture, en introduisant la réalité augmenté dans le cocktail proposé par la firme. Michael Abrash, sur la scène de l'OC5, le décrit comme la première étape de la quête vers le casque VR/AR ultime. Le Quest est donc le "proof of concept" commercialisable de cette philosophie. De la même manière, la Wii U incarnait la phase d'apprentissage de Nintendo en matière de tablette tactile et de portabilité de l’expérience "console de salon”. Six années plus tard sortait la Switch, héritière de cette même philosophie et dont le succès n'est plus à prouver.
Ne nous voilons pas la face : le Quest, de par son architecture technologique forcément limitée, se prive d'ores et déjà d'une gros partie du catalogue Rift et ce qu'il fera tourner subira très probablement un certain downgrade technique. Pour les joueurs PC, jadis coeur de cible d'Oculus, le Quest n'est donc pas vraiment un achat intéressant, à moins que les développeurs n'y créent des jeux exclusifs ou des versions tirant profit de cette nouvelle dimension en matière de mobilité, véritable plus du Quest que n'a pas le Rift. Car si le code de plusieurs jeux, tels que SuperHot VR, ont été portés "en quelques semaines" sur le Quest, qu'en est-il des déplacements et de l'hypothétique exploitation du free-roaming ? Cette adaptation à de nouveaux horizons a un coût significatif, aussi bien en temps de production qu'en argent. On se retrouve donc encore une fois dans le même schéma que la Wii U : un appareil moins puissant que la concurrence directe, mais dont les features, si elles sont pleinement exploitées, élargissent grandement le spectre des clients potentiels. En l'état, l'Oculus Quest fait l'impasse sur les possesseurs de PC gamer, et sur les propriétaires de casques premium.
Le suivi des développeurs et le social, clé de voûte du succès pour le Quest
Cette attention des développeurs à l'égard des portages "Rift - Quest" et le soutien financier de Facebook durant cette phase sont la clé de voûte du succès du Quest auprès des acheteurs du Rift. C’est ici, encore une fois, le même cas de figure qu’au début de la Wii U, puisqu'on se demande combien de jeux seront “pensés différemment” sur le Quest, au lieu d’adopter un modèle “fixe” qui sera facilement porté sur le Rift, les casques WMR, le PSVR et sur le HTC Vive. D’ailleurs, ce dernier avait lui aussi basé sa stratégie sur les déplacements dans une aire de jeu mais avait vite mis de côté cette feature, faute de jeux l'exploitant pleinement. La technologie est en revanche utilisée dans le domaine professionnel, notamment sur les Escape Room en VR. A ce niveau là, le Quest a probablement un coup à jouer et offre théoriquement un confort supérieur pour un coût jusqu'à neuf fois moins élevé.
Le Quest est donc un véritable alien sur le secteur de la VR. Il dispose d'un potentiel certain mais devra se faire un nom et une clientèle très rapidement en vue de lancer la machine côté développeurs tiers, dans l'applicatif comme dans le gaming. Tirera-t-il des enseignements du périple de la Wii U, dont il se rapproche, tant en matière de positionnement stratégique que de contexte de lancement ? Réponse au printemps 2019.