Le pixel à l’honneur

Avant d’aborder ce que la Gamebuino a dans les entrailles, il est bon de rappeler que ce projet, issu d’une campagne réussie de financement participatif, est imaginé à la base par un étudiant qui pendant un moment s’occupait lui-même de l’envoi des consoles commandées. La petite machine, dont la taille est proche de celle d’une Game Boy Micro, est avant tout très compacte. Contrairement à d’autres consoles dites portables, elle est pensée pour tenir vraiment dans la poche, grâce à sa légèreté et à ses dimensions qui n’excèdent pas celles d’un paquet de mouchoirs (105 mm x 54 mm x 17mm). L’objet se tient plutôt bien en main, même si la croix directionnelle a vite fait de montrer ses limites sur certains jeux. Orientée vers les gros pixels, la Gamebuino s’équipe d’un microcontroller de 32KB de RAM, pour un affichage 1.8” en 16 couleurs indexées. Cela signifie que les jeux créés ressemblent pour la plupart aux créations MS DOS pour Windows 3.1 sorties dans le début des années 1990, voire Game Boy mais avec quelques couleurs. Ces performances techniques tournées vers le passé lui assurent cependant une excellente autonomie, avoisinant la vingtaine d’heures d’utilisation avant que la batterie soit entièrement vidée. La charge se fait via un câble micro USB fourni dans la boîte.

Créer, avec un “c” comme C++

La console est open-source et basée sur le logiciel de développement IDE Arduino. L’information à retenir ici, c’est que pour créer “facilement” un jeu, il faut obligatoirement passer par le C/C++, le fameux langage de programmation généraliste. Ne vous attendez pas à une interface graphique comme nous avons l’habitude d’en voir dans les Little Big Planet ou autres Project Spark via un logiciel distribué avec l'appareil. Le code s’écrit ici à l’ancienne, ligne par ligne, fonction après fonction. En guise d’exemple, voici ce qu’il faut écrire pour faire apparaître la phrase “Silent Jay est dubitatif” à l’écran au lancement du programme :

#include <Gamebuino-Meta.h>

void setup() {
  gb.begin();
}

void loop() {
  while(!gb.update());
  gb.display.clear();

  gb.display.print("Silent Jay est dubitatif");
}

Du code, rien que du code. Le langage choisi étant le même que celui utilisé dans le monde professionnel, la Gamebuino peut être perçue comme un outil aidant à mettre un orteil, puis le corps tout entier, dans le monde du développement. La console est donc particulièrement tournée vers les personnes souhaitant apprendre activement comment coder, mais ne laisse aucune chance à ceux qui souhaiteraient créer des concepts rapides sans (trop) mettre les mains dans le cambouis.

Le site officiel propose heureusement une multitude d’ateliers afin d’aider les débutants à comprendre le langage. Les applications à télécharger étant en open-source, il est évidemment possible de piquer des bouts de code provenant d’autres programmes pour avancer un peu plus vite. Les passionnés d’électronique seront ravis d’apprendre qu’ils pourront également retirer la coque de protection translucide, et ainsi accéder à un circuit imprimé prêt à subir toutes les expériences désirées. Les pros de la bidouille devraient donc trouver des utilisations correspondant précisément à leurs besoins, même si ces derniers n’ont rien à voir avec le monde du jeu vidéo.

♫ Des p’tits jeux, des p’tits jeux, toujours des p’tits jeux ♫

La bibliothèque de jeux, disponible sur le site officiel du groupe, est complétée par les propositions de créateurs passionnés qui envoient des titres programmés par leurs soins. Il suffit alors de mettre les fichiers sur la carte microSD de l’appareil grâce à un adaptateur USB fourni afin d'en profiter sur la console. Ce qu’il faut retenir, c’est que tout ce qui se télécharge dans le but de fonctionner avec la Gamebuino est gratuit. Le fait que l’on retrouve beaucoup de copies de jeux connus rappelle dans une certaine mesure ces consoles chinoises dont se délectent quelques Youtubeurs, où les clones de titres légendaires tels que Mario, Street Fighter ou encore Contra hantent des cartouches “300 en 1”. Avec un concept basé sur la création de jeux puis leur partage en ligne, la bibliothèque de la Gamebuino fait face aux affres habituelles de ce genre de procédé : les propositions sont loin d’être toutes remarquables.

L’entreprise française a imaginé sa nomade dans le but de viser l’efficacité. Elle dispose effectivement d’une croix directionnelle, de deux boutons A et B, ainsi que de deux touches Home et Menu. Ce qui est largement suffisant pour les jeux aux concepts très arcade qui ornent sa librairie. Il n’y a effectivement pas forcément besoin de boutons supplémentaires lorsque l’on s’amuse à des copies de Tetris, Pokémon, Pong et Yahtzee. Le menu donne également accès à diverses options plus ou moins anecdotiques allant du contrôle des lumières et du son, à celui des captures (d’écran, et de clip vidéo). Il est certain que dans sa version de base, la Gamebuino fait un peu jouet en plastique disposant du minimum syndical en termes d’ergonomie.

Après notre semaine passée en compagnie de la Gamebuino, nous pensons que son futur ne se fera peut-être pas chez les joueurs, mais plutôt du côté de l’éducation, puisqu’elle est une porte d’entrée à l'apprentissage de la programmation. Ses jeux gratuits conçus par d’autres passionnés sont pour la plupart très inspirés de ce qui existe déjà ailleurs, mais sur un petit écran affichant quelques couleurs et de gros pixels. Le trip rétro et la grande facilité d’utilisation de l’objet sont autant d’atouts qui pourraient néanmoins convaincre une frange de passionnés. La programmation en C/C++, étape incontournable pour qui veut créer un titre sur ce support, plombe tout de même la grande facilité de création promise. Un produit avant tout pensé pour les curieux attirés par les pixels, et qui ne sont pas rebutés par les lignes de code et les points de soudure.