Quand on évoque l'eSport, on pense souvent à tout, sauf à Just Dance. Et pourtant, depuis trois ans, danser et conquérir les foules de la prestigieuse Coupe du Monde des Jeux Vidéo est devenu une possibilité tangible. En moins de dix ans, Just Dance, titre de danse entre amis d'Ubisoft, s'est donc imposé comme phénomène grand public, environnement compétitif en ligne, et surfe désormais sur une vague de plus en plus tournée vers l'événementiel : l'eSport. Tendance faite pour durer ou simple feu de paille rondement marketté, tâchons d'analyser ensemble la pénétration d’un marché en constante évolution...
Ouvrons nos chakras de la tolérance
Si l’eSport et Just Dance vous paraissent incompatibles au point d’avoir été scandalisé à la découverte du thème de cet article, c’est que vous faites sans doute partie de l’énorme caste de joueurs légèrement réfractaires au changement. Vous le savez sans doute déjà, les tendances vidéoludiques évoluent bien plus vite que nous, et notre capacité d'adaptation a parfois un peu de mal à encaisser et comprendre l'appétence record du public pour certaines mouvances. En 2014, tandis que l'ESWC, la Coupe du Monde des Jeux Vidéo, jadis intimement liée au succès de titres comme CS ou Starcraft, annonçait l'arrivée de Just Dance dans ses catégories, peut-être vous êtes-vous alors dit "j'suis trop vieux pour ces conneries". Que vous ayez eu, sur le moment, raison ou tort n'est pas la question. La question est de savoir si cette entrée en fanfare est en adéquation avec les valeurs de l'eSport et surtout de prédire où cette adhésion va mener le jeu d'Ubisoft.
Gaming Live : Just Dance, incontournable des soirées entre amis
Premièrement, acceptons que nous sommes désormais en 2017 et que le jeu vidéo n'est plus cette noble activité partagée par une confrérie de rêveurs. Un petit groupe d'incompris dévoreurs d'épopées digitales et de gladiateurs 2.0 d'une arène sous-terraine qui tremble sous les cris de la foule, à l'abri des regards du reste du monde. Aussi vite que le jeu vidéo, au sens large, s'est laissé apprivoiser par les smartphones de monsieur Tout-le-monde, l'eSport est en train de subir une ouverture vaste. Se voulant représentatif du parc grandissant de jeux dits « compétitifs » sur le secteur vidéoludique, l'eSport se devait en toute logique d'accueillir ces cinq dernières années des titres que certains qualifient de "casual", ne serait-ce que pour répondre à l'immense demande de ces joueurs qui, bien qu’ayant un casier vidéoludique quasi-vierge, finissent bien souvent par être friand de beau jeu sur le titre qui les passionne depuis quelques mois. L'eSport s'ouvre donc au grand public de la même manière que le grand public s'ouvre peu à peu à l'eSport, et les chiffres le prouvent.
Il existe deux sortes d'eSport...
Prenons par exemple Clash Royale, titre ô combien représentatif de la "casualisation de l'eSport", et ne voyez pas cela d'un œil péjoratif : il s'agit d'un constat objectif. Clash Royale a réussi à réunir plus de 100 000 spectateurs simultanés sur sa toute première compétition, alors que le jeu avait à peine un mois. Alors certes, nous sommes bien loin des 8.5 millions de viewers simultanés de la compétition reine de Dota 2, The International, mais il s'agit là d'une immense performance pour un jeu catégorisé "casual" qui, dans l’imaginaire collectif du gamer bien-pensant, n'est pas la cible de joueurs investis d'une certaine passion vidéoludique.
L'eSport à l'ancienne...
Il y a donc deux fronts en constante évolution. On remarque premièrement un renforcement progressif de la scène eSport "classique" avec, dernièrement, une ouverture des vannes au niveau étatique en matière de reconnaissance des statuts et de clarté organisationnelle, dont nous parlerons plus bas. Cet eSport là, vous le connaissez déjà sans doute. Il s'articule autour de communautés excessivement bien organisées et investies, est représenté par des marques fortes, par des jeux forts, et dispose de joueurs dont l'impact médiatique a explosé ces dernières années, notamment grâce au streaming, à YouTube et aux réseaux sociaux. Ce milieu prend progressivement du galon et se responsabilise dans le but d’égaler, à terme, le niveau de professionnalisme et la qualité de divertissement d'un sport conventionnel. Et ce n’est pas pour rien si les clubs de foot ont, à l’unisson, créé leurs teams FIFA dédiées à l’eSport : c’est un signe fort, une preuve de maturité pour un milieu qui, enfin, est pris au sérieux par le public et les institutions.
...et l'eSport nouvelle génération
Enfin, un nouveau type d'eSport a fait son apparition ces dernières années, celui du "casual gaming" sur lequel des populations pas forcément joueuses à la base s'investissent avec une ferveur telle qu'elles en viennent facilement à consommer de l'eSport sur leur titre du moment. Sur ce secteur compétitif, c'est véritablement la facilité d'adoption et de compréhension du jeu qui prime et attire le badaud. Mais alors, pourquoi cette forme d’eSport fonctionne-t-elle sur un public si « jeune », au sens vidéoludique du terme ? La réponse est sans doute purement psychologique. Voir des gens jouer au jeu que vous avez maîtrisé en deux jours, y faire du beau jeu et gagner des millions de dollars en cinq minutes, a quelque chose d'hypnotisant et de divertissant. Il y a un véritable côté "succès express à notre portée" qui nous attire et nous donne envie de regarder ces parties, ne serait-ce que pour comprendre comment être le meilleur sur des titres aux mécaniques si simples en apparence.
Voilà donc cette nouvelle branche de l'eSport, focalisée sur des jeux au succès retentissant et parfois éphémère, qui cible le grand public avec des jeux très simples à comprendre et à maîtriser. Maintenant que la notoriété du phénomène n'est plus à faire et que la masse critique de joueurs pour offrir du compétitif de qualité est atteinte, rien ne semble arrêter ce cercle vertueux. L'eSport, historiquement niche du jeu vidéo, est devenu une ruche bourdonnante d'adeptes de tous âges et de tous horizons, venus regarder des jeux en tout genre. Mais à parler d'eSport à tort et à travers, ne risquons-nous pas d'en perdre la substantifique moelle ?
Mettons-nous tous d'accord : qu'est ce qu'un "jeu eSport" ?
Le terme "eSport", qui caractérise la compétition vidéoludique de haut niveau et tout ce qui gravite autour (métiers, événements, règles, lexique...), est utilisé à tire larigot depuis des mois. Définir la pratique et les frontières de l’eSport est d’ailleurs une activité qu’énormément de médias généralistes se sont empressés de pratiquer l'an dernier, alors que le parlement français promulguait, le 7 octobre 2016, la loi pour une République Numérique. Grosso modo, ce texte clarifie la situation de l’eSport au niveau humain (reconnaissance du statut des joueurs au niveau du droit du travail) et organisationnel (suppression de l’étiquette « jeu d’argent » trop souvent apposée sur ces compétitions). En attendant la définition officielle du terme dans le Robert ou encore le Larousse, deux dictionnaire qui feront entrer l’ « eSport » dans leurs pages cette année, tâchons donc de citer les médias experts qui connaissent bien leur sujet et ce, depuis des années.
De ce que nous pouvons lire sur le web, notamment chez nos confrères du site Millenium, un jeu eSport se caractérise par plusieurs traits identitaires. Il se doit d’être facile à regarder et ses mécaniques doivent être, dans les grandes lignes, assez simples à assimiler. Toutefois, c’est véritablement au niveau de la profondeur de game design (le fameux "metagame") que les titres taillés eSport se caractérisent. Ils se doivent d’être pleins de surprises et de nuances de gameplay, autant d'éléments qui permettent de jauger les joueurs et ainsi de différencier facilement le novice et l’expert. Enfin, il est important d’isoler la chance de l’équation, afin que les affrontements soient à la hauteur du spectacle et puissent procurer aux différents matchs quelques moments de tension et des retournements de situations, sans pour autant que l’issue de la compétition ne dépende d’une donnée totalement aléatoire. Le lien avec Just Dance est donc plus ou moins respecté, le jeu est ici excessivement simple à comprendre, simple à pratiquer mais, côté "metagame", on repassera. Ubisoft, conscient de ce petit défaut, s’est donc mis en tête de changer les règles pour sa formule compétitive, en introduisant des conditions de victoire qui font de ce jeu vidéo, le support d’un show aux ressorts en constante évolution.
Just Dance introduit les smartphones comme capteur de mouvement
Du « jeu sympa » aux halls de l’ESWC : le périple de Just Dance
Lancé en 2009 par un Ubisoft qui capitalisait déjà sur ses deux franchises du moment, Assassin’s Creed et Les Lapins Cretins, Just Dance a proposé le même concept années après années, mais a su maintenir des ventes élevées tout en surfant sur les différentes évolutions technologiques à sa portée. De la Wii aux smartphones en passant par Kinect et le Just Dance Now totalement dématérialisé, rien n’échappe à l’équipe de développeurs d’Ubisoft. Dès l’édition 2014, qui représente le 5ème jeu de la série, Just Dance propose des parties à 6 joueurs et un mode Karaoké. C’est aussi à cette occasion que sort le World Dancefloor, première étape compétitive du jeu, qui permet aux joueurs de s’affronter simultanément, sur la même chanson, via internet. L’année suivante, c’est le contrôle au smartphone qui fera son entrée et rendra par la même occasion le jeu bien plus accessible aux groupes de joueurs, qui se gênent désormais moins durant les chorégraphies.
Toujours en 2014, Just Dance fait une apparition retentissante à l’ESWC (au sein de la Paris Games Week) pour les phases finales du tournoi 2014, en marge des compétitions locales et du classement sur internet. Le pari est gagnant et la scène est remplie. Jeunes et moins jeunes se prennent au jeu et regardent la compétition avec plaisir. Les plus âgés (notamment les parents) nous expliquaient alors que c’était plaisant à regarder, qu’ils comprenaient tout ce qu’il se passait même s’ils n’étaient pas friands de jeu, qu’ils pouvaient danser sur la musique, participer... et que c’était l’un des seuls endroits où ils pouvaient s’assoir et s’amuser dans le hall. On retrouve là les traits typiques du spectateur eSport « casual gaming » décrit plus haut : la convivialité, l'accessibilité exacerbée et l'impression de voir une compétition "à notre portée". Les éditions suivantes de la Just Dance World Cup à la Paris Games Week furent également des réussites et permirent d’identifier divers champions, devenus égéries de Just Dance aux yeux du public. Une, surtout, se distingue des autres, par son palmarès de triple championne de France et vice-championne du Monde, mais aussi par son aisance et son charisme. Elle s’appelle Dina, et nous l’avons rencontrée dans le cadre de cet article.
= Un circuit en voie de professionnalisation =
Fraichement revenue de son premier E3, où elle était invitée par Ubisoft en remerciements de son implication sur le jeu, Dina est un modèle d’investissement personnel, à l’image des « e-athlètes » conventionnels. Danseuse occasionnelle de Modern Jazz et adepte du "Just Dance en soirée" avec ses amis, cette jeune femme qui travaille durant la semaine dans un institut de statistiques adopte désormais un rythme de vie éfréné, puisqu’elle dédie une grande partie de ses week-end à la promotion de sa passion, sillonant le pays pour faire des animations Just Dance et danser avec les gens un peu partout : dans les conventions, dans les rassemblements, et même dans les rues pietonnes en térasse d’un café. La compétition Just Dance, qui se déroule en ligne mais aussi fin octobre et en début d’année, lui impose également de connaitre à la perfection un grand nombre de chorégraphies du jeu. Cette seconde vie ne lui permet malheureusement pas de se délester de son travail, au niveau financier, malgré ses nombreuses interventions au niveau national, sous l’impulsion d’Ubisoft, qui compte régulièrement sur son statut de championne pour promouvoir l’aspect compétitif du titre.
Pendant 3 ans nous avons travaillé avec l’ESWC sur un format qui répondait à la fois aux modalités de la compétition eSport et aux spécificités de la franchise. Just Dance repose sur la danse et, au-delà du seul scoring, la compétition fait appel au talent de danseur des participants. Il était alors essentiel d’introduire un jury de professionnels capable de juger les performances des compétiteurs selon des critères artistiques, dont sa capacité à transmettre des émotions et à partager son univers. Cette année, nous avons décidé d’aller plus loin. Pour la première fois, des castings seront organisés dans 5 capitales européennes pour gagner sa place pour la Finale Nationale retransmise sur un canal de diffusion majeur de chaque pays. Les gagnants de chaque finale nationale pourront ensuite accéder à l’ultime étape de la compétition : la Finale Mondiale de la Just Dance World Cup qui aura lieu début 2018.
La Just Dance World Cup s'annonce en trailer
Ambassadrice non-officielle, Dina n’est pas contractuellement liée à l’éditeur français car sa condition de compétitrice serait potentiellement mise en danger par un contrat. L'existence d'un tel lien entre la joueuse et l'entreprise génèrerait en effet assez vite des soupçons de partialité dans l'attribution des titres, étant donné que l’eSport Just Dance dépend de deux votes : celui de la machine et celui du jury, composé de personnes proches du développement de Just Dance. Si celui qui vous paye pour être étincelant peut avoir ne serait-ce qu’une once d’influence sur votre classement de champion, la compétition n’est pas justement arbitrée. Dina nous précise d'ailleurs que la compétition cherche encore son règlement idéal et n’hésite pas à changer de méthode de comptage année après année, ce qui est toutefois normal après seulement trois ans d’existence. Voyons donc plus précisément comment se déroule un match de finale de Just Dance…
Grande finale, mode d’emploi
Face à la tentaculaire playlist de Just Dance, difficile de se dire prêt à connaitre sur le bout des doigts chacune des chorégraphies. C’est pourquoi la sélection des chansons de compétition est donnée « deux à trois semaines » avant l’événement, tandis que le tirage effectif des 2 ou 3 chansons sur lesquelles vont concourir chacun des candidats se fait bien plus tardivement, parfois même la veille comme ce fut le cas dans le cadre de l’ESWC Winter 2017, comme nous le précise Dina. A partir de là, les e-athlètes bossent à fond leurs danses et arrivent sur scène fringants, dans le but de convaincre les juges, le public, et la machine. A l’issue de chaque danse, le kinect 2.0 de la Xbox One (l’outil le plus précis pour déterminer le scoring sur Just Dance) donne les deux scores qui déterminent le gagnant. Seulement voilà, l'évaluation ne s'arrète pas là et un premier point est donc attribué à l’un des deux compétiteurs qui s'est, en toute logique, le mieux débrouillé sur la chanson.
C’est ensuite le jury qui prend la parole et donne, à la manière d’un télé-crochet, son expertise sur l’énergie et l’émotion qu’a dégagée chacun des danseurs. Si le premier juge est en accord avec la machine et donne son point au "gagnant au score", le vainqueur de la partie est conforté et remporte son premier round. En revanche, si le premier juge estime que malgré son déficit de point, le "perdant au score" s’est mieux débrouillé que l'autre candidat, il y a alors un point partout et c’est au second juge de départager. La tension est donc palpable à chaque délibération et le jeu ne donne donc qu’un avis provisoire sur la définition du gagnant. Par ailleurs, si ce concept compétitif vous plait et que vous sentez l'âme d'un champion de danse, sachez que les qualifications en ligne sont toujours effectives pour la Just Dance World Cup. Il vous suffit de vous rendre sur le site officiel pour connaître la marche à suivre et tenter de faire partie des candidats qui iront jusqu'aux phases finales, face aux professionnels qui vous jugeront.
C’est donc véritablement le jury qui décide qui gagne. En d'autres termes : Ubisoft, par l'intermédiaire des juges qu'il mandate et qui sont proches du développement du jeu, décide qui remporte la compétition sur son jeu eSport. Comme le rappelle Dina, « le but de l’eSport, et plus particulièrement de celui sur Just Dance, est de dégager de l’émotion » et l'aspect purement impartial de l'évaluation semble donc mise de côté. L’année passée, en 2016, la notation était encore différente, puisque la console donnait un point, et un jury de 3 personnes donnait également un point après délibération. S'il y avait égalité, c’était au public de voter. Le problème, comme nous l’explique Dina, c’est qu'on « comprend vite qu’un joueur connu gagnera face à un joueur pas connu s'il y a vote de popularité ». Pour cette année 2017, avec le système de vote expliqué plus haut, Dina a fait face à quelques déconvenues, notamment sur l’ESWC Winter : « Je suis tombée contre un adolescent de 14 ans, je savais d’avance qu’il allait gagner. Je l’avais vu danser et il dansait bien ». Selon elle, peu importe les points attribués par la console, le jeune Chazza allait gagner grâce au vote du jury, qu'elle devinait déjà impressionné par une telle performance pour un si jeune compétiteur.
Difficile donc d’évaluer de manière équilibrée un match de Just Dance, car la machine n’est pas non plus parfaitement objective lorsqu’il s’agit de capter les mouvements : «La captation marche plus ou moins bien selon ta morphologie. Plus tu prends de place à l'écran, mieux tu es capté. Si deux personnes de carrure totalement différente font un match, il y aura un léger avantage pour la personne qui a la carrure la plus imposante ». Concernant la méthode d'attribution des points, Dina a d'ailleurs fait remonter ses recommandations. Selon elle, les juges doivent être plus nombreux et venir de différents corps de métier, notamment la danse ou encore le spectacle et doivent inclure des membres du public, lesquels donneront leur voix sans être influencés par l’applaudimètre afin d’éviter le souci lié à la notoriété, que nous évoquions plus haut. Espérons donc que les prochaines éditions prennent en compte ces retours pour équilibrer la compétition. En l’état, l’eSport Just Dance a donc le fessier entre deux chaises, entre le show bien réel qu’il procure au public, façon Danse avec les Stars 2.0 et les velléités eSport d’Ubisoft qui permettent au jeu d’attirer du public vers ce fameux spectacle susmentionné. Pourtant l'attrait est bien réel, le public eSport "casual" est présent mais l'ADN actuel de la compétition s'avère assez éloigné du carcan eSportif, qu'il soit classique ou casual.
Nous voyons une vraie communauté se fédérer autour de nos événements Just Dance depuis 3 ans mais aussi en dehors de la compétition officielle. En France par exemple, les membres de la communauté Just Dance ont créé des « leagues » qui se rencontrent lors des différentes conventions sur lesquelles Just Dance est présent. De même aux Philippines, où Just Dance est très populaire, des « crews Just Dance » s’affrontent tous les ans en cosplays sur les chorégraphies Just Dance. Il y a beaucoup d’autres initiatives de ce genre à travers le monde et nous espérons que la nouvelle formule de la JDWC nous permettra de l’ouvrir au plus grand nombre.
Trailer de Just Dance 2018
Vers quoi pourrait aller l’eSport Just Dance ?
Pour s’élever au rang de véritable jeu eSport, ce qui est, on l'imagine, le but d’Ubisoft avec Just Dance, le titre doit proposer autre chose que son modèle actuel. En l’état, la captation de mouvement « comme à la maison » avec les quelques imperfections qu’elle apporte n’aide pas vraiment à établir un socle eSportif crédible : la machine se doit d’être sans faille pour s'imposer grâce à son œil technique brut et indiscutable. Cette étape passe peut être par le développement d’une caméra dédiée spécifiquement aux compétitions de haut niveau, qui aurait des capteurs bien plus puissants que le Kinect 2.0 et proposerait un traitement de l’action irréprochable.
Il est difficile de fournir des statistiques de fréquentation officielles et représentatives mais nous observons une augmentation de 83% du taux de participation online aux différentes phases de qualifications online de la JDWC 2017 comparée à celle de 2016. Cette tendance de fond est prometteuse pour l’avenir de la compétition.
L’eSport ne s’écrit pas avec l’aléatoire ni avec la chance comme nous l’avons vu plus haut, et c’est pourquoi l’œil artistique qu’apportent les juges se doit d’être lui aussi impartial et donc lié d'aucune façon possible a Just Dance en tant que produit. Enfin, en accord avec la philosophie du jeu vidéo, l'avis des juges ne doit pas être plus important que celui de la machine. Just Dance reste un jeu de danse, basé sur le scoring. Il parait donc impensable sur un jeu eSport de gagner en dépit de ce qu’a prévu le game design pour désigner le vainqueur. Certes, il y a l'émotion, la fraicheur, l'incarnation, mais l'on pourrait par exemple imaginer un impact plus réduit du jury : de quoi combler des écarts de point ou marquer plus clairement un avantage, à la rigueur. De cette manière, aucun soupçon de « chouchoutage » ou de "mise en avant forcée" ne pourrait exister.
Et si le bon média, c'était la télé
De la même manière, il faut que le public ciblé par cette forme d’eSport soit informé de l’existence du circuit compétitif. De très nombreuses personnes interrogent Dina durant ses événements pour se renseigner sur la compétition Just Dance, ignorant jusqu’alors l'existence du circuit. Sa notoriété doit se faire progressivement, mais par quel média ? Les réseaux sociaux sont un bon moyen d’entretenir une communauté mais le « recrutement » de cette dernière doit se faire sur un milieu bien plus ouvert, comme la télé par exemple. Le succès retentissant des shows de danse n’est plus à faire et Just Dance pourrait très justement investir cet environnement pour surfer sur l’ « eSport pour tous » prôné par les chaines de télé depuis la mise en vigueur de la loi pour la République Numérique. De cette manière, le jeu gagnerait en popularité et son circuit eSport serait le plus médiatisé, car présent sur le bon médium, dans une formule idéale et très attirante, même aux yeux du non-joueur potentiellement friands d'eSport casual. Ce show TV pourrait être l'occasion pour Ubisoft de fédérer une communauté chaque semaine et de prendre régulièrement la parole pour par exemple officialiser de nouvelles mises à jour et présenter de nouvelles chorégraphies en avant-première avant de les intégrer au jeu. D’une certaine manière, Just Dance est LE jeu dont le potentiel de séduction est le plus grand sur le public non-initié. Avec ce gain de spectateurs potentiels, les écuries eSport, et notamment RedBull ou Coca Cola, pourraient s’intéresser plus activement aux e-athlètes de cette discipline, ce qui faciliterai grandement la vie et les emplois du temps de nos champions.
Merci à François-Xavier Dénièle pour ses réponses ainsi qu'à Emeline pour avoir relayé nos questions. Merci également à Dina pour sa sympathie, son temps et ses réponses. Nous lui souhaitons évidemment bonne chance pour la compétition.