Airbus propose une version militarisée de son A321 XLR, l'A321MPA, pour remplacer les avions de patrouille maritime français. Face au Falcon 10X de Dassault, ce choix d'un appareil civil reconverti pourrait révolutionner l'aviation militaire. La décision de la DGA est imminente.
L’Europe et le militaire
L'avion de ligne A321 XLR, fleuron de la technologie d'Airbus, pourrait bientôt revêtir l'uniforme de la Marine nationale française. Le constructeur européen a en effet proposé une version militarisée de son appareil, l'A321MPA, pour remplacer la vieillissante flotte d'avions de patrouille maritime Atlantique 2 (ATL-2). Ce projet audacieux, s'il est retenu par la Direction Générale de l'Armement (DGA), marquera un tournant dans l'histoire de l'aviation militaire, en introduisant un appareil civil reconverti au cœur des opérations de défense.
¿A321 MPA para España 🇪🇸?
— Kepa Sagardi (@KepaSagardi) November 9, 2024
Ante los rumores de que el A321 habría sido el elegido por Francia 🇫🇷 como su futuro avión de patrulla marítima, surgen las preguntas sobre si España podría adquirirlo.
Hilo explicativo sobre por qué esa posibilidad es muy remota.
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L'information, initialement relayée par l'analyste défense Kepa Sagardi sur Twitter, puis confirmée lors du salon Euronaval 2024, a suscité un vif intérêt. Airbus et Dassault, avec son Falcon 10X militarisé, sont en compétition pour ce contrat crucial. Si la décision finale de la DGA se fait toujours attendre, la proposition d'Airbus d'adapter un appareil civil à des fins militaires soulève des questions importantes et ouvre des perspectives inédites.
L'A321MPA, basé sur la version XLR de l'A321, le plus grand de la famille A320, offrirait une plateforme polyvalente et économique. Son fuselage étroit, contrairement aux avions de patrouille maritime traditionnels, permettrait une réduction significative des coûts d'exploitation tout en conservant une capacité d'emport importante grâce à une soute à bombes de grande taille. L'appareil serait équipé de technologies de pointe, incluant des antennes ESM (Electronic Support Measures) pour la surveillance électronique, des systèmes de communication avancés, et un détecteur d'anomalies magnétiques (MAD) en queue pour la détection de sous-marins.
Changer les codes militaires
Ce choix d'un avion civil transformé en plateforme militaire représente une rupture avec les pratiques traditionnelles. Jusqu'à présent, les avions de patrouille maritime étaient conçus spécifiquement pour cette mission, avec des coûts de développement et de production élevés. L'A321MPA, en capitalisant sur la maturité et l'efficacité de l'A321 XLR, promet un coût d’acquisition et de maintenance réduit, un atout considérable dans un contexte budgétaire contraint.
Cependant, l'adaptation d'un avion civil pose également des défis. L'A321MPA, avec un rayon d'action de 8 700 km, est moins performant sur ce point que le Falcon 10X (13 900 km). La question de la robustesse et de la survivabilité de l'appareil en environnement opérationnel se pose également. Airbus devra démontrer que l'A321MPA peut être adapté aux exigences spécifiques des missions de patrouille maritime, notamment en termes de résistance aux conditions météorologiques difficiles, de capacité à opérer à basse altitude et de protection contre les menaces potentielles.
L’expérience d’Airbus dans la transformation d'avions civils en appareils militaires, notamment avec l'A330 MRTT, avion de ravitaillement en vol, plaide en sa faveur. Ce précédent démontre la capacité du constructeur à adapter ses plateformes aux besoins des forces armées. La longue durée de vie prévue pour l’A321 (40 ans) et la facilité de maintenance héritée de la famille A320 NEO constituent également des arguments de poids.
Une nouvelle ère pour Airbus
Le remplacement des ATL-2, en service depuis les années 1960 et dont Dassault assure la maintenance, est une nécessité pour la Marine nationale. Ces avions jouent un rôle essentiel dans la protection des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) de la Force océanique stratégique (FOST), la dissuasion nucléaire française, ainsi que dans la surveillance maritime, la lutte anti-sous-marine et les opérations de recherche et de sauvetage.
L'arrivée de l'A321MPA, si le projet est confirmé, marquerait une nouvelle ère dans l'aviation militaire. Elle ouvrirait la voie à une utilisation accrue des plateformes civiles pour des missions de défense, offrant une solution plus économique et flexible face aux défis budgétaires et opérationnels. Ce choix pourrait également influencer d'autres pays confrontés à des besoins similaires en matière de patrouille maritime, ouvrant des perspectives commerciales importantes pour Airbus.
L'enjeu dépasse donc le simple remplacement d'une flotte vieillissante. Il s'agit d'une potentielle révolution dans la conception et l'utilisation des avions militaires, avec des implications significatives pour l'industrie aéronautique et les stratégies de défense. La décision de la DGA, attendue prochainement, sera donc scrutée avec attention par l’ensemble du secteur. Elle déterminera si l'avenir de la patrouille maritime se dessine dans le ciel, à bord d'un avion de ligne transformé en sentinelle des mers.