J'ai enfin pu rouler dans la première voiture à hydrogène française. Mais vous ne pourrez jamais monter à bord. Un changement de vision qui aura permis à Hopium de passer d’un fabricant de voitures à hydrogène à un fabricant de piles à combustible.
Une voiture d'exception
Le vendredi 15 novembre était un jour historique pour l'hydrogène français et même européen. J’ai eu le privilège de monter à bord de ce qui fut un temps le fleuron de l’espoir français en matière de voiture particulière à hydrogène : l’Hopium Machina. Une expérience unique, presque irréelle, car ce véhicule, symbole d’une ambition révolue, ne sera jamais commercialisé pour le grand public. Alors oui, je casse déjà tout espoir. Mais pas de panique, il y a beaucoup à dire et surtout beaucoup d'espoir pour l'avenir.
L'entreprise Hopium avait promis de révolutionner le secteur automobile avec cette berline élégante et performante, alimentée par une pile à combustible à hydrogène novatrice. Le projet avait suscité un engouement considérable, porté par un design audacieux signé Félix Godard et la promesse d’une mobilité propre et performante. J’avais moi-même suivi les premiers pas de ce projet avec intérêt, notamment lors de sa présentation en grande pompe au mondial de l'auto 2022 à Paris.
Et deux ans plus tard, je roule dedans ! L’expérience fut intense, quoique brève. Le ronronnement de la pile à combustible, loin du silence absolu parfois imaginé, était perceptible, amplifié par l’absence d’insonorisation du véhicule de test. Les 360 chevaux de la Machina, se faisaient pleinement ressentir sur l'anneau de vitesse du circuit de Linas Monthléry, malgré le revêtement très fortement bosselé. Mais je vous laisse un peu écouter le vacarme de ce monstre dans le Daily Tech.
De la nostalgie dans l’air
Au final, c’est une sensation étrange, mélange d’exaltation face à la technologie et de goût d'inachevée face à un destin avorté. Car l’Hopium Machina, aussi impressionnante soit-elle, appartient désormais au passé. La stratégie de l’entreprise a radicalement changé. Exit le rêve de la voiture à hydrogène, place à la mobilité lourde. Hopium se concentre désormais sur le développement et la commercialisation de sa technologie de pile à combustible pour des applications dans le transport routier, maritime et aéronautique.
Lors de cet événement sur le circuit de Monthléry, même si la star était plus ou moins la Machina, il y avait à ses côtés, la véritable star du jour : la pile à combustible de 100 kW, cœur battant de la nouvelle stratégie d’Hopium et surtout, son atout est sa légèreté et sa compacité face à la concurrence.
L’objectif affiché est clair : proposer une alternative crédible au diesel pour les véhicules lourds d’ici 2028-2030, grâce à un système composé d’unités de 100 kW, permettant de décupler les performances. Mais surtout d’être ultra adaptable et pouvoir convertir n’importe quelle voiture, avec un peu de place dans le compartiment moteur tout de même.
Pourtant, l’avenir d’Hopium se dessine désormais loin des voitures particulières. La société mise sur des marchés de niche, comme l’illustre le projet maritime K-Challenge, pour financer l’industrialisation de sa technologie. Elle recherche également un partenaire industriel majeur pour soutenir la construction d'une ligne d’assemblage automatisée sur son site de Saint-Bonnet-de-Mure, près de Lyon, en vue d’une production à grande échelle.
Rouler dans la Machina fut ainsi un privilège rare. Une expérience qui m’a permis de toucher du doigt le potentiel de l’hydrogène dans le secteur automobile, mais aussi de constater l’évolution rapide et parfois impitoyable de ce marché. La Machina, symbole d’un rêve brisé, devient paradoxalement le porte-étendard d’une nouvelle ambition, celle d’une mobilité lourde décarbonée.
Un pari audacieux, dont l'issue reste encore incertaine. Mais une chose est sûre : l’hydrogène, sous une forme ou une autre, a un rôle à jouer dans la transition énergétique. Et l'histoire de la Machina, aussi singulière soit-elle, devrait devenir le fer de lance de la communication d’Hopium. Un projet enfin concret sur lequel s'appuyer.