La Corée du Nord accuse son voisin du Sud de lui envoyer des drones chargés de tracts politiques. À l'inverse, la Corée du Sud affirme que son voisin du Nord lui envoie des ballons chargés de déchets.
Des tensions historiques exacerbées
Les relations entre la Corée du Nord et la Corée du Sud n'ont jamais été simples. Depuis la fin de la guerre de Corée en 1953, les deux nations sont techniquement en guerre, séparées par une frontière lourdement militarisée. Le rêve d'une réunification semble de plus en plus lointain, surtout depuis que Kim Jong-un, leader de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), a qualifié Séoul de « principal ennemi » en début d'année. Cet acte a marqué une rupture symbolique forte, aggravant davantage la situation déjà tendue.
Cependant, les tensions n’ont pas seulement pris la forme d’affrontements verbaux ou militaires. Depuis plusieurs mois, des objets insolites - des ballons remplis de déchets et des drones diffusant des pamphlets - traversent régulièrement la frontière entre les deux pays, exacerbant les tensions et compliquant encore plus le dialogue entre les deux gouvernements.
Des drones sur Pyongyang
Le 3 octobre, les autorités nord-coréennes ont détecté un drone volant au-dessus de Pyongyang, chargé de pamphlets critiquant le régime. Selon le ministère des Affaires étrangères nord-coréen, ce drone, vraisemblablement envoyé depuis la Corée du Sud, transportait des messages qualifiés de « rumeurs incendiaires et de déchets politiques ». Cet incident a rapidement déclenché la colère de Pyongyang.
Kim Yo-jong, la sœur du leader nord-coréen, a été particulièrement virulente dans ses déclarations, menaçant d'une « réplique forte » et d'un « désastre horrible » si de nouveaux drones pénétraient l’espace aérien nord-coréen. Elle a averti que toute nouvelle violation de leur ciel pourrait être interprétée comme un « acte militaire » à part entière. Face à ces accusations, Séoul a tenté de calmer la situation. Le ministère sud-coréen de la Défense a démenti l’implication de drones militaires dans ces incidents, tout en admettant que des citoyens sud-coréens auraient pu être responsables. Une réponse ambiguë qui n’a fait qu’ajouter à la confusion.
Des ballons et des tracts sur Séoul
Les drones ne sont pas les seuls objets volants à raviver les tensions. Depuis mai, Séoul a reçu plus de 5 500 ballons venus du nord, remplis de déchets, d'excréments, et parfois d'objets dangereux. Ces « ballons de la colère », envoyés par Pyongyang, visent à harceler psychologiquement et matériellement le Sud. Plus que de simples actes de provocation, ces ballons suscitent une réelle inquiétude à Séoul. Certains ont provoqué des incendies et endommagé des infrastructures, ce qui alimente la crainte qu'un jour, ils puissent contenir des substances dangereuses, voire des armes biologiques.
Le Sud a réagi en menaçant de prendre des « mesures militaires décisives » si un ballon venait à causer des pertes humaines ou à franchir une ligne rouge. Pour l’heure, Séoul envisage de contrer ces attaques en utilisant ses propres drones pour neutraliser les ballons avant qu'ils n'atteignent le sol sud-coréen.
Un jeu de miroir
Ce climat de tensions n’est pas nouveau. Depuis des années, la Corée du Sud et des activistes envoient des ballons vers le Nord, chargés cette fois de pamphlets critiquant Kim Jong-un, de billets de banque et même de clés USB contenant des chansons de K-pop. Ces actions, destinées à affaiblir le régime nord-coréen, ont souvent été mal perçues par Pyongyang. De son côté, la Corée du Nord a également utilisé des drones pour survoler Séoul et ses environs. En décembre 2022, le Sud a repéré cinq drones nord-coréens au-dessus de la capitale, forçant les autorités à déployer des avions de combat. Ces incidents montrent que les deux nations sont engagées dans une guerre psychologique de plus en plus sophistiquée et technologiquement avancée.
Dans cette guerre de propagande et de provocations, aucun des deux camps ne semble prêt à céder. Récemment, la Corée du Nord a dynamité des sections de routes reliant le Nord et le Sud, envoyant un message clair à son voisin. Le symbole est fort : même si les deux pays sont séparés par une zone démilitarisée infranchissable, Pyongyang veut marquer la rupture de toute possibilité de dialogue. La Corée du Sud, de son côté, a réactivé une ancienne méthode de guerre psychologique : des haut-parleurs à la frontière, diffusant des messages de propagande et des chansons de K-pop en direction du Nord.