Une histoire aux allures de déjà-vu

Dans Dragon’s Dogma 2, le joueur incarne l’Insurgé, exactement comme dans le premier épisode, mais vous n’avez pas besoin de l’avoir fait pour comprendre ce qu’il se passe. Concrètement, l’Insurgé est un humain dont le cœur a été dévoré par le dragon et dont la quête de vengeance pour retrouver son humanité va l’amener à bouleverser le monde. C’est ce qu’on appelle le dogme du dragon qui régit tout l’univers du jeu et qui donne une aura particulière au personnage du joueur tout au long de l’aventure. Si jusque-là le pitch est similaire à celui du premier jeu, Dragon’s Dogma 2 met en place des conspirations à base de faux prophètes et de relations tendues entre deux nations en toile de fond. C’est donc à travers son périple que l’Insurgé va rencontrer différentes factions et prendre des décisions qui vont bouleverser la face du monde.

Comme le laissait présager l’absence du chiffre 2 sur son écran d’accueil, l’histoire de Dragon’s Dogma 2 ressemble beaucoup à celle du premier et ne brille pas pour son originalité, ni pour la façon dont elle est racontée. Régulièrement, on n’a droit qu’à de courtes cinématiques pour faire avancer l’intrigue ou de brèves discussions avec des personnages qui nous disent où aller sans que cela ne fasse très naturel. Pour ce qui est des quêtes principales, on a souvent le sentiment qu’elles sont parfois assez basiques et qu’elles servent à nous indiquer où aller sans que cela ne soit toujours très intéressant. D’ailleurs, certaines indications de quêtes sont parfois floues volontairement, ce qui fait qu’on peut prendre plusieurs minutes à en comprendre la logique.

En réalité, ces quêtes servent avant tout à nous faire découvrir de nouvelles régions de la carte que l’on va ensuite découvrir de notre côté, en sortant des sentiers battus. Toute cette façon de faire n'est pas sans rappeler les jeux de rôle à l’ancienne ou sur table dont Dragon’s Dogma s’inspire largement des codes et de l’ambiance. Mais pour ce qui est de l’histoire, on peut dire qu’elle fait le taf et qu’on arrive à la suivre avec intérêt même si la mise en scène des discussions lambdas n’aide pas trop à s’investir. En réalité, la quête principale n’est que la face cachée de l’iceberg et sert à nous pousser à explorer et à voyager par nos propres moyens, ce qui est la première grande force du jeu.

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Un formidable sentiment de liberté et de l'autonomie

Dragon’s Dogma 2 est un jeu qui mise énormément sur l’immersion pour rendre son univers le plus crédible possible, quitte à ce que cela soit contraignant manette en main. La majeure partie du temps, on voyage d’un bout à l’autre de la map et on croise en route des tonnes de monstres et autres bandits qui cherchent à nous éliminer. Mais dès que l’on sort des sentiers battus, c’est là que la magie de Dragon’s Dogma 2 opère. Alors qu’aucun marqueur ne l’indique sur la carte, on peut rapidement trouver un coffre, une grotte ou même une créature légendaire sans qu’on l'ait volontairement cherché. À travers ses bonnes surprises, on comprend vite que Dragon’s Dogma 2 mise beaucoup sur l’autonomie et la liberté du joueur dont la curiosité est souvent récompensée et c’est bien là la force du titre. D’ailleurs, c’est pour ça que certaines quêtes annexes donnent plus envie que certaines missions principales puisqu’elles sont parfois moins dirigistes.

Mais si le titre de Capcom offre une proposition singulière dans le paysage du jeu vidéo moderne en ne prenant pas le joueur par la main, cela a tout de même quelques inconvénients. Comme dit plutôt, Dragon’s Dogma 2 se veut très immersif et cela passe par certains choix de designs qui sont volontairement inconfortables. Par exemple, les éléments dans l’inventaire ont un poids qui influe sur votre jauge d’endurance, ce qui peut finir par vous essouffler bien plus vite. La nuit, il est impossible de sortir sans une torche tant il fait sombre, et c’est sans compter les monstres qui sont plus nombreux et dangereux que jamais. Et puis, à force de prendre des coups, la jauge de vie diminue ce qui oblige à dormir dans une auberge ou à camper à la belle étoile, même si on n'est pas à l’abri d’un assaut ennemi.

Mais le meilleur exemple de ce parti pris sans concession concerne les voyages rapides. Dans Dragon’s Dogma 2, vous ne pouvez pas vous téléporter d’une ville à l’autre d’une simple pression de touche. Au préalable, il vous faut une transpierre qui coûte une fortune, ainsi qu’activer le téléporteur là où vous voulez aller alors que tous les lieux visités n’en possèdent pas forcément un. Certes, il existe des téléporteurs que vous pouvez placer par vous-mêmes ce qui est bien pratique, mais ils font clairement partie des objets les plus rares du jeu. Et puis, comparé au premier, Dragon’s Dogma 2 introduit des chars à boeufs qui permettent de se rendre d’une ville à l’autre plus rapidement, même si on n'est pas à l’abri d’une attaque ennemie. Certains environnements ont même des moyens ingénieux de déplacement comme des téléphériques, mais cela ne concerne que certains axes bien particuliers. En réalité, tout ce qu’on vient de vous citer sont des cas particuliers et la plupart du temps, on se retrouve à faire le déplacement à pied. Or, vu la grandeur de la map, les trajets sont souvent longs, répétitifs et remplis d’ennemis ce qui peut devenir pénible tant la densité de combats est par moment trop élevée.

Vu la façon dont on vous en parle, tout ce qu’on vient de vous dire peut être considéré comme un défaut et pourtant, c’est justement ce qui rend la proposition de Dragon’s Dogma si unique. Tous ces choix de design sont volontaires et là dans un but d’immersion ce qui fait qu’il est difficile de considérer ces lourdeurs comme un vrai défaut, même si elles sont désagréables. Néanmoins, cette décision de privilégier l’immersion au confort va en rebuter plus d’un, du moins ceux qui ne sont pas prêts à jouer le jeu de cette proposition singulière. Et puis, cette volonté est d’autant plus dure à juger qu’elle donne lieu à de nombreux combats qui est de loin la plus grande qualité du titre.

Capcom oblige, un formidable gameplay soigné

Comme on vous l’a dit plutôt, Dragon’s Dogma 2 est un Action-RPG en monde ouvert qui profite d’un système de combat particulièrement soigné typique de Capcom. Au départ, le titre propose quatre classes bien différentes qui ont toutes leur propre gameplay et surtout des compétences uniques qui les démarquent les unes des autres. Encore une fois, ce parti pris de l’immersion se ressent ici à travers certains éléments de gameplay de base qui ne sont propres qu’à des classes bien spécifiques. Et la bonne nouvelle dans tout ça, c’est qu’on peut facilement passer d’une classe à l’autre en se rendant dans une guilde, histoire d’essayer différemment façon de jouer. D’ailleurs, c’est là aussi qu’on peut acheter de nouvelles capacités et améliorer celles qu’on a déjà, ce qui donne une vraie sensation de montée en puissance en progressant.

Manette en main, il en résulte un gameplay ultra satisfaisant et surtout efficace grâce à toutes les compétences disponibles et aux animations particulièrement soignées. Les combats sont d'autant plus intéressants que les ennemis en face sont souvent malins, avec des comportements bien pensés pour vous éliminer au plus vite. Avec tout ce qu’on a en main, on peut se sentir puissant, mais il n’est pas rare que la situation s’inverse complètement quand on est dépassé en nombre. Mais ce qui démarque surtout Dragon’s Dogma 2 des autres Action-RPG, c’est sa mécanique qui permet d’escalader les ennemis pour les attaquer. Clairement, cela rappelle Shadow of the Colossus ou Monster Hunter, surtout sur certains combats de boss qui sont spectaculaires grâce à l’utilisation de cette mécanique.

Ainsi, Dragon’s Dogma 2 met le paquet sur ses affrontements spectaculaires, aussi bien à travers les animations de ses combattants que les effets des sorts des mages. En plus, par rapport au premier jeu, l’expérience gagne en ergonomie grâce à des raccourcis qui permettent de se soigner ou d’allumer sa lanterne sans passer par les menus. Malheureusement du côté des menus, on ne peut pas dire que l’ergonomie soit le mot d’ordre puisqu’ils sont identiques à ceux du premier et on s’arrache toujours les cheveux à naviguer dedans. Mais si le titre de Capcom brille autant, c’est aussi grâce à un système qui lui est propre et qui mérite bien qu’on lui consacre une partie entière : les Pions.

Les Pions, les vrais héros de Dragon's Dogma

Bon, en gros, les Pions sont des compagnons gérés par l’intelligence artificielle qui vous suivent en permanence. En début de partie, vous êtes amenés à créer votre propre Pion à travers l’un des outils de création de personnages les plus complets de ces dernières années. Vraiment, tout cela va tellement loin qu’on peut choisir l’angle de certaines animations et même le caractère de notre compagnon qui aura une incidence sur son comportement en combat. Durant votre aventure, vous êtes accompagnés de votre Pion ainsi que deux autres créés par d’autres joueurs que vous pouvez recruter en ligne via des stèles disséminés à travers le monde. Grâce à ça, vous pouvez composer une équipe complémentaire pour attaquer aussi bien de près que de loin, avec de la magie ou des projectiles bien physiques.

Mais là où le système de Pions brille particulièrement, c’est que ce sont des compagnons intelligents qui vous donnent des conseils tout au long de l’aventure. Par exemple, les Pions peuvent vous indiquer les points faibles d’un ennemi ou vous mener vers un coffre qu’ils ont découvert dans la partie d’un autre joueur. Encore plus que dans le jeu original, ils interagissent régulièrement entre eux pour raconter des anecdotes étonnantes ou des indications pour avancer dans l’histoire. Très clairement, les Pions sont les vrais héros de Dragon’s Dogma 2, notamment parce qu’ils parlent à l’inverse de l’Insurgé qui reste muet.

Un monde entre graphismes et technique

Bon, vous le voyez depuis tout à l’heure, mais il faut bien qu’on vous parle à un moment de la technique quand même. Comme tous les jeux Capcom de ces dernières années, Dragon’s Dogma 2 tourne sur le RE Engine, un moteur qui a fait ses preuves sur Resident Evil 4 et Street Fighter 6 l’an dernier. Évidemment, le résultat est bien supérieur au premier épisode qui était sorti sur PS3 et Xbox 360 en 2012 et qui n’était déjà pas bien beau à l’époque. Pour ce second épisode, on a droit à de magnifiques panoramas grâce à un vrai travail sur les environnements et le monde en général qui a l'air vivant même sans la présence du joueur. Peut-être que l’absence d’icône à l’écran rend le tout encore plus perceptible, mais l’univers de Dragon’s Dogma 2 est visuellement agréable à parcourir car il fait vrai et naturel. Durant les cinématiques les plus importantes, on observe également que les visages sont particulièrement réussis tout comme les animations. D’un point de vue purement visuel, Dragon’s Dogma 2 est donc une vraie réussite, aussi bien en termes de résolution affichée à l’écran que de direction artistique.

En revanche, c’est quand on évoque la technique et donc la fréquence d’images que les choses se gâtent, du moins sur PS5 qui est la version que nous avons testée. Régulièrement, il faut reconnaître que le framerate souffre de sérieux ralentissements à plusieurs occasions. Si en premier lieu on peut observer ce problème dans la capitale, certains combats avec de nombreux ennemis, des monstres gigantesques et de nombreux sorts souffrent également de ce souci. Le plus étonnant dans tout cela c’est que le jeu ne propose pas plusieurs modes d’affichage sur PS5 comme cela est devenu la norme sur cette génération de consoles. Sur PS5, on sent que le jeu vise à conserver une haute résolution en permanence, ce qui fait que la fréquence d’images est souvent sacrifiée. En plus, certains ralentissements ont lieu alors que l’écran est déjà surchargé d’effets à cause de sorts, ce qui rend la lisibilité des combats vraiment compliquée par moment. Tout ça pour dire que sur console, on a droit à une technique en dents de scie qui oscille entre magnifiques panoramas, visages réussis et ralentissements en combat et en ville.

Conclusion

Dragon’s Dogma 2 est un titre à la proposition unique et aux partis pris bien tranchés qui ne fait pas de compromis pour le meilleur comme pour le pire. D’un côté, le jeu de Capcom brille par son gameplay riche et varié, son aventure immersive et la liberté offerte au joueur pour découvrir ce monde et ses magnifiques panoramas. C’est en explorant et en sortant des sentiers battus que Dragon’s Dogma 2 dévoile son potentiel, ce qui est encore plus renforcé par le système de Pions.

Mais de l’autre, cette volonté de privilégier l’immersion au détriment du confort quitte à rendre certains aspects de l’expérience pénibles ne plaira vraiment pas à tout le monde. Il en va de même pour ses quêtes pas toujours intéressantes, ses combats parfois brouillons, l’ergonomie de ses menus et surtout les nombreux ralentissements dont l’expérience souffre sur console. En bref, Dragon’s Dogma 2 saura régaler ceux qui joueront le jeu de cette proposition sans compromis en laissant sur le carreau les autres trop habitués au confort des jeux modernes.