Retour en arrière, dans les coulisses de la guerre des consoles des années 1990.
Des documents datant de 1996 montrent à quel point Sega se voilait la face sur le succès (ou plutôt le non-succès) de sa Saturn, face au nouveau concurrent de l'époque, Sony.
Des documents de 1996 nous replongent dans la guerre des consoles
Ces documents récemment publiés mettent en lumière le déclin progressif de la production de consoles chez Sega, alors que la firme luttait sans relâche pour rivaliser avec le géant Sony (pas encore tout à fait un géant du jeu vidéo à l'époque, mais déjà un géant de la technologie). À travers un PDF de 272 pages publié par Sega Retro, on découvre les résultats financiers de 1996 ainsi que les chiffres de ventes de Sega of America, et des mails échangés entre des cadres de Sega. Les commentaires des dirigeants de l'entreprise sur l'état de l'industrie et la sortie de la Sega Saturn sont fascinants, avec le regard d'aujourd'hui. Malgré une ludothèque solide, la Saturn a constamment été à la traîne face à la nouvelle PlayStation, une console plus jeune et moins chère.
"On est en train de tuer Sony" ... Spoiler alert ... ça n'a pas duré.
Ces documents révèlent les efforts acharnés de Sega pour surmonter ces difficultés. Dans un e-mail, l'ancien PDG, Tom Kalinske, déclarait : "Au Japon, on est en train de tuer Sony. Dans tous les magasins, les stocks de Saturn sont épuisés, tandis que des piles de PlayStation prennent la poussière. Les revendeurs nous disent qu'ils ne peuvent même pas mesurer notre taux de ventes réel, car les consoles Saturn se vendent avant qu'ils puissent les comptabiliser." Cependant, comme le souligne Kalinske, cette réussite au Japon n'a pas été équivalente aux États-Unis, où Sony a dominé sans conteste Sega dès son arrivée et tout au long de la deuxième moitié des années 90.
The total cost to manufacture the Saturn in early 1996 was $232 - much lower than expected.
— John Harrison - Mega Drive Shock (@MegaDriveShock) July 3, 2023
The retail margin was only 6%! Meaning retailers made only $15 per Saturn sold.
Emails reveal concern that retailers were going to abandon the market en masse due to low margins.
Comme le rappelle le chroniqueur expert en Sega John Harrison, les revendeurs en dehors du Japon ont rapidement été tentés d'abandonner la Saturn. En effet, une Saturn coûtait 232 $ à produire, mais la marge des revendeurs n'était que de 6 %. Autrement dit, ils n'engrangeaient que 15 $ par Saturn vendues. Sega craignait déjà à l'époque que les revendeurs abandonnent ses consoles en masse, à cause de ces marges trop faibles.
Les jeux de sport de qualité et sortis au bon moment, ce qui a manqué à la Saturn ?
Dans ces documents, on découvre que les jeux de sport ont été l'un des principaux points faibles de Sega, d'après l'éditeur. La société n'était tout simplement pas en mesure de rivaliser avec les mastodontes EA et Sony dans ce domaine. Une page du document révèle que Sega ne comptait que 11 personnes pour développer et commercialiser des titres de sport, tandis que les équipes concurrentes étaient beaucoup plus importantes. Par conséquent, les jeux sortaient souvent à contretemps par rapport aux périodes idéales pour les franchises de jeux de sport, telles que les jeux NBA, NFL et NHL. Certains jeux ont même été si médiocres qu'ils ont simplement été annulés, à l'image d'un jeu de la NFL tellement mauvais, et en retard de six mois sur son planning, que Sega estimait qu'il aurait "nui au prestige de la marque s'il avait été publié".
Sega était prêt à remonter la pente, pourtant. La firme avait remarqué que la PlayStation était vue par le public comme une console "moins chère, avec des jeux plus beaux, un meilleur marketing, et un plus gros budget derrière elle". Sega voulait changer cela grâce à de meilleurs spots publicités, et des jeux de sport sortis au bon moment ... Mais le lancement de la Nintendo 64 en 1996 a fermé les fenêtres d'opportunité de Sega. Si la Dreamcast aura droit à un bon lancement, la PS2 raflera tout sur son passage, et Sony sera à partir de là, très clairement, l'ogre du marché.
Sega ne produit peut-être plus de console, mais c'est toujours un éditeur majeur ! A tel point, que Microsoft songeait encore à racheter Sega il y a seulement quelques années ...