Marquer les esprits vite et fort

C’est en effet le 21 novembre 1990 qu’est sortie au Japon la Super Famicom, rebaptisée Super Nintendo chez nous lors de son arrivée en avril 1992. Aujourd’hui encore, nous nous rappelons tous de nos premiers émois lorsque nous avons poussé pour la première fois le bouton “Power” de la petite console. Certains ont été accueillis par le son d’une pièce ramassée avec Super Mario World , d’autres par la musique énergique de F-Zero . La Super Famicom fut présentée pour la toute première fois en 1988, comme le stipule un exemplaire du Famicom Tsushin (futur Famitsu). À l’époque, le prototype exposé avait pour principal objectif d’empêcher Nec et Hudson Soft de remporter trop de parts de marché avec leur PC Engine, sortie en octobre 1987. C’est pour cela que les premiers visuels laissent paraître un bouton “Famicom” en plus des boutons “Power” et “Reset” : à l’origine, la firme de Kyoto avait envisagé de sortir un adaptateur pour accueillir les jeux de sa première console de salon à succès, la NES. Une idée forte abandonnée en cours de route. Annoncée tôt au milieu de multiples promesses (dont celle d’un nouveau Zelda au lancement), la Super Nintendo veut marquer les esprits vite et fort alors que la concurrence s’organise.

Du côté du design, on ne change pas une équipe qui gagne. Après son travail réussi sur la NES, C’est Masayuki Uemura qui conçoit la SNES. La firme de Kyoto équipe son hardware d’un processeur 665C816 16 bits capable d’afficher 256 couleurs (sur 32 768 disponibles) en plus d’un processeur sonore Sony SPC700 (imaginé par Ken Kutaragi, futur patron de PlayStation). Le tout pour un poids de 1,16 kg et des dimensions de 20 cm x 24,2 cm x 7,2 cm. Lorsque la console de Nintendo sort au Japon au prix pourtant élevé de 25 000 yens, c’est un raz-de-marée. Les 300 000 machines distribuées aux boutiques de l’archipel se vendent en quelques heures. Le line-up de lancement ne contient pourtant que deux jeux. Mais quels jeux ! Les nombreux fans de Mario ont le plaisir de trouver un nouvel épisode du plombier moustachu avec Super Mario World, considéré comme étant un des meilleurs de toute la série. Les autres se lancent dans un jeu de courses futuristes impressionnant pour l’époque avec F-Zero, et son Mode 7 renversant. Les semaines suivantes finissent de convaincre le public japonais des qualités de la machine avec l’arrivée de Pilotwings , Gradius III , Super R-Type , Final Fantasy IV , Super Ghouls'n Ghosts , Super Castlevania IV ou encore The Legend of Zelda : A Link to the Past , pour ne citer qu’eux. Un festival qui donne rapidement à la SNES ses lettres de noblesse.

Une lutte acharnée et un déluge de jeux

Quand nous nous remémorons les années SNES, nous avons forcément les images de la lutte acharnée contre SEGA qui nous reviennent. Avec une Genesis (nom américain de la Mega Drive) disponible deux ans avant la 16 bits de Nintendo au pays de l’Oncle Sam, nous avons effectivement assisté à une véritable guerre marketing. Aux États-Unis, SEGA use et abuse de publicités comparatives pour ridiculiser Mario, puis lance le slogan “Genesis does what Nintendon’t” que l’on peut traduire par “la Mega Drive fait ce que Nintendo ne peut faire”. En France, où la publicité comparative est plus strictement encadrée, nous avons connu les slogans devenus célèbres “SEGA, c’est plus fort que toi” ou encore “Mega, c’est plus fort que Super”. Tout en nuances ! Quand la Super Nintendo est arrivée précipitamment en France en avril 1992 grâce à Bandaï, la machine ne s’est pas laissé faire et a inondé les magazines de l’époque de publicités marquantes. La même année, SEGA fera rouler son train “Euro Challenge SEGA 92” qui s’arrêtera dans 23 grandes villes de France afin que les joueurs puissent découvrir le Mega CD. Nintendo suivra en amenant un 33 tonnes spécialement aménagé dans le but d’y présenter sa nouvelle console. En 1994, alors que Sega lance sa chaîne Sega Channel aux États-Unis et que la Multi-Mega voit le jour, Nintendo sort la Super Game Boy, un accessoire pensé pour la SNES octroyant la possibilité de jouer à ses jeux Game Boy sur un téléviseur. Décidément, les deux géants font tout pour attirer l'attention des joueurs.

Dans ce combat pour le contrôle de l’amusement dans le salon, chaque console a ses forces et ses faiblesses. Mais au final, le public a tranché : 49 millions de Super Nintendo s’écoulent dans le monde, contre 39 millions de Mega Drive. Nous évoquions les premiers émois ressentis au moment d’allumer la console, mais comment ne pas aborder tous les bons souvenirs qui reviennent au moment de la ranger dans le placard. Il est difficile de dresser une liste des meilleurs jeux de la SNES tant ces derniers furent nombreux avec The Legend of Zelda : A Link to the Past , Super Metroid , Secret of Mana , Super Castlevania IV , Super Mario World 2 : Yoshi's Island ou encore la série des Donkey Kong Country . C’est sur cette machine que nous avons vu naître Mario Kart et StarFox , tandis que de gros titres de l’arcade ont trouvé de belles adaptations avec Street Fighter II et Killer Instinct . Un des softs majeurs du monde PC, Doom , a même trouvé le chemin du petit hardware japonais grâce à la puce Super FX 2. Au milieu des années 1990, la popularité de la SNES dans nos contrées est telle que nous retrouvons la console dans une séquence devenue culte des Trois Frères, réalisé par Bourdon et Campan (1995).

Aujourd’hui, vous pouvez encore jouer à quelques-uns des meilleurs titres de la console en vous connectant au Nintendo Switch Online et en lançant l’application Super Nintendo de la petite hybride. Plus de 30 jeux y sont répertoriés, de Donkey Kong Country à F-Zero, en passant par Super Ghouls’N Ghosts. Il est également possible de se procurer une SNES Classic Mini afin de retrouver les sensations d’antan grâce au pad fourni et aux 21 titres préinstallés (dont Starfox 2). 30 ans, ça se fête ! Il est donc l’heure de tous se rassembler derrière la grosse bougie de Mario et de souhaiter un joyeux anniversaire à cette bonne vieille Super Nintendo.