Peut-être que l’homme de Lige-feu allait enfin me parler ? Les cloches avaient carillonné pour la première fois depuis longtemps. Il me fallait maintenant des réponses. Avant d’y retourner, je descendis l’escalier près de la cloche et je me retrouvai une dizaine de mètres plus bas que celle-ci. Un message posé sur le sol indiquait la présence d’un mur illusoire. J’y donnai un coup d’épée et effectivement, le mur en question disparut sous mes yeux ébahis. Derrière se traînait un homme envahi d’œufs. Il bloquait le passage. Je lui ôtai la vie. De ses œufs sortit une multitude de larves. J’étais affaibli par le combat contre l’araignée et je préférais éviter de prendre des risques. Je plongeai ma main dans ma besace et j’en retirai quelques bombes incendiaires que je lançai sur les larves. Elles dégagèrent une odeur nauséabonde oscillant entre la pourriture et le brûlé. L’homme balbutia encore quelques mots avant de mourir. Je dégageai sa carcasse d’un coup de pied. J’allumai un feu non loin et je m’assis, goûtant déjà un repos bien mérité. Mais je ramassai aussitôt mon épée et je me levai d’un bond. Dans le mur à côté de moi se tenait une autre femme-araignée.

Les filles d'Izalith

La roche l’empêchait de se mouvoir et à en juger par la quantité d’œufs aux alentours, il s’agissait probablement d’une pondeuse. Ses mains jointes et ses yeux clos me faisaient penser à une prêtresse plongée en pleine prière. Elle était blonde et comme sa sœur elle avait quelque chose d’attirant malgré sa monstruosité. Je la contemplai sans dire un mot. Son propre silence me rassurait. Je baissai la garde de mon épée et je m’approchai de la créature. Le combat contre la première araignée avait été éprouvant et sa simple vue m’avait terrifié. Mais en ce moment c’était tout le contraire. Je m’inclinai et je la saluai. Elle ouvrit deux yeux blancs qui se posèrent sur moi. Elle ne me voyait pas mais elle pouvait m’entendre. Ses mains restèrent collées l’une à l’autre.

- Où sommes-nous ? demandai-je.

Elle répondit mais je ne discernai rien d’intelligible dans son discours. Après une pause elle referma les yeux. Je ne pouvais rien en tirer. J’aurais pu la tuer, elle avait l’air extrêmement faible. Mais elle n’était pas comme sa sœur. Elle ne représentait pas une menace. Je la laissai à ses prières. Et j’eus comme une illumination. Ces deux femmes-araignées avaient quelque chose de spécial. Je connaissais leur légende. Celle que j’avais tuée devait être Quelaag et je me trouvais dans son domaine. Sa sœur aveugle était Quelaan. Elles étaient toutes deux des filles du chaos jadis et servaient la sorcière d’Izalith. Devenue maîtresse du chaos, elle était à l’origine des démons sur Lordran. Cela signifiait que son fils ne devait pas être très loin…

Une journée en enfer

En arrière se trouvait un long boyau. Je l’arpentai sur toute sa longueur. Je ne parvins pas à chasser le dégoût qui m’assaillait. J’avais l’impression de me promener dans un intestin géant et ma récente découverte n’arrangeait pas les choses. J’aurais pu retourner en arrière pour revenir à Lige-feu. Mais ce passage m’y conduisait peut-être. De cette manière, je découvrirais une nouvelle route. L’enfer s’étala soudain devant moi. De la lave stagnait en contrebas et tout autour de moi se trouvaient des porteurs d’œufs. Les larves qu’ils contenaient étaient particulièrement voraces et je ne voulais pas risquer ma vie par bonté d’âme. Je les laissai vivre. Le sort de ces malheureux n’était pas de mon ressort… Je m’engageai dans la seule voie praticable, faisant fi des râles et prières des hommes proches.

Deux d’entre eux se mouvaient avec une lenteur exécrable. On aurait dit deux escargots difformes. Ils vinrent à ma rencontre. Contrairement aux autres, ils sentaient ma présence. L’un d’eux se projeta en avant et tenta de m’agripper avec ses mains calleuses. Je lui décochai un coup de pied en pleine figure, ce qui eut pour effet de faire éclore tous ses œufs. Je poussai un grognement tandis que je fouillais dans mes affaires. Je lançai la bombe que je venais de trouver. Les larves s’embrasèrent dans un joyeux crépitement. L’autre homme subit le même sort. Toujours plus bas se trouvait un lac de lave. Une fine bande de terre y conduisait. Je l’empruntai, ne perdant pas de vue les créatures qui s’y tenaient un peu plus loin. La chaleur était insoutenable, d’autant plus que je portais toujours le casque de gargouille, en métal. Je perdais des litres de sueur mais je poursuivis. Pas très loin. La bande de terre se terminait au milieu du lac. Je revins en arrière en prenant garde de ne pas déraper.

Je ne l’avais pas remarqué durant la descente mais à peu près à hauteur de l’endroit où les deux hommes avaient tenté de m’agresser démarrait une autre voie. Je la suivis. Une sorte d’aqueduc très étroit courait au-dessus de la lave. Je mis quelques minutes pour me décider à y poser le pied. Il était tellement facile de me tendre un piège à cet endroit pour me faire basculer dans le vide… Je pris mon courage à deux mains et mon épée à une seule, afin de me gêner le moins possible durant la course. Je franchis le ravin à toute allure sans jeter de regard ni vers le bas ni en arrière. De l’autre côté, je repris mon souffle.

Le gardien du lac

J’étais en train de contourner le lac. J’étais bien plus haut que tout à l’heure, quand j’étais encerclé par la lave. Je remontais parmi les rochers. La vue qui s’offrait à moi n’avait pas d’égale, à la fois fascinante et effrayante. Je risquais à tout moment de basculer dans le ravin mais curieusement personne ne m’attaqua. J’en compris finalement la raison. Je tombai sur une créature étrange : des tentacules de feu fouettaient l’air un peu plus loin. Le corps qui s’agitait plus bas avait une allure grotesque mais arborait un visage torturé. J’y devinai une paire d’yeux. Je n’avais jamais rien vu de tel. Je ne savais pas du tout ce qu’était cette chose ni même si elle me verrait. Je tentai de passer.

Je m’empêchai de courir. A proximité de la chose, je retins mon souffle. J’étais maintenant à portée des tentacules et je m’apprêtais à esquiver. Mais rien ne vint. Encore plus près, il ne s’était toujours rien passé. Je courus et je me mis à l’abri. Le chemin était bloqué et un cadavre se trouvait là. Je repensai au dragon mort qui m’avait tendu un piège. Ceci y ressemblait fortement. Je récupérai ce que je pus sur le corps et je fis face au monstre. Je savais qu’il m’attaquerait au retour.

Et en effet, il se réveilla et poussa un hurlement. Je voyais maintenant l’intégralité de sa tête hideuse, avec ses deux cornes lovées. Je le reconnus. D’après les fresques que j’avais vues lorsque j’étais vivant, il s’agissait de la Décharge incessante, le fils d’Izalith auquel j’avais pensé un peu plus tôt. Je déglutis. Un bras s’abattit juste à côté de moi. Mon épée l’ébrécha à peine. Sa seconde attaque ne me manqua pas. Mon esprit voyagea jusqu’au feu le plus proche. De retour, la bestiole s’était déplacée. J’anticipai son attaque et je me jetai au sol. Mais ce n’est pas son bras qu’elle projeta mais un cône de feu. Il était encore plus chaud et plus pénétrant que celui du dragon du pont. Par chance j’avais récupéré une tenue bordée d’or, matière réputée pour protéger efficacement du feu. Pour ma troisième tentative, je me vêtis de ce nouvel habit. Le capuchon masquait mon visage. Dans ce volcan plein de lave et de lumière, un anneau qui rend invisible n’aurait pas été de trop…

Je courus le long de la corniche. Le démon s’avançait déjà vers moi. Un peu avant de l’affronter la première fois, j’avais repéré un étroit couloir sur la droite. Là il ne pouvait m’y trouver. J’évitai son souffle de flammes et je m’y cachai. Juste derrière moi s’abattit un tentacule. Je fis volte-face pour l’entailler. Il releva précipitamment la tête et quelques secondes plus tard c’est un bras qui ébranla le sol. Il palpa la roche à ma recherche et tout ce qu’il trouva fut une pointe d’acier qui s’enfonça dans sa chair. Il se releva, furieux. Il s’agita pendant un moment. J’entendais la lave sous lui qui se déplaçait par vagues. Je maudis ma lâcheté mais rester dans ce trou était le seul moyen de venir à bout d’un tel monstre. Au moins il ne pouvait pas me toucher. Il repartit à ma recherche plusieurs fois. Ses blessures laissaient couler du feu brûlant que je prenais soin d’éviter. L’animal beuglait tant et plus. Les gravats aux alentours faisaient un bond à chaque fois que le démon promenait son bras à ma recherche. Au bout d’un moment qui me parut une éternité, celui-ci se coupa en deux sous l’impulsion de mon dernier assaut. Le monstre s’effondra dans la lave. Je posai mes mains sur les genoux et je poussai un soupir de contentement. Je risquai un coup d’œil en bas, pour assister à un spectacle étrange mais agréable. Par endroits le lac s’assécha. Il m’était maintenant possible de le traverser sans encombre et sans risquer à tout moment de basculer dans la lave.

Le retour des démons

La pierre était encore chaude mais praticable. De la fumée s’échappait çà et là. Ca n’avait rien de rassurant mais c’était le seul moyen de traverser le lac. Les créatures que j’avais aperçues plus tôt me glacèrent d’effroi. Il s’agissait de démons taureaux. Plus loin il y avait d’autres démons, comme celui que j’avais affronté dans les soubassements du village des morts-vivants. Eux aussi possédaient deux braquemarts. Si celui que j’avais tué dans le village n’avait pas posé de souci majeur, c’est surtout parce que j’avais réussi à m’isoler de ses attaques. Ici je disposais de plus de place pour me battre et aucun chien n’était présent pour m’occuper. Le premier que j’affrontai était rapide et brutal. Mais j’avais parcouru du chemin depuis le premier démon. Je disposais d’un meilleur équipement et je sentais en moi que j’étais plus fort. Le monstre mordit rapidement la poussière. Mais ce n’était que le premier. Toute une troupe m’attendait…

Le combat fut rude. J’essayai d’isoler chaque combattant pour faciliter les choses. Chacun d’eux maniait leurs deux braquemarts avec une telle aisance qu’on aurait pu croire qu’il s’agissait de plumes. Dès le premier ennemi, je dus reculer jusqu’à la corniche que je venais de franchir. Il sauta et abattit ses deux armes sur le sol. Je n’osais pas le quitter des yeux mais un pied mal placé m’aurait précipité dans le ravin. Je lui rendis ses coups et sous mes assauts répétés, il finit par tomber dans le vide. J’enchaînai les suivants de la même manière, plongeant sur eux avec mon épée pour les arrêter dans leur élan. Je ne leur laissai pas l’occasion de répliquer.

Le couloir nettoyé, je descendis un escalier. Une boule de pierre vint à moi. Une tête de démon en dépassait et m’inonda de feu. Un pas sur le côté me débarrassa du problème. Un peu plus loin se tenait une larve, dans le mur. Mais celle-ci était gigantesque. Elle me rappela la limace-araignée que j’avais affrontée dans les cavernes, même si elle était différente. A peine approchée qu’elle se rétracta et balaya l’endroit avec son corps. Elle me heurta et m’entraîna dans son sillage. Elle m’écrasa contre le sol. Je me relevai d’un bond et je m’écartai. La bête ne pouvait s’extirper du mur. Mais dès que je m’avançais, elle s’apprêtait à m’attaquer. Je la fis chasser l’air à plusieurs reprises. Elle était rapide et ne laissait entrevoir aucune faille. J’eus alors une idée toute simple. J’attendis qu’elle se rétracte et au moment où son corps bougeait dans ma direction je tendis mon épée. La larve s’empala sur sa pointe. Dans son mouvement elle m’arracha l’arme des mains. Je priai pour que cela suffise pour l’éliminer. Elle éructa et se tortilla dans tous les sens, lâchant des litres de liquide verdâtre. Elle ne bougeait plus. Du bout de ma botte je tâtai le corps inerte. J’arrachai mon épée pour constater avec horreur que la lame avait fondu par endroits. Le sang de l’animal devait contenir des traces d’acide. J’eus un haut-le-cœur à l’idée qu’il aurait pu m’en jeter à la tête. J’allumai un feu après avoir balancé le cadavre dans l’abîme et je m’attelai à la réparation de ma claymore.

L'ombre du passé

La mélodie avait été douce et la voix qui l’avait accompagnée, mélodieuse. Une chanson de voyage au coin du feu, une soirée banale dans une taverne délabrée. Les ténèbres qui avaient environné la masure se faisaient de plus en plus menaçantes déjà à l’époque. Mes voyages m’avaient amené aux quatre coins du monde. Les ruines étaient plus nombreuses que les bâtiments intacts. Partout l’obscurité gagnait du terrain. Rares étaient les endroits inondés de lumière. Cette taverne en faisait partie.

Le chatoiement qui coulait de la cheminée avait colporté une chaleur confortable dans cette chambre. Le chanteur avait caressé quelques cordes et la cithare avait crié son crescendo de conclusion. La combustion des chûtes de chêne, comme quantité de corps calcinés, avait capté ma concentration du crépuscule jusqu’au commencement de la clarté.

Je détournai le regard du foyer. J’avais dormi quelques heures, suffisamment pour me retaper. Ce dernier rêve me hantait davantage que le premier car celui-ci était bien plus réconfortant et en un sens, bien plus dérangeant. Tout autour de moi était mort et monstrueux. J’étais en enfer, ou pas très loin. J’avais choisi arbitrairement de suivre cette route mais j’étais peut-être en train de m’éloigner de Lige-feu au lieu de m’en approcher. Je décidai pourtant de poursuivre par cette voie. Lorsque j’étais descendu la veille et juste avant d’affronter la larve géante, j’avais repéré un escalier descendant. Ma curiosité naturelle me poussait à savoir ce qu’il cachait.

En bas, une issue était baignée d’une lueur vive. Il s’agissait d’un mur de lave. Rien ne me permettait de le franchir mais j’avais la nette impression qu’il cachait un lourd secret. Je me devais de percer ce mystère. Je pris le seul chemin possible, sur la gauche.

La cupidité est un vilain défaut...

Des démons taureaux barraient la route. Eux aussi étaient plus faciles à vaincre que le premier, au village des morts-vivants. Je me rappelai de la hache que j’avais prise comme trophée. Elle était trop lourde pour moi, même si son poids me paraissait maintenant plus faible que dans mes souvenirs. Une larve se laissa pendre depuis le plafond. Elle me goba et commença à me mâcher. Je me débattis comme un forcené et la bête consentit à me lâcher. Je m’en écartai tout en essayant de retrouver mon équilibre. Je m’affalai sur mes fesses en ne quittant pas le monstre des yeux. Je me mis sur mes deux pieds et je le chargeai en hurlant. D’un mouvement du poignet, je le coupai en deux. Il bougea encore un peu puis il devint inerte.

Le couloir ne continuait pas plus loin. Au bout se trouvait un coffre. Ca sentait le piège, comme je l’avais deviné pour le fils d’Izalith. Mais la tentation, comme toujours, était trop forte. J’atteignis presque le coffre quand quatre larves débouchèrent du plafond et me coincèrent entre elles. Je n’avais aucune chance de gagner le combat. J’étais blessé et je ne disposais d’aucune liberté de mouvement. Je pris une profonde inspiration et je courus entre les deux ennemis qui me séparaient du coffre. Je les vis derrière moi qui remuaient et crachaient de l’acide sur le sol. J’ouvris le couvercle en bois pour en extirper une grande braise. Le plus dur restait à faire. Je devais zigzaguer entre les larves sans m’arrêter. Si l’une d’elles me prenait entre ses mandibules, j’étais mort.

Je m’élançai. Les deux que je venais de duper me tournaient le dos et je les dépassai sans problème. Mais arrivé aux deux suivantes, c’était une autre paire de manches. Elles approchèrent leur tête pour me saisir. Je fis un bond de côté. Je me cognai contre le mur mais je n’attendis pas une seconde pour reprendre mes esprits. Je me projetai en avant. Une mâchoire se referma violemment là où ma jambe se tenait un instant plus tôt. A quelque distance des larves, je m’octroyai une pause. Puis, je m’amusai à les narguer en sautant de joie devant elles.

De retour à Lige-feu

Pour l’instant ce passage était condamné. Je revins en arrière. De retour au lac partiellement asséché, je choisis cette fois de prendre la direction opposée. Plusieurs démons taureaux se trouvaient là mais j’étais maintenant plus confiant qu’avant. Ils étaient presque une dizaine. Je m’arrangeai pour les combatte un à un. Et même de cette manière, la tâche était difficile. Je les tuai tous, pour rien. Il n’y avait aucune issue. Le seul intérêt résidait dans les quelques cadavres épars qui contenaient des objets. Mais pour les obtenir il me fallait les chercher au beau milieu de la lave. J’enfilai une nouvelle fois ma tenue brodée d’or pour ce faire.

Il n’y avait pas de raccourci pour Lige-feu par ici. Je retournai près de Quelaan mais elle ne disait toujours rien. Je pris mon mal en patience et je revins au sanctuaire par le chemin le plus rapide. L’homme qui se tenait près de l’ancien feu resta énigmatique. Il me parla de puanteur et de ronflement. Comme d’habitude, je ne pouvais rien en tirer. Je me souvins avoir entendu des ronflements provenant de l’autel du sanctuaire. Et les cloches de l’Eveil devaient sûrement avoir réveillé le dormeur qui s’y trouvait.

Je vis d’abord sa tête hirsute. Elle n’avait pas de lèvres et ses gencives et ses dents immondes étaient apparentes. Deux énormes yeux orange me fixaient tandis que des excroissances pendaient nonchalamment autour de son visage. Je ne pus déterminer de quel genre de bestiole il s’agissait mais son aspect était incroyablement repoussant. Et l’odeur qui en émanait était effectivement fétide. Je croyais que Lige-feu était un endroit de paix. Ce n’était plus le cas. J’analysai rapidement les lieux afin d’établir la meilleure stratégie à adopter pour en venir à bout. Mais la créature me salua. Elle parlait tout à fait normalement, comme s’il s’était agi d’un homme. Elle me félicita pour avoir activé les cloches et se présenta comme un serpent du nom de Frampt. Je baissai mon épée, muet de surprise. Il poursuivit et me confia que j’étais là pour succéder au seigneur Gwen, celui qui avait participé à la guerre contre les dragons. Le serpent plaçait tous ses espoirs en moi car en remplaçant Gwen, j’aurais le pouvoir d’entretenir le Feu et de débarrasser le monde du fléau des morts-vivants.

Enigmes dans l'obscurité

Je ne répondis rien. D’un côté j’avais risqué et perdu la vie un grand nombre de fois pour réveiller un monstre à l’haleine de poisson pourri. D’un autre côté, la perspective de devenir l’un des hommes les plus puissants du monde était alléchante. En fait je ne parvenais pas à me faire à cette idée. Le serpent me parla de deux endroits : Anor Londo, que je devais atteindre. Et la forteresse de Sen qui me permettait d’y arriver. La seule forteresse que j’avais cru apercevoir se trouvait en aplomb de l’église. Et son seul accès était verrouillé. Lorsque j’avais trouvé le portail de la forteresse, un chevalier essayait de s’y rendre aussi. Peut-être qu’il pourrait me donner quelques renseignements. Je m’y rendis, après m’être arrêté chez André.

Le forgeron me parla d’une des braises que j’avais ramassées. Il ne pouvait rien faire avec celle-là. Il m’enjoignit de trouver quelqu’un d’autre. Il y avait donc d’autres forgerons dans les parages. Je fis néanmoins renforcer la lame de ma claymore. A force de découper des morts-vivants et des démons, elle avait tendance à s’émousser rapidement. Sans même parler de l’acide qui l’avait rongée. Je fis de même avec mon armure, qui ne me garantissait jusqu’alors qu’une protection rudimentaire. Je ne savais pas ce qui m’attendait plus loin et je préférais ne pas y penser. Tout comme j’ignorais encore ce que j’allais faire avec l’héritage du seigneur Gwen, pour peu que j’arrive à lui succéder. D’ailleurs j’ignorais qu’il était mort. Et s’il ne l’était pas, en quel honneur devrais-je lui succéder ?

Je quittai le forgeron pour me diriger vers la forteresse, l’esprit embué par des questions sans réponse. Je m’engageai sur la passerelle qui y menait. Le portail était ouvert. Et le chevalier qui s’y tenait au préalable avait disparu. Il ne m’avait pas fait part de ses intentions. Là encore quelque chose se tramait. Quelque chose au fond de moi me poussait à renoncer avant qu’il ne soit trop tard. On m’offrait un pouvoir immense sur un plateau. Tôt ou tard j’allais devoir en payer le prix. Je mis de côté mes appréhensions et je m’engouffrai dans l’obscurité de la forteresse de Sen…