Préambule : ici je fais une analyse politique détachée, le but n'est pas de donner mon avis personnel sur la politique sanitaire et d'en débattre.

Ce que je constate donc, c'est que dans le contexte politique actuel, il y a un grand gagnant et deux perdants.

Le gagnant c'est Philippot, qui a réussi à prendre les devants d'un mouvement populaire d'envergure à gros potentiel. Pour quelqu'un qui n'existait plus médiatiquement depuis son départ du RN, c'est un coup de maître.

Les deux perdants sont la gauche (radicale) et le RN.

J'aimerais m'attarder en particulier sur la gauche.

Je suis fasciné de voir à quel point ils sont à côté de la plaque.

D'abord, ils ont laissé la droite de Philippot et Villiers prendre l'initiative de la lutte contre le pass, alors qu'elle rassemble une part importante du pays dont la sociologie est comparable à celle des GJ : une population plutôt populaire, dépolitisée, en résumé les fameux "perdants de la mondialisation" qui ont une défiance viscérale envers le système (le bloc bourgeois urbain pro Macron, PS et LR étant quant à lui largement favorable au pass sanitaire). Donc typiquement l'électorat qu'une gauche radicale, sociale et populaire devrait essayer de capter, comme l'avait plutôt bien fait Mélenchon en 2017 d'ailleurs.

Ensuite, au lieu de joindre le mouvement en faisant preuve d'humilité et d'unité dans une situation où la colère dépasse les clivages, ils restent dans leur sectarisme délirant et abandonnent le mouvement.

Exemple :

Ce qui me fascine avec la gauche, c'est son incapacité à se focaliser sur une lutte, à dépasser les petites querelles idéologiques. Ce que fait Philippot : il arrive à rassembler autour d'une lutte, sans braquer ni exclure personne. À dépasser les clivages. La gauche en est incapable, car trop empêtrée dans sa vieille morale qui lui fait considérer l'extrême droite (prétendue, car Philippot c'est plutôt du Chevenement en fait) comme le mal absolu. Sauf qu'une grande majorité du peuple se fout de ces histoires de fascisme et autre tambouille idéologique. Il se fout de cette convergence des luttes qui rend la gauche incapable de rassembler autour d'une cause sans y associer d'autres lubies qui excluent et divisent de facto. La gauche est incapable de dépasser son cercle militant et ne sait plus parler au peuple. Allez, petite exception pour la CGT peut-être.

Autrement dit : est-ce que vous voyez Philippot parler de Frexit dans les manifs ? Ou agresser les gens de gauche ? Non, il fédère parfaitement autour d'une lutte précise et c'est ce qui le rend populaire en ce moment. Les gens ont l'impression qu'il est là pour les défendre et pas pour leur vendre un énième produit politique (ce qu'il fait, du coup, avec cette subtilité). Il n'aurait aucun problème à accepter la présence d'insoumis dans une manif, mais l'inverse n'est pas vrai.

Si la gauche avait pris les rennes du mouvement, elle l'aurait vite détruit et réduit à un délire petit bourgeois de militants antifascistes et de bobos type nuit debout, parce qu'elle y aurait inclu du soutien aux migrants ou que sais je. Elle aurait agressé toute personne avec un drapeau français ou un message politiquement incorrect. C'est exactement ce qu'elle a fait avec les GJ quand elle a récupéré le mouvement : beaucoup des GJ de première heure ont fui car ils ne s'identifiaient plus à cette nouvelle atmosphère.

Bref je trouve que cet épisode illustre définitivement la disparition de la gauche populaire, et c'est intéressant de voir à quel point Philippot donne aux gauchistes une leçon de stratégie politique ici.