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Sujet : [Fic] Une vie d'élu

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BlackDeViL24 BlackDeViL24
MP
Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:43:16

Bon je balance.

BlackDeViL24 BlackDeViL24
MP
Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:43:48

Chapitre 10 : Quand on aime on ne compte pas – Partie 1.

Les jours suivants furent presque euphoriques. Non pas que je m'estimais victorieuse après avoir reçu ma lettre d'admission au programme de sélection du RAC. Je savais pertinemment bien que ce n'était au contraire que le début, et que les ennuis allaient seulement commencer à partir de maintenance. Malgré tout, cette première étape était vraiment importante pour moi, car si mon dossier avait été accepté, c'était que j'avais bel et bien des atouts à faire valoir pour un régiment de forces spéciales. Et ça, c'était extrêmement flatteur, on ne pouvait pas le nier. Ça voulait dire que mon CV était spécial, plus spécial que les centaines voir milliers d'autres CV qu'avait reçu le service de recrutement. Autrement dit, à partir de maintenant, mon destin n'était plus seulement entre les mains de quelques gratte-papiers de bureaux aux choix trop souvent arbitraires et injustes, non, mais bien entre les miennes. Pas de regrets, pas de remords. J'allais me donner à fond, et si je me plantais, au moins cette fois-ci, je ne pourrais pas dire qu'on ne m'avait pas donné ma chance.
Donc certes, être admise au sein d'un programme de sélection d'un régiment de forces spéciales, c'était un début, et un début uniquement, j'en avais plus que jamais conscience.
Mais c'était malgré tout un début prometteur, à partir duquel je pouvais d'ors et déjà me permettre de rêver un peu, qui sait...
Je passai dès lors la fin de semaine avec un esprit un peu plus léger, presque détendu en fait, ce qui n'était plus arrivé depuis longtemps mine de rien. J'eus même le loisir de me pencher un peu plus sur ce fameux service de rencontres impérial...Et d'y découvrir alors un univers comme je ne l'aurais jamais imaginé...
Contre toutes attentes, la jeune employée qui m'avait inscrit avait eu raison : cela faisait trois jours maintenant que je recevais un nombre incalculable de messages de tous un tas de mecs, à tel point que ma chambre d’hôtel fut bientôt jonchée de parchemins. Et ce dont l'on s'était bien gardé de me prévenir, au passage, c'était que la population qui employait quotidiennement ce service ne le faisait peut-être pas pour rien finalement. En d'autres termes, j'eus bien vite l'impression d'avoir atterri en plein milieu d'un immense zoo rempli d'animaux de toutes sortes et de tous horizons, totalement inaptes à la séduction en société civilisée, et donc contraints de se rabattre sur ce genre de services par pupitres interposés. Suffisait de voir la gueule des messages que je recevais :
« slt sa te dit un plan Q ? »
« coucou dispo pour du sexe ce soir ? »
« t belle meme ac ton œil chelou jte bz toute la nuit sans probleme sa te dit ? »

Et je passai volontiers sur les milliards de « salu sa va ? », de « sale pute !! » si j'avais le malheur de ne pas répondre dans la minute, ou mieux encore, sur ceux qui tentaient de dessiner leur bite à l'échelle en s'imaginant que j'allais leur tomber immédiatement dans les bras. Mention spéciale pour le blaireau qui – j'en étais sûre – avait réellement décalqué sa propre bite par message. De quoi me taper un mélange de fou rire et de consternation en l'imaginant poser sa gaule sur son pupitre pour mieux en dessiner les contours.
Non vraiment, au delà des barres que je me tapais depuis maintenant trois jours devant mon pupitre, à lire tous ces animaux en rut user des techniques les plus invraisemblables pour tenter d'arracher un rendez-vous crapuleux, j'eus surtout la confirmation formelle que le développement de ce genre de service de rencontres n'avait pas du tout eu l'effet escompté sur l'humanité.
Loin de rapprocher les gens, cela n'avait fait au contraire que les éloigner un peu plus les uns des autres, déréglant des codes sociaux millénaires pour...Quoi ? Qu'avait-on gagné au final ? Qu'avait-on véritablement tiré de positif en troquant les rencontres réelles et authentiques contre ce genre de processus déshumanisant ? Certains m'auraient répondu qu'il suffisait de ne pas utiliser les services de rencontres Impériaux, que c'était notre choix, qu'il ne tenait qu'à nous de continuer «à l'ancienne ». Ce qui aurait amené à oublier un peu vite que ces foutus services, ils étaient pratiquement obligatoires aujourd'hui, et qu'on ne pouvait plus faire sans, justement.
Cela faisait trop d'années qu'ils étaient implantés dans le paysage socio-culturel, trop d'années qu'ils avaient pignon sur rue, et trop d'années que les gens s'y étaient habitués, au point de ne plus pouvoir revenir en arrière pour la majorité d'entre eux. Les messages que je recevais depuis trois jours en étaient la preuve : quel homme m'aurait abordé ainsi, avec un tel mélange d'agressivité et de désespoir, il y a encore quelque décennies de cela ? Qui se serait réellement imaginé que le fait de me parler directement de cul, puis me traiter de salope dans la foulée au moindre signe d'hésitation – même pas de refus – de ma part, serait un comportement normal et légitime ?
Il y a quelques décennies, il aurait s’agit d'inadaptés, de fous furieux, de névrosés, soit de gens relativement rares sur le plan statistique. Pas le genre qu'on croiserait à tous les coins de rue. Pas la majorité des hommes en tout cas.
Pourtant, les dizaines, voir les centaines de mots que j'avais reçu en l'espace de seulement trois jours, et leur contenu surtout, constituaient un indicateur clair et indiscutable que le monde avait définitivement changé. Les Hommes n'étaient plus séducteurs et intrigants, les rapports n'étaient plus authentiques et naturels, et ce qui avait autrefois été un procédé instinctif, irréfléchi, encré dans notre ADN, et simple maillon perdu au sein de l'assemblage gigantesque qu'était la Vie avec un grand V, était devenu un véritable combat. Un combat cruel et sanguinaire, où des millions de blessés et d'estropiés se bousculaient pour tenter d'arracher les quelques rares brancards qui traînaient un peu partout.
En fait, je n'en voulais pas au hommes de m'écrire de cette façon, de m'apostropher de cette manière. J'aurais pu me sentir outrée, offensée d'être abordée de la sorte. J'en aurais eu le droit, le devoir même, car j'estimais être une personne normale, une femme, un être humain doué d'âme et de conscience, et je méritais le respect, la considération. Je n'étais pas un objet, et certainement pas un défouloir pour frustrés.
Pourtant, plus qu'ils ne me vexaient, tous ces messages me faisaient surtout de la peine en l'état.
Je sentais la détresse de ceux qui m’écrivaient, je percevais leur souffrance, leur désespoir. Je comprenais à quel point ils luttaient, tentaient de se raccrocher par tous les moyens possibles aux quelques rares bouts de corde que leur tendait un monde qui avait évolué beaucoup trop vite. Un monde auxquels très peu de gens, en fait, étaient parvenus à s'adapter...
Au fond, je savais bien qu'au delà de leurs messages tantôt agressifs, tantôt déplacés, pratiquement aucun de ces mecs ne me voulait du mal, où ne m'aurait ne serait-ce que manqué de respect, si l'on s'était rencontré en d'autres circonstances. Ils se seraient tout simplement...Comportés normalement...Et moi aussi d'ailleurs. Tout aurait été beaucoup plus simple...
En fait, ce qu'il leur manquait à tous, et ce qui me manquait à moi aussi, et certainement à Safia, et probablement à Salmo également, ainsi qu'à tous mes collègues, et même à tous les criminels que j'avais rencontré ces dernières années, c'était du contact humain, du vrai contact humain, finalement.
C'était ni du cul, ni des rapports crapuleux, ni des échanges brutaux et grossiers, mais de l'affection, de l'authenticité, quelque chose de vrai, de simple, de naturel. Quelque chose que le monde moderne, dans sa course effrénée et implacable vers le progrès, semblait avoir définitivement oublié.
Honnêtement, je ne pensais pas que les services de rencontres impériales avaient pensé à mal en décidant un beau jour de s'établir et de prospérer en Cyrodiil. Je pensais au contraire qu'ils avaient voulu rendre service justement, perpétuer la possibilité de se rencontrer et d'échanger chez une population qui était devenue majoritairement inapte à créer et à maintenir des liens naturels et authentiques dans un monde qui ne le permettait plus.
Je pense que ça avait été ça le but : proposer une solution. Une alternative.
Le problème, c'est que cela ne nous avait pas rapproché, au contraire même.
Cela n'avait fait que nous éloigner d'avantage les uns des autres...

BlackDeViL24 BlackDeViL24
MP
Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:44:08

Denel Attius reçu sa lettre d'admission au programme de sélection de la DRI peu de temps après moi, comme en témoignait le message surexcité qu'il m'envoya par pupitre. A croire que les programmes de sélection des différentes forces spéciales commençaient à peu près en même temps. En fait c'était même sûrement le cas, pour des raisons évidentes d'organisation, d'échange de ressources, de connaissances, ou plus simplement encore, pour mettre plus facilement au point des cellules de formation croisées entre les différents régiments.
Après tout, bien qu'appartenant souvent à des corps d'armées différents – c'était bien le cas pour la DRI, qui appartenait à l'infanterie, alors que le RAC appartenait à la cavalerie – les forces spéciales, c'était un petit monde bien à part au sein même de l'armée. D'une certaine manière, ils se connaissaient tous entre eux, ne serait-ce que par leur mode de vie, leur expertise, et la haute confidentialité de leur travail. Ils étaient fréquemment amenés à bosser ensemble, à s'appuyer les uns les autres, à échanger des informations classifiées, ou même des techniques de combat.
A titre d'exemple, je savais que le RAC, bien qu'appartenant à la cavalerie, était souvent amené à opérer à pied, discrétion oblige. Dans ces conditions, qui de mieux que la fameuse DRI, Division de Reconnaissance de l'Infanterie impériale, pour les former aux techniques d'infiltration et de combat non conventionnelles ? A contrario, un opérateur de la DRI était lui aussi une véritable machine de guerre. Il devait maîtriser un nombre incalculable de techniques de combat, d'infiltration, de survie, et bien d'autres choses encore. Pouvoir monter et manoeuvrer un cheval en cas d'urgence était donc, parmi tant d'autres, une aptitude tout bonnement indispensable, peu importe qu'il fasse partie de l'infanterie à la base. Probablement que le RAC avait également formé nombre d'opérateurs de la DRI aux techniques de combat à cheval au fil de ces dernières décennies, toujours dans la confidentialité la plus totale évidemment.
Au final, c'était ainsi que ça fonctionnait chez les forces spéciales : ils étaient les meilleurs parce qu'ils se formaient systématiquement chez les meilleurs, et si ça valait pour les différentes forces spéciales au sein même de la Légion Impériale, ce processus s'étendait bien au delà également.
A titre d'exemple, j'avais souvent entendu dire, au services de renseignements, que la DRI, pour en revenir à elle, avait plusieurs fois partagé des modules de formation avec la Morag Tong, rien que ça...L'info n'était pas officielle bien sûr, mais malgré tout, j'étais persuadée que c'était totalement vrai...

Au delà de l'euphorie que je ressentis à la réception de ma lettre d'admission, la fin de semaine fut tout de même un peu confuse, je devais bien l'avouer. La promesse de devoir tout plaquer et partir pour mon nouveau régiment dès le Morndas suivant me rattrapa à l'entrée du week-end. Et là, je réalisai d'un coup que, effectivement, je n'avais plus que deux jours avant que ma vie ne change radicalement, et peut-être de manière totalement définitive qui plus est.
Le changement, je connaissais bien sûr. Ça ne m'effrayait pas spécialement. Entre mes années à l'orphelinat, mon départ vers les classes préparatoires militaire, l'entrée à l'école des officiers impériaux, mon affectation à mon premier régiment, mon transfert vers les services de renseignements, ainsi que ma longue mission d'infiltration au sein de la Confrérie Dunmer, j'avais eu mon lot...Les chamboulements avaient été fréquents dans ma vie. Je m'y étais accoutumée d'une certaine manière. D'ailleurs, le fait de n'avoir ni famille, ni amis, ni amant, ni enfant, m'avait grandement facilité la tache à chaque fois. Forcément, il était bien plus facile de plier bagages et de s'en aller vers une nouvelle vie quand rien de bien concret ne nous retenait dans la précédente.
Malgré tout, il y avait toujours eu une sorte de continuité dans ma carrière, jusqu'à présent du moins. La prépa, puis l'académie militaire impériale, puis le régiment...Tout s'était déroulé normalement, dans l'ordre, sans accroc ni imprévu. Même mon transfert vers les services de renseignement avait été « facile » en quelque sorte, car il avait alors été question de revenir à un travail plus théorique, plus volontiers porté sur l'analyse, la recherche, l'interprétation, jusqu'à ma mission d'infiltration, qui n'avait finalement été que l'aboutissement de plusieurs années d'un apprentissage minutieux et méthodique au sein des différents bureaux des services de renseignements. Même là oui, le fleuve avait suivi son cours, pas à pas, avait connu différentes embouchures certes, mais avait malgré tout continué à s'écouler dans un sens bien précis, suivant un tracé qui était finalement, au delà de quelques remous, très largement prédéfini.
Or cette fois-ci, je sentais bien qu'il y avait quelque chose de différent à l'aube de mon retour à la Légion Impériale, et à mon intégration au programme de sélection du RAC. Ce n'était plus une suite logique, ce n'était plus un enchaînement naturel. J'allais cette fois-ci me confronter à quelque chose de véritablement nouveau, de véritablement dépaysant, et je m'en rendais bien compte tout à coup. Je m'apprêtais à quitter le fleuve de ma propre existence pour mieux prendre une toute nouvelle direction, et soudain, cela me faisait un peu peur, je devais bien l'admettre. Non pas que je regrettais mon choix. J'étais très impatiente de voir où tout ça allait me mener bien sûr. Mais malgré tout, pour la première fois depuis longtemps, je ressentais une véritable incertitude, une véritable appréhension, car la route que je m'apprêtais à prendre désormais, n'était pas tout à fait celle que j'aurais dû suivre à la base.
Non, cette route-ci, elle se révélait bien différente de toutes les autres, plus audacieuse, mais plus incertaine également...
C'était le bordel dans ma tête. D'un coup, je réalisais que j'avais beaucoup de choses à régler avant mon départ, mais que je souhaitais également profiter du peu de temps qu'il me restait pour...Je ne sais pas...Profiter, en quelque sorte ? Faire un dernier truc sympa, sans prise de tête, avant de devoir embrayer sur ce qui serait peut-être un tournant décisif dans ma carrière, et mon existence toute entière ? Si j'avais eu une famille, j'aurais certainement dîné avec eux, passé une ultime soirée à leur côté avant le grand départ. Si j'avais eu de vrais amis, j'aurais certainement passé du temps avec eux également. Un dernier verre, une dernière bouffe, je sais pas...
J'avais envie de faire quelque chose, de bouger. Pas forcément de marquer le coup à proprement parler, mais de faire un truc au moins, peu importe. Pas juste rester dans ma chambre d’hôtel quoi...
Ce fut probablement à cause – ou grâce ? – à cet état d'esprit soudain que j'attrapai à la volée une opportunité à laquelle je n'aurais probablement pas donné suite en d'autres circonstances.
En l’occurrence, l'un des nombreux « prétendants » qui m'envoyaient des messages par pupitre interposé depuis maintenant trois jours, avait fini par se démarquer de tous les autres...
Je ne savais pas bien dire pourquoi, ni comment en fait. Lorsqu'il décalqua sa fiche personnelle pour me montrer son visage – car oui, ce système à la con ne permettait pas encore de voir à quoi ressemblaient ceux qui vous choisissaient et vous envoyaient des messages en premier – il s’avéra effectivement être assez beau garçon. Un Impérial de vingt-huit ans, un peu plus jeune que moi du coup, mais à l'allure assez sobre, classe, posée. Belle gueule certes, mais ce n'était pas forcément ça qui avait retenu mon attention. Après tout, des belles gueules, j'en avais entraperçu plein lors de ma première visite à la succursale du service de rencontres impériales. Ce n'était pas ça qui manquait...
Non, lui, ce qui m'avait tout d'abord surpris, c'était qu'il m'avait abordé et salué avec une normalité pratiquement anormale. Et c'était un comble, quand on prenait la peine d'y penser. Le simple fait qu'on ait lancé la conversation avec moi de manière tout à fait normale et naturelle, m'avait immédiatement paru étrange, voir choquant, déjà trop habituée que j'étais à recevoir des messages de cul, voir des insultes, voir les deux en même temps.
Ici, rien de tout ça. Juste un jeune Impérial bien sous tous rapports qui avait entamé la conversation avec un naturel désarmant, et qui au fil des échanges d'écrits – et c'était là ce qui allait définitivement le démarquer de tous les autres – avait rapidement fait montre d'une subtilité et d'une vivacité d'esprit particulièrement bienvenues. Et ça, clairement, ça me fit beaucoup de bien oui.
Tout ma vie, qu'elle soit professionnelle ou privée, j'avais côtoyé des délaissés, des accidentés, des criminels, des militaires, des sociopathes et des carriéristes, soit autant de gens avec qui je n'avais tout simplement jamais pu baisser ma garde et me laisser aller à quelques conversations insouciantes. Que ce soit à la Légion, dans le ghetto, ou même en taule, je n'avais côtoyé que des tordus, des camés, des débiles, des mecs pas foutus de développer un minimum leurs idées, et quand ça avait été le cas, ça n'avait jamais été que pour le travail, le fric, les affaires et le pouvoir.
Jamais la moindre discussion détachée, jamais le moindre échange sain et constructif. Du cerveau endurci de la Confrérie Dunmer à l'officier supérieur de la Légion Impériale, les mecs véritablement intelligents et instruits que j'avais rencontré vivaient eux aussi leurs vies sous une cloche hermétiques, devenus incapables de voir le monde au delà de leur domaine d'expertise quotidien.
Le fait de parler soudain à une personne simple et naturelle, et surtout, de pouvoir parler d'absolument tout avec elle, me fit l'effet d'une véritable délivrance. Et ce fut d'ailleurs à cet instant précis que je réalisai encore une fois à quel point le contact humain, le vrai contact humain je voulais dire, me manquait terriblement...Avoir des vrais gens à qui parler, avec qui échanger des idées, partager des activités...Si seulement j'avais pu avoir ça moi aussi. Si seulement...
En tout cas, je ne savais plus exactement comment s'était développée notre discussion - il me faudrait sûrement la relire en entier d'ailleurs – mais elle s'était rapidement étendue sur des pages et des pages. Ce Fredas encore, j'avais commencé à lui écrire vers midi, juste comme ça, par petites touches, par petits échanges mesurés. Et comme à chaque fois, notre conversation avait continué jusqu'à ce que l'horloge de ma chambre ne passe subitement le cap de minuit, dans un claquement bien caractéristique.
-Putain ! Déjà ?! Glapis-je en faisant un bon sur mon lit, des dizaines de parchemins éparpillés tout autour de moi.

BlackDeViL24 BlackDeViL24
MP
Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:44:28

Oui, décidément, Betto Flaccus, de son vrai nom, me plaisait vraiment beaucoup...

-Betto : Ça te dit qu'on se voit en vrai autour d'un dîner ?
-Teleri : Oui, bien sûr.
-Betto : Tu fais quoi demain soir ?
-Teleri : Je dîne avec toi tiens.
-Betto : Merde. J'avais déjà prévu tout un argumentaire pour essayer de te convaincre...
-Teleri : Garde-le pour demain soir. Je suis beaucoup plus difficile à convaincre en face à face.
-Betto : J'ai exactement ce qu'il faut pour ça. Morceau de tissu + une potion tranquillisante. Personne ne résiste à cet argument là.
-Teleri : Ha ha ! C'est vrai au fond, je te connais pas. T'es peut-être un psychopathe...
-Betto : Seulement le week-end.

Là, penchée sur mon parchemin, plume à la main, je sentis mes joues rougir.
C'était bizarre en fait. Je me sentais charmée, et totalement nigaude à la fois.
-Betto : En ville ou à l'appart' ?
-Teleri : T'as un appart' toi ? Je croyais que t'étais un clodo qui vivait dans les égouts de la banlieue.
-Betto : D'abord t'es une pétasse. Ensuite, non non. J'ai un appart' dans le quartier des jardins elfiques.
-Teleri : Ah oui c'est vrai. On est hyper proches en fait.
-Betto : C'est pour ça que j'ai noté ton adresse. Le côté pratique avant tout.
-Teleri : Toi tu sais parler aux femmes.

Je me surpris plusieurs fois à glousser bêtement. D'un côté, j'avais envie de me mettre des claques, mais de l'autre...Merde hein, pour une fois...
-Teleri : Va pour l'appart'. Mais on commande un truc à livrer. Pas envie que tu m’empoisonne, le psycho.
-Betto : Ma cuisine est totalement indolore. J'ai actuellement 144 corps de femmes totalement intactes dans ma cave qui peuvent en témoigner. Mais oui bon, si ça te rassure, je garde ça pour le deuxième rendez-vous. Donc on se fera livrer. On improvise à ce moment là ?
-Teleri : Ça me va. On fera ça en équipe. Je choisis et toi tu paies.
-Betto : Michto.

Nos échanges taquins se terminèrent par une mise au point du plan officiel de la soirée :
Rendez-vous demain à vingt heures, devant chez lui, rue du vieux hêtre, numéro quatre-vingt-trois, quartier des jardins elfiques. Je devais juste amener de quoi boire, et lui paierait la bouffe qu'on se ferait livrer. Et m’accueillerait dans son humble demeure, évidemment...
Petite gamine de trente-et-un ans toute émoustillée que j'étais, j'avais désormais particulièrement hâte d'être le lendemain soir. Comme quoi, peut-être que les autres avaient raison : il suffisait de se lancer...
Sauf qu'avant de me rendre chez le charmant Betto ce Fredas soir, j'avais un autre truc extrêmement important à faire...Et je choisis de rentabiliser mon temps en le faisant dès ce Fredas matin, la tête encore un peu dans le cul, mais néanmoins bien décidée à clôturer rapidement cette histoire officielle avant de pouvoir me donner corps et âme à la préparation de mon rendez-vous galant.
-...Je comprends pas pourquoi t'as besoin de moi. Fit remarquer Maro Salvitto alors que nous pénétrions, en fin de matinée, l'immeuble de dix étages dans lequel se situait mon ancien appartement.
-L’arrondissement de Terre-neuve est relativement tranquille. Expliquai-je. Mais les services de renseignements ne sont pas encore tout à fait sûrs que ma couverture tienne toujours, donc ils m'ont autorisé à venir rechercher mes affaires dans mon ancien appart, uniquement si un garde en civil m'accompagnait. Ça reste le Dun après tout...

Et le Dun, je n'étais pas franchement super heureuse de le retrouver en cette fin de matinée.
Certes, l'arrondissement de Terre-Neuve, situé dans le sud du Dun, était assez calme. Il ne s'y passait pas grand chose, et on était assez loin de l’activité criminelle infernale qui régnait dans des cités comme Ald-Mora ou Courte-crique, à titre d'exemple.
Malgré tout, le Dun, ça restait le Dun, du nord au sud, de l'est à l'ouest, et si la cité des quatre-feuilles, dans laquelle j'habitais depuis plusieurs années maintenant, ne se démarquait pas par sa criminalité galopante, elle n'en demeurait pas moins crade et déprimante au possible. Clairement pas l'endroit le plus accueillant de Terre-Neuve...
Mais bon, le loyer y était pas cher, alors...
-Ça pue la pisse dans cet immeuble...Commenta Maro alors qu'on arrivait dans le couloir sale et délabré du huitième étage, soit celui où se situait mon appart'.

J'avais presque fini par oublier à quoi ressemblait cet endroit...Plus de deux ans que je n'y avais pas mis les pieds, et maintenant que je revoyais ce couloir gris plein de béton, de graffitis et de détritus, je me sentais comme mal à l'aise, de nouveau rongée par la misère qui régnait ici.
La lumière qui filtrait par les fenêtres situées en bout de couloir révélaient à intervalles réguliers la poussière qui stagnait dans l'air. Derrière l'une des portes d'entrée des vingt appartements qui résidaient à cet étage, quelqu'un semblait s’étouffer dans ses glaires, s'arrêtant de tousser et de cracher uniquement pour lâcher quelques jurons étouffés par les murs et les portes fermées.
Dehors, par les fenêtres entrouvertes du couloir, j'entendais des gamins jouer et s'insulter en même temps. Et avec un langage particulièrement fleuri qui plus est. Un subtil mélange d'Impérial et d'argot Dunmeri qu'on retrouvait typiquement chez les habitants du Dun.
J'entendis même quelqu'un pisser bruyamment, bien que je ne sus pas dire de quel appartement ça venait exactement...
Enfin bon, la vie n'était pas rose ici. C'était la galère, ni plus ni moins.
Tout juste pouvait-on s'estimer heureux d'entendre seulement des gens gueuler, cracher, roter et pisser, plutôt que d'entendre des claquements d’arbalètes ou des détonations de parchemins magiques, comme c'était fréquemment le cas dans d'autres arrondissements du Dun.
-C'est ici ? Questionna Maro en me voyant finalement insérer ma clef dans la serrure du numéro 8-11.

BlackDeViL24 BlackDeViL24
MP
Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:44:44

Nous pénétrâmes enfin mon appartement, rangé et plutôt ordonné, mais qui malgré tout, n'avait plus vu âme qui vive depuis plus de deux ans maintenant, en témoignait l'odeur de renfermé.
Là, dans ce qui devait être au maximum une vingtaine de mètres carrés, se trouvait une unique grande pièce, très sobrement aménagée, divisée en un coin salon-chambre, un coin cuisine, et un coin salle de bain. Ou plus précisément, un vieux divan-lit, derrière lequel se trouvait une baignoire usée, en face de laquelle se trouvait une table et une petite cheminée sommaire.
-Ah ouai. T'es du genre minimaliste toi. Commenta le Khajiit alors que j'ouvrais de mon côté les rideaux pour mieux apporter un peu de lumière dans cette habitation ombragée.
-Je vis pour mon taff. Répondis-je en référence à l'endroit effectivement très dépouillé dans lequel j'avais vécu ces dernières années. J'ai rien...Quelques fringues, quelques papiers...Cet appart' ne me servait que pour dormir de temps en temps, et avoir une adresse pour le courrier.
-Et en gros là t'as besoin de quoi ? Questionna Maro en jetant des coups d'oeil ça et là.
-Mon équipement de légionnaire, et mon dossier officiel. Conclus-je.

J'ouvrai l'un des tiroir de ma table de cuisine, et attrapai aussitôt mon dossier militaire, resté intact durant tout ce temps. Une odeur de Sucrelune envahit alors la pièce...
-Mec sérieux ? Lançai-je en me retournant vers Maro.
-Ben quoi ? Me répondit bêtement ce dernier en tirant sur sa pipe fraîchement allumée.

Effectivement, je n'eus pas besoin de fouiller beaucoup pour retrouver le reste de mes affaires.
Dans un coin de la pièce, près du divan-lit, se trouvait toujours mon équipement réglementaire d'officier Impérial, soit celui que j'avais reçu lors de ma remise de diplôme à la fin de mes quatre années d'étude au sein de l'académie militaire impériale.
Tout était là : Ma cuirasse lourde, mon casque à crête de centurion – qui marquait mon statut d'officier subalterne, là où le casque de légat marquait l'appartenance à la classe des officiers supérieurs – mes gants, mes bottes, mes dagues, mon arbalète, et mon espadon.
Mon foutu espadon, cette énorme épée de deux kilos et d'un mètre cinquante de long, que les formateurs de la légion m'avaient imposé comme arme principale, soit disant parce que « j'étais naturellement douée pour son maniement ». Un choix totalement rocambolesque que je n'avais jamais compris, et jamais réellement accepté non plus. C'est vrai au fond, pourquoi m'avait-on fourgué cette énorme merde et avait-on insisté pour que je la manie ? Elle aurait été plus utile à un grand gaillard, à un Nordique ou un Orque, je ne sais pas moi...Mais non, eux, on leur avait donné des glaives et des boucliers, et moi la petite Dunmer, on avait insisté pour me former au maniement d'un putain d'énorme espadon qui faisait presque ma propre taille.
Allez comprendre l'armée...
En tout cas, il ne manquait rien. Mieux encore : tout avait gardé son brillant.
Au moins, je n'aurais pas à lustrer et à entretenir tout ce bordel pour mon intégration de Morndas.
-Bon ben...Je crois que j'ai tout...Annonçai-je en rassemblant mes affaires.
-Attends je vais t'aider. Proposa Maro en attrapant mon espadon et ma cuirasse lourde.

Il entreprit également de saisir mon arbalète, l'observa durant quelques secondes, cracha une volute de fumée sucrée, et commenta :
-N'empêche, si t'es prise dans les forces spéciales, ça va te changer de tirer avec leurs arbalètes a répétition. Ces vieux trucs à rechargement manuel, c'est totalement dépassé. Je comprends pas pourquoi on continue à les utiliser dans les régiments régulier d'ailleurs. C'est lourd, c'est lent, c'est pas précis...Tiens regarde moi cette corde à la con. Quand je faisais mes classes à l'infanterie, toutes les arbalètes étaient en rade à cause de ces putains de corde qui arrêtaient pas de péter. On a du faire les exercices de tir en lançant des pierres...
-Sérieux ?! Pouffai-je.
-Je te jure...
-Nous à l’académie, ça allait encore. Me remémorai-je. Les arbalètes étaient dans un état convenable.
-Ouai mais vous les officiers, on vous refile toujours le bon matos. Grommela Maro. C'est comme la bouffe tiens ! On vous voit hein, à manger du poisson et de la purée pendant que nous on doit se taper des rations périmées tous les jours !
-J'ai fait mes classes aussi Maro...Des rations périmées, on en mange tous...
-Ouai mais vous c'est temporaire. Nous c'est pour toute la vie. Conclut le Khajiit.
-Oh arrête hein !

Nous quittâmes finalement l'appartement, non sans un bref regard en arrière de ma part.
A vrai dire, je ne savais pas exactement quand j'allais revenir ici. Probablement pas avant un bout de temps...En tout cas, cet endroit n'allait pas me manquer. Pour le peu de temps que j'y avais réellement passé en même temps...
Nous descendîmes lentement l'interminable cage d'escalier de l'immeuble. Fallait dire que le fait de se manger huit étages, les bras chargés d'objets métalliques lourds, c'était crevant et ça prenait du temps, en plus de faire pas mal de bruit. Ce que ne manqua pas de nous faire remarquer un locataire du quatrième étage lors de notre passage...
-Hey ! Vous voulez pas faire moins de bordel ?! Nous apostropha ainsi un Dunmer d'une cinquantaine d'années, à la dégaine bien typique de gros beauf agressif et alcoolique.
-Rentre chez toi, gros branleur ! Lui répondit Maro du tac au tac.
-T'as dis quoi le macaque ?! S'emporta le Dunmer en s'avançant vers nous.

Maro posa brusquement mes affaires au sol, et lui fonça dessus si vite que je n'eus même pas le temps de réagir.
-Mais qu... ! Tenta de se débattre le Dunmer, avant de se faire sauvagement empoigner par le Khajiit.

Maro le choppa au col, lui fit une violente clef de bras, et lui fracassa la tête contre le mur du couloir.
-Vas-y, casse-toi, casse-toi maintenant, casse-toi...Souffla le caporal en le jetant ensuite vers l'entrée de son appartement.

Un bruit de meuble renversé et de vaisselle brisée résonna depuis l'intérieur du domicile, suivi de jurons choqués et outrés, juste avant que mon compagnon ne se décide purement et simplement à claquer lourdement la porte. Et de terminer par un bon coup de latte en plein milieu, histoire de bien marquer le coup...
En fait, je réalisai à cet instant précis que Maro n'était pas juste un jean-foutre qui aimait s'envoyer des taffes de sucrelune pendant son service, mais aussi et surtout un bon mec de ghetto bien violent qui, si il n'avait pas été canalisé par la Légion, aurait immanquablement fini dans un gang de criminels, à vendre de la came et à buter des gens. Le genre de mec que j'avais rencontré à foison lors de ma mission d'infiltration en prison, à la différence que tous ces taulards justement, n'avaient peut-être pas eu la chance d'avoir pour guide et pour sauveur l'armée impériale...
Ouai, des Khajiits comme Maro Salvitto, j'en avais vu des centaines, des milliers même. Et ils s'étaient tous comporté exactement comme lui : détachés en apparence, mais sujets à de très violentes sautes d'humeur lorsqu'on venait les contrarier.
Comme quoi, ce n'était pas pour rien qu'on désignait souvent l'armée comme une ultime alternative à la prison. Probablement que beaucoup de criminels seraient devenus des soldats, et inversement, si le hasard et les circonstances en avaient décidé autrement à un instant précis de leur vie...

Message édité le 11 décembre 2020 à 21:47:44 par BlackDeViL24
BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
11 décembre 2020 à 21:44:58

Nous regagnâmes finalement ma chambre à l’hôtel du roi Nédique, non sans avoir bien galéré à transporter tout mon matos à travers deux lignes de RDS.
-Merci en tout cas. Soufflai-je en terminant de ranger mon matériel dans un coin de la chambre. A charge de revanche hein.
-Ouai t'inquiète. Lâcha Maro tout en jetant des regards intrigués à ma chambre de luxe. Ah ouai ! Posé ici !
-Je t'offre un verre ? Lui proposai-je.
-Nan nan, c'est gentil mais je dois filer. Refusa toutefois mon compagnon en quittant rapidement la pièce. Mais une autre fois si ça te dit ? De toutes façons on se reverra, tranquille. Puis on reste en contact.
-Bon, d'accord alors...Merci en tout cas.
-Ouai t'inquiète. Répéta le Khajiit, visiblement pressé. Allez, à bientôt !
-Oui, à bientôt.

J'observai Maro s'éloigner rapidement le long du couloir, puis me décidai finalement à refermer la porte de ma chambre, et à revenir vers mon lit.
-...Toi mon coco, tu vas chercher ta dose. Commentai-je à voix basse. Enfin, c'est pas mon problème hein. C'est déjà sympa à lui d'être venu m'aider...

Je poussai un long soupir, un peu fatiguée et agacée par tout ce déménagement, et entrepris d'ailleurs de m'asseoir quelques minutes sur mon lit, histoire de me poser un peu.
Au moins, c'était fait. J'étais prête pour morndas...
Et maintenant ?
Maintenant...
Maintenant, j'avais du pain sur la planche, parce que maintenant, il s'agissait de me maquiller, de me faire belle, et de me trouver des vêtements potables pour ce soir.
Et ça pour le coup...Et bien c'était une sacré mission...Du genre que je n'avais plus mené à bien depuis très, très longtemps...

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
13 décembre 2020 à 22:35:34

La suite arrivera demain, le chapitre est un peu (nettement) plus long que prévu. :hap:

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 17:19:21

Bon la suite arrive bientôt mais je divise le chapitre en 3, sinon ça va faire 30 pages word pour finir... :hap:

ps: J'explique pour le principe. En vrai personne ne lira ces messages. https://image.noelshack.com/fichiers/2018/20/7/1526807245-voyalaplaya.png

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 17:51:14

Chapitre 11 : Quand on aime on ne compte pas – Partie 2.

Le vrai problème, quand on passait des années à la Légion, ou dans les service de renseignements, c'est qu'on perdait presque totalement sa capacité à se rendre présentable en société.
Plus précisément, les us et coutumes propres aux civils, comme le simple fait de bien s'habiller, se maquiller, voir simplement se coiffer, devenaient des corvées, des contraintes abominables avec lesquelles il était très difficile de renouer. A titre d'exemple, cela faisait des années que je me coiffais d'une simple tresse, vite fait bien fait, sans jamais me casser le cul avec tous ces peignes et autres brosses de toutes sortes qu'utilisaient quotidiennement la plupart des femmes civilisées.
Cela faisait donc très, très longtemps que je ne m'étais plus coiffée à proprement parler, pour la simple et bonne raison que ce genre de convention n'était absolument pas d’application dans des instituions telles que l'armée ou les services de renseignement. Bien sûr, il fallait être propre sur sois. Hors de question de se pointer à une instruction ou à une réunion en puant la sueur ou en ayant la gueule de travers. Il fallait être carré, droit, présentable quoi. Mais il ne fallait pas être coquet, et c'était bien ça ce qui nous différenciait de la plupart des civils. Eux étaient coquets, prenaient soin d'eux, multipliaient les coiffures, les maquillages et les apparats. Or dans la Légion, ce genre de luxe était totalement proscrit. Les hommes devaient être bien rasés, et avoir une coupe nette. Les femmes elles, devaient avoir une coiffure sobre, et ne pas afficher ostensiblement leur féminité. Et voilà, c'était à peu près tout pour le physique. Pour les hommes, ça signifiait donc souvent une coupe courte, sans chichis, alors que la plupart des femmes se contentaient d'un chignon ou d'une tresse. En gros, on nous avait appris à être propres, mais simples. Pas d'artifices, pas de superflu. On allait à l'essentiel. Et ça arrangeait tout le monde au final. C'était un mode de vie auquel on s'habituait très vite. Le problème, c'est lorsqu'il s'agissait d'en revenir à des activités plus mondaines, entouré de civils et de conventions sociales très éloignées des standards auxquels nous avaient habitué l'armée, ou des institutions connexes comme les services de renseignements.
Comment étais-je censé m'habiller pour un rendez-vous galant, moi qui alternait entre les uniformes militaires et les vêtements de bureau lambda depuis mon entrée dans le monde adulte ? Comment devais-je me coiffer ? Comment devais-je me maquiller ? Si je m'étais écoutée, je serais venue avec ma tresse habituelle, pas maquillée, et affublée de vêtements choisis au pif dans mon armoire. Pourtant, je ne pouvais pas faire ça, je le savais bien...Enfin, plutôt, je pouvais le faire oui, mais ç’aurait été me tirer un carreau dans le pied, parce que si moi je ne prêtais désormais que très peu d'importance aux cérémonies physiques et vestimentaires dont s’encombraient la plupart des civils, il y avait fort à parier que mon rendez-vous galant lui, serait moins enclin à passer outre mon minimalisme habituel. En l'état, je devais tout de même faire un petit effort de présentation, j'en avais bien conscience, ne serait-ce que pour prouver ma bonne éducation Impériale – et non pas que j'étais une grosse racaille négligée du Dun – mais également pour...Peut-être...Mettre toutes les chances de mon côté ? C'était mon premier rendez-vous galant depuis des années. Autant dire que je n'avais pas envie de me foirer d'entrée de jeu à cause de ma dégaine...

Je passai pratiquement tout mon après-midi dans ma chambre d’hôtel, à faire des essais en compagnie de Safia, qui avait fort heureusement accepté de venir m'aider. Déjà pour trouver ma tenue, bien évidemment, mais également pour m'aider à me coiffer et à me maquiller.
-...Euh sérieux ? Commentai-je après qu'elle m'ait fait essayer une robe que j'estimais beaucoup trop habillée pour un simple premier rendez-vous.
-Ouai, c'est vrai que c'est un peu...Un peu trop...Observa l'Impériale tout en m'étudiant. Bon on va tester autre chose. Ça peut-être ?
-Euh bof...
-Et celle-là ?
-M'ouai...
-Bon, et celle-là alors ?
-Boah...
-Si tu refuses tout ce que je te propose, on va pas y arriver hein ! Pesta ma collègue.

Nous tombâmes finalement d'accord sur un ensemble robe-salopette décontracté, mais pas trop non plus. Un truc relativement sobre dans lequel j'eus au moins le mérite de me sentir à peu près à l'aise, ce qui était tout de même important, mine de rien.
Question maquillage et coiffure, je me contentai de laisser faire Safia et d'accepter ce qu'elle proposait, parce que là pour le coup, rien ne pouvait paraître plus tristounet que ma tresse habituelle...
-Mais...T'es en train de me décoiffer là ? Relevai-je tout de même après quelques instants passé sur ma chaise, interloquée par les coups de brosse étrange que me prodiguaient ma collègue..
-Mais pas du tout, je donne du volume à tes cheveux ! Se défendit immédiatement cette dernière.
-Ah bon...
-...Là, le maquillage maintenant...Enchaîna la jeune Impériale en attrapant un pinceau et en tapotant différentes parties de mon visage avec. Les paupières...Ferme les yeux ? Là...Bon, faudra que t'apprennes à le faire toi même un jour. C'est important d'être féminine.
-Oui, ça aurait fait toute la différence au sein de la Confrérie Dunmer. Ironisai-je.
-C'est fini ça, Teleri...
-A la Légion non plus, j'en aurai pas besoin...Fis-je remarquer.
-Mais tu ne seras pas soldat toute ta vie. Rétorqua Safia. Et quand bien même, les permissions c'est pas pour les chiens. Je sais qu'on a tendance à privilégier nos carrières, mais n'oublie pas qu'il y a une vie civile à côté de notre métier. Il ne faut pas passer à côté. Je ne pense pas que tu souhaites te réveiller un jour à cinquante balais, entourée de tes chats et de plein de regrets...

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 17:51:40

La tension monta d'un cran lorsque l'horloge de ma chambre indiqua soudain dix-neuf heures. En effet, selon l'emploi du temps qu'on s'était fixé avec Safia, c'était précisément l'heure à laquelle l'on devait être prêtes à quitter l’hôtel. Le rendez-vous avec Betto Flaccus étant fixé à vingt heures, cela nous laissait le temps d'aller acheter les boissons et d'aller ensuite prendre un verre en ville, histoire de mieux me « mettre en condition ». Tout un programme...Et effectivement, j'allais en avoir besoin, vu comment le stress était en train de me gagner petit à petit.
-T'as rien oublié ? Questionna Safia alors que l'on quittait ma chambre.
-Euh...Non j'ai tout. Vérifiai-je.

Nous quittâmes ensuite l’hôtel, direction l'une des supérettes du quartier du marché, déjà bien animé en ce début de soirée.
-Je peux voir vos papiers d'identité ? Me lança soupçonneusement le vendeur du premier magasin dans lequel je rentrai, lorsque je lui demandai deux bouteilles de Surilie et une bouteille de Sujamma.
-Pa...pardon ? Bégayai-je.
-Il faut être majeur pour pouvoir acheter des alcools forts. Insista le vendeur.
-C'est une blague ? J'ai trente-et-un ans...
-Du Sujamma ? Questionna Safia une fois que nous fumes sorties de l'échoppe, non sans avoir dû batailler ferme avec un vendeur bien casse-couilles.
-J'ai dit à Betto que je lui ferais goutter.
-Mais tu t'y connais en alcools de Morrowind ? Poursuivit ma collègue. Il paraît que ça arrache ce truc là...
-Quand j'étais en prison, les mecs de la Confrérie en fabriquaient en scred lorsqu'ils bossaient en cuisine. Expliquai-je. Donc j'ai pu goûter. Après, ça reste de la grosse gnôle artisanale faite par des taulards. J'imagine que le vrai Sujamma n'a pas le même goût. Enfin on va bien voir du coup...Ah et pour répondre à ta question : oui, ça dégomme.

Je n'avais pas vraiment fait le lien de prime abord, mais je réalisai bien vite que si la cité impériale était si animée ce soir, c'était tout simplement parce que c'était aujourd'hui la fin des examens d'hiver au sein de la plupart des universités impériales. Nous fûmes donc rapidement encerclées d'étudiants venus festoyer depuis les quatre coins de Cyrodiil.
Et le moins que l'on pouvait dire, c'était que ça commençait fort :
A peine dix-neuf heures, et nombre d'entre eux étaient déjà complètement torchés, gueulant et gerbant à tous les coins de rue.
Enfin, cela sembla surtout concerner le quartier du marché en fait, car le quartier des jardins elfiques sembla immédiatement plus calme une fois que nous franchîmes son grand portail d’entée. Ici aussi, il y avait des étudiants en sortie bien sûr, mais ils semblaient un peu plus calmes, cherchant peut-être une mise en jambes un peu plus progressive dans l'un des nombreux pubs du coin avant de rejoindre ensuite seulement le joyeux bordel du quartier du marché.
Quand à Safia et moi, nous décidâmes sans plus attendre de rejoindre l'auberge de la nouvelle Sovngarde, établissement d'inspiration Nordique dont la dimension familiale et folklorique avait depuis longtemps fait la renommée. C'était bien simple, chaque fois que j'y rentrais, j'avais l'impression d'être de nouveau téléportée en Bordeciel, avec ses Nordiques bourrus, ses énormes choppes d'hydromel, et ses innombrables discussions où ça gueulait plus que ça ne parlait. Le tout évidemment, avec un service et des normes d'hygiènes mises aux standards de l'Empire.
Fallait pas déconner quand même...
Du reste, c'était un endroit assez chaleureux : Gros foyer central qui crépitait, comptoir dans un coin, et tout autour du feu, des tables et des chaises. Un truc bien à l'ancienne quoi, bourré de cachet.
-Ah ! Une peau grise ! Aboya un gros Nordique totalement bourré au moment même où Safia et moi pénétrions l'établissement. Alors ça se passe bien avec vos nouveaux maîtres écailleux ?! Pas trop mal aux fesses ?!
-Excuse moi mon gros Ysgramor des bacs à sable, mais quand on se fait enculer par des ALTMERS sur son propre territoire, on ferme bien sa gueule. Répliquai-je du tac au tac.

Des rires gras retentirent un peu partout dans l'auberge.
Bah...Les Nordiques de Cyrodiil n'étaient pas méchants, juste un peu lourds et provocateurs parfois.
Et de toute façon, ça n'allait jamais beaucoup plus loin que quelques vannes grossières, car il y avait fort à parier que ce Nordique était exactement comme moi au final : un mec qui avait grandi ici, au sein de la société impériale, et n'avait donc jamais mis le moindre orteil dans la province de ses lointains ancêtres. Alors à quoi bon nous intéresser d'avantage à ce qu'il se passait là-bas...
-Qu'est-ce que je vous sers ? Questionna un serveur après que nous ayons pris place à une petite table vide.
-Deux bières. Répondit simplement ma collègue.

Le serveur reparti immédiatement derrière le comptoir, nous laissant le loisir d’observer l'auberge quelques instants. Et elle était déjà bien bondée aussi, mine de rien...Beaucoup de Nordiques venus fanfaronner bien sûr, mais également des Impériaux, des Elfes, des Khajiits...
Le gros pochetron qui m'avait interpellé dès mon entrée par exemple, semblait m'avoir déjà oublié, préférant continuer sa discussion – si on pouvait appeler ça une discussion du moins – avec un Bosmer visiblement bien saoulé par ses manières intrusives.
-...vrai que vous ne pouvez pas manger de feuilles ? Questionna avidement le Nordique.
-Vous ? Répéta le Bosmer en haussant un sourcil perplexe.
-Ben vous les Elfes des bois quoi.
-J'ai aucun problème à manger de la salade...
-Mais au Valboisé il paraît que c'est passible de mort, et que vous vous nourrissez uniquement de viande de trolls que vous chassez vous même, vrai ? Insista le Nordique.
-Qu'est-ce que j'en sais moi ? Je suis né ici, j'achète ma viande et mes légumes dans les magasins, comme tout le monde...
-Mais ouai ! Fous lui la paix enfin ! Intervint un autre Nordique. Est-ce qu'on te demande si tu chasses le mammouth toi ?
-Je pourrais ! Se vanta aussitôt l’alcoolo en bandant ses muscles.
-Arrête hé ! Le seul mammouth que tu pourrais coucher c'est ta mère !
-...Teleri...Me souffla soudain Safia.
-Quoi ? Questionnai-je en me retournant vers elle.

Ma collègue m'indiqua le coin opposé de la pièce d'un signe de tête silencieux. Et en effet, là tout au fond, assis un peu à l'écart, j'aperçus alors deux individus que je n'aurais jamais pensé voir ici : Deux agents du Thalmor...
-Mais qu'est-ce que...Qu'est-ce qu'ils foutent là ? Murmurai-je, perplexe.
-Aucune idée...Confia l'Impériale.

J'avais beau réfléchir, je ne voyais absolument pas ce que deux Altmers du Domaine Aldmeri pouvaient bien venir trafiquer au sein même de la cité impériale, dans un pub Nordique du quartier des jardins elfiques qui plus est. Les rares fois où l'on les avait aperçu au cours de ces dernières décennies – en Cyrodiil du moins - ça avait essentiellement été dans le quartier du palais, pour quelques réunions politiques bien précises, après lesquelles ils étaient immédiatement repartis chez eux. Or là, il n'y avait à ma connaissance aucun événement particulier qui légitimait leur présence dans la cité impériale. Pas de réunion, pas d'entrevue officiellement annoncée, rien que je sache à ce sujet. Les services de renseignement en auraient forcément été avertis, et moi aussi...
Que venaient-ils donc faire ici, dans une taverne de ce genre, loin de chez eux, mais également loin d'un quelconque représentant politique impérial ?
-Voici. Nous indiqua soudain le serveur en nous déposant nos bières.
-Oh, merci. Répondis-je en abandonnant momentanément l'observation des deux agents du Thalmor.
-Bon ben...Santé. Conclut Safia en levant sa bouteille.

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 17:52:01

Je répondis à son salut, puis entrepris d'observer de nouveau les deux Altmers.
Apparemment, leur présence dans cette auberge n'était pas vraiment passée inaperçue. Tout juste semblait-on les ignorer vaguement pour le moment. Enfin ou du moins, jusqu'à ce que le gros Nordique bourré ne se décide soudain à les interpeller indirectement :
-...quasi sûr de ça. Demande donc aux deux pointus derrière moi !

Plusieurs têtes se retournèrent aussitôt vers les deux Elfes, qui répondirent à ces regards inquisiteurs par un haussement de sourcil dédaigneux.
-C'est vrai que vous êtes là pour arrêter quelqu'un ? Les questionna un Impérial d'âge moyen.
-Je ne vois pas bien ce qui peut légitimer cette hypothèse. Répondit l'un des deux Altmers d'un air condescendant. Ni en quoi cela vous regarde.
-C'est vrai ou pas ? Insista l'Impérial.
-Bien sûr que non...Répondit simplement l'Altmer.
-Boh menteur ! Rétorqua aussitôt le Nordique bourré. C'est connu, les Haut-Elfes le disent eux même « Quand le Thalmor apparaît, chie dans tes braies ».
-Nous n'avons pas pour habitude de nous exprimer avec des propos si familiers. Rétorqua l'agent dans un froncement de sourcils offensé.
-...C'est pas eux qui disent ça...Releva un autre Nordique, l'air pensif.
-Ah ? T'es sûr ? Hésita le pochetron.
-Vous êtes venus en bateau ? Par le fleuve ? Enchaîna le premier Impérial, visiblement très curieux.
-Quel fleuve ? Questionna le Nordique bourré.
-...Nous sommes venus par la route. Répondit platement l'Altmer.
-Comment ça quel fleuve ? Rétorqua l'Impérial en se tournant vers l’alcoolo. Ben le Niben tiens.
-T'appelles ça un fleuve toi ? Répliqua à son tour le Nordique. On peut pisser d'une rive à l'autre !
-Genre...
-Ben quoi ? Je te jure ! Insista l’alcoolique.

L'un des deux Thalmor leva les yeux au ciel, dépité par autant d’idioties.
-...D'ailleurs, en parlant de ça...Enchaîna le Nordique.

Il se leva péniblement, manqua de tomber à la renverse au moins trois ou quatre fois vu son ébriété, mais parvint tout de même à se diriger vers le mur le plus proche. Et là, sans crier gare, il baissa son pantalon et commença à pisser bruyamment devant tout le monde.
-HEIN ?! MAIS IL EST SERIEUX LUI ?! Beugla aussitôt une voix derrière le comptoir.

Un Impérial d'une soixantaine d'années, probablement le gérant de la taverne, traversa la salle comme un boulet de canon, et vint sauvagement empoigner l'ivrogne.
-Hey mais... ! Se débattit ce dernier.
-GROS DEGUEULASSE ! T'ES PAS CHEZ TOI ICI ! DEGAGE MAINTENANT !

Le Nordique fut littéralement jeté à la rue, sous un mélange de rires, d'applaudissements et de réflexions outrées. Hélas, l'ouverture prolongée de la porte d'entrée permis à une grosse bourrasque hivernale de pénétrer la taverne, et comme Safia et moi n'étions stratégiquement pas bien placées, nous fûmes probablement les premières à la ressentir.
-Brrrrrrr ! Vivement le printemps ! Trembla ma compagne.
-Mais fermes ça bordel ! Renchérit un autre Impérial, assis à la table juste à côté de la notre.
-Oui ben désolé mais bon hein...Tempéra le gérant de la taverne en désignant d'un geste entendu le Nordique qu'il venait tout juste de balancer dehors.

J'entrepris de me lever moi aussi, et de m'approcher du feu quelques instants pour mieux me réchauffer.

https://image.noelshack.com/fichiers/2020/50/7/1607888415-skyrimse-2020-12-13-14-36-35-07.jpg

Et c'est fut à ce moment précis, parce que je venais de me lever et de changer de position, que je l'aperçus. Elle était juste là, postée à peu près en face de moi, un peu sur la gauche, profitant elle aussi de la chaleur du brasier :
La jeune Bosmer que nous avions aperçu quelques jours plus tôt avec Safia, lors de mon inscription au service de rencontres impériales, et que ma collègue avait rapidement identifié comme étant un agent des forces spéciales de la cavalerie impériale...

https://image.noelshack.com/fichiers/2020/50/7/1607889002-skyrimse-2020-12-13-15-35-44-39.jpg

Nos regards se croisèrent brièvement, mais juste assez longtemps pour me confirmer qu'elle m'avait bien reconnu elle aussi, et surtout, qu'elle avait bien cerné quel genre de personne j'étais.
Je bossais dans les services de renseignement après tout, j'avais appris à reconnaître immédiatement ces choses là. Probablement que elle aussi, d'une certaine manière...
Que faisait-elle ici ? Était-elle en mission ? Non, peu probable. Les forces spéciales n'étaient pas du genre à faire ce genre d'infiltration ou de repérage. Pas par des agents officiels en tout cas, même si ils étaient chargés de la logistique ou de l’administration. C'était le rôle des services de renseignement ça, justement. Il y avait donc assez peu de chance qu'elle soit là à cause des agents du Thlamor, par exemple. Était-elle venue prendre un verre avec des amis ? Mais elle avait l'air seule cela dit. A moins qu'elle ne soit simplement venue ici pour rencontrer quelqu'un elle aussi ? Il est vrai qu'elle s'était inscrite au service de rencontres impériales le même jour que moi, et qu'apparemment, le fait de proposer un premier rendez-vous dans un endroit public était assez fréquent.
Oui, ça devait être ça à mon avis. Elle allait rencontrer quelqu'un elle aussi. Ou alors elle était vraiment comme moi : une meuf tellement isolée que si elle souhaitait s'adonner à des activités aussi simples que le fait d'aller prendre ou verre ou manger un bout au resto, elle devait le faire seule, faute d'amis pour l'accompagner...
-Euh Teleri, il va être l'heure. Lança soudain Safia derrière moi.

J'abandonnai mes réflexions, et me détournai du feu pour mieux revenir vers ma collègue.
-Déjà ?
-Ben ouai, il est vingt heures moins dix...Observa l'Impériale.
-Merde, on a même pas...Commençai-je, soudain assaillie par le stress.
-T'en fais pas va, il n'y a rien à dire. Me rassura aussitôt Safia. Sois toi même, et puis c'est tout. Il va pas te manger ce mec. Enfin, ou peut-être bien que si justement, et c'est ça qui est bon ! Ha ha !
-T'as des délires cannibales ?
-Tu comprends pas hein ? Ironisa ma collègue avec un rictus narquois.
-Si j'ai très bien compris, obsédée va.

Nous quittâmes bientôt l'auberge de la nouvelle Sovngarde, juste à temps d'ailleurs, car une violente bagarre entre deux piliers de comptoir éclata dans notre dos à l'instant même où nous prenions la direction de la sortie. On croisa même un officier de la garde impériale sur le pas de la porte, qui déboulait en sens inverse, l'air furibond :
-Encore ?! Mais bordel je m'en vais te la boucler moi, ce putain de taverne de saoulards !

Ce ne fut pas le seul garde impérial qu'on croisa d'ailleurs...A l'évidence, le quartier du marché était plus animé que jamais par les fêtes estudiantines, vu le boucan qui semblait en provenir, ainsi que tous les soldats qu'on apercevait en train de s'y diriger au petit trot.
-Tu vas faire quoi après ? Questionnai-je en direction de Safia.
-Hmmmm. Je pense bien aller prendre un petit verre au quartier du marché. Confia ma collègue. Ça va être bien animé ce soir.
-Fais gaffe quand même hein. On sait jamais.
-T'inquiète. Viens me rejoindre après au pire, si jamais tu...Enfin si ça devait se finir plus tôt que prévu quoi...
-Boh...Euh...
-Mais je rigole hein ! Gloussa la jeune Impériale. Te tracasse pas trop va. Ça va bien se passer.

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 17:52:24

Nous nous dirigeâmes lentement en direction de mon point de rendez-vous, rue du vieux hêtre, numéro quatre-vingt-trois.
-Dis Teleri, pourquoi on marche de plus en plus lentement ? Plaisanta Safia.
-Hmmm...

Putain, ça y est, j'étais en stress total...
-Mais... ! Avance enfin ! Insista ma collègue en me tirant par la manche. Tu m'as dit que t'étais pressée de le rencontrer !
-Oui mais bon euh...
-Euh quoi ?
-Ben euh...Après euh...Peut-être qu'on peut remettre à un autre jour ?
-Pardon ?
-Je lui expliquerai par pupitre que j'ai eu un empêchement...
-Mais ça va pas non ?! Allez avance !

Et en moins de temps qu'il ne fallut pour le dire – car oui, c'était fou comme le temps prenait un malin plaisir à filer dans ces cas là – on se retrouva soudain rue du vieux hêtre...
D'une certaine manière, j'aurais presque aimé un signe, un imprévu, voir un cataclysme. Quelque chose qui aurait subitement fait disparaître le numéro quatre-vingt-trois, et m'aurait permis de dire « ah ben zut alors ! Il est pas là ! Bon ben temps pis on rentre ! ».
Sauf que non hélas, il n'y eu ni signe, ni imprévu, ni cataclysme. La rue était bien là, et le numéro quatre-vingt-trois également. Je le voyais même d'ici, depuis ma position...
-Allez allez. Me rassura Safia tout en réajustant une dernière fois mes cheveux, puis mon écharpe. Tout va bien se passer, tu vas voir. C'est les premières minutes qui sont les plus gênantes, puis après ça roule tout seul. Te prends pas la tête, reste naturelle, laisse le parler, bois quelques verres, puis profite de ta soirée.
-Hmmm...Marmonnai-je, encore plus dépitée et stressée que le jour où j'avais dû passer mes examens d’entrée aux services de renseignement.
-Allez ! Bonne chance ! On se voit plus tard ! Conclut ma collègue en décidant finalement de me planter là.

Safia quitta rapidement la rue, et disparut à l'angle du carrefour suivant, non sans m'avoir adressé au passage un ultime salut d’encouragement.
Quand à moi, je restai quelques secondes immobile, seule dans cette rue déserte et silencieuse, l'esprit agité par mille et une questions. A un moment, je fus même prise de la folle envie de foutre le camp, et de planter purement et simplement mon rendez-vous.
Sauf que je ne pouvais pas faire ça, pas maintenant...Je m'étais donnée trop de mal dans ma carrière et même dans ma vie en général que pour me refuser aujourd'hui l'opportunité de rencontrer des gens, de développer des relations, voir tout simplement de profiter un peu de mon existence.
Je voulais dire : que ce soit ce gars ou un autre, je ne pouvais pas abandonner, pas sur le principe. Ça revenait à m'enterrer toute seule, à m'avouer définitivement vaincue, à admettre que je n'étais désormais rien de plus qu'une enveloppe vide, définitivement flétrie par une vie de travail, incapable de servir à autre chose qu'au taff et à la rentabilité. Une énième sacrifiée du monde moderne en somme, condamnée à errer, à remplir son petit rôle jusqu'à ce que la mort l'emporte, sans jamais s'autoriser des plaisirs et un épanouissement qui étaient pourtant la raison même de notre présence ici. Au final, à quoi bon venir sur Nirn si c'était pour nous enfermer dans une existence morne, dénuée de tout plaisir et de tout frisson ? Serait-ce ça ma vie ? Une vie de travail, de procédures, de formalités, sans jamais rien à côté ? Une vie d'automate Dwemer, conçue et programmée pour remplir sa fonction basique sans jamais y déroger ?
Je devais bien me rendre à l'évidence : aujourd'hui j'avais trente-et-un balais, et si ma vie professionnelle me plaisait énormément, et m'avait toujours largement convenu, elle n'en demeurait pas moins qu'une partie de mon existence, partie qui avait peut-être pris trop de place au final... Safia avait raison, il y avait une autre vie au delà du travail, bien différente de celle qu'on supportait au quotidien, et cette vie là, je ne voulais pas la rater. Je ne voulais plus la rater...
Il en était hors de question...

Je me dirigeai finalement d'un pas maladroit mais néanmoins décidé vers mon point de rendez-vous. Après tout, rien ne servait de se torturer l'esprit pendant des heures. Il fallait y aller, tout simplement. On verrait bien par la suite...
-Bon...Commentai-je en me présentant devant le numéro quatre-vingt-trois, à savoir une petite maison mitoyenne comme à peu près toutes les autres maisons au sein du quartier des jardins elfiques.

Je soufflai un bon coup, raffermi ma prise sur le sac contenant mes trois bouteilles d'alcool, puis, la conscience vacillante, le cœur battant à tout rompre, j'entrepris finalement de frapper à la porte.

Newradion44 Newradion44
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Niveau 10
14 décembre 2020 à 21:47:13

Le 14 décembre 2020 à 17:19:21 BlackDeViL24 a écrit :
Bon la suite arrive bientôt mais je divise le chapitre en 3, sinon ça va faire 30 pages word pour finir... :hap:

ps: J'explique pour le principe. En vrai personne ne lira ces messages. https://image.noelshack.com/fichiers/2018/20/7/1526807245-voyalaplaya.png

Je lis mec. Je bois tes écrit :noel:

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
14 décembre 2020 à 23:10:42

Merci de ton soutien kheyou. https://image.noelshack.com/fichiers/2018/36/3/1536182288-jiub-2.png

Newradion44 Newradion44
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Niveau 10
17 décembre 2020 à 00:19:50

Sweeeeeeeeeet :bave:

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
17 décembre 2020 à 19:52:23

Je dirai, pour être sûr, samedi soir kheyou.

Newradion44 Newradion44
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Niveau 10
18 décembre 2020 à 21:24:26

J'attend ça avec impatience mon Black :noel:

Sinon tu a une petite dunmers dans ta vie :hap:

Il me semble qu'a l''epoque tu te disais mage noir. Moi plus que 4 ans et j'ai mes pouvoirs :noel:

Newradion44 Newradion44
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Niveau 10
20 décembre 2020 à 11:34:27

Ou est le chapitre :snif:

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
20 décembre 2020 à 12:57:03

Bonjour kheyou.

J'ai bien écrit mais j'ai été occupé en même temps. La suite arrive dans l'aprem.

ps: concernant les histoires de mage noir, ça date. De l'eau a coulé sous les ponts de Vivec depuis. :hap:

BlackDeViL24 BlackDeViL24
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Niveau 33
20 décembre 2020 à 14:26:41

Bon voilà, je relis et je post.

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