Un tout petit.

Bon j'envoie.

Chapitre 38: Une délicate attention.

Il y avait tout de même un détail auquel personne n’avait pensé avant de ce déploiement éclair. Un truc tout con, mais auquel personne n’avait véritablement pris la peine de réfléchir. Et ce truc, c’était Elsweyr lui-même…
Notre descente des collines rocheuses s’était faite dans une relative fraîcheur, merci à l’aube et aux nombreuses cimes qui nous avaient apporté un peu d’ombre durant de notre progression. Par contre, l'ascension progressive du soleil dans le ciel, ainsi que notre arrivée dans l’immense mer de sable de la région de Dune avait rapidement changé la donne. Et là, c’était face à une véritable fournaise que nous nous étions confrontés. Il était encore tôt - même pas huit heures du matin - et pourtant, la température était brusquement montée d’un cran une fois le désert rejoint. L’air des collines s’était raréfié, le vent s’était assoupi, et la chaleur, elle, n’avait fait que croître au fil des heures, à tel point que les parties métalliques de notre équipement étaient rapidement devenues intouchables. La lame de ma claymore par exemple, s’était mise à fumer lorsque j’y avais versé quelques gouttes de ma gourde. Fallait pas demander la température qu’il faisait déjà…
Compte tenu de mon petit gabarit, c’était moi que l’on avait mis en tête de peloton, jugeait que mes petites jambes imprimeraient le rythme de marche des dix-sept autres opérateurs du RAC. Paradoxalement, ce fut moi qui éprouvai le moins de difficultés à progresser une fois que nous fûmes plongé dans l’immense océan de dunes d’Elsweyr. Derrière moi, j’entendais fréquemment les autres trébucher, grommeler, pester, entraînés dans le sable mou par leur poids. Je fus même contrainte de ralentir l'allure à plusieurs reprises, car beaucoup eurent du mal à suivre ma cadence - pourtant pas franchement rapide. Et le pire, c’était que les mecs qui marchaient derrière moi étaient tout sauf des guignoles. C’étaient des opérateurs échelon de l’Empire, des putains de machines de guerre sur-entraînées capables d’encaisser les pires conditions imaginables. Simplement, on ne nous avait pas préparé au calvaire que représentait Elsweyr. On nous avait balancé sur la zone au dernier moment, sans vrais préparatifs, et c’était seulement maintenant qu’on y était, qu’on réalisait à quel point rien dans notre mode opératoire, notre stratégie et même notre équipement, n’était adapté à cette réalité du terrain. Oh, on en mourrait pas bien sûr, on avait encore de la ressource. Mais on était malgré tout confronté à des complications qu’on aurait facilement pu contourner si ce déploiement n’avait pas été effectué dans une telle urgence. Une fois l’opération vague rouge terminée, il fallait composer avec le désert, son climat et sa topographie, et ça pour le coup, ça nécessitait une stratégie et une logistique toute autre…
Je comprenais un peu mieux pourquoi les Do’Traaji étaient devenus si menaçants ici. A bien des égards, cet endroit ressemblait aux descriptions de l’Oblivion, avec ses immenses régions arides et brûlantes. Pas le moindre vent, pas le moindre souffle, pas la moindre trace de vie… Rien que des dunes de sable, de la pierre, et cette chaleur accablante qui vous assaillait de toutes parts. Depuis combien de temps nous marchions déjà ? J’avais l’impression de suivre ces crêtes sableuses depuis des heures et des heures…
Ce qui était sûr, par contre, c’était que des gens passaient par ici, en témoignaient les traces de pas suivant précisément le même itinéraire que nous.

Alors que nous enchaînions les kilomètres dans cet interminable océan de dunes, il y eut bientôt un autre souci au sein du groupe. En l’état, le soleil était devenu tellement agressif qu’il commençait à brûler les Impériaux du peloton, et ils étaient largement majoritaires. Bien sûr, des opérateurs comme Hastrel, Endril ou moi n’avions pas de problème particuliers. La fourrure du Khajiit le protégeait du soleil, et concernant Endril et moi, notre peau grise était naturellement résistante aux brûlures et autres températures élevées. Fallait pas oublier que nos ancêtres vivaient sur les terres volcaniques de Morrowind depuis des milliers d’années. Forcément, la fournaise, c’était pas vraiment un problème pour les Elfes Noirs. Mais pour des Impériaux comme Telrav, Titus, Rexus, et tous les autres, par contre… Des rougeurs significatives apparurent bientôt sur le visage et sur la nuque de la plupart des soldats, et ça, c’était préoccupant ouais, parce que ça voulait dire que leur peau était littéralement en train de cramer. Bientôt, elle allait gonfler, cloquer, puis peler et se décomposer, occasionnant au passage de sacrées douleurs. Dans un contexte de déploiement militaire, cet état de fait était problématique, car il leur serait difficile d’être pleinement opérationnels avec la gueule complètement ravagée par les rayons ultraviolets du soleil.
Et encore, en partant du principe qu’on arriverait bien vite à bon port, et qu’on ne subirait pas la fournaise trop longtemps. Que se passerait-il si on perdait trop de temps ici, sous la canicule ? Leur peau finirait pas éclater, voir se nécroser dans le pire des cas, et là tout à coup, le danger devenait sérieux. Ce n’était plus qu’une simple question de confort, mais bien une question de santé, voire de survie…
Je continuai la progression le long des crêtes de sable, toujours vers le nord-ouest, toujours vers le point de ralliement avec la brigade logistique de la cavalerie. Les communications avec Clivia et Reman étaient momentanément coupées pour des raisons stratégiques, aussi fûmes nous contraints d’avancer seuls dans le désert. Ça ne m'effrayait pas spécialement bien sûr. C’était prévu, et puis nous n’étions pas perdus. Nous avions une idée assez claire d’où nous étions, et d’où nous nous rendions. Mais tout de même, je devais bien admettre que le fait d’être ainsi plongée dans le silence au beau milieu de cette étrange région, sans contact avec le reste de l’Empire, avec les trois quart d’un peloton progressivement attaqué par le soleil brûlant, avait quelque chose d’inquiétant, voire d’un peu angoissant. Et si nous restions ici pour toujours, dans cet immense océan de sable silencieux ?

Je jetai un bref coup d’oeil derrière moi, et me confrontai aussitôt à la grosse tête toute mauve de Rexus. D’un côté, j’eus envie d’éclater de rire, mais de l’autre, ce n’était pas spécialement marrant non plus. Il avait l’air d’en baver le pauvre.
-... Putain de chats, putain de pays… Grommela le colosse, arrachant un sourcillement vexé à Hastrel Velarius. Je sais pas ce que l’Empire trouve à cet immense tas de merde sablonneux, mais il y a plutôt intérêt à ce que ce soit important ! T’as pas la gueule qui crame Teleri ?!
-J’ai chaud ouai, mais cramer… Répondis-je tout en observant mes propres avant-bras. Non ça va…
-Rexus, pourquoi tu poses la question ? Railla Titus quelques mètres plus loin. Les Dunmers mangent de la cendre au petit déjeuner et prennent des bains de lave pour le plaisir. Bien sûr que non, qu’elle ne crame pas. C’est pas une couille molle comme toi.

Quelque part derrière moi, j’entendis Endril se racler la gorge d’un air agacé.
-...écoutez-le, le blondinet ! Se vexa Rexus en se retournant en direction du mage. La ramène pas hein ! T’es encore plus rouge que moi !

Il était vrai que Titus n’était pas très beau à voir lui non plus. Il était certes moins mauve que le colosse - probablement une question d’alcoolémie latente - mais son teint de peau naturellement pâle ne semblait pas spécialement apprécier le soleil.
-La vache j’ai chaud… Souffla fort éloquemment quelqu’un en queue de colonne.
-Et donc, on va où ? Reprit Rexus sur le ton de la conversation.
-Non Teleri ! Lui réponds même pas ! Aboya Telrav en me voyant ouvrir la bouche. Il avait qu’à écouter l’instruction ! Merde à la fin !
-Bon… Abdiquai-je.

Je regardai de nouveau droit devant moi, vers le désert, et fus soudain interpellée par l’apparition d’un étrange nuage de sable flottant loin au nord-ouest de notre position.
-Ah, quelqu’un vient. Relevai-je en plissant les yeux.

Je perçus aussitôt le cliquetis caractéristique des soldats en armure se déplaçant dans mon dos. En quelques secondes à peine, nous fûmes tous les dix-huit en ligne, toutes les arbalètes pointées vers l’avant, prêts à foudroyer celui qui venait désormais à notre rencontre. Nous n’eûmes toutefois pas à nous tracasser bien longtemps, car c’était en réalité tout un convoi de cavalerie impériale qui galopait droit dans notre direction, comportant notamment plusieurs charrettes destinés à transporter des troupes. Un centurion, affublé de son casque à crête caractéristique, se détacha rapidement du reste de l’escadron en nous apercevant à son tour, et vint directement à ma rencontre. A ma plus grande surprise d'ailleurs.
-Capitaine Teleri Othril ? S’enquit immédiatement ce dernier en stoppant son cheval à ma hauteur.
-Euh… Oui c’est moi… Hésitai-je, un peu décontenancée de le voir s’adresser à moi en particulier.
-Lieutenant Ashtus Horatius, brigade logistique de cavalerie. Se présenta l’officier centurion. Selon les ordres du commandement, vous étiez censés nous rejoindre environ douze kilomètres au nord-ouest, mais compte tenu de l'importance de votre mission, on nous a donné l’ordre de faire jonction vers vous plutôt que d’attendre votre arrivée, et de vous amener directement dans la périphérie nord de Dune.

D’un geste de la main, il nous désigna les chariots de transports vides que ses soldats avaient amenés avec eux. Je clignai des yeux, interloquée. Hélas, le silence étrange qui régnait dans les rangs à ma gauche et à ma droite ne me rassurait pas beaucoup plus.
-Parait que ça vient directement du renseignement… Glissa le centurion face à notre mutisme prudent.
-Ben voyons… Grommela la voix de Linus sur ma droite. Et sinon, quelqu’un peut m’expliquer pourquoi ce petit coq s’adresse directement à cette pisseuse ? On lui accorde un peu trop d’importance si vous voulez mon avis.
-Pisseuse ? Répétai-je.

Je sentis une main m'agripper fermement l’épaule gauche, m’empêchant de me retourner d’un bond vers le Rougegarde. Parce que là effectivement, d’un coup, je mourrais d’envie de lui faire fermer sa grande gueule. Mais ça, la main d’Endril l’avait déjà compris...
A ma droite, un peu en retrait, je perçus des bruits de lutte furtifs, signe que d’autres mains s’occupaient également de Linus.
-Peu importe de qui ça vient et à qui ça s'adresse ! Intervint la voix de Telrav. Rassemblez-vous par sections, et montez ! Et toi commences pas à me faire chier !
-C’est bon lâche moi ! Grogna la voix du Rougegarde.
-Bah, un chariot c’est un chariot. Commenta Rexus en s’avançant d’un pas traînant vers les diligences. Ça peut même venir de Molag Bal en personne, du moment que ça m’épargne de marcher une seule seconde de plus dans ce sable de merde…

Nous embarquâmes par sections respectives dans les différentes charrettes, et posâmes lourdement nos culs sur les banquettes de bois. Le convoi démarra dans la foulée.
-Oh punaise… Souffla Rexus de soulagement.
-Tu l’as dit. Acquiesça Titus.
-Teleri, Linus, si jamais vous continuez à vous dévisager comme ça… Commença Endril.
-Ouais ? Quoi ? Le provoqua Linus tout en continuant de me toiser d'un air mauvais.

Je soutins son regard sans sourciller. Si il s’imaginait me faire peur une seule seconde, ce fils d’inceste...
-Arrêtez vos conneries là ! S’énerva Endril en plaquant ses mains sur nos visages, histoire de mieux nous forcer à tourner la tête.
-... En tout cas le renseignement est drôlement pressé de nous voir à Dune. Commenta Titus comme si de rien n’était. Vous pensez qu’ils ont déjà une autre mission pour nous ?
-Bah… On vient de la finir notre mission. Répondit Rexus en fixant le blondinet d’un air dubitatif.
-Une mission Rexus. Confia Endril en se retournant vers lui. Ça ne clôture pas le déploiement pour autant. Ce n’était qu’une première étape d’ouverture, les Do’Traaji restent planqués partout dans la région. Tu penses bien qu’on est loin d’en avoir terminé ici...
-Mais je croyais qu’on devait prendre la région de Dune aux Do’Traaji et… !
-Bon Rexus, tu m’emmerdes ! Coupa Telrav. Je veux plus t’entendre parler stratégie jusqu’à nouvel ordre !

Le colosse souffla bruyamment, se retourna sur sa banquette pour mieux tourner le dos à son chef de section, et se mit à fixer le désert avec obstination. C’est vrai que c’était un peu lourd à la longue, de l’entendre poser autant de questions alors qu’il lui aurait suffit d’écouter l’instruction.
-Ça y est il boude. Railla Titus.
-N’empêche que je me pose la même question. Reprit Endril. Le renseignement est anormalement insistant. C’est rare qu’ils nous sollicitent autant dès les premières heures d’un déploiement. T’as pas des trucs à nous dire Teleri ?
-Non, j’ai rien à vous dire. Répondis-je du tac au tac, piquée par les insinuations du Dunmer. Si j’avais des infos, je vous les aurais données.

Linus se racla bruyamment la gorge. Endril se retourna d’un bond et lui intima de fermer sa gueule.
-... C’est forcément lié à toi en tout cas. Glissa Telrav tout en auscultant machinalement le mécanisme de son arbalète. Le renseignement ne nous aurait pas envoyé la brigade logistique sans vraie raison, ils ne l’ont jamais fait jusqu’à présent, et ça fait pratiquement vingt ans que je fais ce métier. Surtout que les baraquements ne sont probablement pas encore montés à l’heure qu’il est, donc c’est certainement pas pour nous reconduire rapidement dans nos cabanons. Je pense comme Titus, ils veulent directement nous confier une autre mission, mais laquelle ?
-En rapport avec le Thalmor ? Proposa Titus. Ou les évadés de Stendarr ?

Je haussai les épaules d’un air impuissant. Ou pas tant que ça en fait, car il était vrai que Levus Mico m’avait parlé de Nilvyn juste avant le déploiement, et de sa présence en Elsweyr.
Avait-ce un lien avec cette arrivée inattendue de la brigade logistique ? Le renseignement avait-il souhaité nous ramener au plus vite vers Dune - là où se situerait le camp de base de la Légion durant tout ce déploiement - en vue de nous refiler directement une nouvelle mission la concernant ? Le raisonnement des autres était logique en fin de compte: l’objectif officiel de notre venue ici était de virer les Do’Traaji de la région de Dune, et cela bien sûr, ça allait prendre du temps, le département de la défense le savait. Ils n’avaient aucun intérêt à nous presser à ce sujet, que du contraire. C’était un travail de longue haleine. Dans un premier temps bien sûr, il faudrait enchaîner les attaques coups de poing contre eux, multiplier les assauts sur leurs positions stratégiques, et elles étaient certainement nombreuses dans la région. Clairement, la guerre ne faisait que commencer, car en plus de cette poussée offensive, s'ensuivrait forcément une pacification lente et progressive de la région. Le terrorisme et ses tactiques de guérilla, c’était pas le genre d’ennemi qu’on foutait dehors en trois escarmouches et deux destructions de matériel. C’était un problème plus global, largement ancré dans les sociétés autochtones. C’était une philosophie, une idée tenace que des populations bafouées embrassaient et perpétuaient de génération en génération. Le combat n’était pas seulement situé sur le terrain, il était également mental, bien encré dans les esprits, et c’était là que se situait l’essentiel du problème. Quand bien même la Légion Impériale réglait le problème de manière radicale et brûlait tout Elsweyr pour arriver à ses fins, qu’est-ce qui nous garantissait que les têtes coupées ne seraient pas aussitôt remplacées par d’autres ? Brûler les mauvaises herbes, c’était une solution brutale certes, mais finalement bien peu efficace quand les racines du mal étaient fermement ancrées dans le sol. En clair, le département de la défense ET le renseignement n’avaient aucune raison de nous presser de la sorte. L’opération vague rouge s’était déroulée à merveille, nous étions arrivés en Elsweyr de manière fracassante, en adressant un message clair, mais maintenant justement, il nous faudrait temporiser et continuer intelligemment le combat pour arriver à nos fins. Une pression aussi inattendue ne pouvait donc signifier qu’une seule chose: on nous attendait effectivement ailleurs, loin des objectifs officiels de tout ce foutu déploiement…
-... Vous fatiguez pas à lancer des hypothèses les gars. Lâcha Telrav alors que Titus et Endril étaient désormais en train de débattre de plusieurs possibilités. C’est le renseignement après tout. On est toujours surpris avec eux.

Le convoi filait à vive allure vers le nord-ouest, levant sur son passage un épais nuage de sable. Encore heureux que la Légion était désormais massivement implantée dans la région. On aurait été cramé à des kilomètres à la ronde sinon.
Peu à peu, les épaisses dunes du sud-est laissèrent place à une topographie moins accidentée. Le désert s'aplatit considérablement, et nous pûmes même rejoindre des voies praticables. La flore parut peu à peu se développer elle aussi. A intervalles réguliers, des palmiers apparaissaient ça et là, indiquant sans conteste possible que nous rejoignions petit à petit une région moins aride, et donc moins hostile à toute forme de vie.

-On approche de la périphérie nord de Dune. M’expliqua Ashtus Horatius, le centurion de la brigade logistique, tout en cavalant à hauteur de notre chariot. Soyez pas étonnés, cet endroit ne correspond plus trop aux cartes tactiques de l’époque. Dune est devenue une vraie mégapole ces dernières décennies.
-Un peu comme Cyrodiil. Fis-je remarquer.
-Un peu ouais.

Comme de fait, bien que je n’avais jamais eu le privilège de la voir de mes propres yeux, je savais malgré tout que l’ancienne cité de Dune avait elle aussi subi de plein fouet les conséquences de la grande guerre. En l'occurrence, sa position excentrée, très au nord d’Elsweyr, et donc toute proche de Cyrodiil, en avait tôt fait une zone relativement neutre dans le conflit opposant l’Empire au Domaine Aldmeri. Au fil des années, beaucoup de gens y avaient vu un refuge, un ultime rempart face à la folie meurtrière des Hommes et des Elfes. Une véritable transition démographique avait eu lieu, des vagues d’immigration successives s’étaient agglutinées autour de cette ancienne citée perdue dans le désert, et d’une petite ville sans histoire était née l’une des plus grosses mégapoles de tout Tamriel. Pendant des années, puis des décennies, Dune avait en quelque sorte représenté la dernière région libre du Domaine Aldmeri, celle où s’étaient à la fois rassemblés les civils ayant fui la guerre, et plus généralement, tous ceux qui n’avaient pas voulu vivre sous le joug du Thalmor. Car oui, toute personne née en Elsweyr, en Val-Boisé, ou même sur l’Archipel de l’Automne, n’était pas forcément une pro-Altmer convaincue. L’on tendait souvent à oublier que le Domaine Aldmeri comptait lui aussi son lot de dissidents, et que la montée en puissance de cette nouvelle société Elfique avait engendré moult contestations et autres dissensions internes. Exactement comme au sein de l’Empire, nombre de personnes s’étaient retrouvées en désaccord avec les lois érigées par cette nouvelle superpuissance, et c’était donc ici, loin du reste du Domaine, qu’ils avaient trouvé leur dernier havre de paix. L’ennui, c’était qu’ils avaient été nombreux à le faire, et que la pauvre petite cité de Dune avait été contrainte de grandir vite. Probablement trop vite, en fait, comme la cité impériale. S’en étaient suivis des problèmes de ghettoïsation, de criminalité, de vivre ensemble... Tout comme Cyrodiil, Dune était devenue un immense bouillon de culture où la cohabitation était souvent compliquée, les Altmers, les Bosmers et les Khajiits notamment, ayant des modes de vie diamétralement opposés, quand bien même ils avaient en commun leur rejet du Domaine Aldmeri. Des arrondissements, puis de véritables départements avaient été construits autour de la muraille ancestrale de la première cité, et une véritable nouvelle civilisation, énorme, bruyante, inarrêtable, avait vu le jour. Je crois qu’à bien des égards, Dune avait quelque peu copié le modèle de Cyrodiil, notamment parce que beaucoup de ses nouveaux habitants n’avaient pas pu rejoindre les frontières de l’Empire à l'époque. Ils avaient été contraints d’arrêter leur exode ici, dans le désert, et y avaient donc créé leur propre mégapole.
-... au fait, vous avez l’air d’être un officier important vu comment le renseignement nous a mis la pression pour vous retrouver. Lâcha Ashtus Horatius après quelques instants de silence. Vous avez une idée de la suite des opérations ? Parce que bon, nous à la brigade logistique vous savez… Hormis transiter du matos pour les régiments réguliers et monter des baraquements… On est toujours les derniers au courant de tout, et on voit jamais la couleur des combats.
-Au moins vous avez la vie tranquille. Commentai-je. Vous risquez pas de vous faire tuer… Et pour vous répondre, justement, on sait pas trop. On imagine que le renseignement va nous affecter directement à une autre mission cruciale.
-Je parlais de manière plus générale. Rectifia le centurion. La suite des événements c’est quoi ? Vous avez tous fait un énorme carton cette nuit, mais maintenant ? L’infanterie va prendre le relais j’imagine, et nous ?
-Non, l’infanterie c’est pas pour tout de suite je pense. Rétorquai-je. On s’implante massivement, c’est un fait, mais dans l’absolu, on vient tout juste d’établir quelques têtes de pont. On est toujours en territoire Do’Traaji, et ces fils de pute sont encore partout. On vient à peine de rentrer en guerre, c’est le tout début. Va falloir continuer de pousser vers le sud si on veut vraiment les éradiquer. Le boulot de la cavalerie ne fait que commencer, croyez-moi.

Ashtus Horatius se gratta le menton d’un air pensif, jeta un oeil curieux vers le désert qui s’étendait au sud, puis répondit:
-Et le Thalmor ? Ça va leur laisser un sacré message, notre arrivée.
-C’est un peu le but aussi oui…

Le centurion se redressa aussitôt sur son cheval, et bomba fièrement le torse.
-Ah, en même temps, ce n’est que justice ! Fanfaronna-t-il. Des décennies qu’ils nous cassent les couilles et nous mettent la pression ! A nous de leur montrer que l’Empire n’est pas qu’un ramassis de fiottes ! La cavalerie est là, ils peuvent bien chier dans leur froc, ces putains d’Elfes ! Enfin, sans vouloir vous…
-Non non, il n’y a pas de mal. Répondis-je.
-Et euh…

L’officier jeta un oeil de part et d’autre du convoi, puis se pencha dans ma direction, et enchaîna plus discrètement:
-Vous pensez vraiment que l’assassinat de ces deux agents du renseignement venait d’eux ? Tout le monde a l’air de penser que les Do’Traaji n’auraient pas pu agir seuls sur ce coup. Qu’ils ont forcément été aidés.
-On a aucune certitude, mais c’est ce qu’on soupçonne fortement oui. Répondis-je. D’où notre déploiement massif dans le nord d’Elsweyr. On fait d’une pierre deux coups. On venge nos morts, on sécurise une région délaissée par les Altmers et très proche de nos frontières, mais en même temps, on leur adresse un message clair. On est là désormais, on veille. On va pas se laisser faire.

Nous aperçûmes bientôt les premières habitations parmi les palmiers. Bien sûr, on était encore très loin du centre surpeuplé de Dune en elle-même, mais par contre, on entrait désormais officiellement dans sa périphérie.
-Ce sont des faubourgs qui encerclent la partie nord de la cité. Expliqua Ashtus Horatius. On a reçu pour ordre de ne pas aller plus au sud, vu que la ville en elle-même n’est pas considérée comme sûre. Parait que des cellules Do’Traaji se planquent encore dans certains quartiers. J’imagine que vous devrez nettoyer tout ça avant l’arrivée de l’infanterie.

Un grognement de mécontentement s’éleva derrière moi.
-... On a commencé la construction du camp de base un peu plus loin à l’ouest. Enchaîna le centurion. Vous vous doutez bien, c’est un énorme chantier. Accueillir dix mille cavaliers, dont plusieurs unités de forces spéciales dans des quartiers bien distincts, et ce en quelques heures à peine… Enfin bref, toute la brigade travaille d’arrache-pied en ce moment même, et…

Une détonation coupa brusquement l’officier dans ses explications. Un violent tourbillon de sable nous aveugla d’un seul coup, alors qu'apparaissait au beau milieu de notre chariot un mystérieux individu encapuchonné.
-OH PUTAIN DE … !

Tout le monde attrapa son arbalète à la volée, et la pointa aussitôt sur le nouvel arrivant.
-Vous êtes cons ? Questionna Linus avec un calme anormal eu égard de la situation. Vous avez jamais vu un spectre ou quoi ?
-Un spectre ? Répéta Rexus tout en toisant le mystérieux personnage d’un oeil incrédule.

Je baissai lentement ma propre arbalète, et toisai moi aussi le nouvel arrivant.
Un spectre ? Vraiment ? Ils existaient donc pour de vrai ? J’avais toujours pensé que, contrairement aux silencieux comme Linus, les spectres n’étaient qu’une blague, une petite métaphore intra-service pour mieux désigner l’aptitude du renseignement impérial à être nul part et partout à la fois. Et voilà qu’à trente-et-un balais, après six longues années de bons et loyaux services au sein des services de renseignements, j’apprenais que les spectres existaient bel et bien, qu’ils allaient et venaient en utilisant la magie de téléportation, et qu’ils étaient probablement mêlés à des missions d’espionnage dont je n'avais même pas idée, au vu de leurs aptitudes hors normes.
Finalement, l’Empire, mon Empire, celui que j’avais si longtemps servi, était pourvu de bien des ressources. Aujourd’hui encore, il parvenait à me surprendre et à m'épater, moi qui pensait pourtant le connaître sur le bout des doigts...
-Hé mon vieux, arrête ton convoi, il y a un changement de plan. Lança soudain l’individu encapuchonné au centurion.

Le centurion le dévisagea d’un air dubitatif lui aussi, mais stoppa malgré tout le convoi d’un geste de la main.
-Par ordre de qui ? Questionna-t-il. Parce que j’ai des directives bien précises concernant le capitaine Othril.
-Qui étaient de l'amener, elle et les siens, dans les faubourgs de Dune. Répliqua le spectre. Et tu as bien fait mon vieux, mais je prends le relais à partir de maintenant.

Le mystérieux espion encapuchonné se tourna ensuite dans ma direction. Évidemment, il était tellement encagoulé qu’on ne pouvait même pas voir son visage.
-Capitaine Othril, veuillez me suivre s’il vous plaît. Commença-t-il tout en m’invitant à descendre du chariot. Le renseignement ne vous a pas fait venir ici ici en urgence pour rien. Figurez-vous qu’il y a un changement de plan concernant le lieu d' hébergement des forces spéciales. Enfin, du RAC en tout cas, et…

Il s’interrompit brusquement dans son propos en apercevant Linus.
-Bah, t’es là toi ? Lui lâcha-t-il d’un air bête. T’assassines plus des gens ?

Le Rougegarde lui répondit par un haussement d’épaules, et descendit lui aussi du chariot. Tous les autres opérateurs du RAC nous imitèrent, non sans se lancer des regards interloqués.
A quoi rimait donc tout ceci ? Où allions-nous ?
-...’fin bref, comme je disais, changement de plan. Poursuivit le spectre après s’être assuré que tout le monde le suivait vers les premières maisons de la zone. Vous ne logerez pas dans les baraquements du camp de base avec les autres. Figurez-vous qu’on vous a trouvé une planque de dernière minute. Compte tenu la nature particulière de votre mission, ce sera plus indiqué, et ça nous permettra également de travailler plus efficacement ensemble.

J’aperçus brièvement le convoi de la brigade logistique reprendre sa route dans notre dos, juste avant que le mystérieux individu nous entraîne dans un dédale de ruelles sablonneuses, serpentant entre différentes bâtisses branlantes. Le genre construits à la va vite, sans fioritures, par des immigrés sans trop de moyens.

Au dessus de nous, le soleil s’était fait un peu moins agressif, furtivement estompé par les quelques nuages qui avaient décidé de traîner dans la région.
-... Tu nous en fait voir de toutes les couleurs Teleri, j’aime pas ça… Grommela Endril dans mon dos.
-J’ai rien demandé moi ! Répliquai-je.

Parce que moi bien sûr, moi, j’adorais être trimballée par de mystérieux individus encapuchonnés sans plus d’explications. Normalement, on aurait dû rejoindre le nouveau camp de base de la Légion Impériale, établi dans le nord de Dune. Le fait de me voir aussi soudainement changer de destination me contrariait, surtout quand aucune véritable explication ne m’était donnée.
Où allions-nous à la fin ?
Je perçus bientôt des voix familières quelque mètres devant nous. Après quelques secondes passées à tendre l’oreille, je reconnus alors une conversation entre Celwen et Percius Ostorius.
-... trouves pas que c’est mieux de placer ta paie dans un projet concret ? Questionna la voix de l’officier légat.
-Boh… Répondit celle, dubitative, de la Bosmer.
-Non hein, tu préfères claquer tout ton fric en alcool et en fringues toi ! Insista celle du major sur un ton moralisateur. Sérieusement, tu trouves que c’est quoi le plus important: tout flamber en loisirs, ou mettre un peu de côté chaque mois pour t’acheter une maison dans quelques années ?

Un silence pensif retentit, uniquement perturbé par le bruit feutré de nos pas dans le sable.
-Alors quoi ? Insista la voix agacée de Percius Ostorius, plus proche que jamais.
-Ben euh… Je réfléchis… Répondit celle de Celwen.
-TU RÉFLÉCHIS ?! S’emporta celle de l’officier légat.
-MAIS NON JE TE CHARRIE HEIN ! Répondit la Bosmer d’un air moqueur.

Nous tournâmes au coin de la maison suivante, et tombâmes alors sur un petit trio pour le moins inattendu. Celwen et Percius Ostorius bien sûr, qui se levèrent du seuil sur lequel ils étaient assis en nous voyant arriver, mais également…
-Capitaine Othril, quel plaisir de vous revoir ! Me salua Rory Hedoren en venant à ma rencontre.
-Rory Hedoren ! Répondis-je, non sans une certaine surprise cela dit, tout en serrant la main tendue du Dunmer. Plaisir partagé !
-C’est qui lui ? Questionna bêtement Rexus dans mon dos.

Un bruit de claque, suivi d’une série de jurons outrés, résonnèrent aussitôt.
-... Figurez-vous que je me suis entretenu avec vos services de renseignements, car Morrowind souhaite contribuer à l’effort de guerre Impérial dans la zone. M’expliqua joyeusement Rory Hedoren, aujourd’hui vêtu d’une magnifique toge rouge et or. Voyez-vous, nous estimons vos camps militaires trop sobres et trop rudimentaires, et nous jugeons qu’ils ne sont pas dignes de gens de votre statut. Aussi, pour vous remercier de votre sauvetage en Bordeciel, j’ai glissé quelques mots ça et là, et convaincu mon organisation de vous prêter cette habitation. Concrètement, il s’agit de l’une des meilleures planques de la Morag Tong dans le secteur nord d’Elsweyr, et comble du hasard, nous ne nous en servions pas ces temps-ci. Autant vous la prêtez n’est-ce pas ? Vous y serez plus à votre aise que dans vos camps de base sales et tristes.

Il nous désigna d’un bref geste de la main la maison devant laquelle se tenaient toujours Celwen et Percius Ostorius. En l'occurrence, un petit taudis à deux étages qui ne payait franchement pas de mine…
-Non non, attendez ! Me coupa le Dunmer avant même que je n’ouvre la bouche. Visitons l’intérieur avant que vous ne me donniez votre avis !
-Bon ben moi je vous laisse ici. A la prochaine ! Conclut brusquement le spectre, avant de disparaître purement et simplement dans un nouveau tourbillon de poussière.

Nous suivîmes l'administratif de la Morag Tong à l’intérieur du bâtiment, et descendîmes directement une première cage d’escalier, non sans nous échanger de nouveaux regards prudents. Un truc qui semblait chiffonner le reste du groupe en cet instant précis, c’était bel et bien le fait que tout le monde semblait désormais s’adresser à moi en particulier, et non plus à Telrav. Si pour Uriel, cet état de fait était globalement admis et compris, pour les opérateurs des sections Varen et Weston par contre, on semblait quelque peu dubitatif.
-Et voilà, bienvenu dans notre humble planque de Dune nord ! Annonça Rory Hedoran alors qu’au lieu de débarquer dans ce qui aurait normalement dû être une cave miteuse et pourrie, nous débarquâmes soudain dans un véritable palace d’architecture elfique, taillé dans un somptueux marbre blanc.
-Putain de merde ! Je comprends ! Lança aussitôt Rexus en dévisageant cette première salle avec des yeux ronds. En guise de couverture, vous avez construit un taudis sur une ancienne ruine ayléide, que vous rénové et transformé en base d’opération !
-Monsieur a le coup d’oeil ! Acquiesça le Dunmer, avec une ironie que le colosse ne comprit visiblement pas sur le coup. Oui en effet, nous avons trouvé cette ville ruine ayléide à la fin de la troisième ère, bien avant que Dune devienne une mégapole et que ses faubourgs débordent jusqu’ici. Et effectivement, nous avons construit une vieille ruine par-dessus pour mieux la préserver des regards indiscrets. Ni vu ni connu comme on dit.
-C’est très astucieux ! Insista Rexus d’un air impressionné. Fallait y penser !

Linus ricana.
-C’est vieux comme le monde Rexus… Commenta Endril à voix-basse. La Confrérie Noire fait pareil depuis des milliers d’années, au sein même de Cyrodiil d’ailleurs. Même les forces spéciales le font depuis la grande guerre…
-Bon, je vous fais visiter ? Proposa Rory Hedoren.

Le Dunmer nous entraîna rapidement dans les différentes ailes de l’édifice. Car oui, en vérité, cette putain de bâtisse était proprement gigantesque. Des milliers de mètres carrés, au moins. Peut-être même plus encore… Comment savoir jusqu’où les Ayléides avaient creusé à l’époque ? Ces galeries pouvaient tout aussi bien s’étendre sur des kilomètres et des kilomètres, et devaient avoir plusieurs points d’entrée et de sortie. Probablement même que ça devait rejoindre des réseaux de grottes ou d’égouttage à certains endroits, comme c’était souvent le cas avec les anciennes ruines Elfiques. Une aubaine pour une organisation comme la Morag Tong, qui avait reconverti cet endroit en véritable petite base d’opération avancée. En tout cas, ils avaient fait un sacré taff sur la décoration et sur l’aménagement, et ils avaient disposé ici tout ce dont pouvait bénéficier un véritable palais. En fait, c’était carrément putain de luxueux comme endroit. On devait faire tâche à mort, avec nos équipements puants la sueur et nos gueules pleines de poussière…

Rory Hedoren nous entraîna dans un nombre incalculable de salles, si bien qu’on se serait rapidement perdu si il ne nous avait pas servi de guide. On vit tour à tour de grandes salles à manger, réparties sur plusieurs étages évidemment, car vu la superficie des lieux, il y en avait un peu partout.

Des grandes piscines, jouxtant d’autres petites salles à manger. De quoi déjeuner au bord de l’eau.

Des thermes, rien que ça…

Et des dortoirs bien sûr. Plein de dortoirs. Et pas des dortoirs de merde en plus. Avec de la moquette, du marbre, et même un petit foyer chaleureux dans le fond de la pièce.

Rory Hedoren nous montra même quelques petites chambres privées, avec leurs propres petites salles d’eau.

Je croyais bien n’avoir jamais vu un tel luxe rassemblé au même endroit. Et dans un endroit immense qui plus est. La Morag Tong avait-elle donc autant de moyens ? Si ils étaient en mesure de nous prêter une telle planque pour nous remercier du sauvetage de l’un de leurs employés, fallait pas demander ce qu’ils avaient en réserve. Cette idée me faisait un peu peur, d’ailleurs…
-Vous pardonnerez ma suspicion… Commençai-je après que notre hôte nous ait ramené dans le grand hall d’entrée principal. Mais en toute franchise, j’ai du mal à croire que la Morag Tong daigne nous prêter un tel palace pour avoir sauvé un administratif qui se présentait lui-même comme un employé tout à fait négligeable, à tel point qu’il nous assurait que personne ne serait venu le sauver si ce n’était nous.

Rory Hedoren tourna lentement la tête dans ma direction, et me toisa sans laisser transparaître la moindre émotion.
-... M’est avis que vous êtes un peu plus important que ça. Conclus-je en rendant son regard au Dunmer.

Tous les membres du RAC, y compris Celwen et Percius Ostorius, observèrent l’individu sans piper mot, interloqués eux aussi par la réflexion que je venais de formuler.
-Et vous avez raison, j’ai menti. Admit finalement Rory Hedoren sur le ton de la conversation. Je ne savais pas qui vous étiez, quels étaient vos objectifs, ni jusqu’où vous seriez prêts à aller pour arracher des informations stratégiques à un “ami”.

Un souligna le mot “ami” avec ses doigts.
-...mais oui, en effet, je suis un peu plus important que j’ai bien voulu l’admettre en Bordeciel. Conclut-il. En l’état, je suis grand maître faisant fonction au sein de la Morag Tong, le grand maître actuel étant dans l’incapacité d’assurer pleinement son rôle. Par ailleurs, j’agis directement sous les ordres de la reine Daynila Hlaalu elle-même.

J’eus l’impression de prendre un coup de marteau en pleine tronche. Le grand maître de la Morag Tong ? Face à nous ? Rien que ça ? Nous étions donc en compagnie de l’un des membres les plus importants et les plus influents de toute cette organisation ? C’était ce genre d’individu que Luther, ce taré sans limites, avait attaqué en Bordeciel, et que nous avions sauvé sans vraiment le vouloir ? Car il était évident que la Morag Tong ne l’aurait pas laissé traîner là au vu de son statut. Probablement les avions nous même raté de peu dans les forêts enneigées de Bordeciel. Pire encore, peut-être même nous avaient-ils observé au loin, nous laissant le soin de prendre leur grand maître en charge… Ainsi donc, Rory Hedoren avait masqué son véritable statut au sein de l’organisation. Probablement a raison, du coup. En effet, comment auraient réagi les renseignements ainsi que le département de la défense si ils avaient cerné sa véritable identité à l'époque ? Peut-être très différemment...
-Nous aurons l’occasion de nous revoir très bientôt. Conclut le Dunmer en se dirigeant vers la sortie de la planque. Et vous de me poser bien des questions, j’en suis certain. En attendant, profitez-bien de cet endroit, et puissiez-vous mener votre guerre avec succès, avec le soutien de la Morag Tong, et de tout Morrowind !

Et il s’en alla, nous laissant seuls avec notre silence, et un sacré paquet de questions.
Décidément, ce déploiement en Elsweyr commençait sur le chapeaux de roue, et vu comment les choses tournaient, j’avais comme la terrible impression qu’on était pas au bout de nos surprises...

A croire qu'il s'est fait enlever par arsyn et Luther volontairement.

Je les vois mal maîtriser un grand maître de la morag tong

Grand maitre faisant fonction kheyou.

Et puis c'est peut-être juste un administratif. Il en faut après tout dans la Morag Tong.

A oui pas faux. J'en deduis que le grand maître qui ne peut remplir sa fonction c'est

Sedaris ledd

Bon je vais poster une mini suite sinon ça sortira jamais.

Chapitre 39: We need you.

Mon réveil fut sec, brutal. Comme à chaque fois, je me retrouvai en sueur, déboussolée, et mon putain de coeur galopait à mille kilomètres heure. Encore un de ces cauchemars à la con… Était-je destinée à rêver de lave, de feu et de bruit pour le restant de mes jours ? Bordel, trente-et-un balais, et je recommençais à appréhender le sommeil comme le premier des nouveau-né. Le pire était que je constatais une dégradation nette à ce niveau. Je cauchemardais déjà quand j’étais petite bien sûr, mais pendant une bonne partie de mon adolescence, ainsi que durant la quasi totalité de ma vie d’adulte, mes nuits avaient été globalement convenables, et les cauchemars avaient pratiquement disparu.
Pourquoi revenaient-ils maintenant ?
Je sentis mes nasaux souffler de contrariété, d’eux-même, sans que je n’ai songé à leur en donner l’ordre. Je jetai un oeil vague autour de moi, et observai durant quelques instants la chambre dans laquelle j’avais passé cette première nuit en Elsweyr. Au moins, on m’avait donné une piaule rien qu’à moi, probablement parce que j’étais officier bien sûr, mais surtout parce que j’étais l’une des rares femmes dans un monde d’hommes. En fait, seuls Celwen et Percius Ostorius s’étaient eux aussi attribués des chambres privées, tous les autres opérateurs ayant été affectés à des dortoirs communs. Je ne pus réprimer un rictus moqueur en imaginant la première nuit qu’avaient passé mes coéquipiers, à se coltiner les ronflements et les odeurs de pieds de Rexus. Mais bon, ils n’avaient franchement pas de quoi se plaindre eux non plus. Même les dortoirs de ce palace étaient incroyablement luxueux comparés aux tentes et aux baraquements traditionnels des camps militaires impériaux. Ici, ils avaient des lits et des matelas grand format, de la moquette, des rangements en veux-tu en voilà, et surtout, de la place à revendre. Clairement, on était loin des tentes pleines de poussière et d’humidité des camps militaires, où de surcroît, on se retrouvait parfois à quarante dans trente mètres carrés.
En ce qui me concernait, ma chambre privée refaisait le cul à n’importe quel hôtel cinq étoiles de la cité impériale. J’avais un énorme lit deux places, des bureaux, des meubles, des tables de travail, et même ma propre mini-piscine. Le tout enrobé de marbre blanc et de boiseries pas franchement dégueulasses. Techniquement, ce n’était même plus à considérer comme une chambre en fait, mais comme un véritable petit appartement privé. Je cherchais toujours où était le piège, mais en l’état, la Morag Tong nous avait fait un sacré cadeau...
Je quittai lentement mon lit, et entrepris de me diriger vers le petit bureau où j’avais entassé mon matos la veille. Quelque part au-dessus de ma tête, le bruit sourd d’un objet qu’on laissait tomber sur le marbre résonna furtivement. Malgré l’épaisseur des murs, j’entendis ensuite des vociférations querelleuses.
-Ah ! Rexus et Linus sont déjà réveillés ! Commentai-je à voix haute.
-Ça fait des heures que tout le monde est réveillé, feignasse. Commenta brusquement une voix sur ma droite.

Je poussai un cri de surprise, et attrapai à la volée l’une des dagues qui traînaient sur le bureau.
-Qu’est-ce que tu fous là toi ?! Aboyai-je, encore sous le choc, en apercevant soudain Davina nonchalamment adossée près de l’entrée de ma chambre.
-Les Lames sont partout. Répondit calmement la Rougegarde. Tu devrais le savoir, petit agent du renseignement.
-Ex petit agent du renseignement. Répliquai-je.
-Toujours bien actif malgré tout, à ce que je vois. Conclut l’ancienne vigile de Stendarr. Enfin, c’est logique cela dit. Ils n’allaient pas laisser partir aussi facilement une menteuse de ta trempe.

Je levai les yeux au ciel, et reposai ma dague sur le bureau.
-... Jolie coiffure au passage. Raillai la Rougegarde.
-Les churros sur ta tête, on en parle ? Rétorquai-je. Et où est le gros Janus ? J’ai pas encore entendu sa grosse voix lâcher une idiotie. J’imagine qu’il n'est pas avec toi.

Davina étouffa un rire.
-Non en effet, il avait d’autres affaires à régler. Confia-t-elle. Figure toi que le gros Janus, aussi loufoque paraisse-t-il, est un haut gradé dans la hiérarchie des Lames. Et il a une sacré influence dans les hautes sphères impériales.
-A tel point que le renseignement et le fils héritier de l’empereur lui-même m’ont avoué avoir des doutes au sujet de son intégrité... Lâchai-je.

Je regrettai presque aussitôt ma connerie. Dans les faits, Janus Cosades, tout officier des Lames qu’il était, était soupçonné de collusion avec Nilvyn Serethi par le renseignement Impérial. Et ça, ce n’était pas rien. Nilvyn Serethi était une criminelle en cavale activement recherchée, et plusieurs de ses compagnons, Balsa, Eraldil ou Arvin notamment, étaient supposés être de mèche avec des organisations telles que la Morag Tong ou la Confrérie Noire. Les Lames étaient les gardiens secrets de l’Empire. Tout comme le renseignement, ils ne reculaient devant aucune bassesse pour accomplir leur devoir. Mais là clairement, un point de non-retour avait été franchi, et des ententes avaient visiblement eu lieu avec des groupuscules extrêmement dangereux pour la sécurité intérieure. C’était en tout cas ce que craignaient les services de renseignements, ainsi que le prince Corvus en personne. Le problème était que Davina était officiellement un membre des Lames désormais, et une proche de Janus Cosades. Et si il était évident que les Lames, de par leur nature propre, passaient leur temps à surveiller tous les autres services de l’Empire, il n’était probablement pas très malin de ma part de lui avoir avoué de but en blanc que eux aussi, étaient également surveillé à partir de maintenant. En l'occurrence, le comportement de Janus Cosades n’était pas passé inaperçu. Il avait attiré l’oeil des services de renseignements, et de l’Empereur lui-même.
Cela, je n’étais probablement pas censé le confier à Davina…
-On sait, oui. Lâcha calmement la Rougegarde, à ma plus grande surprise d’ailleurs. Tous ne peuvent pas comprendre notre mission, même le renseignement impérial. Nous devons êtres prudents, et discrets. Les ennemis sont partout Teleri, même dans notre propre camp.

Je demeurai silencieuse quelques secondes, les sourcils froncés, ne sachant pas bien si je voulais ou non m’aventurer sur ce terrain avec l’ancienne vigile de Stendarr.
-L’anneau de Méphala, tu l’as toujours ? Questionna Davina.

Je piochai dans la poche de mon pantalon, et lui exhibai aussitôt le petit morceau de ferraille que je trimballais depuis plusieurs semaines désormais. Je ne m’étais pas vraiment attardée à l’inspecter davantage d’ailleurs. Juste, je l’avais gardé avec moi, c’est tout, comme on me l’avait demandé...
-Non, garde le. Contra la Rougegarde alors que je le lui tendais. On le récupérera plus tard. Il est plus en sécurité avec toi pour le moment.
-Plus en sécurité avec un opérateur échelon un en plein déploiement militaire ? Ironisai-je.
-Oui, tout à fait. Confirma l’ex-vigile, ce qui eut le don de m’arracher un grognement exaspéré. Au fait…

Elle me tendit soudain un journal.
-C’est toujours bien de suivre l’actualité. M’expliqua la Rougegarde. C’est une édition de La Plume, un journal de Morrowind, mais j’ai envie de dire, ils sont plus objectifs que les journaux impériaux ou aldmeri, alors…
-Et donc en gros, t’es venue taper l’incruste dans ma chambre pour m’apporter le journal ? Questionnai-je tout en observant brièvement la première page de l’édition qu’elle venait de me donner.
-Ça, voir si t’étais bien arrivée à bon port, et aussi pour te dire le CSOJ ET le renseignement vont faire de cet endroit une véritable petite base secrète durant le déploiement impérial en Elsweyr. Confia Davina. Attends-toi à voir aller et venir des gens de toutes sortes, nous y compris. Ce palace est gigantesque, autant en profiter. Et puis, on va avoir du travail dans le coin.

Je dépliai lentement le journal, interloquée par la première de couverture.
-Bon, on se revoit plus tard ! Conclut brusquement Davina.

Je levai aussitôt les yeux dans sa direction, trop tard cela dit. Elle avait déjà foutu le camp…
Bah… Je retournai lentement m’asseoir sur mon lit, captivée par l’article que j’avais désormais sous les yeux.

“La Plume - édition spéciale.
Opération militaire de grande envergure en Elsweyr ! L’Empire sur le pied de guerre !

C’est un véritable coup de théâtre qui s’est déroulé cette nuit dans le nord d’Elsweyr. En effet, à l’heure où nous écrivons ces lignes, ce sont pas moins de dix milles soldats de la cavalerie impériale qui viennent de prendre position dans la région de Dune, menant une série d’assauts particulièrement violents sur plusieurs positions dominées par les Do’Traaji.
Une opération qui ferait apparemment suite à plusieurs attentats commis à la frontière de Cyrodiil ces dernières années, ainsi qu’à l’assassinat tout récent de deux agents des services de renseignements impériaux par des terroristes Do’Traaji. Des rumeurs auxquelles n’ont pas souhaité répondre les différents porte-paroles de la Légion Impériale que nous avons tenté de questionner à ce sujet, bien malgré notre insistance. Reynis Gorvas, politologue à l’université centrale d’Almalexia, nous résumait quant à lui la situation selon ces termes:
-Cette opération était à prévoir depuis longtemps. Elsweyr, et plus particulièrement la région de Dune, est une terre gangrenée par les conflits civils et par le terrorisme depuis de très nombreuses années, et il était évident que l’Empire ne tolérerait pas éternellement une telle agitation aussi près de ses frontières. Depuis la fin de la grande guerre à vrai dire, le Domaine Aldmeri peine à sécuriser ses territoires orientaux, ce n’est un secret pour personne. Le Val-Boisé, et plus encore Elsweyr, sont fréquemment secoués par des tensions et des soulèvements de toutes sortes. La région de Dune est notamment devenue une sorte de zone neutre, anti-Domaine, pro-Empire, mais relativement autonome compte tenu des enjeux géopolitiques de la zone. C’est un endroit où aucune superpuissance ne souhaite véritablement prendre pied, de peur d’envenimer la paix durable mais terriblement précaire dont bénéficie actuellement Tamriel. Cela, différents groupuscules criminels l’ont bien compris: La Confrérie Noire, les gangs de cavaliers tels que les Lances Noires ou les Ultra Septima, et bien évidemment, des cellules indépendantistes tels que les Do’Traaji. Bien sûr, ce chaos social ne préoccupait ni le Domaine Aldmeri, ni l’Empire ces dernières années. Ces deux géants avaient d’autres chats à fouetter. Mais maintenant que des attaques ont été spécifiquement menées contre l’Empire, cela change considérablement la donne. Ce qui est arrivé cette nuit était inévitable.

Selon les premières estimations, ce seraient donc environ dix milles soldats de l’impitoyable cavalerie impériale qui auraient déferlé dans la région de Dune cette nuit, rasant et éliminant méthodiquement toute présence Do’Traaji dans la zone.
-Et beaucoup d’autres suivront. Nous certifie le jeune Tanval Indoril, général en chef de la maison éponyme. L’Empire fonctionne toujours de la même façon: la cavalerie devant, tel un rouleau compresseur, et leur immense infanterie derrière, pour sécuriser durablement les régions capturées à l’ennemi. Les Do'Traaji sont désorganisés, mais ils sont nombreux, c'est un fait connu de tous. Les éjecter de la région prendra du temps, quand bien même leur combat est perdu d'avance. Pour être honnête avec vous, je ne comprends vraiment pas à quoi ils s’attendaient en attaquant aussi ouvertement des agents Impériaux. Je ne cautionne pas leur philosophie, et encore moins leurs méthodes, mais toute organisation se revendiquant comme “indépendantiste” est censée agir dans un but précis, pour la gloire, la souveraineté et surtout la survie de son peuple. Pourquoi attaquer l’Empire de front, alors que ce dernier n’avait qu’une présence neutre et symbolique en Elsweyr ? C’est totalement absurde. Ces sauvages démontrent une fois de plus leur hypocrisie, et leur soif du meurtre à tout prix.
-La Légion Impériale d’aujourd’hui est probablement la plus grande et la plus puissante armée qui ait jamais existé en Tamriel. Renchérit Manis Drothan, porte-parole du corps des Ordonnateurs. L’Empire est techniquement capable de réduire à néant n’importe quelle autre nation de Tamriel en quelques semaines à peine. Les attaquer de front est d’une idiotie et d’une insouciance sans nom. C’est à se demander si ces barbares stupides n’ont pas agi sous la pression de quelqu’un d’autre.

Des insinuations qui ne datent pas d’hier, et qui avaient déjà fait bondir plusieurs représentants du Thalmor ces dernières années, lors du fameux désastre des collines vertes notamment. Pour rappel, à l’époque déjà, des rumeurs d’une entente secrète entre le Domaine Aldmeri et les Do’Traaji avaient été émises, arguant que les Altmers s’étaient servis des terroristes Khajiits pour harceler et affaiblir les frontières de l’Empire.
-Il serait bon que la petite “Union Dunmeri” apprenne à rester à sa place, et à ne pas s’aventurer sur le jeu de la diffamation ! Avait vociféré Elundur, l’un des porte-parole des Justiciars, à nos confrères Brétons du “Manuscrit Volant”. Le Domaine Aldmeri et l’Empire entretiennent des relations compliquées certes, mais cordiales malgré tout, n’en déplaisent à quelques Dunmers en mal de sensations fortes ! Nous condamnons fermement ces attentats, et assurons l’Empire de tout notre soutien et de toute notre aide quant à la résolution de ce tragique incident !

Une fanfaronnade puérile que le Roi Helseth avait sitôt tourné en dérision à l’époque, et sur laquelle nous ne reviendrons pas aujourd’hui. Par contre, l’éventualité d’un déploiement Impérial en Elsweyr avait déjà été débattu après cet incident, ce qui avait alors donné lieu à de nombreux échanges entre les deux superpuissances.
-Nous comprenons la détresse de l’Empire, et souhaitons réaffirmer notre soutien envers les familles des disparus. Avait confié Calanor, porte-parole du Thalmor. Par ailleurs, nous comptons renforcer immédiatement notre présence dans la zone de Dune, et mâter une bonne fois pour toute ce groupuscule sanguinaire que sont les Do’Traaji. Nous demandons simplement à l’Empire de nous faire confiance, et de nous laisser nous occuper de nos territoires. Nous savons que la région de Dune est plus favorable à leurs idées qu’aux nôtres. Nous comprenons et acceptons cela, et ne souhaitons en aucun cas mâter une population dont nous respectons les choix de vie. Simplement, nous comptons bien sécuriser cette province trop longtemps délaissée, et lui redonner la paix et la prospérité qui lui reviennent de droit.

Et le général Valgus Pelagia, général en chef de la Légion Impérial, de répondre:
-Nous admettons et respecterons toujours la souveraineté du Domaine Aldmeri sur la province d’Elsweyr. Nous souhaitons effectivement travailler avec le Thalmor à une solution durable, mais nous estimons malgré tout qu’eu égard des difficultés rencontrées par nos deux nations, une présence impériale en Elsweyr devient plus que nécessaire pour mener à bien ce projet. Nous souhaitons plus que jamais appuyer les troupes du Domaine Aldmeri dans la région de Dune, sécuriser la zone et rétablir la paix, car les agressions contre nos postes frontaliers sont devenues monnaie courante ces dernières années, et cela, le Domaine lui-même doit bien comprendre que nous ne pouvons le tolérer plus longtemps.

Des propos qui n’avaient finalement rien donné de concret, l’Empire n’étant jamais intervenu militairement dans la région, jusqu’à ce jour du moins.
-C’est un échec à tous les niveaux. Tente de nous expliquer Reynis Gorvas. Le Domaine Aldmeri n’a absolument pas été en mesure de sécuriser la zone comme escompté - il n’a probablement jamais cherché à le faire d’ailleurs - et la prudence et l’attentisme de l’Empire depuis l’attentat des collines vertes n’ont fait que renforcer la témérité des Do’Traaji dans la région ces dernières années. Ce qui est arrivé cette nuit était couru d’avance. Reste à voir la tournure que prendront les événements à la suite de cette invasion.

Invasion. Le mot peut paraître fort, mais compte tenu la virulence, l’importance et surtout la soudaineté de cette opération militaire lancée par l’Empire, l’on peine à croire que le Domaine Aldmeri l’ait validé de quelque manière que ce soit, ni même qu’il ait été mis au courant d’ailleurs. Personne n’a été en mesure de répondre à nos questions pour le moment, mais nul doute que les déclarations risquent de pleuvoir de tous les côtés dans les prochains jours, et que de vieilles tensions risquent d’être remises sur le devant de la scène.
Nous n’hésiterons en tout cas pas à vous tenir quotidiennement informés de l’évolution de la situation.

Pour plus d’informations sur la genèse des Do’Traaji, ou sur la Légion Impériale, son fonctionnement et son histoire, nous vous renvoyons vers les pages 7, 8, 9 et 10 de cette édition spéciale.”

Je refermai lentement le journal, pensive. C’était étrange finalement: on savait tous que notre venue ici déclencherait de sacrés tensions politiques avec le Domaine Aldmeri, mais c’était seulement maintenant, à la lecture de ce journal de Morrowind, que j’en prenais pleinement conscience. Comment réagirait le Thalmor en nous voyant débarquer en masse dans le nord d’Elsweyr ? Ils étaient déjà au courant évidemment - si Morrowind l’était… - mais l’absence de réaction de leur part, même quelques heures à peine après notre arrivée, avait quelque chose d’interpellant. Et il était vrai que sur le plan politique, notre opération pouvait légitimement être considérée comme une invasion, étant donné le fait que nous débarquions en force et sans aucun accord préalable dans une région qui n’était pas officiellement la nôtre.
Ça pouvait même être considéré comme une déclaration de guerre, en fait…
Comment réagiraient les Altmers face à cette opération ? Comment réagiraient-ils lorsque l’infanterie, non contente de laisser la cavalerie partir seule devant, commencerait à déferler et à sécuriser massivement la région tel un ogre insatiable ? Pas bien, c’était certain. Les Altmers étaient de sombres connards orgueilleux, mais cette terre était la leur après tout, et si les rôles avaient été inversés, jamais l’Empire n’aurait toléré une telle opération. Comment le département de la défense avait-il véritablement envisagé ce déploiement ? L’objectif principal restaient les Do’Traaji, leur éradication, et la pacification de la zone, mais personne n’ignorait que le vrai problème derrière tout ça, était le Domaine Aldmeri lui-même. Qu’ils soient secrètement responsables ou non de ces attentats, ne changeait rien au fait que notre venue serait forcément vue comme une agression pour eux. Cela, le département de la défense et les services de renseignements y avaient forcément pensé. Comment avaient-ils envisagé ce futur bras de fer avec les Haut-Elfes ?
Je reposai finalement le journal, et chassai ces questions de mon esprit. Tout d’abord parce que ce n’était pas de mon ressort - ce n’était pas ce qu’on m’avait demandé - mais aussi et surtout parce que je ne voulais pas me tracasser avec quelque chose sur lequel je n’avais aucune forme d’influence pour le moment.
J’enfilai la tenue semi-civile que Celwen m’avait préparé la veille, et entrepris de quitter rapidement ma chambre. Pour le moment, avant même de penser opérations militaires, missions confidentielles et enjeux politiques, j’avais quelque chose de très important à faire, maintenant que je m'étais installée sur le lieu de mon déploiement :

Profiter de ce putain de palace gigantesque, et de tout ce qu’il avait à offrir.

Merci mon black

C'est dur pour toi en ce moment niveau boulot ?

Planning chargé en effet. Mais on fait avec mon bon khey.

Merci mon bon khey

Quand la suite khey ?