Les choses n'en resteront pourtant pas là. En partant de l'existence du PSO-Loader, 'Eurasia', membre du groupe 'StarCube', se fendit d'un nouveau programme nommé 'Animal Crossing Loader' il y a quelques petits mois seulement. Ce boot code a été conçu pour être flashé dans la ram de la GameCube justement à l'aide de PSO-Loader (ou du similaire PSUL 1.1 publié entre temps par Titanik de Crazy Nation, déjà célèbre à l'époque de la scène N64). Une fois installé, il permettra l'upload de jeux commerciaux segmentés. Ainsi, 'Animal Crossing Loader' exige de la GameCube qu'elle s'adresse au PC plutôt qu'à son lecteur de Mini-DVD, lorsqu'elle a besoin de données supplémentaires. En clair, un niveau du jeu peut être stocké dans la Ram et être joué, et à la fin du niveau, lorsque la GameCube a besoin de charger dans sa mémoire vive le code informatique du niveau suivant, elle ira le chercher, contre sa nature originelle, sur le disque dur du PC. Cela ralentit considérablement les temps de chargement, et engendre des brouillages sonores lorsque la bande-son est lue sur le disque en live. De plus, de nombreux titres ne peuvent pas être démarrés avec ce boot code.

Depuis ce jour béni par certains et onni par d'autres, les sorties Isos ont pris une autre dimension et les fichiers de la plupart des jeux GameCube pullulent sur les sites de téléchargements illicites. Un émulateur N64 a même été déniché sur le Bonus Disc de Zelda The WindWaker : Zelda Ura et Zelda Ocarina Of Time n'ont pas été reprogrammés pour la GameCube, ce sont simplement les 'Roms' N64 qui tournent à l'aide d'un émulateur made in Nintendo logé sur le même mini-DVD. L'activité de duplication et de diffusion des isos est principalement l'oeuvre du groupe 'StarCube', auquel appartient Eurasia. En parallèle, le programme 'Animal Crossing Loader' a aussi été remanié et amélioré à de nombreuses reprises par Eurasia et ses collègues, accroissant sans cesse le taux de compatibilité, au même titre que la vitesse des transferts.

Bien sûr, certains seront rapides, devant l'étendue des dégâts, à vouloir d'urgence mettre un terme à ce genre de dérives... à tout prix ! Quitte à jeter le bébé avec l'eau du bain. Ainsi, l'Industrie, avec un grand I, a la fâcheuse tendance à mettre dans le même sac les pirates et les développeurs 'homebrew', qui sans licence officielle ne rapportent rien quoi qu'il arrive et qui ne seraient que ceux qui livrent les moyens techniques aux criminels de commettre les délits. Si cet état d'esprit se lit entre les lignes de certains communiqués de presse, on le retrouve aussi dans les stratégies judiciaires des constructeurs de console qui s'en prennent de plus en plus aux petits malins qui déprotègent, et, aux fabricants / revendeurs de 'puces' plutôt qu'aux vraies causes du piratage, ainsi qu'à ceux qui en profitent réellement. Jodi Dogherty, PR manager chez Nintendo Of America, a même tenu ces propos sur les revendeurs de Flash Advance Linker il y a quelques mois: 'Dans le cadre de la guerre contre la drogue, on ne vise pas les consommateurs mais bien les trafiquants.' (source: Communiqué de presse Nintendo envoyé par Reuters, Associated Press et BusinessWire). Si on l'écoutait, la lutte contre l'héroïne passerait par la lutte contre les fabricants et distributeurs de seringues plutôt que par un travail de fonds sur la prévention et par une guerre contre les réseaux mafieux qui récoltent les profits des ventes de la drogue elle-même.

Pourtant, ces dernières années, la justice américaine (suite à l'enterrinement en 2000 du Digital Millenium Copyright Act, qui interdit formellement la 'circomvention d'une protection technologique') donne systématiquement raison à l'Industrie dans son combat contre les 'crackers'. Certaines personnes y subissent des peines de prison ferme pour avoir vendu des 'modchips' ou pour avoir trouvé et rendu publique une faille dans un système de protection. Cela peut parfois paraître un tantinet hypocrite quand on sait par exemple que Sony fabrique des graveurs DVD et des DVD vierges. Ceux-ci sont nécessaire pour la conception de la copie illicite (l'acte illégal donc). Les puces, et les freeware de la veine de PSO-Loader ou de Animal Crossing Loader, ne permettent, quant à eux, que la lecture de programmes 'non-signés', ce qui inclut les copies illégales préalablement (!) réalisées. Or, le fait d'avoir réalisé la copie d'un jeu est illégal en soi, qu'on puisse utiliser ou non la copie. Si je vole 50 Euros, je suis coupable. Dépenser les 50 Euros volés ne sont en rien des circonstances aggravantes, et le commerçant qui empoche les 50 Euros n'est pas mon complice. Nous n'avons pas encore atteint en Europe le seuil déjà franchi aux Etats-Unis. Heureusement pour Costis, mais aussi pour la liberté des milliers de programmeurs indépendants et pour le respect de la présomption d'innocence : le fait qu'on nous donne les moyens de pirater ne fait pas de tout le monde un pirate en puissance. On notera que l'Union Européenne a par contre épinglé Nintendo pour avoir créé un cartel avec sept de ses distributeurs afin de partitionner le marché européen et de «maintenir des prix artificiellement hauts», ce qui ne manquera pas d'ajouter de l'eau au moulin de ceux qui prétendent que le vrai problème des jeux est leur prix trop élevé dans cet éternel débat sur le piratage, ses causes et ses conséquences...

Il s'agit de ne pas se hâter dans une vision manichéenne ou diabolisante de la scène, comme le prouvent les nombreuses expériences positives qu'on lui doit, que ce soit sur Dreamcast, console tenue en vie deux années après son arrêt de production grâce justement à la communauté Homebrew, ou maintenant sur GameCube, avec par exemple l'initiative brillante qu'est WarpPipe. WarpPipe est un software opensource totalement gratuit tournant sur Windows (versions Mac OS X et Linux en cours de développement) et qui permet en toute simplicité et de jouer en ligne sur GameCube à Mario Kart : Double Dash !!, 1080° Avalanche et Kirby Air Ride. Les joueurs étaient censés se contenter de jeu en LAN sous prétexte que Nintendo voulait que sa prophétie sur l'insuccès du Online s'auto-réalise. Malgré tout, les gamers peuvent aujourd'hui s'affronter à distance, grâce à WarpPipe, programme qui ne favorise aucunement le piratage, pas plus que ces auteurs d'ailleurs. Pourtant, sans PSO-Loader, WarpPipe serait resté un projet imaginaire irréalisable.