Alors que la version PS2 que nous avons eue entre les mains était en cours de finalisation et comportait par là-même quelques bugs, on ne pouvait qu'être charmé voire ébloui par la qualité technique de l'ensemble. Il faut savoir que derrière Michel Ancel se dresse une équipe composée de personnes qui, fort d'une solide expérience professionnelle que ce soit dans le monde de l'animation, du jeu vidéo ou de la musique, a réussi à nous concocter un univers chamarré où la plénitude côtoie harmonieusement la poésie des couleurs, des sons via des endroits très éclectiques (cité futuriste, mine, bar , phare, îles…). Ce qui est formidable, tout aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est bel et bien la magie avec laquelle ces lieux, qui ont tous une vie propre, s'imbriquent les uns dans les autres pour donner au final quelque chose d'homogène.
On est donc en présence d'un jeu qui puise allégrement dans des films comme Le 5ème Element, Star Wars, Blade Runner ou des oeuvres japonaises comme les chefs-d'oeuvre de Miyazaki Hayao que sont Porco Rosso ou Laputa le château dans le ciel. Au final, le design trouve une justesse graphique malgré des hommages et des emprunts qui n'ont a priori pas grand chose à voir entre eux. Il faut ainsi voir cette baleine s'élancer gracieusement hors de l'eau, ce monstre volant attaquant notre hovercraft, le rendu de l'eau, pour bien comprendre que Beyond Good & Evil n'est pas seulement construit autour d'un seul univers.
Si cet esthétisme est flagrant en ce qui concerne les décors, il l'est encore plus durant les phases de jeu. Ainsi les courses d'hovercraft resplendissent de couleurs, les combats sont dynamiques, techniques et bénéficient du fameux bullet-time (technique mise au point par John Gatea pour le premier opus de Matrix) qui viendra conclure certains de vos enchaînements. On retrouve d'ailleurs ce ralenti au détour d'actions que vous pourrez effectuer avec Pey'j qui, non content de vous suivre durant votre aventure, participera de façon active lorsque vous appuierez sur un bouton qui lui est réservé.
En parallèle de l'aspect graphique, la bande son a, elle aussi, de quoi impressionner. Les musiques, très présentes dans le jeu, accompagnent véritablement le joueur. Tantôt triomphantes, tantôt très calmes, très World Musique avec ces synthès remplacant allégrement instruments à vent, cuivres et percussions, la musique s'adapte parfaitement aux environnements, aux moments de la journée, à l'action ou aux émotions de Jade. Beyond Good & Evil sonne un peu comme la rencontre de Jerry Goldsmith et de Deep Forest. Les voix anglaises profitent également d'un doublage convaincant et on ne peut qu'espérer que la localisation française soit à la hauteur. En somme Beyond Good & Evil est un vrai melting-pot de films, d'animés, de jeux et si on peut penser que le résultat esthétique n'est qu'un patchwork sans saveur, il n'en est rien. Ainsi, en sus du design très japonais de Jade, l'univers bon enfant cotoie une réalité plus rude, les couleurs chaudes s'estompant alors pour nous plonger dans des lieux plus sombres, plus sales, plus angoissants. Et si tout est une affaire de goût, on ne peut enlever au projet d'Ubi une certaine forme de poésie qui apaisera le joueur, le fera trépigner ou soupirer.