Il était une fois…

Destiny of Spirits commence de façon assez austère. On vous demande votre nom et votre date de naissance. Alors que l'on est en droit de douter de l’utilité de pareilles questions dans un free-to-play, ces éléments se révèlent très vite vitaux. En effet, quitte à jouer la carte du mystique, le titre place le joueur au sein d’un vaste système simili-astrologique où prédictions et créatures font bon ménage. L’ambiance est aux quadrants solaires grecs et aux astrolabes exotiques alors qu’on vous explique comment le jeu fonctionne via un didacticiel qui a tout d’une séance de voyance. Ne vous attendez pas à croiser Madame Irma : ici, votre interlocuteur factice est une déesse nordique qui vous présente votre but. Vous êtes un "chasseur d’esprits", héros mythique destiné à purger le monde des "esprits du chaos" lors de combats épiques. Alors qu’on vous inculque les bases, des animaux fantastiques viennent jouer avec vos rétines à l’écran, se plaçant petit à petit sous votre contrôle lors d’un entraînement au combat. Le système d’affrontement est simple et intuitif, et vous êtes rapidement libéré du tutoriel pour plonger dans le vif du sujet : la conquête du monde, rien que ça.

L’introduction terminée, le joueur est déjà capable d’établir des parallèles avec de célèbres licences. Si le nombre impressionnant de créatures mythiques s’offrant à vous déclenche déjà des « Attrapez-les tous » dans le cerveau de certains, d’autres noteront des similitudes avec des séries de jeux de cartes bien connus. Rapidement, on vous explique que vous êtes affilié à l’une des trois grandes zones de jeu : Europe (Eurasie et Afrique), Asie ou Amériques. De votre localisation géographique dépendra la nature de votre folklore et de vos adversaires dans un premier temps. Il s’agira donc de conquérir les zones autour de votre base originelle, jusqu’à étendre votre domination à la totalité du globe. Mais ne comptez pas vous en sortir facilement : en effet, il va falloir combattre et pas qu’un peu !

Clash of the Titans

Le briefing concernant les combats a beau être bref, il est plutôt bien mis en place. Chaque créature a son élément (eau, feu, lumière, fer, bois…) et a un avantage / un désavantage sur un autre (l’eau éteint le feu mais peut être vaincue par la terre). A partir de ce système de pierre-feuille-ciseau, il s’agit de faire combattre des monstres trois par trois dans des affrontements qui ne sont pas sans rappeler une licence dont la mascotte est un adorable rongeur électrique. Les créatures disposent d’une capacité propre à chacune (un dragon aura par exemple un jet de flammes), et peuvent l’utiliser en combat au détriment d’une attaque : au joueur d’utiliser stratégiquement ces capacités qui mettent un certain temps à se recharger. Chaque créature dispose également d’un "poids" défini, limitant volontairement le nombre de monstres pouvant combattre. Choisir entre un monstre puissant mais lourd ou deux bestioles plus modestes mais plus sveltes est aussi une option tactique à ne pas négliger, sous peine de mordre la poussière et perdre vos PV, qui ne se rechargent qu’après un certain temps !

Les différentes zones de jeu se définissent par plusieurs affrontements débloquant petit à petit un boss de région, puis un boss de zone. Ces créatures très puissantes mettront vos talents de stratège à l’épreuve et récompenseront le joueur par des bonus divers : augmentation de la capacité de stockage de créatures, du poids limite maximal, ou nombre d’amis (joueurs rencontrés durant votre session). Ces derniers sont d’ailleurs de première importance puisqu'ils vous permettent de louer leurs créatures moyennant une somme modique, ou de vous voir accorder des attaques supplémentaires en combat. Un plus non négligeable. Lors de l’ensemble des combats, vous récoltez deux types de ressources : pierres et orbes d’esprits. Ces objets peuvent être utilisés de plusieurs manières, principalement pour agrandir votre collection d’esprits ou les fusionner afin de les faire monter de niveau. Et l’on en vient au cœur même du jeu, à savoir les invocations. A défaut de vous faire dessiner des pentacles au sol avec du sang de poulet, il vous faudra pourtant suer sang et eau (virtuellement du moins), pour espérer débloquer les créatures les plus rares : un vrai bonheur !

Dresseur de légendes

Les esprits sont regroupés en grandes aires géographiques, mais aussi en folklores distincts. Celtique, amérindien, japonais, océanien, inuit… et même français ! Chaque grande zone (Europe, Asie, et Amériques) dispose de ses propres invocations, en rapport avec son propre folklore : en tant qu’Européen, vous pouvez donc vous attendre à crouler sous les déités celtes, les contes slaves et les monstres mythologiques grecs. Une liste déjà impressionnante, que vous pouvez agrandir de plusieurs manières. En effet, si les invocations de base vous coûteront quelques pierres durement acquises, vous aurez éventuellement accès à des invocations supérieures, demandant un certain type d’orbes acquis au compte-gouttes, ou via des microtransactions. Les grincements de dents sont de rigueur, mais il est également bon de savoir que d’autres moyens sont à la disposition du joueur pour agrandir sa collection, notamment grâce aux fonctionnalités de la console.

La "chasse" est en effet une option de jeu, vous permettant de ramasser des esprits en vous connectant à travers le monde. Il s'agit-là d'un bon moyen d’acquérir certains esprits disponibles uniquement via cette fonctionnalité et dans certaines régions du monde seulement : le vrai bonheur du gamer globe-trotteur ! En plus de cela, le joueur peut également espérer capturer quelques esprits en combat, événements rares mais bien réels qui sauront vous gratifier de vos efforts lors de l’acquisition d’un monstre quasi introuvable. Le système de rareté du jeu saura vous faire tourner la tête, puisque les esprits les plus rares sont bien entendu les plus puissants et désirables (dragons, vampires, loups-garous, dieux grecs, dinosaures, voire même des légendes PlayStation comme Knack ou Gravity Rush…). Comptez aussi sur les échanges entre joueurs pour récupérer des esprits appartenant à d’autres zones géographiques inaccessibles, ce qui n’est jamais bien simple. Pour autant, le jeu s’avère assez généreux par moments, tout en instillant de façon maligne une ambiance mystique.

Horoscope du jour : Joie, bonheur avec possibilité de centaures

Quitte à forcer le trait, pourquoi ne pas proposer au joueur une prédiction par jour ? A chaque connexion quotidienne, le joueur se voit défini par une prédiction et affublé d’un élément particulier. Vous serez ainsi tantôt chanceux, malchanceux, béni ou maudit, augmentant ou diminuant vos chances d’acquisition de bonus divers ou maximisant / minimisant la puissance de vos créatures pour un élément donné. Chaque jour vous sera également proposée une invocation "du destin", à effectuer avec un joueur ami. Lors de cette invocation, vous pouvez espérer récupérer un monstre d’un folklore différent du vôtre, et potentiellement très rare pour peu que votre "compatibilité" astrologique soit de qualité. Une idée plus que sympathique, et qui ne manquera pas de démanger la curiosité des collectionneurs à chaque allumage de la console au petit jour.

Faire combattre le Petit Chaperon rouge et un T.rex contre la Vénus de Milo et un Oni est certes possible, mais il vous faudra parfois bien mieux pour vaincre les boss d’événements spécifiques du jeu. Vous pourrez essayer de récupérer des esprits uniques lors de défis à durée limitée plus difficiles que la moyenne. Cela dit, une nouvelle fois, il faudra vous montrer patient puisque les tentatives de combat de ces boss sont extrêmement lentes à recharger, et ne manqueront pas de jouer avec vos nerfs... A moins que vous ne cédiez aux sirènes (ironiquement) du porte-monnaie virtuel à remplir avec de vrais sous. Une compensation au système de jeu général, certes gratuit, mais volontairement frustrant par moments.

L’odyssée du chasseur d’horreurs

A défaut de passeur d’aurore, ceux qui n’auront pas saisi cette fine référence auront cependant compris que Destiny of Spirits est un titre qui compte bien garder le joueur sous sa coupe durant un certain temps. Cela dit, a-t-il les moyens de pareilles ambitions ? Commençons par les choses qui fâchent, avec en ligne de mire des temps de chargement souvent courts mais incessants en rapport avec le besoin permanent d’être connecté pour pouvoir jouer. Aspect gênant qui traîne en longueur pour peu que la recherche de votre réseau n’aboutisse pas. Viennent s’y ajouter les légères déceptions concernant le manque d’un système de collection digne de ce nom, et d’informations concernant ces créatures étranges qu’on aurait aimé mieux connaître (un Monstrodex en somme). Les microtransactions, discrètes mais omniprésentes, sauront elles aussi irriter les plus allergiques au système, pourtant forcés de passer à la caisse s’ils n’ont pas la patience nécessaire à l’obtention quotidienne des bonus.

Pour autant, le jeu présente de nombreuses qualités, en plus d’être gratuit : plutôt fun et addictif, il saura fidéliser le joueur de par ses fonctionnalités intelligentes et son gameplay simple mais diablement efficace. Fort d’un contexte à la fois étranger et partagé par tous, Destiny of Spirits s’avère être un RPG des plus corrects qui réussit son pari de proposer une expérience de jeu unique et que l’on a étonnamment pas envie de lâcher. Une bonne pioche des plus sympathiques, à défaut d’être tout simplement mythique.