Cherchant comment innover dans une niche vidéoludique assez fermée, à savoir celle du jeu de rythme, Gitaroo Man Lives fait preuve d'une capacité remarquable d'adaptation. Laissant de côté les poncifs du genre, il s'envole aisément en proposant une manière très originale d'appréhender les diverses épreuves. Mélangeant la classique apparition de touches à presser à un moment précis et un principe terriblement intéressant basé sur une ligne musicale, le soft d'iNis (les responsables du fabuleux Oendan) mêle le basique au révolutionnaire avec une science indubitable. Pour résumer, le titre prend comme base un principe d'attaque/défense dans lequel vous devrez passer par deux gameplays distincts suivant votre "poste". Dans un premier temps, en tant que "combattant", vous devrez asséner à votre adversaire différents riffs de guitare afin de le déstabiliser et de lui causer des dégâts, matérialisés par une jauge verte au-dessus de lui. Et c'est à ce moment précis que le jeu devient réellement prenant et presque hypnotisant. En effet, au lieu d'appuyer bêtement sur un enchaînement de boutons sans autre challenge qu'un timing parfait, vous allez être forcé de conserver toute votre attention à chaque moment. La faute en revient à un système de trajet à emprunter tout au long du déroulement d'un morceau. Dans le principe, vous devez utiliser le stick presque analogique pour orienter un cône lumineux dans une direction particulière, et plus particulièrement dans celle de la ligne apparaissant d'un côté précis de l'écran.

Une fois focalisé sur ce trait, le but est alors de presser au moment opportun le bouton rond, afin de valider le passage de guitare correspondant. Rien de bien compliqué donc, mais une petite subtilité rend le tout bien moins apaisant. Effectivement, non content de lutter pour conserver un semblant de rythme, vous devrez orienter le cône lumineux en question en suivant les variations de la courbe. C'est à dire qu'à la moindre bosse, il vous incombera de modifier l'angle de votre "viseur" pour que la ligne ne sorte pas de votre champ de vision, tout en poursuivant de matraquer la touche rond en suivant la musique. Une idée vraiment passionnante, donnant au titre cette espèce de notion d'avancée forcée sur un chemin particulier, à l'image des jeux de plates-formes des premiers temps. Un côté très ludique qui empêche de perdre l'intérêt au fil d'un niveau et qui permet des variations très nombreuses. Parallèlement à cela, l'aspect défensif reste plus simple, axé sur l'obligation de toucher le bon bouton au bon instant afin d'éviter de perdre des points de vie. Enfin, les rares moments nommés Charge vous permettent de regagner un peu d'énergie en procédant de la même manière que pour l'attaque, mis à part qu'ici vous devrez essayer de faire le moins de fautes possible dans le but de récupérer le maximum de santé. Une construction très habile, qui réserve de petites surprises et permet de donner l'impression au joueur de participer pleinement à un combat pur et dur.

Un gameplay accrocheur donc qui va de pair avec une réalisation peut-être un peu grossière, mais laissant libre cours à un design général de grande qualité, alliant une inventivité dans les formes et l'univers visuel à un côté yonkoma (petite histoire humoristique dessinée en quatre cases) extrêmement présent au niveau du chara design et des situations. Tout cela aboutit à poser une ambiance riche et totalement délirante, soutenue par un scénario portant haut et fort le droit d'être débile. Le second degré règne ici en maître dans une joie communicative, même si nombre d'entre vous trouveront la fin du jeu totalement immorale. Un ensemble très cohérent, réellement lumineux qui comporte pourtant deux problèmes de taille pour l'instant. En effet, Gitaroo Man Lives ! possède une difficulté à l'équilibre très précaire et alterne des phases trop aisées avec des moments de panique nerveuse titillant la folie. Ces élans sont la plupart du temps incompréhensibles et donnent immédiatement envie d'insulter copieusement le petit héros du titre à la même cadence que sa guitare. Un souci que l'on dépasse avec beaucoup d'entraînement qui s'avère trop frustrant pour les personnes simplement désireuses de se divertir. De plus, cette version PSP est un copier-coller quasi total de l'opus PS2 ayant pour principale modification d'être sur une portable. C'est bien trop peu pour convaincre et surtout pour pousser les acheteurs à investir dans un jeu neuf alors que l'épisode de base (aussi bon) plafonne dorénavant aux alentours d'une vingtaine d'euros. Mis à part pour le mode multijoueur plus agréable que sur PS2, peu d'arguments viennent justifier ce portage sauvage et basique. Reste que le soft est toujours aussi prenant, éreintant et amusant, si tant est que l'on apprécie le côté hardcore gamer assumé, qui ne devrait pas changer d'ici la sortie. Pour finir, il faut aussi mettre en avant l'environnement musical du titre, comportant des morceaux de qualité, oscillant entre de jolies ballades romantiques, des passages rock symphonique ou encore un trip jazz à la trompette digne des années 70 électrisant. Espérons que cela non plus ne varie pas entre-temps.