Sorte de pendant chevaleresque de la série Dynasty Warriors, Kingdom Under Fire : Heroes est le second volet d'une série amorcée l'année dernière et disposée dans les chaudes mains des coréens de Phantagram, jeune studio émergent. Et pour un coup d'essai, il faut bien avouer que nous n'étions pas loin du coup de maître. C'est donc avec ce bagage important que ces fiers développeurs ont entrepris de concevoir une suite, qui se montre enveloppée de ses plus beaux atours devant vos yeux. Pour ceux qui ne se seraient pas plongé précédemment dans les batailles titanesques inhérentes à cette saga, une petite explication s'impose. Tout d'abord, le principe de jeu est une sorte de mélange très habile entre Kessen 3 pour les phases de déplacements stratégiques et Dynasty Warriors pour ce qui est du combat proprement dit. En effet, vous évoluez en tant que leader très charismatique de plusieurs troupes d'assaut, composées d'unités ayant une forte spécialisation. Par exemple, dans le scénario d'Ellen, du moins au début, vous avez sous vos ordres deux factions, l'une composée d'archers, et l'autre représentant en quelque sorte l'infanterie. Prenant place dans cette dernière, c'est à vous de gérer le déplacement de vos hommes, répartis par groupe de spécialité, afin de fonder une tactique digne de faire face aux assauts adverses. Pour ce faire, il vous incombe de manipuler une sorte de viseur indiquant pour chacun des bataillons un endroit spécifique à rejoindre. Il suffit alors de passer d'un ensemble à l'autre pour mettre en place des couvertures, des encerclements, et bien d'autres stratégies encore. La seule différence entre ces masses d'unités reste la résistance, plus faible logiquement chez les archers, la vitesse, la puissance, et surtout l'implication du héros ou de l'héroïne au sein du combat. Effectivement, si l'unité dans laquelle vous vous trouvez se voit contrainte de rencontrer une opposition, non seulement celle-là va s'impliquer violemment dans le combat, ce qui reste cohérent, mais vous allez également être mis à contribution. Dans ce cas précis, vous prendrez en fait le contrôle du Commandant et foncerez bouche ouverte et épée au vent dans la fureur de la bataille. C'est à cet instant que le côté réflexif se métamorphose en un ersatz de Dynasty Warriors, vous permettant de vous prendre pour une sorte de demi-dieu du maniement de l'arme blanche, abattant des centaines de créatures belliqueuses et accumulant les cadavres.

L'immersion se charge alors de vous prendre par la main, et il est bien malaisé de s'extirper de ce déluge de coups, bercé par des morceaux typés hard-rock du plus bel effet. L'action est à son comble, tant est si bien que vous passerez sûrement de longues secondes à observer vos hommes déchaîner leur soif de combat tout autour de vous dans une mêlée géante. Mais cet aspect ne doit pas faire oublier le fond clairement tactique mis en branle. Bien que relativement limité par rapport à des titres communs tirant vers le RTS, Kingdom Under Fire : Heroes apporte néanmoins son lot de manifestations demandant réflexion, surtout au travers du placement des troupes et de leur formation. Souvent nettement plus nombreux que vous et surtout plus puissants, vos antagonistes ne se priveront pas de vous prendre en tenaille ou de pousser vos archers à la retraite si vous ne prenez pas garde à votre arrivée sur les lieux. D'autant que des règles de base sont à retenir, comme le fait qu'un tireur sera bien plus efficace occupant un poste surélevé, que les unités d'assaut à distance ennemis doivent être les principales cibles, ou encore que croiser le fer en forêt réduit les chances de porter l'estocade fatale à court terme. A vous donc d'avancer prudemment et de garder un oeil avisé sur l'évolution générale du conflit. Sans quoi vous pourriez vous retrouver rapidement sans aucun soutien, ce qui serait problématique. A noter dans cette veine-ci qu'il faut éviter à tout prix que le groupe contenant le commandant soit détruit, sous peine d'être obligé de recommencer l'intégralité d'une mission, qui peut, suivant le cas, s'étendre de 15 à 40 minutes d'acharnement. Pour vous aider dans cette tâche quasi-surhumaine, il est possible de faire appel à des compétences spécifiques, que vous pouvez débloquer grâce aux points d'expérience obtenus à la fin de chaque épreuve victorieuse.

C'est d'ailleurs lors des moments de paix, suivant logiquement le sang et le feu, que vous aurez l'occasion, d'une part de gérer votre équipe et vos généraux en leur achetant des armes, armures et autres ustensiles de combat, sans oublier les compétences citées plus haut, et d'autre part recruter des mercenaires dans la taverne de chaque bourgade. En effet, l'accès au menu de gestion des divers groupes n'est disponible qu'en ville, vous obligeant à faire les bons choix à l'avance, renforçant de fait l'aspect tactique. C'est aussi en ces lieux que vous ferez avancer le scénario de l'un des sept personnages principaux, par le biais de dialogues utilisant de simples artworks, et sans aucune mise en scène. Heureusement, les évènements en combats sont nombreux et permettent quelquefois d'apercevoir certaines bribes scéniques, nous faisant profiter du moteur de jeu. Repiqué directement sur celui de l'opus précédent, le fond graphique du titre commence à accuser quelques rides profondes, proposant certes des environnements gigantesques et des dizaines d'unités affichées simultanément, mais également un brouillard tenace digne, lui aussi, de Dynasty Warriors (du moins jusqu'au 5). Malgré tout, plongé dans les cris et les flammes de la bataille, on se contente de remarquer les mouvements bien décomposés de nos troupes et du héros principal, tant l'action parvient à nous happer. D'autre part, le chara-design, proche de celui de Lineage 2, offre des intervenants profondément charismatiques, à l'image de Leinhart, qui aurait aisément pu trouver sa place dans un Castlevania entre les mains de Kojima Ayami. De ce fait, on se retrouve au final avec un titre assez peu innovant vis-à-vis de son prédécesseur, traînant avec lui une nouvelle fois des problèmes d'I.A, de réalisation, et de caméra, mais conservant l'essence de ce dernier. Reste à savoir si ces divers écueils seront réparés d'ici la sortie du soft, étape indispensable pour se replonger sans ménagement dans la hargne et la tactique. Dans le cas contraire le manque de nouveautés se fera cruellement sentir. Les orcs ne passeront pas !