Pétrifié par une terrible malédiction, un preux chevalier surmonte les mille dangers jonchant sa route dans le but de retrouver sa dulcinée par la force de l’amour, et surtout celle de son arsenal. Avec son corps de pierre qui recouvre un coeur vaillant, le héros s’aventure dans une profession de foi qui mêle sauts de l’ange et affrontements de l’enfer. Dommage que ce soit au joueur qu’incombe la lourde tâche de porter la croix.
Solide comme un roc ?
Terrible malédiction qu’est celle jetée au chevalier de Castle of Heart. Le mauvais sort envoyé par un sorcier le transforme petit à petit en roche et lui fait perdre de la santé à petit feu. Chaque bouffée d’air expirée fait donc irrémédiablement baisser la jauge de vie, à moins qu’un item de vie trouvé dans un coffre ou lâché par un ennemi occit ne lui redonne un peu de vigueur. Comme chacun le sait, nul ne peut arrêter un homme à la recherche de sa bien-aimée éplorée, l’amour étant un moteur aux effets surprenants. On ne peut pourtant pas qualifier les mécanismes de Castle of Heart de délicats, puisque les situations se délient à coup d’épée dans la trogne et de lances dans la rate. Dans ce side-scroller 2.5D action/plate-forme, la seule subtilité vient peut-être de la possibilité d’équiper une seconde arme, selon les joyeusetés létales trouvées en chemin. Armé d’une arbalète ou d’un javelot, il devient aisé d’atteindre des cibles perchées ou des objets suspendus à faire chuter sur des ennemis. Ces derniers n’auront d’ailleurs jamais l’idée de fuir une situation à leur désavantage, l’intelligence artificielle se contentant de gérer des chemins de ronde et de courir vers le chevalier une fois détecté.
Le but du jeu est de parcourir différents niveaux en repoussant de multiples ennemis grâce à tout un tas d’armes. Parfois, un mécanisme doit être enclenché pour ouvrir une porte, lorsqu’il ne s’agit pas de faire preuve d’adresse afin de sauter sur différentes plates-formes mobiles sans tomber dans le vide. Au début, on s’applique. On explore les zones dans le but de récupérer les secrets et on prend soin d’éliminer chaque ennemi présent. Puis on se rend compte qu’avec cette maudite jauge de santé qui ne cesse de descendre et le nombre trop important de monstres dans les niveaux, il vaut mieux courir à toute allure jusqu’à la fin d’un chapitre. Les affrontements, inintéressants au corps à corps à cause d’une palette de mouvements trop pauvre, font généralement perdre plus de vie qu’ils n’en font gagner. La fuite vers la fin du tableau est donc une réelle stratégie de victoire, même si elle s’éloigne nous l’imaginons du design attendu par les développeurs. Il faut avouer que les combats ubuesques dans lesquels il est possible de sauter sur un opposant de manière à s’en servir de piédestal prêtent bien trop souvent à se draper du voile de l'incompréhension.
Mythologie de l’est, conception à l’ouest
Dans cet univers qui s’inspire de la mythologie slave, les éléments cohabitent difficilement. Tout d’abord, le choix de game design qui consiste à faire perdre un bras au héros lorsqu’il ne lui reste plus beaucoup de vie, rendant impossible l’utilisation de toute arme secondaire, est discutable puisqu’il punit le joueur dans le besoin, créant une boucle d’échec. Ensuite, le level design nous ramène au moyen-âge du jeu vidéo avec des décors sans relief dont les défis ne sont jamais renouvelés, sauf lors des passages récurrents de fuite en avant. La caméra, quant à elle, n’arrive pas à trouver le bon angle pour filmer convenablement l’action, laissant au joueur la tâche de deviner ce qui se cache au-delà du bord bas de l’écran. Spoiler : il s’agit la plupart du temps d’un trou qui demande de recommencer au précédent checkpoint. Enfin, les contrôles ne répondent pas instantanément, et une simple action comme enclencher un interrupteur ou ramasser une arme lance une animation pendant laquelle les adversaires continuent de frapper le joueur impuissant.
La maniabilité est parfois inutilement compliquée, à l’image des trappes au sol qu’il n’est possible de briser qu’en frappant vers le bas après un saut. L’aspect purement plate-forme de Castle of Heart pâtit de toutes ces imprécisions et laissent une mauvaise impression générale. Le héros se bloque encore trop facilement contre de petits éléments qui dépassent du décor, alors que les sauts sont régulièrement mortels à cause d’une pesanteur somme toute délicate à apprivoiser. Quant au plongeon, sa puissance est telle que l’on a vite fait de terminer empalé à des pics après son utilisation. Il est donc normal qu’avec l’accumulation de tous ces soucis, la difficulté paraisse particulièrement élevée. Les boss peuvent en tout cas prétendre au titre des vilains les plus frustrants de ce début d’année.
Points forts
- Un côté dark fantasy loin d’être déplaisant
- Certains passages assez jolis
Points faibles
- Dimension action pauvre
- Aspect plate-forme imprécis
- Maniabilité qui manque de réactivité
- Difficulté en dents de scie
- Intelligence artificielle aux fraises
- Direction artistique quelconque
Que ce soit du côté de sa technique générale ou de ses mécanismes de jeu, Castle of Heart est aussi générique qu’une épée commune vendue par le premier forgeron du coin. À l’image de ce chevalier de pierre qui s’effrite au fil du temps, l’aventure part en morceaux sous les coups de ses mécanismes pauvres et d’une jouabilité globalement imprécise. Castle of Heart n’est pas un jeu au challenge relevé, il est surtout bourré de maladresses qui rendent la progression difficile et frustrante.