20.000 lieues sous la peur

La vie s'écoule paisiblement au sein de la station sous-marine Compass affrétée par la société Oceanova. Mais cette tranquillité sera de courte durée. Alors que des chercheurs étudient l'épicentre d'un tremblement de terre de niveau 8 sur l'échelle de Richter, une immense lame de fond balaye l'ensemble des installations. L'eau s'infiltre et noie instantanément la majorité des occupants. Seul Kip survit à cette catastrophe naturelle d'une violence rare. Isolé et coupé du monde avec pour seul allié un scaphandre, notre héros va tenter de survivre et rejoindre la surface.

La narration de Narcosis ne s'embarrasse à aucun moment de cinématiques et préfère garantir une immersion constante en conservant le point de vue de Kip. La claustrophobie qui se dégage du titre de Honor Code, Inc est omniprésente et fera trembler d'effroi les réfractaires aux endroits confinés. Narcosis enferme le joueur dans un scaphandre en titane avec pour seule compagnie le silence et s'en amuse. L'atmosphère de Narcosis rappelle sans conteste le film de James Cameron The Abyss. L'océan est un être capricieux se jouant de l'Homme et les développeurs en jouent avec malice. Cette peur de la noyade, mort atroce s'il en est, se ressent à chaque pas. Chaque décision est lourde de conséquences et cette ambiance oppressante n'aide en rien à détendre le dernier survivant.

Kip subit de plein fouet les effets de la haute pression qui l'entoure. Sensations désagréables sous les ongles, bourdonnements, difficulté à se mouvoir... notre héros manque cruellement d'oxygène et perd peu à peu la raison. Narcosis est un titre horrifique et ne lésine jamais sur les Jump Scares et autres apparitions inopinées pour clouer le joueur à son fauteuil. Ce survival-horror est éprouvant et transforme la moindre once de courage en appréhension. Chaque pas se mérite. Chaque avancée se paye en hallucinations. Ne soyez pas dupe ! Narcosis conservera jalousement une parcelle de votre âme 20.000 lieues sous les mers et vous serez ravis de la lui céder.

L'intégralité de ce périple qui ne dure pas plus de 6 heures se déroule en profondeur et Honor Code, Inc. non sans une dose de génie, réussit à transposer cette dimension aquatique. Au-delà des simples bulles s'échappant du scaphandre et d'une obscurité propice à la peur, les environnements parcourus oscillent entre le correct et le prometteur. De simples objets flottant dans une pièce, un moniteur encore alimenté éclairant un laboratoire plongé dans la pénombre, du magma s'échappant de la croûte terrestre... les décors surprennent par leur variété et leur capacité à prendre vie malgré cette mort omniprésente. Sans décrocher la rétine, cette aventure réalisée sous le moteur Unity rime avec dépaysement et c'est bien là l'essentiel.

Un cri dans le néant

Narcosis est un jeu de survie en milieu hostile. Engoncé dans un scaphandre pesant un âne mort, le héros lutte constamment pour se mouvoir, enclencher un levier, etc… Effectuer le moindre geste, la plus minime action consomme la seule ressource vous faisant défaut… l’oxygène. Le jeu du jeune studio Honor Code, Inc. s’articule autour de la recherche et la gestion méticuleuse de ce précieux O². Le stress ressenti durant ce périple sous-marin naît en grande partie de la peur de l’asphyxie. À plusieurs kilomètres sous le niveau de la mer, personne ne vous entendra crier, ne vous verra, avec pour conclusion une mort solitaire dans l’obscurité abyssale. Cependant, pour s’éclairer et effrayer la faune locale, Kip possède un projecteur fixé à son casque et des fusées éclairantes embarquées sur son bras droit. Au nombre de 10, ces dernières illuminent l’aventure et distraient les créatures aquatiques les plus belliqueuses.

Les fonds marins regorgent d’espèces inconnus et pour cause. Les grandes profondeurs restent inaccessibles à l’Homme ou presque et les découvertes en ces lieux sont légion. Un poulpe aux allures de mini Cthulhu et son comportement similaire au Facehugger (cf. Alien), un poisson “rocailleux” et des araignées géantes à la carapace blindée, Narcosis ne s’encombre pas d’une “trouzaine” d’ennemis. Et pourtant, cette faune suffit à complexifier le périple par la présence de créatures impossibles à éliminer et qu’il faut contourner sous peine de subir leur courroux et de voir sa combinaison perforée séance tenante. Pour repousser les assauts des petites créatures, Kip ne possède qu’un pauvre couteau de plongée. Autant dire que ce dernier est tout bonnement désarmé.

Dans Narcosis, survie rime avec fuite en avant. La confrontation directe ne vous mènera à rien. Et Honor Code, Inc. l’a bien compris en incitant le joueur à se dissimuler dans l’environnement et à profiter du comportement attendu des créatures pour se faufiler. Malgré tout, ces séquences d’infiltration reste bien trop sommaire et deviennent parfois frustrantes quand un script refuse de se déclencher. Et que serait un survival-horror sans ces énigmes bien senties ponctuant un chemin de croix au demeurant linéaire ? De la recherche de carte magnétique à l’activation d’un générateur en passant par la résolution de puzzles certes simples, mais ayant le mérite de renouveler le périple… Narcosis est un jeu d’aventure survivaliste et les archétypes du genre ne se laissent pas prier pour enrichir l’expérience. Seuls les environnements en extérieur pêchent par leur absence de points d’intérêts ce qui rend difficile l’orientation d’un héros plongé dans l’obscurité.