La tradition veut désormais que tout AAA moderne dévoile son season pass en détails avant même d'être disponible dans les rayons. Ce fut récemment le cas de Far Cry 5, le prochain épisode de la saga de FPS d'Ubisoft, qui nous emmène pour rappel sur les terres sauvages du Montana. Mais si vous souhaitez prolonger le plaisir en foulant de nouveau le sol d'un des plus beaux états d'amérique, il faudra passer par d'autres moyens : les 3 DLC proposés dans le season pass ne vous permettront en effet que de traîner vos guêtres jusqu'au Vietnam, d'affronter des hordes de zombies ou même d'aller déambuler sur Mars.
Cet article entrant dans la rubrique "Débat et opinion", il est par nature subjectif. L'avis de l'auteur est personnel et n'est pas représentatif de celui du reste de la rédaction de Jeuxvideo.com.
Proposer des contextes étonnants pour les DLC de ses jeux, d'autres s'y sont déjà essayés. Outre Rockstar et son célèbre Red Dead Redemption Undead Nightmare, Sleeping Dogs nous proposait ainsi de revisiter un Hong Kong possédé par des esprits malfaisants dans Cauchemar à North Point, tandis que la série Far Cry, déjà, s'offrait un délire typiquement 80's via le très barré standalone Blood Dragon. Autant d'expériences qui ont certes pu amuser nombre de joueurs et leur offrir un petit supplément rafraîchissant, mais que l'auteur de ces lignes n'a guère su apprécier.
Il n'est pourtant pas difficile de comprendre ce qui peut attirer éditeurs et développeurs dans la création d'un contenu téléchargeable à contre-courant de l'expérience proposée par le jeu de base. Pour les premiers, rappelons que la création d'un AAA devient de plus en plus coûteuse : chaque développement est un risque qu'il faut savoir mesurer en jaugeant le marché avec efficacité. Dans un tel contexte, s'essayer aux DLC originaux permet de connaître façon grandeur nature la réaction des joueurs avant, potentiellement, de transformer l'idée en un véritable titre à part entière.
Quant aux seconds, ils peuvent profiter des DLC pour s'offrir une plus grande liberté créatrice, d'une part parce que la pression liée au développement est moins forte que pour le titre d'origine, d'autre part parce qu'il s'agit aussi d'un bon moyen de réintégrer un mécanisme abandonné ou un contexte jugé trop risqué à essayer sur le jeu d'origine. Se servir des contenus téléchargeables comme d'une sorte de laboratoire idées farfelues est donc parfaitement défendable. Mais alors, pourquoi y suis-je tant opposé ? Avant tout pour une question de continuité.
L'une de mes premières déceptions remonte ainsi à l'arrivée de Red Dead Redemption, déjà brièvement évoqué plus haut : inutile de revenir sur l'excellent titre de Rockstar, vous avez sans doute déjà entendu en long, en large et en travers les raisons de l'excellent accueil reçu par le jeu à sa sortie et mon avis n'est guère différent. En revanche, quelle ne fut pas ma déception de constater qu'à défaut de creuser son univers sérieux et réaliste, Rockstar a préféré nous fournir un DLC s'appuyant sur un background fantastique étonnant. Aussi bon que puisse être Undead Nightmare, il reste à mes yeux cette expérience décalée non canonique, donc totalement hors-propos dans la belle fresque présentée par le Western bientôt doté d'un second opus.
Il ne s'agit évidemment pas d'un cas isolé. La Tyrannie du roi Washington par exemple, série de 3 DLC d'Assassin's Creed III, nous faisait aussi explorer une réalité alternative dans laquelle Connor disposait de pouvoirs étranges. Si l'ensemble avait au moins le mérite de s'intégrer dans l'univers canonique de la série avec un artifice scénaristique (un brin tiré par les cheveux certes, mais tout à fait justifiable), il tranchait bien trop avec l'expérience de base pour en offrir un complément logique.
Lorsque un nouveau jeu sort, la logique veut que le DLC soit là pour proposer un prolongement de l'expérience. Quand GTA IV me propose de retrouver les pavés de Liberty City dans la peau de personnages croisés au cours de l'aventure de Niko Bellic, c'est tout un pan inexploré de l'univers du jeu qui s'ouvre à moi et me permet de m'y replonger sous un angle inédit. La donne est la même pour The Witcher III ou plus récemment Assassin's Creed Origins, qui, sans changer de protagoniste, densifient leur scénario de base et nous permettent même d'explorer de nouvelles contrées avec leurs DLC. Dans ces deux cas, l'éditeur et le développeur respectent le contrat implicite qu'ils ont signés avec le joueur : "Vous avez aimé notre jeu sous cette forme ? Nous vous proposons de prolonger le plaisir." C'est vrai, rien ne nous oblige à acheter un DLC, et la voie de l'originalité est toujours plus justifiable sur de tels contenus que sur le nouvel épisode d'une saga. Mais en optant pour un tel choix, éditeurs et développeurs privent sans doute une partie de leur public d'un petit plus appréciable, faisant de leurs soft un gâteau fort goûtu... privé de sa cerise.