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Si la Grand- Bretagne s'éloigne peu à peu d'un Brexit dur, de non-concession, les inquiétudes restent prégnantes chez certains dirigeants qui voient dans cette manœuvre politique des retombées économiques lourdes, en particulier sur le marché du jeu vidéo.
La Grande-Bretagne est un fleuron de l'industrie européenne du jeu vidéo, mais également de la scène internationale, ayant su à la fois mettre en valeur ses studios locaux comme Creative Assembly (saga des Total War), ou bien Playtonic Games (Yooka-Laylee), mais également en faisant venir des studios étrangers comme Rockstar Games (participation à Grand Theft Auto: Liberty City Stories, Red Dead Redemption, Grand Theft Auto V, etc.), ou bien Warner Bros. Interactive Entertainment (série des Batman Arkham, exception faire d'Origins, et des jeux LEGO, etc.). Il est donc difficile de concevoir, pour le monde du jeu vidéo britannique, une sortie du marché européen qui risquerait de fragiliser encore plus l'économie nationale. Le changement récent de politique vis-à-vis du possible abandon de frontière entre les deux territoires irlandais vient néanmoins permettre d'envisager de possibles solutions à cette problématique.
L'année 2018 sera donc une étape décisive pour l'avenir de cette nation et son industrie vidéoludique, car ce qui inquiète le plus les acteurs de cette économie, c'est le risque de pénurie de main d'œuvre qualifiée. Comme dans la plupart des secteurs dits " de pointe", les studios de jeux font appel à des travailleurs étrangers, majoritairement européens qui, pour l'instant, peuvent circuler librement dans l'espace Schengen. Si un Brexit sévère se précise, c'est donc toute une filière qui risque d'être impactée. L'industrie du jeu vidéo britannique a su croître grâce à cette liberté de mouvements dont jouissaient les "expats", or si celle-ci venait à disparaître, beaucoup de ces travailleurs feraient marche arrière et iraient travailler ailleurs dans l'Union Européenne. Les jeux demandant de plus en plus de développement et de savoir-faire riches et variés, il est donc difficile d'imaginer ces studios offrir un rendement équivalent à aujourd'hui avec une équipe réduite : il en résulterait donc une pléthore de projets annulés, de jeux repoussés ou bien non finalisés à leur sortie.
Une seconde ombre au tableau semble se profiler : l'Organisation Mondiale du Commerce identifie aujourd'hui les contenus vidéoludiques comme des "services", soumis à des règlements et laissant peu de souplesse. Si des discussions semblent avoir été rudement menées afin de mettre à jour cette classification, celle-ci n'a pour l'instant pas évolué, entraînant donc des risques de taxations fortes de ces produits digitaux que le marché unique européen protège pour l'instant. Le jeu coûtera donc plus cher à développer, et son prix risque d'augmenter en conséquence à sa vente car il sera taxé, soumis à des droits de douane et à des règles propres aux "services". La question d'une évolution du marché unique européen est actuellement en discussion entre les dirigeants européens et britanniques afin de trouver l'arrangement qui soit le plus intéressant pour les deux parties. Cette négociation a le mérite de rassurer certains acteurs, tandis que d'autres pensent déjà à un possible plan B : émigrer vers l'Irlande, ou vers un autre pays européen (Pays-Bas ou France), est une possibilité non négligeable afin d'éviter les impacts du Brexit et profiter davantage fiscaux ou économiques que peuvent offrir ces nations.
Si les leaders du marché du jeu vidéo veulent rester optimistes et espèrent une sortie négociée (évitant un Brexit dit du "no-deal"), il est actuellement difficile de savoir quelles finalités auront ces arrangements. La Grande-Bretagne, tout comme l'Union Européenne, a ses propres intérêts et les conditions de cette sortie vont impacter les économies de ces deux entités.
Source : Gameindustry