L'E3 2015, en tenant toutes ses promesses et se permettant même de mettre fin à certaines des plus anciennes arlésiennes de l’industrie vidéoludique (Shenmue 3, The Last Guardian, Final Fantasy VII Remake) remplit à merveille son office alimentant le marché du jeu vidéo en spéculations, attentes et frissons durant les mois qui suivirent. La gamescom quant à elle, du fait d’un nombre élevé de jeux jouables à Los Angeles, perdit un tant soit peu de sa superbe au cours d’une édition 2015 en demi-teinte, bien que l’univers PC puisse se vanter d’un salon allemand riche en contenu. L’E3 en juin, la gamescom en août et le Tokyo Game Show en septembre. La Sainte Trinité des salons ne dérogera pas à la règle cette année non plus.
Troisième salon majeur ponctuant une rentrée des classes à peine entamée, le TGS se déroulera du 17 au 20 septembre 2015. La précédente édition, bien que marquée par une baisse significative de ses visiteurs, enchanta le joueur nippon et la presse venue des quatre coins du globe avec une version jouable de Bloodborne, de Monster Hunter 4G et la présence de la New Nintendo 3DS … de bonnes surprises noyées dans une surabondance de RPG et de jeux mobiles, Tokyo Game Show oblige.
Un repli stratégique
La grande messe japonaise du jeu vidéo se recentre sur sa propre industrie année après année. Orientée sur la production au sein de l’archipel, les éditeurs occidentaux n’investissent qu’à de rares exceptions le temps et les moyens nécessaires pour apparaître à Tokyo et faire bonne figure. En 2014, seuls Electronic Arts, Bethesda Softworks (pour The Evil Within) et Microsoft firent le déplacement. Et la partition envisagée d’ici quelques jours entérinera un phénomène devenu “commun” au fil des ans. L’indéboulonnable EA et Kobojo s’offriront l’exotisme du pays du soleil levant et le dépaysement qui l’accompagne, éditeur et studios abandonnés par l’ensemble de la production européenne et américaine.
LEGO Jurassic World sur le stand de Sega et Disney Infinity 3.0 chez Bandai Namco. Call of Duty : Black Ops 3, Star Wars : Battlefront, Destiny : Le roi des corrompus, Uncharted : The Nathan Drake Collection, Minecraft (édition PlayStation Vita), à l’exception de Sony jouant la carte de “L’exception qui confirme la règle”, éditeurs, studios et en définitive leurs jeux seront encore inscrits au registre des abonnés absents. Cependant, avec la domination sans partage de l’E3, la présence de la gamescom et la montée en puissance de la Paris Game Week, le Tokyo Game Show en s’autorisant un repli stratégique se démarque de la concurrence. Les amateurs de J-RPG et autres productions japonaises se doivent de faire le déplacement. Un ostracisme qui à l’heure actuelle donne au TGS cette saveur si particulière avec pour porte-étendard “Le jeu vidéo japonais se découvre au Japon”.
L'avènement du mobile
Dans cette guerre de tranchées opposant jeux mobiles et traditionnels et secouant l’industrie du jeu vidéo depuis une décennie, le Free to play s’apparente à une arme de destruction massive. Et les revenus générés au Japon par l’App Store et Google Play laissent entrevoir un avenir tout en mobilité. En 2013, avec 5.1 milliards de dollars, le mobile générait d’ores et déjà plus de revenus que le marché console (salon + portable), un marché console dominé par les portables (Playstation Vita et Nintendo 3DS). Le jeu vidéo nomade fait partie intégrante de la culture japonaise, une évolution naturelle miroir des habitudes de consommation. Et 2014 ne fit que confirmer cette tendance ; les jeux vidéo sur mobiles générant 60.4% des revenus sur le marché vidéoludique japonais. Un phénomène en pleine expansion pour une mutation profonde de leur manière de consommer le jeu vidéo … un avenir susceptible de s’étendre au reste du monde dans les années à venir.
Le Tokyo Game Show, reflet de l’industrie, mute petit à petit ouvrant ses portes aux studios et éditeurs orientés production sur smartphones et tablettes avec des jeux Free to Play à destination du marché japonais pour une majorité des projets présentés. Ainsi les stands majeurs que furent Konami, Capcom ou Playstation par le passé sont grignotés par Glee, Wargaming.net ou encore Square Enix (mobile) et des jeux tels que Puzzle & Dragons, Brave Frontier et Final Fantasy Record Keeper. L’édition 2015 surfe sur cette vague exacerbant cette montée en puissance du tactile. Konami parie sur son Pro Evolution Soccer Club Manager. Square Enix lance dans l’arène pas moins de 9 titres face à 13 titres consoles “seulement” et les franchises affichées sont alléchantes : Final Fantasy (Final Fantasy : Brave Exvius, Final Fantasy Grandmasters, Mobius Final Fantasy), Dragon Quest (Dragon Quest VIII : Warriors of Eden), Kingdom Hearts (Kingdom Hearts Unchained X) … soit 40% du line up rimant avec mobile, symbole d’une stratégie économique hybride. Et il en va de même pour Bandai Namco et ses 18 jeux mobiles puisant au sein des franchises Dragon Ball Z, Digimon, The Idolmaster, Gundam, One Piece, Sword Art online, tales of et Jojo’s Bizarre Adventure. L’expérience du TGS se voudra tactile ... et les pouces seront mis à rude épreuve.
L'omniprésence de Square Enix
Square Enix, Capcom, Sega, Koei Tecmo, Bandai Namco, Konami, Sony … l’ensemble des acteurs japonais est présent, à l’exception de Nintendo, éternel absent du TGS. Et de cette pléthore de stands, d’écrans géants, de musiques s’entremêlant … certains éditeurs sortent leur épingle du jeu.
Square Enix est de cette trempe. Porté par une multitude de licences à la renommée internationale, Final Fantasy et Dragon Quest en tête, l’éditeur japonais couvre de son aura un Tokyo Game Show accueillant pourtant plus de 400 exposants. Bien que l’espace réservé à Square ne soit pas des plus grandiloquent, le catalogue mis en avant impose à chaque TGS le respect. Il en sera de même pour l’édition 2015. Respectivement 4 et 9 jeux Dragon Quest et Final Fantasy, Star Ocean 5 et un opus de la saga Kingdom Hearts … Sans nul doute, l’attention de la presse et du public se fixera sur ce line up. Quant au planning de l’éditeur pour le 19 et 20 Septembre, il déborde d’événement en tout genre … entre présentations sur scène, diffusion sur Niconico (Youtube japonais), bande-annonces … le chaland aura de quoi occuper son week-end.
La surrepésentation du RPG
Le RPG est aux joueurs japonais ce que le FPS est aux occidentaux, une question de survie à la limite du besoin primaire, un genre de jeu se vendant par palettes. Les projets se démultiplient et les annonces pullulent. Nouvelle franchise, séquelle, préquelle, portage, spin off … le marché se prélasse dans un tour par tour nostalgique, un ATB propriétaire ou un dynamisme salutaire en réponse aux attentes des consommateurs. Et ce n’est pas l’avènement du jeu vidéo sur mobiles qui atténuera cette tendance. Le RPG sous toutes ses formes (Puzzle-RPG, Action-RPG, Fast-RPG …) est une poule aux oeufs d’or pour tout éditeur, surtout au Japon, à la conquête des stores iOS et Android.
Aux côtés des RPG cités ci-dessus, d’autres licences seront à l’honneur : Monster Hunter, Dark Souls, Persona, Phantasy Star Online, Sword Art … Zodiac représentera quant à lui le savoir-faire européen en matière de J-RPG. Développé par Kobojo en collaboration avec Hitoshi Sakimoto (compositeur de Final Fantasy Tactics, Final Fantasy Tactics Advance ... Final Fantasy XII) et Kazushige Nojima (scénariste sur Final Fantasy VII, Final Fantasy VIII, Final Fantasy X ... Kingdom Hearts et Kingdom Hearts II), ce titre prévu pour fin 2015 défendra une vision artistique et nostalgique du RPG.
Le musou, autre genre prisé du public nippon, imposera ses velléités guerrières à grand renforts d'attaques destructrices. Dynasty Warriors Online et bien entendu Hyrule Warriors Legends aiguiseront avec délectation leurs armes sur une foule de visiteurs prêts à en découdre. Jeux de Combat (Street Fighter V en tête), FPS, Stratégie, Action (Attack on Titan), Aventure (Uncharted : The Nathan Drake Collection), Survival-Horror (Resident Evil 0 HD Remaster) … compléteront une affiche alléchante.
Conclusion
Salon à l’aura en berne auprès d’un pan de joueurs intéressés avant tout par les projets occidentaux, le Tokyo Game Show, certes recentré sur les productions japonaises, conserve un attrait indéniable. Joueurs mobiles, fans de J-RPG, amateurs de projets exotiques, simples curieux voire candides … l’édition 2015 pourrait finalement nous surprendre à plus d’un titre. JeuxVideo.com couvrira cet événement à la fois sur place et à distance. Aperçus, reportages et impressions à chaud seront au programme. La rédaction vous donne RDV le 17 Septembre !