En ce mois de décembre 2014, davantage qu'une étroite rétrospective de l'année écoulée, nous vous proposons un bond en arrière de 10 ans, comme le veut le principe des désormais traditionnelles news BTG*.
2004. Les consoles portables sont en perte de vitesse. La N-Gage n'a pas trouvé son public et le coup de jeune donné par Nintendo un an auparavant à sa Game Boy Advance avec la Game Boy Advance SP n'était pas suffisant pour porter le jeu vidéo dans la nouvelle génération.
Innover pour amorcer la septième génération de consoles
Tandis que Sony projette d'envahir le marché des consoles de jeu portables avec la PSP, Nintendo entend conserver son statut de leader incontesté du secteur en annonçant dès 2003 l'arrivée d'un “nouveau produit” conçu dans l'optique de proposer aux joueurs une manière inédite de jouer, concept devenu à terme le fer de lance de Big N. Il aura fallu attendre début 2004 pour que le nom de la nouvelle machine soit officialisé : il s'agira de Nintendo DS, DS étant l'acronyme de Dual Screen. Annoncée comme le “troisième pilier” des machines Nintendo aux côtés de la GameCube et de la Game Boy Advance, la Nintendo DS devra attendre mai 2004 pour bénéficier d'une présentation en bonne et due forme dans le cadre de l'E3.
https://www.youtube.com/watch?v=TaACette présentation insiste sur le fait que si le double écran constitue la caractéristique la plus évidente de la console portable, DS est également l'acronyme de Developer's System, marque de la volonté de Nintendo de s'arroger le statut de leader de l'innovation en proposant un produit suceptible d'attirer les développeurs et de laisser libre cours à leur créativité. Réputé conservateur, Nintendo cherche à dépoussiérer son image et à entrer de plain-pied dans le monde de l'innovation. La réception critique et publique est bonne, d'autant que le géant japonais sait brosser les joueurs dans le sens du poil en dévoilant une démo de Metroid Prime : Hunters qui sera l'un des premiers softs à tirer parti du stylet et de l'écran tactile.
Il faut reconnaître que la Nintendo DS présentait des spécificités inédites pour l'époque. Si le double écran n'était pas une première chez Nintendo (on pense notamment, en termes de design, à la Game & Watch), l'introduction du tactile sur l'un d'entre eux constitue une vraie nouveauté, ouvrant la porte à de nouvelles façons de penser le jeu vidéo. Elément de gameplay à part entière, le tactile sera un argument fort pour séduire les joueurs.
En outre, la connection wi-fi intégrée présente l'intérêt majeur de ne plus être contraint d'utiliser les encombrants Game Link Cable ou Câble Link pour jouer avec un ami équipé de la console. La possibilité de jouer jusqu'à 16 joueurs avec une seule cartouche en wi-fi est une réalité et la nature de certains jeux de Nintendo se prêtait idéalement à cette fonctionnalité. Enfin, la rétrocompatibilité avec les jeux Game Boy Advance était un argument solide pour convaincre les plus conservateurs d'acheter la dernière-née des écuries Nintendo. Bref, tous les éléments étaient en place, et Big N prévoyait une fenêtre de sortie pour fin 2004.
Un succès commercial immédiat
Les délais ont été respectés. Nintendo a en premier lieu implanté sa console portable le 21 novembre 2004 aux Etats-Unis. 550.000 machines ont été commercialisées au prix de 149 $ outre-Atlantique et 90% des stocks ont trouvé preneur dès la première semaine de vente, représentant 500.000 machines écoulées. Un franc succès qui ne cessera de croître d'une manière fulgurante avec l'arrivée du produit sur son territoire natal le 2 décembre 2004. La DS parvient sans surprise à trouver sa place dans les foyers nippons, à tel point que fin décembre 2004, la Nintendo DS totalisait près de 2,84 millions d'exemplaires vendus. Des ventes plus qu'encourageantes qui correspondaient aux ambitions de Nintendo de vendre 1 million de DS avant fin 2004 pour la seule Amérique du Nord.
Si les objectifs étaient ambitieux, Nintendo ne s'attendait pas nécessairement à un tel succès, tant et si bien que la quantité de machines sur le marché se serait révélée insuffisante en l'absence de réaction de la firme. Pour répondre aux précommandes colossales, le géant japonais a affecté une troisième usine à la production de la portable fabriquée en Chine. Car si de tels résultats étaient plus qu'encourageants, Nintendo ne regardait pas moins d'un oeil méfiant l'arrivée de la PSP de Sony, commercialisée le 12 décembre 2004 dans l'archipel.
Rester leader sur le marché de la console portable
Graphiquement supérieure à la DS et disposant de fonctionnalités online et multijoueurs solides, la PSP était davantage destinée à un public “harcore gamer” tandis que Nintendo se positionnait en théorie sur le marché “casual”. L'avenir donnera toutefois à Nintendo l'ascendant sur son principal concurrent sur le marché des consoles portables.
Les qualités de la Nintendo DS résidaient autant dans ses innovations que dans son ergonomie. Ses multiples bonnes idées ont permis à Nintendo de conserver sa suprématie dans un secteur sur lequel il règne en maître depuis toujours. Si les jeux du lancement de la console n'étaient pas tous parfaitement adaptés au support tactile, les titres proposés un peu plus tard ont permis à la machine de devenir incontournable en proposant davantage de jeux spécialement conçus pour être joués avec les spécificités de la console là où la PSP s'est un peu trop attardée sur de simples portages de jeux PS2. Des licences fortes telles que Mario Kart et New Super Mario Bros. ont séduit le public attaché à l'image de marque de Nintendo tandis que la série Nintendogs garantissait de capter l'intérêt d'un public plus large, comme en témoignent les ventes de la licence qui totalise 23 millions d'exemplaires écoulés.
De plus, Nintendo a su faire preuve d'une certaine souplesse en adaptant rapidement sa console aux exigences du marché. Que ce soit en termes de prix ou de modèles (DS Lite, Dsi et DS XL), la flexibilité de Nintendo lui a permis de pérenniser la présence de sa console dans les foyers jusqu'à la cessation de sa production, 9 ans après sa sortie, afin de laisser la place à sa version modernisée : la Nintendo 3DS.
Trailer de Mario Kart DS
Un repos bien mérité
10 ans après sa sortie, la Nintendo DS laisse un bel héritage derrière elle, héritage toujours bien vivant et dont l'impact se mesure dans notre utilisation quotidienne du jeu vidéo. Si Nintendo n'a pas la paternité du tactile, il n'est toutefois pas totalement étranger à sa démocratisation dans le marché vidéoludique. Outre la Nintendo 3DS qui a su parfaitement s'intégrer au parc de consoles en dépit d'une exploitation de la 3D à la pertinence discutable, la PS Vita de Sony intègre des éléments tactiles au même titre que nos incontournables smartphones et tablettes. Etre le premier à avoir eu l'idée d'intégrer cette fonctionnalité sur une console de jeu donne à Nintendo des allures de précurseur et a sans aucun doute contribué au succès de la machine.
Et, bien évidemment, on se souviendra aussi de la DS pour ses chiffres de ventes colossaux, s'élevant selon le site officiel de Nintendo à 154,01 millions d'unités vendues, tous formats confondus, faisant d'elle la console portable la plus vendue de tous les temps et la hissant en deuxième place du classement intégrant les ventes de consoles de salon, juste derrière la PlayStation 2.
*L'expression BTG est l'acronyme de "Bien ta grotte" qui exprime l'idée du retard en faisant comprendre à quelqu'un qu'il a manqué une information, importante ou non, connue du plus grand nombre.