Cher lecteur, apprenez que ceci devrait être officiellement notre dernier papier pour Jeuxvideo.com, et quoi de plus réjouissant que de constater que le destin nous aura offert en guise de cadeau de départ l’épilogue de l’incroyable remontada d’AMD dans le domaine des processeurs.
Souvenez-vous, l’épopée du fabricant a débuté fin 2016 avec le lancement des Ryzen de première génération : sans revenir complètement sur les produits Intel, ces nouveaux CPU ont à la fois posé les bases d’une architecture Zen convaincante et remis à plat les rapports prix / nombre de cœurs, pour le plus grand bonheur des consommateurs. Mi-2018, AMD renforçait ses positions avec notamment des gains en termes de finesse de gravure, quand Intel devait continuer de composer avec un process de fabrication 14 nm et une architecture de référence Skylake datant de 2015. Aujourd’hui, c’est avec sa troisième génération de CPU Ryzen qu’AMD compte véritablement passer devant son concurrent, grâce à quelques améliorations majeures : une finesse de gravure dite « 7 nm », et une micro-architecture Zen 2 repensée pour en tirer parti. Et nous sommes donc bel et bien là pour constater qu’effectivement, les produits Ryzen ont atteint l’âge de maturité, et font maintenant jeu égal avec la concurrence, voire même, beaucoup mieux.
Bien qu'AMD assure un certain niveau de rétrocompatibilité vis-à-vis du socket AM4, nous nous sommes contenté de tester ces nouveaux processeurs sur une plateforme X570 fournie par AMD, et équipée de mémoire DDR4 certifié pour 3600Mhz, mais configurée sur 2133 MHz. Et ce, afin de rester en cohérence avec nos précédents tests de processeurs. Egalement, vous pouvez trouver la description complète de notre protocole en suivant ce lien.
Précisons toutefois en préambule que le temps nous aura manqué pour parcourir l’ensemble des possibilités des deux nouvelles puces Ryzen 7 3700X et Ryzen 9 3900X. Par exemple, nous n’avons pas pu évaluer l’impact du passage au standard PCI-Express 4.0 sur les cartes graphiques compatibles (les dernières Radeon série 5000). De même, nous n’avons pas poussé le fonctionnement de notre plateforme X570 (carte mère Asus ROG Crosshair VIII Formula) que ce soit sur l’overclocking mémoire ou processeur. Pour autant, derrière cette analyse basée sur des mesures de performances bureautiques et vidéoludiques que nous qualifierons de « classiques », impossible de ne pas voir la réussite technique d’AMD.
Ainsi, si l’on revient sur les processeurs Ryzen de première et seconde génération, leurs défauts par rapport à la concurrence se résumaient à deux arguments majeurs : des performances légèrement en retrait sur les tâches dites monothreadées, démontrant la supériorité technique des Core Skylake / Coffee Lake sur les Core Zen, et des performances vidéoludiques en dessous des attentes, notamment sur les hauts débits d’images. Deux soucis qui sont définitivement enterrés, comme le montrent les résultats que nous avons obtenus. Sur deux applications monothreadées (Cinebench et GeekBench dans notre cas), les Core Coffee Lake et les unités Zen 2 se montrent aussi véloces. Parallèlement, on remarque un gain de 15% sur ce cas de figure, entre les cœurs Zen+ et Zen 2 : une belle performance, qui se décline assez naturellement sur les tests mettant à contribution l’ensemble des ressources disponibles. Sous FryRender ou Corona, un Ryzen 7 3700X (8 cœurs / 16 threads) tient aisément la comparaison face à un i9-9900K (même configuration), et va même le surpasser sous Cinebench ou Handbrake. Quant au Ryzen 9 3900X, autant vous dire qu’il est loin devant, armé comme il l’est de ses 12 cœurs avec SMT (l’équivalent de l’hyperthreading d’Intel, pour mémoire). On note enfin que les puces Ryzen sont toujours d’excellentes travailleuses lorsqu’il s’agit de s’atteler à des tâches d’encodage vidéo, ce qui les positionnent comme des stations de jeux / stream idéales.
Et d’ailleurs, qu’en est-il de la partie jeu vidéo justement ? Eh bien si Intel conserve bien un très léger avantage, celui-ci ne sera que théorique. En effet, sur nos tests vidéoludiques visant à faire peser une certaine de pression sur le CPU, les Core i7-9700K, i7-8700K et i9-9900K réussissent toujours à grappiller quelques FPS sur leurs concurrents. Toutefois, ces cas de figure se font nettement plus rares qu’à l’époque (pas si lointaine) des puces Ryzen de série 2000. D’autre part, et comme nous le suggérions, on parle de différence de performances de quelques points, sur des valeurs brutes très élevées. Difficile dès lors de sanctionner AMD d’afficher 170 FPS plutôt que 180 sur The Witcher 3. Mais surtout, si l’on se replace dans des configurations de jeu plus réalistes, avec une pression de calcul mieux répartie, les faibles différences constatées s’estompent complètement. En ce qui nous concerne, il s’agissait du dernier bastion qui pouvait encore vous faire préférer les Core Intel aux CPU Ryzen. Désormais, dans tous les cas de figure, les produits marqués du sigle orange et noir sont à privilégier, notamment parce que ces excellentes performances s’accompagnent de deux bonus qui pèsent lourd.
Le premier, c’est la faible consommation qu’elles induisent. Nos chiffres impliquant la mesure de la consommation globale de la machine et non celle du seul CPU, ils sont un indicateur plus que preuve directe, mais les différences de comportement n’en restent pas moins impressionnantes : tandis qu’en travail bureautique et/ou multimédia, un Ryzen 3700X tutoie les performances d’un Core i9-9900K, son architecture couplée à son process de gravure induit une économie d’énergie d’une soixantaine de watts. Si l’on prend une autre référence comparative, un PC équipé en Ryzen 3700X consommera un peu moins qu’un concurrent, équipé en 8700K ou 9700K. Quant au 3900X, il est évidemment plus énergivore, mais gardons en tête qu’il s’aligne sur les besoins du 9900K, tout en proposant 4 cœurs actifs supplémentaires.
Le second argument, qui va enfoncer le dernier clou sur le cercueil des Core Intel tel qu’ils sont actuellement proposés, c’est la tarification. Actuellement, un Core i7-9700K se négocie autour de 450€, tandis que sa version KF est légèrement plus abordable de 10-15€. Parallèlement, i7-8700K et i9-9900K se commercialisent respectivement à 450€ et 520€ en moyenne. En face, AMD arrive avec un Ryzen 7 3700X tarifé à 370€ en boutique. Ça calme ! Le 3900X est évidemment plus onéreux (620€ actuellement) mais ses performances sont d’un autre niveau. Si l’on se base sur ces seules données, le débat n’existe pas et l’on ne peut que saluer la politique d’AMD qui continue de se montrer commercialement agressif. Attention toutefois : il convient en effet de mentionner que la plateforme de prédilection des Ryzen série 3000, équipée d’un chipset X570, ne présente pas vraiment le même rapport qualité prix, et rare seront les cartes mères qui passeront sous la barre des 200€. Toutefois, et c’est là encore un effort à saluer : AMD assure une rétrocompatibilité de ses nouvelles puces sur les anciens chipsets (B450 / X470 principalement). Il est évidemment nécessaire de bien s’assurer de la fourniture d’un BIOS compatible par le fabricant, et cet avantage ne se fait pas toujours sans quelques légères contreparties, mais cela permet d’envisager un processeur Ryzen de dernière génération tout en maitrisant le cout de la plateforme associée.
Avec cette 3ème génération de puces Ryzen, AMD fait donc un carton plein, et nous offre une nouvelle version du combat épique de David contre Goliath. Autant par les prestations de ces nouveaux processeurs Ryzen et que par la différence considérable de moyens financiers qui le sépare d’Intel, AMD étonne, surprend, et ses équipes peuvent aujourd’hui célébrer sans complexe l’un des plus beaux retour en grâce industriel de ces dernières décennies. Reste que malgré ce succès, Intel demeure un concurrent de poids, qui devrait enfin pouvoir profiter d’une avancée technologique majeure, avec l’intégration d’un process de fabrication 10 nm attendu de longue date. En attendant, si vous devez investir dans une nouvelle machine, nous vous enjoignions vivement de vous tourner vers cette série 3000, qui n’a de notre point de vue que des avantages. Veillez simplement à rester raisonnable, en vous orientant sur du Ryzen 5 ou 7 pour du gaming pur, l'intérêt de monter à plus de 8 coeurs dans ce cadre étant pour le moins limité.